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Organes conventionnels

Le Comité des droits de l’homme examine le rapport de la Colombie

Le rapport de la Colombie

20 Octobre 2016

GENEVE (20 octobre 2016) - Le Comité des droits de l'homme a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport périodique de la Colombie sur les mesures prises par le pays pour donner effet aux dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Présentant ce rapport, Mme Paula Gaviria Betancur, Conseillère présidentielle pour les droits de l’homme de la Colombie, a expliqué que la Colombie était convaincue que la meilleure façon d’assurer les droits de ces citoyens réside dans une paix sûre et pérenne, raison pour laquelle le Gouvernement et le Président ont tout fait pour aboutir à un accord avec les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC), qui a eu pour résultat le cessez-le-feu.  Elle a ensuite affirmé que de grands progrès avaient été enregistrés dans le domaine des droits de l’homme dans son pays.  L’État dispose d’un registre des victimes de détention arbitraire, de violences sexuelles, de violences arbitraires et des personnes déplacées; plus de 8 millions de victimes ont été intégrées dans ce registre et plus de 6 millions obtiennent aujourd’hui des réparations, a précisé la Conseillère présidentielle.  Suite au 2700 plaintes déposées en matière foncière, un programme de restitution des terres a été mis en place, a-t-elle par ailleurs fait valoir.  La Colombie s’efforce de réaliser les droits fondamentaux des groupes vulnérables, notamment des femmes, des filles, des personnes d’ascendance africaine, des personnes handicapées, des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transsexuelles et intersexuées (LGBTI) et des membres des minorités, a d’autre part assuré Mme Gaviria Betancur.
 
Beaucoup de chemin a été parcouru s’agissant de la lutte contre les discriminations, a par ailleurs déclaré la cheffe de délégation.  L’État colombien s’efforce de mettre fin aux inégalités subsistant encore aujourd’hui, notamment entre les hommes et les femmes, a-t-elle indiqué; le principal obstacle dans ce domaine reste le caractère multiple des discriminations à l’encontre des femmes et les violences sexuelles qu’elles subissent.  Un programme national existe qui protège aujourd’hui plus de 6000 personnes – défenseurs des droits de l’homme, journalistes ou syndicalistes, entre autres, a ajouté Mme Gaviria Betancur.  Des agressions sont toutefois toujours d’actualité, mais l’État met tout en œuvre pour mettre fin à de telles pratiques en luttant contre l’impunité, a-t-elle indiqué.
 
La délégation colombienne était également composée, entre autres, de Beatriz Londono Soto, Représentante permanente de la Colombie auprès des Nations Unies à Genève, d’Alan Jara Urzola, Directeur général de l’Unité pour la réparation intégrale des victimes et de Diego Fernando Mora, Directeur général de l’Unité nationale de protection.
 
La délégation a répondu aux questions qui lui étaient adressées par les membres du Comité s'agissant, notamment, des exécutions extrajudiciaires, disparitions forcées et actes de torture; des personnes déplacées; de la restitution des terres; des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transsexuelles et intersexuées (LGBTI); des personnes d’ascendance africaine; des populations autochtones; des violences sexuelles, grossesses précoces et interruptions volontaires de grossesse; de la lutte contre la traite de personnes; ou encore de l’enregistrement des naissances.
 
Un expert a salué les efforts réalisés par la Colombie pour veiller à la mise en œuvre du Pacte malgré un contexte très compliqué.  Dans le cadre du conflit, certains acteurs continuent à tenter de mettre à mal les droits de l’homme en cherchant à perpétuer un climat d’insécurité, a-t-il toutefois fait observer.  Estimant difficile de comprendre comment un pays pouvait fermer les yeux sur autant de crimes commis, il a souligné que, si un accord politique a été trouvé, il convient néanmoins de faire la lumière sur tous les crimes commis.
 
Les déplacements massifs de populations qui étaient liés aux activités des FARC diminuent, mais d’autres activités de groupes violents poussent encore les populations à quitter leur domicile, a pour sa part fait observer une experte.  Il a en outre été souligné que les discriminations à l’encontre des personnes d’ascendance africaine restaient une préoccupation pour le Comité.  Un expert a quant à lui relevé qu’entre 2012 et 2016, plus de 400 assassinats ont été commis en raison de l’orientation sexuelle des victimes et a fait observer que la majorité des enquêtes n’avaient pas abouti.  Les violences à l’encontre des femmes restent très répandues en Colombie, a-t-il par ailleurs été rappelé.
 
