Organes conventionnels
Le Comité contre la torture examine le rapport de Sri Lanka
Rapport de Sri Lanka
16 novembre 2016
GENEVE (16 novembre 2016) - Le Comité contre la torture a examiné, hier matin et cet après-midi, le rapport présenté par Sri Lanka sur les mesures prises par ce pays pour appliquer la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.
Présentant ce rapport, M. Jayantha Jayasuriya, Procureur général de Sri Lanka, a rappelé la garantie offerte par la Constitution sri-lankaise selon laquelle nul ne sera soumis à la torture ou à des actes inhumains. La définition de la torture, qui a été intégrée dans une nouvelle loi, est suffisamment vaste pour couvrir tous les aspects de la souffrance, a-t-il en outre fait valoir, avant d’attirer l’attention sur les nombreux amendements législatifs adoptés concernant les droits de l’homme et notamment relativement à la prévention de la torture. Une loi de 2015 sur la protection des victimes a été amendée récemment, avec la mise en place d’une autorité nationale pour la protection des victimes et des témoins, a-t-il indiqué, précisant que la Division de la protection des victimes et des témoins est désormais opérationnelle. Des mécanismes transparents et indépendants ont aussi été créés pour permettre d’enquêter sur les allégations de torture, a-t-il ajouté.
Les Représentants permanents de Sri Lanka auprès des Nations Unies à New York et à Genève – respectivement MM. Rohan Perera et Ravinatha Aryasinha – ont poursuivi cette présentation. M. Perera a notamment indiqué que l’objectif de la mise à jour de la loi de prévention contre le terrorisme était de la rendre conforme aux normes internationales en matière de droits de l’homme. M. Aryasinha a pour sa part indiqué que, conformément à la loi adoptée à cette fin, le Bureau des personnes disparues allait voir le jour en 2017. Le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la torture a pu avoir un accès sans restriction à tous les lieux de détention, postes de police et camps militaires du pays, a-t-il ajouté, précisant que suite à la visite de ce titulaire de mandat, le Ministre de la justice a décidé de mettre en place un comité chargé d’examiner les allégations de torture et de prendre des mesures préventives.
La délégation sri-lankaise a répondu aux questions des membres du Comité s’agissant, notamment, de la définition de la torture ; des compétences du Procureur général ; de la garde à vue ; de l’irrecevabilité des aveux obtenus sous la contrainte ; de la loi sur la prévention du terrorisme ; de la protection des témoins et des victimes ; de l’indemnisation et autres formes de réparation en faveur des victimes ; des questions de formation ; de l’unité spéciale d’enquête de la police ; des visites de lieux de détention ; de l’indépendance du judiciaire ; et du traitement des allégations et plaintes relatives à des actes de torture.
M. Alessio Bruni, corapporteur du Comité pour l’examen du rapport de Sri Lanka, s’est réjoui que le Gouvernement sri-lankais ait reconnu la compétence du Comité pour recevoir les plaintes individuelles au titre de la Convention. Il a ensuite estimé que Sri Lanka devait prendre des mesures pour prévenir les cas de torture et a rappelé qu’à l’issue de la visite qu’il a effectuée dans le pays cette année, le Haut-Commissaire aux droits de l’homme avait demandé aux autorités de prendre des mesures claires pour faire en sorte que la torture, les violences sexuelles ou autres traitements inhumains, cruels et dégradants soient explicitement interdits. Le Haut-Commissaire aux droits de l’homme a aussi souligné que les défenseurs des droits de l’homme ne sauraient être harcelés. M. Bruni a ensuite relevé qu’à l’issue de sa visite dans le pays, le Rapporteur spécial sur la torture avait signalé que les cas de torture, tant anciens que nouveaux, faisaient encore l’objet d’une impunité totale et s’était dit convaincu que la torture était une pratique encore courante dans le pays.
