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Discours Haut-Commissariat aux droits de l’homme

Forum européen d’Alpbach Groupe de haut niveau sur la corruption et le développement durable

01 Septembre 2020

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Discours liminaire de Michelle Bachelet, Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme

1er septembre 2020

M. Selzer,
Chers participants,
Chers amis, 

Ce forum a lieu à un moment crucial pour nos sociétés et notre planète.  La discussion d’aujourd’hui sur la corruption peut nous aider à définir de nouvelles orientations politiques, dont nous avons besoin d’urgence.

La pandémie de COVID-19 a révélé les nombreuses failles et inégalités de nos sociétés. Leur croissance est nourrie et alimentée par ces vulnérabilités préexistantes et évitables. Et nombre d’entre elles proviennent de la corruption.

Comme le Directeur exécutif de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime l’a souligné à la 8e réunion de la Conférence des États parties à la Convention des Nations Unies contre la corruption à Abu Dhabi l’année dernière, « en raison de la corruption, des milliers de milliards de dollars sont détournés chaque année des écoles, des hôpitaux et d’autres services et infrastructures essentiels ».

Comme il l’a fait remarquer, la prévention et la lutte contre la corruption sont « des éléments clés pour réaliser des progrès en vue de mettre fin à la pauvreté et aux inégalités, de protéger la santé et la planète, et de renforcer la justice et l’État de droit » – notamment en prévenant les conflits et en stimulant le développement durable.

Il est à présent urgent d’utiliser ces éléments clés pour mettre en place des sociétés saines et plus égalitaires.

Nous devons mettre fin à l’accélération des inégalités et à l’approfondissement des sentiments de colère et de frustration. La faim augmente ; les possibilités d’emploi, d’éducation et de formation font défaut ; et comme ce sont notamment les pauvres, les minorités victimes de discrimination et les femmes qui paient le plus lourd tribut de la pandémie, les mécontentements se multiplient.

Comment pouvons-nous renverser ces tendances ?

Avec le Programme de développement durable à l’horizon 2030, les États se sont collectivement fixé un plan d’action réalisable pour les droits, le développement et le bien-être des individus.

Et pour la première fois, le Programme comprend une compréhension commune des institutions responsables et inclusives essentielles à la mise en place d’un modèle de prospérité beaucoup plus efficace.

L’objectif de développement durable 16 résume le fondement d’une « bonne gouvernance » : garantir l’impartialité de l’état de droit ; contrôler la corruption, promouvoir la participation ; et encourager des institutions efficaces, responsables et transparentes qui protègent les libertés fondamentales.

On ne saurait trop insister sur l’importance de l’ODD 16. Ce sont les catalyseurs et les accélérateurs de l’ensemble du Programme 2030. Ce sont également les moteurs du travail visant à reconstruire en mieux à la suite de la crise due à la pandémie.

Chers collègues,

La bonne gouvernance, la lutte contre la corruption et les droits de l’homme ont des principes communs. Ensemble, ils favorisent un plus grand bien-être ; des systèmes dans lesquels les résultats du développement sont mieux gérés et partagés plus efficacement.

Comme la Convention des Nations Unies contre la corruption, le droit international des droits de l’homme nécessite des États qu’ils prennent des mesures efficaces contre la corruption. Tout manquement à cette obligation et à l’obligation d’offrir des recours aux victimes de violations des droits de l’homme résultant de la corruption constitue en soi une violation des droits de l’homme.

Comme ma prédécesseure Navi Pillay l’a signalé il y a plusieurs années, « La corruption tue. L’argent soustrait chaque année par la corruption suffirait à nourrir 80 fois ceux qui souffrent de la faim dans le monde. Près de 870 millions de personnes se couchent chaque soir le ventre vide, dont beaucoup d’enfants ; la corruption les prive de leur droit à l’alimentation et, dans certains cas, de leur droit à la vie. »

Dans le contexte actuel de la pandémie de COVID-19, la corruption détourne des ressources vitales et affaiblit l’efficacité des politiques conçues pour minimiser la souffrance des personnes les plus touchées par les pertes de moyens de subsistance, le manque de possibilités de formation et d’autres préjudices.

Notre promesse de parvenir à un développement durable et notre obligation de respecter les droits de l’homme nous obligent à prendre enfin des mesures sévères contre la corruption – tant en ce qui concerne la confiscation de ce qui devrait être des biens communs que la facilitation des abus de pouvoir à des fins privées.

L’impact de la pandémie sur les personnes et les économies renforce la nécessité de mettre davantage l’accent sur la bonne gouvernance et sur une surveillance efficace et fondée sur des principes. Certes, il sera difficile de procéder à des changements structurels pendant une crise de cette envergure. Mais nous devons de toute urgence veiller à ce que les fonds parviennent aux personnes qui en ont le plus besoin. De nouveaux retards ne peuvent que se traduire par une perte accrue de ressources publiques, par des équipements médicaux de moindre qualité et par l’affaiblissement de nombreux autres services essentiels par la corruption.

Pour la planète, pour nos peuples et pour la prospérité, nous devons reconstruire nos sociétés avec des politiques et des institutions qui défendent plus efficacement les droits de l’homme.

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