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Déclarations Haut-Commissariat aux droits de l’homme

Réunion ministérielle de la Force conjointe du G5 Sahel

28 Mars 2019

Déclaration de Michelle Bachelet, Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme sur la mise en œuvre du cadre relatif au respect des droits de l’homme

Le 28 mars 2019

Mesdames et messieurs les ministres,

Excellences,

Je tiens à remercier la France et le Burkina Faso d’avoir organisé cette réunion.

Les opérations de paix régionales et celles de lutte contre le terrorisme sous-régionales sont considérées comme des outils efficaces dans la lutte contre l’extrémisme violent. Cependant, ces opérations militaires de lutte contre le terrorisme, qui exigent souvent de passer à l’offensive, peuvent présenter un risque plus élevé pour les civils. Les violations des droits de l’homme et du droit humanitaire qui peuvent se produire au cours de telles opérations peuvent conduire à une recrudescence de la violence et de la radicalisation, et compromettre l’objectif initial.

Les efforts déployés durant les opérations militaires pour atténuer les dommages causés aux civils dans le respect des droits de l’homme et du droit international humanitaire exigent des cadres de conformité. Je me félicite que le Conseil de sécurité s’accorde de plus en plus à reconnaître que l’appui aux opérations de paix régionales doit s’accompagner de tels cadres. Comme le Secrétaire général l’a déclaré au Conseil des droits de l’homme le mois dernier, " nous avons prouvé qu’il n’est possible de lutter efficacement contre le terrorisme que si les droits de l’homme sont respectés ".

Le cadre de conformité de la Force conjointe du G5 Sahel, tel que conçu par le HCDH, traduit les obligations juridiques internationales en un cadre de réduction des risques opérationnels adapté aux réalités spécifiques et au mode de fonctionnement des opérations antiterroristes. Il comprend sept mesures et mécanismes. Il s’accompagne d’un dispositif de communication et de suivi par les Nations Unies, d’un appui technique et d’un dialogue avec la Force conjointe.

La mise en œuvre de ce cadre nécessite des efforts concertés de la part des autorités nationales, des Nations Unies, des forces internationales sur le terrain, de la société civile et des autres acteurs concernés. Au Sahel, l’Union européenne joue un rôle technique important à travers ses missions de formation et de renforcement des capacités (EUTM et EUCAP).

Excellences,

Ce cadre a été établi à la suite d’un accord technique tripartite entre les pays du G5 Sahel, l’Union européenne et les Nations Unies, et a été mis en place avec le soutien financier de l’Union européenne. Depuis son lancement il y a un an, des progrès ont été réalisés concernant les formations et l’adoption de règles et de procédures sur la Force conjointe. Nous avons également constaté des progrès en matière de responsabilités.

Ensemble, le HCDH, la Force conjointe et le Secrétariat permanent du G5 Sahel, ainsi que les commandements des armées nationales ont jeté les bases d’une compréhension commune des problèmes existants et de leurs solutions, et ont élaboré un plan de mise en œuvre.

En 2018, un examen des six premières opérations de la Force conjointe a permis de recenser les bonnes pratiques et de déceler certains problèmes. L’un d’entre eux était la finalisation d’un accord sur l’état des forces. Nous avons fourni des conseils techniques tout au long de cet examen.

Nous avons également élaboré avec la Force conjointe une procédure opérationnelle normalisée claire concernant la capture, la détention et le transfert ou la libération des adultes et des enfants capturés ou détenus dans le cadre de ses opérations.

Le HCDH, l’Institut international de droit humanitaire et plusieurs partenaires techniques ont conçu et proposé un cours pilote sur les droits de l’homme et le droit international humanitaire, fondé sur des scénarios, à l’intention des officiers supérieurs de la Force conjointe et du commandement de la force du G5 Sahel. Le Collège de défense du G5 Sahel en Mauritanie lancera ce cours et nous appuierons la formation des formateurs en 2019.

La situation sur le terrain a commencé à changer. En reconnaissant progressivement la nécessité d’accepter ses responsabilités, la Force conjointe permet aux collectivités d’accéder à la justice, ce qui est une étape cruciale pour établir un climat de confiance.

Par exemple, en 2018, l’unité des droits de l’homme de la MINUSMA a enquêté sur l’exécution extrajudiciaire de 12 civils impliquant des cellules maliennes de la Force conjointe et a aidé les autorités maliennes et la Force conjointe à enquêter sur ces allégations. Je salue l’enquête menée sur cet incident et des mesures adoptées par les autorités maliennes.

La Force conjointe a également mis au point un mécanisme ponctuel d’autosurveillance et d’information du HCDH et de la MINUSMA sur les allégations de violations ou de capture de personnes par ses troupes, ce qui a donné lieu à des enquêtes nationales sur certains incidents.

Bien que l’obligation de rendre pleinement compte de ces affaires n’ait pas encore été remplie, la conduite d’enquêtes sur de tels incidents peut devenir un moyen de dissuasion. Je félicite le général Hanana Ould Sidi et les autres acteurs responsables de ces efforts et nous attendons avec intérêt la conclusion de toutes les enquêtes.

Excellences,

Les mesures et les mécanismes du cadre peuvent réduire les risques pour les civils et améliorer le professionnalisme et l’efficacité des forces de sécurité impliquées dans la lutte contre le terrorisme.

Ces deux objectifs sont liés, comme le Conseil de sécurité l’a souligné dans sa résolution 2423 : " pour obtenir la confiance de la population et, partant, assurer l’efficacité et la légitimité de la Force conjointe [du G5 Sahel], il est indispensable de respecter le cadre réglementaire. "

Je me réjouis de l’appui que le Conseil de sécurité et le Burkina Faso, qui assure actuellement la présidence du G5 Sahel, continueront d’apporter pour que ce cadre réglementaire soit pleinement mis en place.

Merci.

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