M. Bruni a souligné que de nombreuses allégations de torture perpétrée par la police sont recensées par des ONG, mais que très peu d’enquêtes ont été ouvertes. Il a ensuite regretté que les membres de la Commission nationale des droits de l’homme ne puissent pas se rendre dans les commissariats ou les lieux de détention dès que des allégations de torture sont signalées. Le rapporteur a par ailleurs fait observer qu’il pouvait s’écouler des jours, des semaines voire des mois avant qu’un prévenu soit déféré devant un juge, notamment en vertu de la législation contre le terrorisme.
Mme Felice Gaer, corapporteuse pour l’examen du rapport de Sri Lanka, a expliqué que le Comité restait préoccupé par le fait que les agents de l’État continuaient de perpétrer des actes de torture pour soutirer des aveux, en dépit de la fin du conflit en 2009. Elle a en outre relevé que la Commission nationale des droits de l’homme recevait fréquemment des plaintes pour des allégations de torture perpétrée par la police; cette Commission estime que le recours à la torture est courant dans le pays et que l’impunité perdure en la matière.
Un membre du Comité s’est inquiété de la persistance d’un climat d’intimidation et de peur au sein de la population. Une experte s’est pour sa part inquiétée de l’âge de la responsabilité pénale, qui est fixé à 8 ans à Sri Lanka.
Le Comité adoptera ultérieurement, lors de séances à huis clos, ses observations finales sur le rapport de Sri Lanka et les rendra publiques à l’issue de la session, qui doit clore ses travaux vendredi 7 décembre.
Vendredi prochain, 18 novembre, à 10 heures, le Comité entamera l’examen du rapport de la Namibie.
Présentation du rapport
Le Comité était saisi du cinquième rapport périodique établi par Sri Lanka (CAT/C/LKA/5), sur la base d’une liste de points à traiter (CAT/C/LKA/Q/5) que lui avait adressée le Comité.
M. JAYANTHA JAYASURIYA, Procureur général de Sri Lanka, a souligné que la présence de la délégation montrait l’attachement du pays aux droits de l’homme plus particulièrement depuis les dernières élections. Le chef de la délégation s’est réjoui que le Comité ait pris conscience des progrès accomplis.
Il a rappelé que cela faisait 22 ans que Sri Lanka était partie prenante à la Convention. La Constitution garantit que nul ne sera soumis à la torture ou à des actes inhumains.
La définition de la torture, qui a été intégrée dans une nouvelle loi, est suffisamment vaste pour couvrir tous les aspects de la souffrance. Il y a eu un grand nombre d’amendements législatifs depuis la présentation du dernier rapport devant le Comité concernant les droits de l’homme relativement, notamment, à la prévention de la torture.
Une loi de 2015 sur la protection des victimes a été amendée récemment, avec la mise en place d’une autorité nationale pour la protection des victimes et des témoins. La Division de la protection des victimes et des témoins est désormais opérationnelle.
Une réforme constitutionnelle est en cours qui vise à mieux ancrer dans la Constitution le mécanisme permettant aux individus de demander justice. Des mécanismes transparents et indépendants ont aussi été créés pour permettre d’enquêter sur les allégations de torture.
Les forces armées et la police ont reçu des directives pour qu’elles veillent à ce que les droits fondamentaux des détenus et des personnes arrêtées soient respectés. Le chef de la délégation a assuré que le Gouvernement était très attaché à la tolérance zéro à l’égard des actes de torture, notamment ceux imputables à la police.
Un autre amendement à la Constitution vise à garantir davantage l’indépendance du pouvoir judiciaire notamment pour ce qui est de la nomination des juges, a poursuivi le Procureur général de Sri Lanka.
La Commission des droits de l’homme a bénéficié d’une augmentation de ses ressources. Cette Commission va tout mettre en œuvre pour répondre aux critères des Principes de Paris, a-t-il assuré. Aujourd’hui, les détenus peuvent contester la légitimité sur le plan légal de leur détention.