Un membre du Comité a expliqué qu’il était difficile pour le Comité d’accepter la légalité de l’utilisation de paysans pour l’arrachage des plantations illégales de coca dans des secteurs truffés de mines terrestres antipersonnel.
 
À l’issue du dialogue, M. Yuji Iwasawa, Vice-Président du Comité, a fait observer que ce dialogue s’était déroulé à un moment historique pour le pays, quelques jours seulement après l’annonce du prix Nobel de la paix accordé au Président colombien.
 
Le Comité adoptera ultérieurement, lors de séances à huis clos, ses observations finales sur le rapport de la Colombie et les rendra publiques à l'issue de la session, qui doit clore ses travaux le vendredi 4 novembre prochain.

Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l'examen du rapport périodique de l’Azerbaïdjan.

Présentation du rapport de la Colombie


Le Comité est saisi du rapport initial de la Colombie, ainsi que des réponses du pays à la liste de points à traiter que lui a adressée le Comité.

MME PAULA GAVIRIA BETANCUR, Conseillère présidentielle pour les droits de l’homme de la Colombie, a expliqué que la Colombie était convaincue que la meilleure façon d’assurer les droits de ces citoyens réside dans une paix sûre et pérenne, raison pour laquelle le Gouvernement et le Président ont tout fait pour aboutir à un accord avec les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC), qui a eu pour résultat le cessez-le-feu.  Cet accord n’a pas été sans incidence pour les droits de la population civile; il a permis de mettre en place des programmes de déminage sur tout le territoire. Tous les secteurs de la société ont été amenés à participer au processus de paix et la communauté internationale a eu voix au chapitre dans ces négociations, a insisté Mme Gaviria Betancur.
 
La cheffe de la délégation colombienne a ensuite expliqué que de grands progrès avaient été enregistrés dans le domaine des droits de l’homme dans son pays.  Différentes politiques ont été mises en place et plusieurs consultations ont été menées avec la société civile à cet effet, qui ont abouti au document de lutte contre toute atteinte aux droits de l’homme.  Des mécanismes de surveillance et de suivi des politiques publiques destinées à garantir les droits de l’homme ont été créés.  Cette politique intègre toutes les autorités de l’état, tant à l’échelon national que régional, a indiqué la Conseillère présidentielle.
 
En 2011, en plein conflit armé, le Gouvernement colombien a mis en place un système de réparation en faveur des victimes, a poursuivi Mme Gaviria Betancur.  L’État dispose d’un registre des victimes de détention arbitraire, de violences sexuelles, de violences arbitraires et des personnes déplacées; plus de 8 millions de victimes ont été intégrées dans ce registre et plus de 6 millions obtiennent aujourd’hui des réparations, a précisé la Conseillère présidentielle, soulignant que des crédits budgétaires considérables ont été débloqués à cet effet.  Pour répondre à leurs souffrances, un programme d’aide psychosocial a été mis en place en faveur de 3000 victimes, a-t-elle ajouté.
 
Suite au 2700 plaintes déposées en matière foncière, un programme de restitution des terres a été mis en place, a par ailleurs fait valoir Mme Gaviria Betancur.
 
La Colombie s’efforce de réaliser les droits fondamentaux des groupes vulnérables, notamment des femmes, des filles, des personnes d’ascendance africaine, des personnes handicapées, des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transsexuelles et intersexuées (LGBTI) et des membres des minorités, a d’autre part assuré la Conseillère présidentielle pour les droits de l'homme.
 
Beaucoup de chemin a été parcouru s’agissant de la lutte contre les discriminations, a par ailleurs déclaré Mme Betancur.  L’État colombien s’efforce de mettre fin aux inégalités subsistant encore aujourd’hui, notamment entre les hommes et les femmes, a-t-elle indiqué. Le principal obstacle dans ce domaine reste le caractère multiple des discriminations à l’encontre des femmes et les violences sexuelles qu’elles subissent, a indiqué Mme Gaviria Betancur, avant de rappeler que le Gouvernement avait mis en place une journée consacrée aux victimes des violences sexuelles, célébrée le 25 mai de chaque année.
 
La cheffe de la délégation colombienne a ensuite salué le travail des défenseurs des droits de l’homme, des défenseurs des communautés autochtones et des associations de défense de droits de l’homme.  Un programme national existe qui protège aujourd’hui plus de 6000 personnes – défenseurs des droits de l’homme, journalistes ou syndicalistes, entre autres.  Des agressions sont toutefois toujours d’actualité, mais l’État met tout en œuvre pour mettre fin à de telles pratiques en luttant contre l’impunité, a assuré Mme Gaviria Betancur.
 
