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Organes conventionnels

Le Comité des droits de L'enfant tient une journée de débat général sur les droits de l'efant et l'environnement

23 Septembre 2016

Comité des droits de l'enfant  

23 septembre 2016

Le Comité des droits de l'enfant a tenu, aujourd'hui, une journée de débat général intitulée «Les droits de l'enfant et l'environnement», occasion pour le Comité de se pencher sur les effets sur les enfants de la dégradation de l'environnement dans le contexte du changement climatique.  Le Comité avait décidé, à sa soixante-deuxième session (14 janvier-1er février 2013), de  tenir une  journée de débat général tous les deux ans. 

Le Comité avait réuni un certain nombre de spécialistes, ainsi que des représentants d'enfants venus de Colombie, d'Inde et de Zambie qui se sont répartis en trois groupes de travail: sur le droit des enfants face au changement climatique; sur les écosystèmes, la biodiversité et les ressources naturelles; et enfin sur l'exposition des enfants aux produits toxiques. 

En ouverture des débats, M. Benyam Dawit Mezmur, avait souligné le lien entre les droits de l'enfant et l'environnement et sur les moyens de renforcer ce lien. 

La Directrice du Département santé publique, déterminants sociaux et environnementaux de la santé de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), Mme Maria Neira, a indiqué qu'un quart des décès dans le monde - plus de 12 millions de morts par an – étaient dus à des facteurs environnementaux. 

Au nom des pays à l'environnement particulièrement vulnérable, la Représentante permanente des Philippines auprès des Nations Unies à Genève, Mme Cecilia Rebong, a souligné que les catégories les plus touchées de la population étaient les femmes, les enfants, les personnes âgées et handicapées.  Elle a aussi rappelé qu'au sein des nations, ce sont les pays en développement qui payaient le plus lourd tribut au dérèglement climatique. 

Sur le plan juridique, le Secrétaire général de l'organisation Terre des hommes, M. Ignacio Packer, a relevé que la Convention relative aux droits de l'enfant était ignorée dans la définition et la mise en œuvre des politiques et des normes environnementales.  Il a estimé indispensable que les politiques environnementales soient inspirées des normes établies par la Convention.

Quant au Rapporteur spécial des Nations Unies sur les droits de l'homme et l'environnement,  M. John Knox, il a fait un rappel historique relevant que le droit à un environnement sain constituait le dernier de la liste des droits fondamentaux ayant été reconnus historiquement.  Résumant ses travaux sur la jurisprudence liant écologie et droits de l'homme qui est peu à peu en train d'émerger, il a déclaré: «Nous devons avoir un environnement sain pour pouvoir jouir des droits de l'homme; et nous devons être en mesure d'exercer nos droits fondamentaux pour avoir un environnement sain». 

Au terme de cette journée de débat à laquelle participaient des représentants des enfants, un certain nombre de recommandations ont été formulées par les rapporteurs de trois groupes de travail, invitant les États à mettre l'intérêt supérieur de l'enfant au cœur de leurs politiques environnementales, pour le salut des générations futures.  La réflexion entamée ce jour devra déboucher sur des partenariats dans les futures actions à entreprendre, a conclu le Président du Comité, M. Benyam Dawit Mezmur.

La prochaine réunion publique du Comité se tiendra vendredi après-midi 30 septembre à l'occasion de la clôture de la présente soixante-treizième session qui s'est ouverte le 13 septembre. 

 

Aperçu des débats

Déclarations d'ouverture

M. BENYAM DAWIT MEZMUR, Président du Comité des droits de l'enfant, a rappelé que de nombreuses décisions avaient été prises dans la période récente sur les questions d'environnement.  Il est pertinent de lier la crise environnementale aux droits de l'enfant, non seulement pour cette raison, mais par le fait même que toutes les questions majeures affectaient nécessairement les enfants, a-t-il observé.  Cette journée de débat doit porter sur le lien entre les droits de l'enfant et l'environnement et sur les moyens de le renforcer.