M. ROHAN PERERA, Représentant permanent de Sri Lanka auprès des Nations Unies à New York, a expliqué que l’objectif de la mise à jour de la loi sur la prévention du terrorisme était de la rendre conforme aux normes internationales en matière de droits de l’homme. Ce cadre vise à lutter contre les menaces de terrorisme et celles faites à la sécurité du pays. Il traite notamment de la détention, de la garde à vue ou de la recevabilité des éléments de preuve. Pour élaborer ce cadre légal les autorités de Sri Lanka ont collaboré avec des experts internationaux notamment des représentants du Haut-Commissariat aux droits de l’homme. La Commission parlementaire sur la sécurité nationale, qui a commencé à discuter de ce projet de loi, doit remettre ses conclusions prochainement, a annoncé M. Perera.
M. RAVINATHA ARYASINHA, Représentant permanent de Sri Lanka auprès des Nations Unies à Genève, a souligné que Sri Lanka continuait à collaborer avec le Haut-Commissariat aux droits de l’homme. Plusieurs fonctionnaires de l’ONU de haut niveau ont d’ailleurs été reçus par les autorités sri-lankaises.
Le Gouvernement s’est lancé dans une procédure qui doit permettre la mise en place d’un mécanisme qui doit garantir le droit à la justice, à la réparation et à la non-répétition. Un groupe de travail a été mis en place avec les organisations de la société civile qui doit permettre la mise en place de ce mécanisme.
M. Aryasinha a relevé que la loi sur la mise en place du Bureau des personnes disparues avait été adoptée et que ce bureau devait voir le jour en 2017.
Il a souligné que le Rapporteur des Nations Unies sur la torture avait pu avoir un accès sans restriction à tous les lieux de détention, les postes de police et les camps militaires. Suite à sa visite dans le pays, le Ministre de la justice a décidé de mettre en place un comité pour examiner et prendre des mesures préventives sur les allégations de torture.
Pour conclure, M. Aryasinha a souhaité que le Comité puisse fournir un catalogue de bonnes pratiques dans le domaine de la lutte contre la torture.
Examen du rapport
Questions et observations des membres du Comité
M. ALESSIO BRUNI, corapporteur du Comité pour l’examen du rapport de Sri Lanka, a souligné avec satisfaction la bonne collaboration du pays avec le Comité même si ce rapport périodique a été remis avec un certain retard. Il s’est félicité que le Gouvernement sri-lankais ait reconnu la compétence du Comité pour recevoir les plaintes individuelles au titre de la Convention. Il a demandé à la délégation si le Gouvernement envisageait d’adhérer au protocole facultatif de la Convention établissant un système de visites régulières des lieux de détention.
Le rapporteur a estimé que le pays devait prendre des mesures pour prévenir les cas de torture. Il a souligné que le Haut-Commissaire aux droits de l’homme qui a réalisé une visite à Sri Lanka en 2016 avait demandé aux autorités de présenter des mesures claires en vertu desquelles la torture, les violences sexuelles ou autres traitements inhumains et dégradants étaient explicitement interdits. Le Haut-Commissaire aux droits de l’homme a aussi déclaré que les défenseurs des droits de l’homme ne sauraient être en butte à du harcèlement. Le rapporteur a demandé si les autorités sri-lankaises avaient donné suite à ces directives et si elles avaient poursuivi les auteurs de tels actes.
M. Bruni a souhaité savoir s’il existait une évaluation du nouveau Comité d’experts qui doit permettre d’enquêter sur les allégations de torture. Il aussi souhaité savoir si le mécanisme judiciaire qui devait veiller à ce que les victimes obtiennent justice était en opérationnel.
M. Bruni a relevé que le Rapporteur spécial sur la torture avait signalé que les cas de torture tant anciens que nouveaux faisaient encore l’objet d’une impunité totale et que beaucoup de chemin restait à parcourir dans ce domaine.