Le parquet a décidé d’adopter un train de réformes pour améliorer le système judiciaire et permettre que soient davantage poursuivis les auteurs des crimes les plus graves.  Un programme de lutte contre le crime organisé a aussi été récemment mis en place. Toutes ces mesures témoignent de l’attachement du Gouvernement colombien à la défense des droits de l’homme dans le pays, a insisté la Conseillère présidentielle.  Les défis sont encore nombreux et variés, a-t-elle reconnu; c’est pourquoi le pays a encore besoin d’être soutenu au niveau international, a-t-elle ajouté.  Aussi, la Colombie va-t-elle être très attentive aux recommandations finales que lui adressera le Comité. a conclu Mme Gaviria Betancur.

Examen du rapport


Questions et observations des membres du Comité

Un expert a salué les efforts réalisés par la Colombie pour veiller à la mise en œuvre du Pacte malgré un contexte très compliqué.  Dans le cadre du conflit, certains acteurs continuent à tenter de mettre à mal les droits de l’homme en cherchant à perpétuer un climat d’insécurité, a-t-il fait observer.  Il faut que le Comité reconnaisse les efforts consentis par les différentes parties, a-t-il insisté.  L’expert a toutefois souligné qu’il était difficile de comprendre comment un pays pouvait fermer les yeux sur autant de crimes commis.  Il a souhaité savoir si les autorités colombiennes allaient prolonger la Convention établissant un partenariat avec le Haut-commissariat aux droits de l’homme, qui dispose d’une antenne locale dans le pays.  Un accord politique a été trouvé mais il faut faire la lumière sur tous les crimes commis, a insisté cet expert, avant de rappeler que les cas de disparitions forcées et de détentions arbitraires sont courants dans le pays et qu’il faut donc tout mettre en œuvre pour poursuivre les auteurs et obtenir réparations pour les victimes.  L’expert a par ailleurs souhaité savoir combien de décisions afférentes aux plaintes individuelles adressées au Comité avaient été prises en compte par la justice colombienne et combien de victimes indemnisées dans ce contexte.  Comment le Gouvernement colombien s’y prend-il dans les zones de conflits, où la population est menacée, pour que les droits de l’homme soient respectés, a en outre demandé ce même expert?
 
Tout en se réjouissant de la diminution des cas d’exécution extrajudiciaire, l’expert a regretté que souvent, le terme d’«erreur militaire» soit utilisé pour expliquer ces exécutions.  Cette qualification est-elle donnée par le système judiciaire et que signifie-t-elle exactement?
 
Un autre membre du Comité s’est montré satisfait de voir le pouvoir de l’Ombudsman renforcé et son indépendance garantie ; il a toutefois souhaité en savoir davantage sur les ressources financières de cette institution et sur le suivi des recommandations et des alertes formulées par l’Ombudsman.  Ce même expert a félicité l’État colombien pour les dispositions législatives en faveur de l’égalité de genre; il a cependant souligné qu’il restait des efforts à faire concernant la représentation politique des femmes et plus particulièrement des femmes issues des minorités.  Il a en outre souhaité savoir pourquoi à ce jour les résultats escomptés n’ont pas été obtenus dans les domaines où des quotas ont été institués, notamment dans le domaine de la justice.
 
Une experte a rappelé qu’il y avait sept millions de personnes déplacées sur le territoire colombien et a souhaité connaître la proportion, parmi elles, de personnes handicapées et de mineurs.  Quelles mesures sont-elles prises pour protéger ces populations et pour mettre fin aux déplacements internes, a-t-elle en outre demandé?  Les déplacements massifs de populations qui étaient liés aux activités des FARC diminuent, mais d’autres activités de groupes violents poussent encore les populations à quitter leur domicile, a-t-elle fait observer.  L’experte a par ailleurs souhaité savoir comment l’État luttait contre les déplacements forcés faisant suite à des grands projets d’infrastructures ou industriels.  Elle a d’autre part souligné qu’un grand nombre de personnes issues des minorités ou de personnes d’ascendance africaine n’étaient pas enregistrées comme personnes déplacées dans des régions reculées aux mains de groupes violents. S’agissant des réparations et des mécanismes mis en place à cette fin, l’experte a demandé comment les personnes s’enregistraient sur les registres existants et a souhaité savoir si les minorités y avaient accès.  L’experte s’est en outre inquiétée d’informations laissant apparaître que le processus de restitution des terres était très lent et que certaines personnes n’avaient pas accès à la restitution de leurs terres mais seulement à des compensations financières parfois symboliques.
 