MME MARIA NEIRA, Directrice du Département santé publique, déterminants sociaux et environnementaux de la santé de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), a indiqué qu'en mars dernier, l'OMS avait publié un rapport sur l'impact d'un environnement insalubre sur la santé, qui avait révélé qu'un quart des décès dans le monde, soit plus de 12,6 millions par an, s'explique par des facteurs environnementaux.  Le droit de respirer un air propre devrait être un droit humain.  Les enfants sont les plus affectés: ils souffrent de maladies respiratoires graves ou des émanations de combustibles malsains dans les foyers lorsque la mère prépare le repas, a-t-elle expliqué.  L'investissement dans des énergies propres est un bon investissement en soi, a-t-elle dit.  Mme Neira a rappelé que des millions d'enfants succombaient à cause d'une eau polluée et d'une absence d'assainissement.  Les petites filles récoltent du petit bois plusieurs heures par jour pour que leur mère puisse cuisiner, ce qui implique concrètement qu'elles ne fréquentent pas l'école, a-t-elle encore relevé. 

Mme Neira a mentionné le problème posé par les déchets électroniques, généralement triés par des enfants dont les petites mains sont exploitées pour en extraire les composants de valeur, ce qui les exposent à des produits chimiques toxiques.  Le travail des enfants est inacceptable, a-t-elle déclaré. 

Lorsqu'il y a une législation, mettez-la en œuvre, a-t-elle lancé à l'assistance.  Ces questions ne relèvent pas uniquement d'un seul secteur, santé ou énergie: elles doivent appeler une action multisectorielle qui, en outre, peut présenter des bénéfices économiques en investissant dans un environnement sain pour les enfants.

MME CECILIA REBONG, Représentante permanente des Philippines auprès des Nations Unies à Genève, qui s'est félicitée que des enfants soient à la tribune, a souligné combien il était important d'entendre leur voix.  Les Philippines sont très présentes dans les débats sur la question du lien entre droits de l'homme et changement climatique, en raison de la grande vulnérabilité du pays à cet égard, a souligné l'ambassadrice, rappelant que les deux catégories les plus touchées de la population étaient les femmes et les enfants.  Les personnes handicapées et  les personnes âgées figurent aussi parmi les populations les plus affectées.  Les pays en développement, quant à eux, sont les plus vulnérables dans le monde. 

Le principe de la limitation du réchauffement climatique à 1,5 degré, par rapport à l'ère préindustrielle, fixée par la communauté internationale, est le seul moyen de faire en sorte que les prochaines générations ne soient pas affectées de manière démesurée dans leurs droits fondamentaux, dont le droit au logement et  à un environnement sain.  Cela a justifié que le Conseil des droits de l'homme se saisisse des conséquences du changement climatique, Conseil au sein duquel les Philippines jouent un rôle mobilisateur aux côtés d'autres nations vulnérables comme le Bangladesh, dans le cadre du Climate Vulnerable Forum (CVF), a-t-elle expliqué.

M. IGNACIO PACKER, Secrétaire général de Terre des hommes international, a estimé que lier les droits des enfants et l'environnement était la clé pour déverrouiller les causes sous-jacentes de nombreuses violations.  Une idée a en effet fini par s'imposer à une organisation comme la sienne: si nous ne réglons pas les problèmes environnementaux, nous serons toujours en retard dans la réalisation des droits des enfants.

Étant donné les récents accords internationaux, notamment celui de Paris sur le climat, ou la définition des Objectifs de développement durable à l'horizon 2030, et bien que ces accords ne soient pas allés aussi loin qu'il aurait été souhaitable, ceux-ci offrent une chance unique d'intégrer une approche fondée sur les droits de l'homme.  Pourtant, le fait est que la Convention relatives aux droits de l'enfant est ignorée lors de la définition et la mise en œuvre des politiques et des normes environnementales.  Pour que cela change, il convient de clarifier ce que signifie concrètement  le fait que des politiques environnementales puissent être  inspirées des normes de la Convention, a souligné le représentant de Terre des hommes.

