Organes conventionnels
Le Comité des disparitions forcées ouvre sa onzième session
03 octobre 2016
Comité des disparitions forcées
3 octobre 2016
Il élit le Mexicain Santiago Corcuera Cabezut à sa présidence
Le Comité des disparitions forcées a ouvert ce matin, au Palais Wilson à Genève, les travaux de sa onzième session en adoptant son ordre du jour et son programme de travail - qui prévoient l'examen des rapports de la Bosnie-Herzégovine et de la Colombie – et en élisant à sa présidence le Mexicain Santiago Corcuera Cabezut. Le Comité a également entendu une déclaration de la Haut-Commissaire adjointe aux droits de l'homme, Mme Kate Gilmore, qui s'est notamment réjouie du rôle de chef de file joué par le Comité face aux disparitions forcées, notant qu'il s'agissait d'un des aspects les plus difficiles des droits de l'homme.
Après avoir rappelé qu'elle s'était rendue dans deux pays ayant enregistré le plus grand nombre de personnes disparues, à savoir l'Iraq et Sri Lanka, Mme Gilmore a fait observer que plus de 600 requêtes sur des cas de disparitions étaient parvenues au Comité, estimant qu'il ne s'agissait-là que de la «pointe de l'iceberg», des milliers de cas n'étant jamais signalés, selon elle, soit pour des raisons sécuritaires qui ne le permettent pas, soit par méconnaissance de l'existence des mécanismes internationaux auxquels s'adresser. Tout en se félicitant du travail de plaidoyer effectué par le Comité, Mme Gilmore a estimé que face à un tel constat, il convenait de faire en sorte qu'un plus grand nombre d'États adhèrent à la Convention et la ratifient; il faut réfléchir aux moyens de les inciter à devenir partie à cet instrument, a-t-elle insisté.
Alors que le nouveau Président du Comité était élu ce matin par acclamation, le Président sortant, M. Emmanuel Decaux, a tiré le bilan des cinq premières années d'existence du Comité, dix ans après l'adoption de la Convention. Le nombre d'États parties à cet instrument est passé de 20 à 52 et 29 rapports ont été reçus par le Comité, chiffre que M. Decaux a jugé encourageant. Le Président sortant a attiré l'attention sur l'effet préventif que pouvait avoir l'examen des rapports des États parties, en évoquant le cas à venir du Gabon. Faisant à cet égard observer que l'examen du rapport de ce pays est prévu pour dans un an, il s'est demandé s'il ne serait pas pertinent d'en avancer la date.
M. Decaux a ensuite insisté sur l'importance de la concertation entre les organes conventionnels, lors de la réunion annuelle des Présidents des organes de traités et a par ailleurs rappelé le caractère fondamental de l'article 33 de la Convention, «l'une des grandes innovations de cet instrument». Cette disposition prévoit en effet que si le Comité est informé qu'un État partie porte gravement atteinte aux dispositions de la Convention, il peut, après consultation de l'État partie concerné, demander à un ou plusieurs de ses membres d'effectuer une visite sur place.
Après son élection à la présidence, M. Santiago Corcuera Cabezut a pour sa part souligné qu'il s'agissait pour le Comité de s'engager par son travail à répondre à «la souffrance indescriptible des personnes disparues et de leurs proches». Il s'est félicité des résultats importants obtenus par cet organe en cinq ans d'existence, mentionnant plus particulièrement la déclaration sur les compétences des juridictions militaires, élaborée par le Comité. Il a par ailleurs rappelé que sur les 52 États parties à la Convention, vingt avait reconnu la compétence du Comité pour examiner des plaintes individuelles. Ces chiffres illustrent le défi auquel est confronté le Comité, a-t-il ajouté, soulignant qu'un effort collectif sera indispensable, avec créativité et inventivité, pour «obtenir au plus tôt l'augmentation du nombre d'États parties, particulièrement en Asie». De même, convient-il d'inciter à ce que soit reconnue la compétence du Comité pour réaliser une des fonctions les plus caractéristiques d'un organe conventionnel, à savoir l'instruction des plaintes individuelles; le nouveau Président du Comité a à cet égard fait observer qu'à ce jour, un seul cas avait été traité.
M. Corcuera Cabezut a estimé que les États ayant la chance de ne pas être affectés par des disparitions forcées ne devraient pas en tirer prétexte pour ne pas s'engager formellement et devenir partie à la Convention, d'autant que celle-ci prévoit des mécanismes préventifs. Il faut faire preuve d'une plus grande conviction, selon lui, pour inciter les États à se rallier à cet instrument. Le nouveau Président s'est dit confiant que la réflexion collective générerait des idées constructives pour parvenir à l'universalité de la Convention.
Lors de l'échange qui a suivi entre les membres du Comité et la Haut-Commissaire adjointe aux droits de l'homme, cette dernière a estimé qu'il convenait de dire sans équivoque aux États que les disparitions forcées n'ayant pas lieu d'être, rien ne saurait justifier l'absence de ratification de la Convention. «Il n'y a pas d'excuses pour ne pas être partie à la Convention», a-t-elle insisté. Renforcer le bureau de Bruxelles permettrait de mieux travailler auprès de l'Union européenne, a ajouté Mme Gilmore, soulignant que le Haut-Commissariat s'efforçait d'obtenir l'accord de l'Assemblée générale
des Nations Unies afin qu'il puisse renforcer sa présence en dehors de Genève.
Mme Gilmore a par ailleurs estimé que le résultat négatif du référendum sur l'accord de paix en Colombie nécessitait réflexion. Elle a rappelé le combat des Mères de la Place de mai en Argentine, dont le courage et la détermination devaient être source d'inspiration non seulement pour le Comité mais aussi pour les Colombiens. Affirmant que les proches des victimes étaient les plus désireux de paix en Colombie, Mme Gilmore a exprimé l'espoir que la paix serait durable dans ce pays.
Avant de clore sa séance publique de ce matin, le Comité a observé une minute de silence à la mémoire des victimes de disparitions forcées.
Le comité entamera demain après-midi, à partir de 15 heures, l'examen du rapport de la Bosnie-Herzégovine, examen qu'il achèvera mercredi matin.
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