Une autre experte s’est enquise du cadre légal concernant les réparations pour les victimes de racisme et de discrimination.  Il a été rappelé que les discriminations à l’encontre des personnes d’ascendance africaine restaient une préoccupation pour le Comité. Ces personnes sont toujours victimes de violence, a insisté l’experte, avant de demander si les auteurs de cette violence étaient poursuivis et si des enquêtes étaient diligentées pour faire la lumière sur ces agissements.  Cette experte a souhaité savoir comment était traités les cas de discrimination multiple, notamment pour ce qui est des personnes handicapées issues des minorités.
 
Cette même experte a souligné que 90% des viols commis hors du cadre d’un conflit restaient impunis dans le pays.  Elle a souhaité savoir combien de poursuites ont été engagées pour des actes commis par les représentants de l’État et dans la sphère privée. Elle a en outre souhaité savoir combien de mises en accusation et de condamnations avaient été prononcées en vertu de la loi sur le féminicide et quelles mesures avaient été prises pour que les prestataires des soins de santé se conforment à l’obligation d’offrir les soins de santé, notamment l’accès à l’avortement, pour les femmes victimes de violences sexuelles.
 
Tout en relevant l’existence d’une volonté politique de répondre aux droits des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transsexuelles et intersexuées (LGBTI), un expert a noté le manque d’informations concernant le suivi et les poursuites engagées en rapport avec des affaires de crimes commis contre ces personnes.  Cet expert a relevé qu’entre 2012 et 2016, plus de 400 assassinats ont été commis en raison de l’orientation sexuelle des victimes et a fait observer que la majorité des enquêtes n’avaient pas abouti.  L’expert a demandé à la délégation d’expliquer ces chiffres et les obstacles qui empêchent le pays d’assurer les droits et la défense de la communauté LGBTI.  Il s’est aussi enquis du statut de l’union des personnes de même sexe en Colombie.
 
Le même expert a ensuite noté que les violences à l’encontre des femmes restaient très répandues en Colombie.  Le harcèlement sexuel sur le lieu de travail reste lui aussi un phénomène courant dans ce pays, a-t-il ajouté.  Il a en outre relevé que le Code pénal envisageait différemment, du point de vue des sanctions encourues, les violences sexuelles selon qu’elles sont ou non commises dans le cadre du mariage.
 
S’agissant des disparitions forcées, l’expert a déploré la persistance de lacunes dans le domaine de la lutte contre l’impunité.  Il a souhaité en savoir davantage sur les mesures prises pour créer un registre national unifié des personnes disparues, rappelant que les accords de paix prévoyaient la mise sur pied d’une unité de recherche pour les personnes disparues.  L’accord de paix ayant été rejeté par référendum, ce projet d’unité de recherche est-il toujours d’actualité, a demandé l’expert?
 
Un membre du Comité a fait observer combien il est difficile en Colombie d’avoir accès aux procédures d’avortement et aux informations nécessaires dans ce domaine.  L’objection de conscience reste très répandue dans le milieu médical, certains centres se refusant à proposer des services d’avortement, a-t-il souligné, rappelant que les femmes qui souhaitent bénéficier d’un avortement ne sauraient se heurter à une politique généralisée contre l’avortement.  Relevant le nombre très important d’adolescentes enceintes, cet expert a souhaité en savoir davantage quant à l’impact des programmes de sensibilisation, y compris en milieu scolaire, en matière d’éducation sexuelle.
 
Les informations fournies par la Colombie concernant la torture sont trop laconiques, a poursuivi ce même membre du Comité, se disant désabusé par l’absence d’informations concernant des cas de torture imputables aux forces de l’ordre ou à l’armée.
 
Un autre expert s’est enquis de la situation des personnes d’ascendance africaine en Colombie et de la raison pour laquelle ces personnes n’étaient pas davantage présentes et visibles dans les différentes sphères de la vie de la société.
 
Lesquels sont les obstacles auxquels se heurtent les personnes transsexuelles pour obtenir un changement d’état civil, a demandé un expert au cours du dialogue?  Il a souhaité que la délégation explique l’écart existant entre les chiffres sur les cas de disparitions forcées fournis au présent Comité et ceux déclarés devant le Comité des disparitions forcées.  Il a en outre souhaité avoir davantage d’informations sur le nombre d’avortements clandestins en Colombie; en 2008, il y aurait eu près de 400 000 avortements, dont seulement quelques centaines auraient été réalisés dans un environnement sanitaire.
 
