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Organes conventionnels

Le Comité auditionne la société civile sur la mise en œuvre de la convention en Argentine, en Suisse, au Honduras et en Arménie

31 Octobre 2016

GENEVE (31 octobre 2016) - Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes a auditionné, cet après-midi, des représentants de la société civile au sujet de la mise en œuvre de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes dans les quatre pays dont les rapports seront examinés cette semaine, à savoir l’Argentine, la Suisse, le Honduras et l’Arménie.

S’agissant de l’Argentine, l’attention a particulièrement été attirée sur les violences faites aux femmes, y compris les féminicides ; sur l’avortement ; sur les questions foncières et sur la situation des femmes rurales et autochtones.

En ce qui concerne la Suisse, des préoccupations ont été exprimées s’agissant des écarts de salaires entre hommes et femmes ; du développement de la prostitution clandestine ; ou encore de la protection des victimes de la traite de personnes.

Pour ce qui est du Honduras, des préoccupations ont été exprimées face aux violences sexuelles et aux féminicides dans le pays, ainsi que face aux violations des droits des femmes rurales, afro-honduriennes et autochtones et face aux conditions de travail dans les ateliers textiles travaillant à l’exportation.

S’agissant de l’Arménie, l’attention a notamment été attirée sur le fait que les textes de loi adoptés en faveur de l’égalité entre les sexes manquent de résultats concrets et que les pouvoirs publics semblent indifférents envers les droits des femmes. Ont en outre été dénoncés les mariages précoces parmi les minorités, notamment chez les Yézidis, ainsi que les écarts de salaires entre hommes et femmes et le nombre élevé d’emplois interdits aux femmes.

Demain matin, à 10 heures, le Comité examinera le rapport de l’Argentine.

Audition de la société civile

S’agissant de l’Argentine

Le Comité de América Latina y el Caribe para la Defensa de los Derechos de la mujeres – CLADEM Argentina a abordé sept points: les politiques publiques, la violence et la discrimination, l’accès à l’avortement, la santé, la situation des femmes transgenres, les femmes privées de liberté, ainsi que la situation des femmes rurales et autochtones. L’ONG a notamment souligné que les travailleuses argentines gagnaient 27% de moins que leurs collègues masculins. Les statistiques font apparaître un assassinat de femme toutes les 23 heures dans le pays, a-t-elle en outre indiqué, déplorant l’impunité qui règne face aux féminicides.

OTRANS Argentina et Frente de organizaciones TLGBI Argentina ont attiré l’attention sur les nombreux décès de femmes en âge de procréer causés par les avortements illégaux. Elles ont également déploré l’abus de l’objection de conscience par les médecins refusant de pratiquer des interruptions volontaires de grossesse. Quant aux transsexuelles et transgenres, elles sont contraintes de pratiquer la prostitution car elles se trouvent dans l’impossibilité d’avoir un autre gagne-pain du fait de la discrimination à laquelle elles sont confrontées.

Fundacion Plurales et Colectivo de mujeres del Chaco Americano ont estimé que l’Argentine ne mettait pas en œuvre les recommandations du Comité formulées à l’issue de l’examen du précédent rapport du pays en 2010. L’insécurité juridique des biens fonciers entraîne des expulsions forcées, ont fait observer ces ONG. Elles ont en outre souligné que les problèmes d’accès à l’eau dans la région du Chaco contraignent les femmes à consacrer plusieurs heures par jour à aller chercher de l’eau.

S’agissant de la Suisse

NGO-Coordination post Beijing Switzerland, qui a précisé représenter une trentaine d’organisations, a affirmé que la Convention n’était pas une réalité en Suisse. Les travailleuses, par exemple, sont confrontées à une inégalité salariale flagrante par rapport aux hommes dès leur entrée sur le marché du travail, alors que, par ailleurs, la pauvreté affecte davantage les femmes. Quant aux pensions de retraite des femmes, elles sont inférieures de 37% à celles des hommes.