Les organisations de développement qui travaillent avec les enfants doivent soutenir des projets environnementaux impliquant des enfants et des jeunes.  Des outils pratiques sont grandement nécessaires pour guider les autorités responsables et le secteur privé pour qu'ils intègrent une approche des droits de l'enfant dans les politiques environnementales ou des évaluations d'impact, a-t-il encore estimé.

Pour M. Packer, les enfants «font partie de la solution et nous nous devons de prêter une oreille attentive à leurs points de vue».  Or, pour exprimer des décisions éclairées, ils doivent avoir accès à l'information et à une éducation environnementale adaptée. 

La parole a ensuite été donnée à trois adolescents et adolescentes originaires de Colombie, d'Inde et de Zambie, qui ont brossé le tableau de la situation dans leur région d'origine où l'air et l'eau sont pollués du fait d'activités principalement minières et industrielles.  Ils ont rappelé que tous les enfants avaient le droit de vivre dans un environnement sain.  En conclusion, ces trois jeunes intervenants ont souligné qu'il était évident que les droits environnementaux de l'enfant constituaient des «droits à la vie»: «Pour quelles raisons les adultes affirment-ils que l'environnement a tant de valeur en le traitant si mal ?», ont-ils demandé en conclusion. 

À la suite de ces déclarations, a été projeté un film du réseau international des jeunes de Terre des hommes consacré aux droits de l'enfant et à l'environnement.

M. JOHN KNOX, Rapporteur spécial des Nations Unies sur les droits de l'homme et l'environnement, a souligné que le droit à un environnement sain constituait le dernier de la liste des droits fondamentaux, rappelant que la Déclaration universelle des droits de l'homme, et les Constitutions des États ne le mentionnaient pas.  Cela était compréhensible à l'époque, a-t-il reconnu, puisque l'on n'avait guère conscience des retombées sur l'homme des dégâts faits à l'environnement.  Les choses ont changé, à partir des années soixante, avec l'émergence d'une conscience écologique. 

Si une jurisprudence variée a fini par se faire en matière de droits environnementaux, celle-ci manque de cohérence pour permettre d'établir des normes des droits de l'homme liées à l'environnement.  M. Knox a dit qu'il s'était efforcé de rassembler les propositions de toutes les instances s'étant prononcées sur ces questions.  Il a rappelé qu'en mars 2014, il avait présenté une synthèse au Conseil des droits de l'homme à ce sujet. 

Et s'il devait résumer en une formule lapidaire les conclusions auxquelles il était parvenu dans les 14 rapports dont il est l'auteur sur cette question, celles-ci tiendraient en deux assertions: «Nous devons avoir un environnement sain pour pouvoir jouir des droits de l'homme; et nous devons être en mesure d'exercer nos droits fondamentaux pour avoir un environnement sain». 

Les instances des droits de l'homme et les États admettent désormais l'idée élémentaire selon laquelle la violation des droits à un environnement sain constitue également une violation des droits fondamentaux de la personne, a-t-il observé.  Il s'agit concrètement d'évaluer les impacts environnementaux, d'en informer le grand public et d'entreprendre des mesures de réparation.  Il ne s'agit pas pour autant de mettre un terme à toutes les activités susceptibles de porter atteinte à l'environnement mais de parvenir à un équilibre entre protection de la nature et développement économique.

Pour M. Knox, les États doivent tenir compte des groupes les plus vulnérables au risque environnemental, ils doivent éviter non seulement toute discrimination et prendre des mesures supplémentaires pour les protéger, le Rapporteur spécial mentionnant spécifiquement les populations autochtones et les enfants. 