Un autre expert a souhaité savoir si la justice de transition envisageait la mise en place d’une commission de réconciliation.
 
Évoquant la justice intermédiaire, un expert a demandé quels types de délits ou de délits n’allaient pas être poursuivis dans ce cadre et si cela ne renforçait pas le sentiment d’impunité. Il s’est par ailleurs enquis des principales difficultés concernant la mise en œuvre de la loi sur les réparations (en faveur des victimes) et a souhaité savoir comment cette mise en œuvre était financée.  Y a-t-il une volonté de couvrir toutes les victimes du conflit armé, a-t-il demandé?  Concernant la restitution des terres, cet expert a relevé qu’il n’y avait pas de garanties que les personnes puissent retourner sur leurs terres en toute sécurité, car il y a encore des groupes qui ne veulent pas la paix et qui terrorisent certaines populations.
 
Un expert a souligné que la violence était encore trop présente en Colombie, avec la présence dans ce pays de nombreux groupes armées malgré l’accord de paix.
 
Ce même expert a par ailleurs souligné que le Comité avait reçu des informations faisant état de la persistance de violences massives à l’encontre de personnes qui participent à des manifestations publiques. Que fait l’État pour gérer ces manifestations et les auteurs de ces violations vont-ils être poursuivis?  Cet expert a en outre relevé que des militaires avaient les mêmes prérogatives que la police pour ce qui est d’encadrer les manifestations pacifiques.  De nombreux cas d’abus de la force ont été recensés dans ce cadre, a fait observer l’expert.
 
Un membre du Comité a expliqué qu’il était difficile pour le Comité d’accepter la légalité de l’utilisation de paysans pour l’arrachage des plantations illégales de coca dans des secteurs minés.  Ces paysans sont ainsi exposés à un nombre important de risques.  Aussi, l’expert a demandé à la délégation si cette pratique allait être abandonnée par la Colombie, rappelant que ces paysans pouvaient aussi être la cible de groupes armés.
 
Un expert s’est dit préoccupé par les nouveaux pouvoirs donnés aux forces de l’ordre dans le cadre de la nouvelle loi qui a été promulguée en matière de surveillance.  Le concept de surveillance (monitoring) est très large et peut aboutir à des abus, a-t-il souligné.  Cet expert a demandé comment étaient gérées les métadonnées et si la confidentialité de ces données était assurée.  Le nouveau code de la police, qui devrait entrer en vigueur, met à mal la distinction entre la vie privée et la vie publique, s’est inquiété l’expert.
 
Une experte a souhaité en savoir davantage au sujet de la lutte contre la traite des êtres humains, faisant observer que les enfants d’ascendance africaine et autochtones étaient plus particulièrement touchés par la traite.  L’experte s’est inquiétée du faible nombre de cas portés devant les tribunaux au regard de l’ampleur du phénomène. Elle a souhaité savoir si la stratégie de lutte contre la traite avait porté ses fruits.  Elle a en outre relevé qu’il n’y avait eu aucune condamnation en matière de travail forcé.
 
Cette même experte a ensuite regretté que les menaces et les intimidations à l’encontre des défenseurs des droits de l’homme et des journalistes soient en pleine résurgence. Elle a expliqué que les auteurs de ces menaces étaient des acteurs aussi bien étatiques que non étatiques.  Combien de plaintes pour violation des droits des défenseurs des droits de l’homme ont-elles fait l’objet d’enquêtes et quelles mesures ont-elles été prises par l’équipe spéciale d’inspection destinée à faire la lumière sur ces cas?
 
Relevant des lacunes en matière d’accès de certaines populations à l’enregistrement des naissances de leurs enfants, en particulier parmi les communautés autochtones et les personnes d’ascendance africaine, l’experte a demandé comment la Colombie prévoyait d’adapter son système d’enregistrement des naissances à la réalité actuelle, notamment dans les zones les plus reculées du pays.  Comment gérer l’absence du père lors de ces enregistrements, s’est-elle en outre interrogée?
 
Évoquant les conditions de vie difficiles des détenus, un expert s’est enquis des résultats des mesures prises par le Gouvernement pour faire face à cette situation.
 
Un autre expert a demandé si les enfants continuaient à être recrutés dans les bandes armées et s’est enquis de statistiques concernant le nombre d’enfants démobilisés suite au conflit.  Il s’est aussi enquis des modalités de prise en charge des enfants ainsi démobilisés en vue de leur réinsertion dans la société.  Il a souhaité savoir si des condamnations avaient été prononcées suite à des affaires concernant le recrutement d’enfants et si des enfants continuaient à participer à des missions de renseignement au service de l’armée.
 