FIZ/PROCORE a relevé que même si la Suisse s’était dotée d’une législation contre la traite, la protection des victimes (de traite) laissait à désirer. La loi et les pratiques helvétiques continuent de mettre l’accent sur les poursuites et ne permettent pas de mettre en œuvre les recommandations du Comité en la matière. La répression du travail du sexe a eu tendance à s’aggraver ces dernières années, ce qui a pour conséquence de provoquer un développement de la prostitution clandestine, a en outre fait observer l’ONG.

Terres des femmes Suisse a fait observer que la persécution au motif du sexe n’étant pas reconnue, les demandeuses d’asile discriminée pour ce fait ne peuvent obtenir l’asile dans le pays en se fondant sur ce motif.

StopIGM.org a fait observer que les enfants intersexués ne sont pas protégés par la loi et que le Gouvernement suisse se refuse de reconnaître qu’il s’agit d’un problème de droits de l’homme.

La Commission fédérale (suisse) pour les questions féminines a abordé la question de la participation politique des femmes, soulignant que ces dernières continuaient d’être sous-représentées au Parlement. Si des progrès ont été faits, notamment dans la présentation que les médias font des candidates, ces dernières demeurent beaucoup moins citées que les hommes dans les médias. Par ailleurs, il est difficile de concilier travail et vie de famille en Suisse, a poursuivi la Commission fédérale. Le congé parental n’est pas réglementé pour les deux parents, a-t-elle souligné, rappelant qu’une initiative parlementaire visant à créer un congé payé de 14 semaines avait été rejetée par la Commission chargée d’élaborer un projet de texte.

Par ailleurs, les postes à responsabilité dans les entreprises demeurent largement occupés par des hommes, en dépit des incitations existantes pour y remédier, a indiqué la Commission fédérale. Elle a en outre évoqué l’énorme désavantage frappant les personnes handicapées en matière d’assurance-invalidité. Enfin, la Commission a abordé la question des problèmes financiers posés aux femmes en cas de divorce, le fardeau reposant principalement sur les femmes, en raison notamment d’un salaire généralement plus faible que celui de leur mari. En 2008, la Cour suprême a souligné la nécessité de trouver une solution non discriminatoire; mais malheureusement, le Gouvernement fédéral estime que la question relève des cantons.

S’agissant du Honduras

Foro de Mujeres por la vidaa expliqué que depuis le coup d’Etat de 2009, les violations des droits humains des femmes s’étaient aggravées, s’agissant particulièrement des femmes rurales, afro-honduriennes et autochtones. Les droits à la terre et aux ressources naturelles sont menacés par les entreprises minières et par l’activité touristique, a souligné l’ONG. Elle a dénoncé l’assassinat de défenseuses des droits de l’homme, rappelant celui de Berta Caceres et déplorant qu’il reste impuni à ce jour. L’ONG a par ailleurs dénoncé la précarisation des travailleuses et les conditions de travail malsaines dans les ateliers textiles travaillant pour l’exportation.

Centro de Derechos de Mujeres a déploré que seuls deux cas de harcèlement sexuel aient fait l’objet de poursuites en justice. L’ONG a rappelé, par ailleurs, que les Nations Unies avaient appelé le Honduras à dépénaliser l’avortement, dans le but de réduire le nombre d’interruptions volontaires de grossesse clandestines.

Centro de Estudios de la Mujer – Honduras a indiqué que le pays connaissait le plus fort taux de féminicides de la région, une femme étant assassinée toutes les 16 heures. L’État ne mène pas d’enquêtes efficaces et il n’existe pas de registre des personnes disparues. Toutes les trois heures, en outre, une plainte est déposée pour violences sexuelles, alors même que l’on sait qu’une femme sur six seulement ose le faire. L’impunité est liée à la corruption, selon l’ONG. Seul, 6,7% du budget de l’État concerne des politiques spécifiques en faveur de la femme, a-t-elle en outre fait observer.