Le rapporteur a par ailleurs souligné que de nombreuses allégations de cas de torture perpétrés par la police sont recensées par des ONG mais que très peu d’enquêtes ont été ouvertes.
M. Bruni a noté que depuis l’adoption de la loi sur la prévention de la torture, le rapport périodique indiquait qu’un grand nombre de fonctionnaires publics avaient été jugés et condamnés pour actes de torture mais qu’il s’agissait là d’informations très générales et qu’il n’y avait pas de renseignements précis sur des affaires concrètes.
M. Bruni a regretté que les membres de la Commission des droits de l’homme ne puissent pas se rendre dans les commissariats ou les lieux de détention dès que des allégations de torture sont signalées. Il a souligné que 3000 plaintes avaient été reçues par la Commission des droits de l’homme pour la période 2010-2016 et a souhaité savoir combien d’actions en justice avaient été intentées sur cette base. M. Bruni a relevé que le Rapporteur spécial sur la torture de l’ONU s’était dit convaincu que la torture était une pratique encore courante dans le pays.
Le rapporteur a souligné qu’il pouvait s’écouler des jours, des semaines, voire des mois avant qu’un prévenu ne soit déféré devant un juge, notamment en vertu de la législation contre le terrorisme. Cette pratique est, selon M. Bruni, propice au recours à la torture de manière routinière par les forces de police.
Le rapporteur a souhaité avoir davantage d’informations sur la présence de lieux de détention secrets dans le pays en soulignant qu’il y a un an, les enquêtes à ce sujet n’en étaient encore qu’à une phase préliminaire. Qu’en est-il aujourd’hui, a-t-il demandé?
M. Bruni s’est inquiété du sort de milliers de personnes disparues tout en félicitant Sri Lanka pour avoir ratifié la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées. Le rapporteur a demandé si le Gouvernement avait envisagé de reconnaître la compétence du Comité des disparitions forcées en matière de plaintes individuelles.
Le rapporteur a demandé à la délégation si les autorités comptaient remplacer la loi contre la torture par une loi qui prendrait en compte les normes internationales dans ce domaine et quelles mesures avaient été prises pour garantir l’indépendance des mécanismes de protection des témoins.
Il a en outre souhaité savoir sur quelles bases le juge décidait qu’un suspect de faits de terrorisme devait suivre un processus de réadaptation plutôt que d’être poursuivi en justice. Le rapporteur a souligné que des cas de torture avaient été rapportés dans les centres de réadaptation et a souhaité savoir si des enquêtes avaient été ouvertes sur ces allégations et si des membres du Comité international de la Croix-Rouge avaient pu visiter ces centres.
M. Bruni a demandé davantage d’informations sur le processus législatif qui doit aboutir à l’adoption à la nouvelle loi sur la sécurité nationale en conformité avec les normes internationales et qui doit remplacer le texte relatif à la prévention du terrorisme.
Le rapporteur a demandé à la délégation quelles étaient les conditions d’incarcération dans les centres de police et les lieux de détention et quelles mesures avaient été prises pour lutter contre la surpopulation carcérale. Il a souhaité savoir si des enquêtes avaient été ouvertes au sujet des décès survenus lors de gardes à vue dans les postes de police.
M. Bruni a demandé à la délégation quel mécanisme existait au Sri Lanka pour recevoir et examiner les plaintes des demandeurs d’asile et des réfugiés qui déclarent avoir été victimes de torture dans leur pays d’origine ; Sri Lanka applique-t-il le principe de non-refoulement, a-t-il demandé en relevant que ce principe ne figurait pas dans la loi sri-lankaise? Il a souligné par ailleurs qu’en l’absence de disposition à cet égard, les demandeurs d’asile et les réfugiés sans visa étaient traités comme des réfugiés illégaux et pouvaient être arrêtés ou détenus.
M. Bruni a par la suite estimé que les personnes acceptaient de passer par un programme de réhabilitation parce qu’elles n’ont pas trop le choix; c’est leur seule chance de survivre.