Le système immunitaire des enfants est en développement et, par conséquent, ce sont eux qui présentent la plus grande vulnérabilité au risque environnemental.  Il est grand temps de préciser les obligations des États en ce qui concerne le risque environnemental et les droits de l'enfant, a-t-il conclu, en estimant que cette journée de débat arrivait à point nommé à cet égard. 

Comptes rendus des groupes de travail

M. CLARENCE NELSON, membre du Comité, et rapporteur du groupe de travail sur le droit des enfants face au changement climatique, a noté que les droits de l'enfant étaient trop souvent ignorés face aux bouleversements actuels.  Or, les enfants ont souvent un avis affirmé sur les problèmes actuels, ainsi que les participants aux débats ont pu le constater avec ceux qui ont participé à la réunion.  Parmi les recommandations faites aux États, il leur est demandé d'améliorer la sensibilisation des enfants au changement climatique et aux risques de catastrophes naturelles.  Il conviendrait aussi d'intégrer les droits de l'enfant dans les mesures prises face au changement climatique.  Les organisations non gouvernementales et les États doivent, enfin, faire un effort pour répertorier les bonnes pratiques. 

M. GEHAD MADI, également membre du Comité, et rapporteur du groupe de travail sur les écosystèmes, la biodiversité et les ressources naturelles, a mis l'accent sur l'importance de l'information et de la participation des enfants, soulignant qu'il n'apparaît pas clairement que les droits de l'enfant soient réellement pris en compte dans les lois, politiques et pratiques relatives aux écosystèmes et aux ressources naturelles.  Les participants ont formulé diverses recommandations afin de favoriser la participation des enfants.  Certains États favorisent une telle participation, a-t-il été noté, le rôle des Médiateurs des droits de l'homme apparaissant fondamental à cet égard, notamment pour recueillir les plaintes d'atteinte à l'environnement.  Les participants ont insisté sur la nécessité de protection des militants écologistes.  Outre l'école, les médias ont un rôle important à jouer dans la sensibilisation des enfants à la biodiversité. 

MME OLGA KHAZOVA, membre du Comité et rapporteuse du groupe de travail sur l'exposition des enfants aux produits toxiques, a noté que celle-ci affectait directement la jouissance des enfants de leurs droits à la survie et au développement, et qu'elle pouvait les affecter durant leur vie entière.  Elle affecte leur niveau de vie, leur accès à une nourriture saine, à l'eau comme au logement.  Les chiffres sont alarmants, a-t-elle souligné, renvoyant ainsi au nombre de décès dus à la pollution cités dans les statistiques de l'Organisation mondiale de la santé. 

Quelque 1 400 substances toxiques sont répertoriées, a indiqué Mme Khazova.  Or, les enfants ne sont pas des adultes en miniature, ils sont en plein développement et sont plus affectés, par conséquent, par les produits toxiques répandus dans l'environnement.  En outre, ceux-ci peuvent porter atteinte aux capacités reproductives et ainsi constituer une menace pour les générations futures.  Il s'agit d'une véritable pandémie silencieuse, a-t-elle averti.  Or, la prévention est entravée par une absence d'information sur ces substances, par des lacunes dans la loi, et par une absence de prise en compte des droits  des enfants.  Elle a enfin noté l'absence de mesures de réparations, les recommandations faites aux États par les participants touchant au caractère central de la prise en compte de l'intérêt supérieur de l'enfant.

Remarques de conclusion

MME KIRSTEN SANDBERG, rapporteuse du Comité, s'est dite impressionnée par la connaissance et la passion des jeunes qui étaient présents à cette journée.  Cela est très prometteur pour l'avenir, a-t-elle conclu. 

M. BENYAM DAWIT MEZMUR, Président du Comité, s'est félicité du succès de cette journée d'échanges.  Toutefois, le succès se mesurera aussi dans ce qui sera concrètement fait à partir de la réflexion engagée.  Les partenariats seront essentiels dans la poursuite de l'aventure, a-t-il ajouté. 
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Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

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