S’agissant de l’Arménie

Armenian Association of World Citizens Women with University Education NGO a expliqué que l’Arménie avait adopté une politique du genre assortie d’un plan national et que cela suscitait l’espoir d’une meilleure égalité entre les sexes dans l’avenir. Or, on ne constate pas une telle évolution positive, a fait observer l’ONG. Malgré une législation favorable, il n’y a pas de mécanisme national actif permettant de produire des résultats concrets en matière d’égalité, contrairement à ce qu’a recommandé le Comité. Les textes sont certes là, qui existent, mais ils ne garantissent en rien une évolution dans le bon sens. L’ONG estime nécessaire que le quota de femmes parlementaires passe de 20 à 30% et plaide pour l’instauration d’une politique de quotas plus stricte.

National Union of Professional Organisations of Health Care Employees of Armeniaa souligné que si plus de la moitié des femmes (55%) sont actives professionnellement, les salaires moyens des femmes en Arménie n’atteignent, à emploi égal, que 64% de ceux des hommes.

Disability Info NGO a mis en cause l’indifférence des pouvoirs publics envers les droits des femmes, certains ayant même demandé que l’on supprime le terme « genre » dans les textes officiels. Les questions féminines ne sont guère présentes dans les médias et les stéréotypes subsistent dans les manuels scolaires. Si le Gouvernement arménien a élaboré récemment un projet de loi sur la violence domestique, celui-ci comporte un grand nombre de lacunes, sans compter que l’Arménie n’a pas ratifié la Convention d’Istanbul sur la violence domestique; il est donc à craindre que ce texte ne soit pas conforme aux instruments internationaux. Par ailleurs, l’Arménie se classe au troisième rang des pays où l’on pratique l’avortement sélectif. Les femmes handicapées sont discriminées et les services de santé ne sont pas inclusifs, a ajouté l’ONG. Le taux de mariage précoce est élevée chez les minorités, en particulier parmi les Yézidis, a-t-elle en outre souligné.

Civil Society Institute NGO / Anti-Discrimination Centre “Memorial” ont critiqué l’absence de sensibilisation de la société à l’égard des femmes migrantes. La situation est très difficile pour celles qui se trouvent dans des villages ruraux isolés. Les deux ONG ont en outre fait part de leur inquiétude face à la liste des emplois interdits aux femmes, qui comporte pas moins de 400 métiers. Il s’agit d’une disposition abusive, généralisée dans l’ex-URSS.

Au cours du dialogue qui a suivi ces exposés, des membres du Comité ont demandé des précisions aux représentants des ONG concernant l’application de la Convention dans ces pays.

S’agissant de l’Argentine, une ONG a indiqué qu’un décret était censée imposer la parité au sein de la Cour suprême – laquelle est actuellement composée de quatre hommes et d’une seule femme.

S’agissant de la Suisse, les ONG ont expliqué que les victimes de traite ne disposaient que de 30 jours de réflexion pour porter plainte. Étant souvent menacée dans leur pays, elles n’ont guère intérêt à dénoncer ce qu’elles ont subi si elles n’ont pas la garantie de se voir accorder la résidence en Suisse. Les ONG ont par ailleurs déploré la réserve émise par la Suisse au sujet de la Convention d’Istanbul. Par ailleurs, un enfant intersexué en Suisse est toujours considéré comme problématique, les parents étant incités à y remédier par une intervention, sans que ne soit pris en compte l’intérêt supérieur de l’enfant.

S’agissant du Honduras, une organisation a indiqué qu’il y avait peu de tribunaux dans les zones rurales, où vivent pourtant 60% de la population. Par ailleurs, les professions judiciaires sont peu accessibles aux femmes, a-t-il été souligné.

Concernant l’Arménie, une ONG a expliqué que les trois quarts des contaminations proviennent des partenaires étrangers des Arméniennes. Il y a par ailleurs en Arménie une opprobre envers les femmes séropositives ou malades du VIH/sida, la confidentialité n’étant pas respectée dans les petites villes, ce qui contraint les femmes concernées à s’adresser à l’hôpital central de la capitale. Des campagnes d’information s’imposent.

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