Sur les 3000 cas d’allégations de torture enregistrés par la Commission nationale des droits de l’homme, combien ont-ils fait l’objet de poursuites en justice, a-t-il ensuite demandé?
Le rapporteur s’est en outre inquiété d’un rapport d’une ONG internationale indiquant que 14 sites officiels auraient été utilisés comme centres de torture par l’armée ou la police. Il a souligné que le Comité n’avait pas les moyens de vérifier la véracité de ces affirmations et a souhaité des éclaircissements de la délégation à ce sujet.
M. Bruni s’est par ailleurs enquis des conditions de détention à Sri Lanka qui, selon certaines ONG, seraient déplorables.
Il a demandé à la délégation où en étaient les enquêtes ouvertes sur d’anciens camps de détention au sein desquels la torture aurait été routinière à l’encontre des détenus.
MME FELICE GAER, corapporteuse pour l’examen du rapport de Sri Lanka, a expliqué que le Comité restait préoccupé par le fait que les agents de l’État continuaient de perpétrer des actes de torture pour soutirer des aveux en dépit de la fin du conflit en 2009. Elle a demandé si des enquêtes avaient été diligentées sur ces allégations.
Elle a souligné que la Commission des droits de l’homme recevait fréquemment des plaintes pour des allégations de torture perpétrée par la police. La Commission estime que le recours à la torture est courant dans le pays et que l’impunité perdure.
Mme Gaer a relevé qu’une Division pour la protection des témoins avait été inaugurée la semaine dernière, se demandant toutefois si celle-ci allait vraiment pouvoir améliorer la situation. Elle a demandé à la délégation si les autorités comptaient amender la législation sur la protection des victimes et des témoins en soulignant qu’à l’heure actuelle c’était la police qui était en charge de la protection des victimes. Selon Mme Gaer, il s’agit d’une situation grave car les victimes peuvent craindre de faire face à des représailles de la part des policiers. La corapporteuse a estimé que la Division pour la protection des témoins devait fonctionner en toute indépendance. Elle a demandé dans combien de cas la police avait été impliquée dans des allégations de torture entre 2014-2016.
La corapporteuse a demandé à la délégation si l’Unité chargée de poursuivre les auteurs d’actes de torture du bureau du Procureur général était toujours opérationnelle. Mme Gaer a dénoncé le fait que dans certains cas la police devait elle-même enquêter sur les allégations de torture perpétrées par les forces de police. Elle a rapporté que selon le Secrétaire général des Nations Unies, M. Ban Ki-moon, les viols et la torture étaient en recrudescence à Sri Lanka et demandé si la lumière avait été faite sur ces cas de violences sexuelles perpétrées par la police notamment à l’encontre des populations tamoules. Évoquant, au passage, le comportement des casques bleus sri-lankais, Mme Gaer a demandé si des enquêtes avaient été diligentées sur les violences sexuelles perpétrées par certains d’entre eux à Haïti en 2007.
Mme Gaer a souhaité avoir davantage d’informations sur les formations dispensées pour les agents de police concernant les dispositions de la Convention et demandé quels services de réadaptation étaient proposés aux victimes de torture ou de traitements inhumains et dégradants.
La corapporteuse s’est interrogé sur le bilan de la Commission des enseignements et de la réconciliation et demandé quand une Commission pour la vérité, la justice, la réconciliation et la non-répétition digne de ce nom verrait-elle le jour. Elle a estimé que, dans ce cadre, aucun cas l’amnistie ne pouvait être accordée pour des faits de torture.
Mme Gaer a souhaité savoir quel était le calendrier pour la mise en place du Bureau des personnes disparues et comment allait fonctionner ce Bureau. Elle a en outre voulu savoir à quelle date la loi sur la criminalisation des disparitions forcées allait entrer en vigueur.
Mme Gaer a relevé que la question de l’impunité semblait planer au-dessus de l’ensemble de l’examen du rapport.