Selon un autre expert, la consultation préalable (des populations concernées face à un projet qui les concernent) n’est pas une réalité sur le terrain.  Beaucoup de hauts fonctionnaires estiment que cette consultation préalable empêche ou freine le bon développement des projets, a-t-il fait remarquer.  Aussi, s’est-il enquis de ce que font les autorités colombiennes pour défendre ce principe de consultation préalable.  Ce même expert a demandé à la délégation ce qu’il en était de la mise en œuvre du Plan de protection des peuples autochtones dont l’existence est menacée sur le terrain.
 
Réponses de la délégation
 
La délégation a souligné que la prévention était une priorité dans le cadre de la lutte contre les exécutions extrajudiciaires.  Plus de 900 affaires, impliquant plus de 1500 personnes, ont été présentées devant la justice dans ce domaine, a-t-elle précisé.  
 
Concernant les exécutions extrajudiciaires, la délégation a par la suite indiqué que le parquet avait procédé à une analyse de l’ensemble des sentences relatives à ces faits, plus de 400 affaires ayant été analysées dans ce contexte.
 
La jurisprudence prévoit que les infractions aux droits de l’homme ne peuvent être traitées par la justice pénale militaire, a par ailleurs rappelé la délégation. 
 
En 2011 la police nationale s’est dotée d’une politique en matière des droits de l’homme qui doit permettre de prévenir les cas de torture ou de traitements inhumains et dégradants. Cette politique a été diffusée largement dans toutes les unités de police. Toujours concernant la torture, la Cour constitutionnelle a déclaré anticonstitutionnels un certain nombre d’éléments concernant la privation de liberté.  Quant à lui, Le bureau du Défenseur du peuple assure un suivi très complet de ce qui se passe en prison; 120 plaintes ont été déposées entre 2015 et 2016 par des détenus au sujet de leurs conditions de détention et de cas de mauvais traitements. Plusieurs personnes ont été condamnées dans ce cadre, a précisé la délégation.
 
La délégation a assuré que le Gouvernement colombien appliquait une politique de tolérance zéro à l’égard des actes de torture.  Des militaires et des policiers sont jugés devant les tribunaux pour des affaires relatives à ce type de crimes, a-t-elle souligné.
 
L’État a mis en place un mécanisme pour permettre une meilleure prise en charge des familles de victimes de disparitions forcées, a ensuite rappelé la délégation.  L’État a pris un engagement indéfectible dans ce domaine pour répondre aux besoins des familles, a-t-elle insisté.
 
La délégation a rappelé que la justice doit être au cœur de tout le processus de réconciliation.  Il est extrêmement important de disposer des mécanismes pour trouver les personnes disparues et il faut trouver des alternatives à la voie pénale; il faut une démarche humanitaire et des mécanismes extrajudiciaires, surtout pour les affaires concernant les personnes disparues. L’expérience colombienne montre que la démarche est bonne dans ce domaine. Elle a été inspirée par le Comité internationale de la Croix-Rouge. L’État continue à collaborer avec la Cour pénale internationale et répond à toutes les demandes du Procureur, a en outre indiqué la délégation.
 
La délégation a expliqué que l’une des principales difficultés en matière de suivi réside dans l’absence d’informations fiables, ce qui empêche d’avoir un aperçu exhaustif de la situation des droits de l’homme dans le pays.  La Colombie a développé une série d’indicateurs devant permettre à l’avenir un meilleur suivi des politiques en matière des droits de l’homme.
 
La délégation a d’autre part souligné que le Ministère colombien des affaires étrangères avait fait part de sa volonté de prolonger le mandat de l’antenne locale du Haut-commissariat aux droits de l’homme dans le pays.
 
La délégation a par ailleurs indiqué que la Colombie accordait la plus grande importance au Défenseur du peuple dont le rôle, au fil des ans, s’est renforcé.  Le budget de cette institution a considérablement augmenté, a en outre fait valoir la délégation.
 
Entre 2002 et 2015, le nombre de personnes déplacées a diminué de plus de 80% et ces derniers mois, cette diminution est encore plus marquée, a ensuite souligné la délégation.
 
La Colombie accorde une attention particulière aux personnes handicapées déplacées, lesquelles bénéficient de mesures de protection et de soutien en fonction de leur handicap et de leurs besoins, a par ailleurs assuré la délégation.
 