Elle a demandé des informations sur les exactions particulièrement atroces qui auraient été commises au sein de l’hôpital de Vavunia et d’un autre centre de détention où les actes de tortures et de violences sexuelles seraient courants.
La corapporteuse a demandé des informations sur le seul abri présent dans le pays pour accueillir les victimes de violences domestiques.
Parmi les autres membres du Comité à s’être exprimés, une experte s’est inquiétée du fait que des enquêtes sur des allégations de torture perpétrées par les forces de police avaient pu être réalisées par le poste de police incriminé. Cette même experte a salué la création d’un Plan d’action national pour lutter contre la traite mais a regretté qu’il n’y ait aucune donnée sur ce fléau.
Un autre membre du Comité a demandé dans quelles mesures les recommandations de la Commission des droits de l’homme étaient prises en compte par les autorités. Il a souhaité savoir comment les autorités comptaient renforcer le processus de réconciliation nationale en y incluant les populations tamoules. Dans ce cadre, il a demandé comment était formée la nouvelle génération des forces de sécurité.
Estimant que le climat d’intimidation et de peur persistait au sein de la population, un autre expert a demandé comment les autorités remédiaient à cette situation.
Cet expert a demandé quelles étaient les conditions de détention des condamnés à mort.
Une experte a regretté que l’âge de la responsabilité pénale soit de 8 ans alors qu’à cet âge l’enfant est trop jeune pour pouvoir faire preuve de discernement. Elle a demandé quelles étaient les mesures prévues pour prendre en charge les enfants déplacés et quel était le statut des groupes paramilitaires.
Un autre expert s’est enquis du nombre de cas de torture identifiés par des médecins lors d’examens médicaux sur des détenus et a souhaité savoir si un médecin était bien présent dans chaque prison. Il en outre souhaité savoir s’il y avait une date butoir pour la fermeture des centres de détention secrets.
Réponses de la délégation
La délégation a expliqué qu’un projet de loi portant modification du Code pénal prévoit notamment le droit du suspect de bénéficier de l’assistance d’un avocat dès les premières phases de l’enquête, en particulier durant la garde à vue.
La délégation a d’autre part souligné que les compétences du Procureur général avaient connu une évolution importante ces dernières années, l’idée étant qu’il puisse garantir l’égalité de tous devant la loi et que son indépendance soit renforcée. Ainsi, le Procureur général a-t-il entamé des poursuites contre les auteurs présumés de torture quelle que soit leur fonction au sein de la société.
La délégation a ensuite estimé que la définition de la torture figurant dans le droit interne sri-lankais est conforme à celle énoncée à l’article premier de la Convention. La notion de souffrance est bien présente dans la loi sri-lankaise, a-t-elle notamment souligné.
La délégation a expliqué qu’à Sri Lanka, qui suit le système de common law tout suspect bénéficie de la présomption d’innocence. En vertu du Code de procédure pénale, un suspect peut être retenu en garde à vue pour une période maximale de 24 heures à l’issue de laquelle seul un juge peut décider, de manière discrétionnaire, de maintenir le suspect en garde à vue pour une période de 24 heures supplémentaires. Aucun cas de torture ou de mauvais traitements n’a été signalé durant une garde à vue, a assuré la délégation. Un aveu fait à un agent de police durant une garde à vue n’est pas recevable devant le tribunal; seul l’est l’aveu fait de manière volontaire devant un juge durant la garde à vue, a par ailleurs indiqué la délégation.
Dans le cadre de la loi sur la prévention du terrorisme, la charge de la preuve est inversée, a ensuite expliqué la délégation. Là encore, il convient de s’assurer que tout aveu est recueilli de manière volontaire et non sous la contrainte. Si les éléments de preuves apparaissent clairement, le détenu peut passer 72 heures maximum en garde à vue. Un ordre de détention peut ensuite être délivré (par un juge) pour une période de trois mois, renouvelable jusqu’à une durée totale maximale de 18 mois, avec réexamen tous les trois mois, avant l’ouverture du procès. Toute détention au titre de la loi sur la prévention du terrorisme peut être contestée, notamment au moyen d’un recours en habeas corpus devant la Cour d’appel.