La délégation a rappelé qu’un protocole permettait à l’échelon national et local de favoriser le retour des personnes déplacées.  Pour autant, certaines personnes ne souhaitent pas rentrer chez elles, a-t-elle fait observer.  Aujourd’hui, l’État propose à titre collectif des indemnisations collectives pour des groupes spécifiques vivant le long de fleuves ou de rivières du pays, a poursuivi la délégation. La police a travaillé à une meilleure protection de ces groupes, qui bénéficient donc d’un traitement particulier, a-t-elle ajouté.
 
La délégation a souligné que l’Observatoire national contre le racisme et la discrimination recevait et enregistrait les plaintes et portait les affaires de discrimination devant la justice.
 
La délégation a ensuite fait observer que plusieurs membres du Gouvernement étaient d’ascendance africaine. Malgré ces exemples, la délégation s’est dite bien consciente que les personnes d’ascendance africaine étaient sous-représentées dans les fonctions importantes du pays et a affirmé que l’État redoublait d’effort pour remédier à ce problème.
 
Le bureau du Procureur a créé une unité spécialisée pour faire la lumière sur les cas de violences à l’encontre des LGBTI, a d’autre part indiqué la délégation.  De grandes avancées ont été réalisées dans la reconnaissance des droits de cette communauté, a-t-elle assuré.  Les fonctionnaires, notamment les policiers et les agents pénitentiaires, ers sont formés aux droits des LGBTI. Le parquet a recensé 528 cas de violence motivés par l’orientation sexuelle des victimes. 
 
Revenant par la suite sur la politique nationale à l’égard de la population LGBTI, la délégation a indiqué qu’un décret-loi devrait être adopté dans les prochains mois qui devrait permettre de mettre en place des mesures de protection en faveur de cette population.
 
La délégation a en outre fait observer que les femmes étaient représentées à hauteur de 20% dans la vie politique. Elle s’est dite consciente que des efforts considérables restaient à faire dans ce domaine.  Selon la loi, 30% des postes à responsabilité élevée doivent être occupés par des femmes et aujourd’hui, ce quota est dépassé dans la fonction publique, a fait valoir la délégation.
 
La délégation a expliqué que le ministère public s’efforçait de donner suite aux plaintes de femmes victimes de violences sexuelles, lesquelles sont informées des mécanismes mis à leur disposition. Le Gouvernement est conscient du défi lié à l’impunité face à ce type de violences et plusieurs institutions travaillent de concert pour lutter contre ce phénomène.  Des condamnations ont été prononcées contre les auteurs de violence sexuelle; plus de 2200 personnes ont été inculpées l’année dernière et plus de 7000 victimes ont pu être aidées, a précisé la délégation, tout en se disant consciente que ces chiffres ne représentent pas la réalité et l’ampleur du phénomène dans le pays.
 
La délégation a reconnu que les grossesses précoces touchaient un nombre très important de jeunes filles.  Le pays travaille depuis longtemps sur cette problématique et le nombre de grossesses précoces a baissé de 0,9% cette année.  Des programmes de sensibilisation sont proposés aux jeunes filles et aux familles.  Les grossesses touchent davantage les jeunes filles déplacées, celles des zones rurales ou d’ascendance africaine, a précisé la délégation.  Le plan décennal en matière de soins de santé met l’accent sur le droit à la santé sexuelle, en particulier pour les jeunes filles.  Quant à l’objection de conscience concernant l’avortement, le Ministère de la santé a veillé à ce que l’on ne puisse pas invoquer une objection de conscience institutionnelle mais bien une objection de conscience individuelle. Le médecin qui fait part de son objection de conscience doit transmettre le dossier de la patiente à un de ses confrères, a expliqué la délégation. La Colombie propose une couverture très large des soins de santé, a-t-elle ajouté.
 
La délégation a ensuite rappelé que la culture de la coca était encore très répandue en Colombie. Le Gouvernement veille à mettre fin à la récolte clandestine de la coca, a-t-elle indiqué. Dans 600 municipalités, des mines terrestres antipersonnel ont été installées par des bandes armées. L’armée avec le concours de civils a réussi à démanteler plus de 5000 mines terrestres.  Des ONG ont également participé à ce démantèlement et nettoyé le territoire colombien de toutes les mines antipersonnel. Des accidents se sont produits qui ont occasionné des morts. Le Procureur public a émis un certain nombre de recommandations pour réduire les risques.
 
La délégation a expliqué que les droits des personnes privées de liberté étaient un problème grave dans le pays; le Gouvernement lutte contre la surpopulation carcérale, notamment en s’efforçant d’éviter au maximum de recourir à la détention préventive – laquelle reste actuellement la règle dans le pays.
 
Il n’y a aucune tolérance concernant la collusion entre les organisations criminelles et les agents de la fonction publique, a ensuite assuré la délégation, avant de préciser que 51 fonctionnaires ont été arrêtés et accusés d’entretenir des liens avec des organisations criminelles.
 
La délégation a ensuite rappelé que la Colombie reconnaissait l’existence du phénomène de la traite des personnes et a assuré que le Gouvernement était attaché à la lutte contre ce phénomène. Le cadre institutionnel a été renforcé en vue d’éradiquer cette pratique, a-t-elle souligné; un décret régit la lutte contre la traite, en s’appuyant sur une stratégie à cette fin qui couvre la période 2016-2018 et contient des objectifs et des indicateurs.  Des condamnations ont été prononcées contre des auteurs de traite et plus de mille enquêtes sont en cours, a en outre précisé la délégation.
 
La délégation a reconnu l’existence de grandes disparités en termes d’accès à l’information en matière de santé génésique. Le plan national de développement va s’efforcer de diminuer ces disparités, a fait valoir la délégation, avant de faire observer que le problème était aussi d’ordre culturel. L’État colombien travaille avec des collectifs de femmes qui peuvent avoir une grande influence au sein de certaines communautés. Le pays a connu une baisse sensible de la mortalité maternelle, a indiqué la délégation, avant d’ajouter que l’objectif du Gouvernement est d’améliorer l’offre de service de soins dans les zones rurales.
 
La délégation a rappelé que l’enregistrement des naissances était un droit pour tous les enfants. C’est aux services de l’état civil qu’il incombe de gérer le registre civil, a-t-elle également rappelé, précisant que l’état civil avait augmenté le nombre de ses bureaux où il est possible de procéder à l’enregistrement des naissances.  Des campagnes de sensibilisation itinérantes sont organisées dans les zones reculées du pays, a ajouté la délégation. Les enregistrements au registre d’état civil ont connu une nette augmentation ces dernières années, a fait valoir la délégation.
 
La délégation a d’autre part expliqué qu’une Unité nationale de protection assurait le droit à la vie et l’intégrité pour les personnes qui se retrouvent en situation de risque extrême pour leur vie en raison de l’exercice de leur fonction. Cette unité protège plus de 6000 personnes, notamment des défenseurs des droits de l’homme, des journalistes et des syndicalistes. Un groupe de travail spécial créé par le Procureur est chargé d’ouvrir des enquêtes sur des actes de harcèlement ou d’intimidation à l’encontre de défenseurs de droits de l’homme. Plus de mille enquêtes ont été ouvertes dans ce cadre et, entre 2010 et 2016, 244 enquêtes ont été ouvertes concernant des homicides, a précisé la délégation.
 
La délégation a expliqué que l’ancien département compétent pour le renseignement avait subi une transformation profonde et avait été remplacé par une nouvelle institution qui est chargée uniquement de cette question et répond aux normes internationales en la matière.  C’est une loi qui règlemente toutes les procédures et le fonctionnement de cette entité, qui n’est en aucun cas compétente pour réaliser les fonctions dévolues à la police, a ajouté la délégation.  Il y a un autocontrôle de cette entité, mais il y a aussi un contrôle externe réalisé par un procureur et le pouvoir législatif vérifie également les activités de cette institution, a indiqué la délégation.
 
La délégation a souligné que la Colombie reconnaissait les droits des populations autochtones et a rappelé qu’un chapitre du plan national de développement était consacré aux droits de ces populations.  
 
Remarques de conclusion

À l’issue de ce dialogue, MME GAVIRIA BETANCUR, Conseillère présidentielle pour les droits de l’homme, a remercié le Comité pour ses remarques et a indiqué que la délégation attendait avec impatience de recevoir les recommandations de cet organe.  Elle a dit espérer que le Comité prendrait en compte le contexte difficile du pays et a assuré que la Colombie est attachée à la réalisation des droits de l’homme.  Le pays va renforcer le dialogue avec la société civile, a-t-elle ajouté, avant de souligner que l’objectif du Gouvernement est d’assurer une Colombie unifiée qui permette à ses citoyens de vivre dans la paix.
 
M. YUJII IWASAWA, Vice-Président du Comité, a souligné que ce dialogue avait lieu à un moment historique pour le pays, quelques jours seulement après l’annonce du prix Nobel de la paix accordé au Président colombien.  Le Vice-Président a remercié la délégation pour la franchise du dialogue et a dit espérer que les observations finales du Comité seront utiles pour aider le pays à respecter pleinement les dispositions du Pacte

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