Il existe au sein de la police une autorité qui est chargée de protéger les témoins et les victimes, a d’autre part souligné la délégation. Cette protection est une priorité et ce sont des officiers de police chevronnés qui doivent l’assurer, a-t-elle insisté.
Une victime peut prétendre à une indemnisation pour tout préjudice physique ou moral qu’elle estime avoir subi ou encore si elle estime avoir été spoliée de ses biens. Les indemnisations procèdent de fonds débloqués par le Parlement à cette fin, a indiqué la délégation. L’assistance apportée aux victimes comprend également des mesures de soutien psychosocial et de réhabilitation voire des traitements, si besoin est.
La délégation a indiqué que des condamnations avaient été prononcées au titre de la loi sur la torture dans des cas de décès de personnes en détention.
Les académies de police, notamment, proposent des services de formation continue à l’intention des jeunes recrues et des policiers expérimentés. Les enseignements qui y sont dispensés portent notamment sur les droits de l’homme, les droits fondamentaux, la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ou encore la Convention relative aux droits de l’enfant. Les forces de police suivent aussi d’autres formations sur l’usage des armes à feu ou sur le recours à la force, en collaboration avec le Comité international de la Croix-Rouge. Toutes les dépenses relatives à ces formations sont financées par la police sri-lankaise et par l’État.
Quelque 1500 officiers de police d’origine tamoule ont été recrutés à la fin du conflit, a précisé la délégation. Cette présence d’officiers de langue tamoule vise à briser les barrières linguistiques que pourraient rencontrer certaines victimes.
L’unité spéciale d’enquête fonctionne au sein de la police depuis 40 ans. C’est une institution indépendante qui enquête sur des plaintes portées à l’encontre de membres des forces de l’ordre, a expliqué la délégation. Cette unité peut engager des poursuites contre des officiers de police, notamment pour des allégations de torture. Cette unité spéciale a d’ores et déjà lancé des enquêtes à l’encontre de fonctionnaires de police de haut rang, a indiqué la délégation.
La délégation a expliqué que la Commission nationale des droits de l’homme réalisait des visites inopinées dans les postes de police et les prisons du pays et devrait en entreprendre encore davantage dans les prochains mois ou les prochaines années.
La délégation a par ailleurs souligné que l’indépendance du judiciaire, notamment l’inamovibilité des juges, était garantie par la Constitution.
Le projet de loi sur les disparitions forcées, qui vise à mettre en œuvre les dispositions de la Convention internationale sur la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, était en cours d’examen.
La délégation a pris acte des allégations de torture commise dans les centres dits de bien-être créés à la fin du conflit. Dans ce contexte, elle a réitéré l’attachement du Gouvernement à l’ensemble des procédures pouvant garantir l’accès à la justice. Un mécanisme crédible permettant aux victimes d’obtenir justice et réparation va être envisagé et le Gouvernement mettra tout en œuvre pour empêcher que ce type d’actes ne puisse se reproduire, a insisté la délégation.
Concernant les allégations de violences sexuelles commises par les Casques bleus en Haïti en 2007, la délégation a rappelé qu’une équipe d’enquêteurs avait été immédiatement constituée pour faire la lumière sur cette affaire. Les 134 militaires impliqués ont été renvoyés, a-t-elle indiqué, ajoutant qu’une réponse détaillée serait transmise au Comité par écrit concernant le déroulement de ces enquêtes.
La délégation a d’autre part expliqué qu’il n’existait pas de dispositions législatives concernant le principe de non-refoulement mais que le pays respectait ses engagements internationaux et que le droit international coutumier prévoyait une protection et des obligations à l’égard des migrants.
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