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Communiqués de presse Organes conventionnels

Le Comité des droits de l'homme examine le rapport du Malawi

10 Juillet 2014

Comité des droits de l'homme    

10 juillet 2014

Le Comité des droits de l'homme a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport initial du Malawi sur la mise en œuvre des dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.  Le Comité avait déjà examiné la situation au Malawi en 2011 en l'absence de rapport.
 
Le rapport a été présenté par l'Avocate générale et Secrétaire à la justice au Ministère de la justice, Mme Janet Banda, qui a d'emblée fait état des élections présidentielles, législatives et municipales qui viennent d'avoir lieu, en mai 2014, au Malawi.  Ces élections ont conduit à une nouvelle période de transition pacifique.  Le chef de la délégation du Malawi s'est félicité des immenses progrès en matière de promotion et de protection des droits, en particulier le droits et libertés des minorités, des personnes handicapées et des femmes, ainsi que la liberté d'expression, d'assemblée et de réunion, notamment à l'issue des événements tragiques des 20 et 21 juillet 2011 lorsque les forces de l'ordre avaient tiré sur des manifestants, faisant une vingtaine de morts.  Les principes et dispositions du Pacte ont été incorporés dans la Constitution, qui est l'unique moyen de transposer le Pacte dans la législation nationale.  Néanmoins, faute de ressources financières adéquates, les réformes n'ont pas encore pu être menées, notamment s'agissant de la révision de la loi sur l'homosexualité.  Un débat est en cours aussi sur la question plus vaste des droits des minorités, qui jouissent désormais de la liberté d'exercer leurs droits.
 
La délégation était également composées de l'Ombudsman, la juge Tujilane Chizumila; le Avocat principal de l'État, M. Pacharo Kayira; le Chef adjoint de la réforme juridique de la Commission du droit, M. Chisazo Nyirongo; le Commissaire de la Commission des droits de l'homme, M. Marshal Chilenga; ainsi que des représentants de cette Commission, de la police nationale, du système judiciaire, du Ministère des affaires étrangères.  Elle a présenté des réponses aux questions qui lui étaient posées par les experts s'agissant notamment de la question de l'application de la peine de mort; des pratiques traditionnelles affectant en particulier les veuves et les fillettes; des suites données aux incidents lors des manifestations de juillet 2011 et les allégation d'usage excessif de la force par la police; des conditions de détention; de la liberté de la presse; de la liberté de religion, s'agissant en particulier de la communauté rastafari.
 
Les membres du Comité ont déploré que les réponses fournies par la délégation soient partielles ou inexistantes sur plusieurs sujets, notamment sur la liberté d'expression et le sort de journalistes détenus.  Ils ont axé leurs questions sur les conditions de détention et les voies de plaintes et de recours des détenus, les mesures prises face à la dramatique prévalence du HIV/sida au Malawi.  La violence domestique, le rite du «nettoyage sexuel» et la coutume du lévirat imposée aux veuves, le mariage des enfants, la dépénalisation de l'avortement, les exécutions sommaires, la question de la peine de mort ont également suscité les préoccupations des experts.  Bien qu'il lui reste encore beaucoup à faire, le Malawi a parcouru un long chemin depuis la dictature, a déclaré en conclusion le Président du Comité, M. Nigel Rodley, qui a toutefois remarqué qu'il reste encore bien des points noirs en matière des droits de l'homme au Malawi.
 
Le Comité adoptera, dans le cadre de séances privées, des observations finales concernant tous les rapports présentés au cours de la session, qui seront rendues publiques à la clôture des travaux, le 25 juillet prochain.
 
 
Le Comité entamera cet après-midi l'examen du rapport de la Géorgie (CCPR/C/GEO/4).
 
 
Présentation du rapport
 
Présentant le rapport du Malawi (CCPR/C/MWI/1) MME JANET BANDA, Avocate générale et Secrétaire à la justice au Ministère de la justice, a déclaré que le Pacte international relatif aux droits civils et politiques a été ratifié en 1993 et donné un aperçu du processus d'élaboration du rapport sous la houlette d'une équipe spéciale présidée par le Ministère de la justice.  Cette équipe spéciale est composée de représentants de différents ministères, d'organes constitutionnels comme la Commission des droits de l'homme, le Bureau du médiateur et les organisations de la société civile.  La plupart des membres de cette commission font partie de la délégation venue à Genève. 
 
Le Malawi vient de tenir, au mai dernier, ses premières élections tripartites pour élire un président, des députés et des conseillers municipaux, ce qui a permis une nouvelle période de transition pacifique.  Le pays a fait d'immenses progrès en matière de promotion et de protection des droits, plus spécifiquement, les droits et libertés des minorités, des personnes handicapées, des femmes, ainsi que pour protéger la liberté d'expression, d'assemblée et de manifestation. 
 
Mme Banda a aussi souligné que, même si les comportements homosexuels restent une infraction en vertu de la loi, les forces de l'ordre ne poursuivent plus pour ce motif.  La Commission du droit va constituer une commission du droit spéciale pour réviser la loi sur l'homosexualité.  Un débat est en cours aussi sur la question plus vaste des droits des minorités, qui ont désormais l'espace et la liberté d'exercer leurs droits.
 
Une loi sur l'égalité des sexes a été adoptée en 2013 qui intègre certains aspects de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes.  Une commission du droit examine actuellement la loi sur l'avortement, tandis qu'une autre se penche sur la loi sur la violence domestique. 
 
Une loi sur les droits des personnes handicapées a également été adoptée, intégrant les principales dispositions de la Convention des Nations Unies sur les droits des personnes handicapées.
 
L'Avocate générale du Malawi, qualifiant de tragiques les événements des 20 et 21 juillet 2011 lorsqu'une vingtaine de personnes ont été tuées durant des manifestations, a indiqué que les manifestations de déroulent désormais pacifiquement grâce à l'adoption d'une loi les régissant.
 
Présentant des réponses à la liste de points adressée à son Gouvernement par le Comité, Mme Banda a expliqué que les principes et dispositions du Pacte ont été incorporés aux chapitres 3 et 4 de la Constitution.  La Commission nationale du droit a été créée aux fins d'intégrer systématiquement les instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme.  De fait, la Constitution fournit un moyen unique d'intégrer le Pacte international dans la législation nationale.  L'Avocate générale a toutefois souligné que le manque de ressources est un problème récurrent pour toutes les commissions du droit au Malawi.
 
De la même façon, et malgré une volonté politique, la question de la discrimination à l'égard des lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres n'a pas été examinée faute de ressources financières et de statistiques à analyser.  Cependant, la procédure constitutionnelle a été suivie et en 2011 et 2012, plusieurs administrations ont réexaminé les lois pénalisant l'homosexualité en vue d'une réforme.  Ces nouveaux textes de lois ont été transmis à la Commission du droit en vue d'une large consultation nationale afin de recueillir les vues de tous les secteurs de la société, en particulier des organisations de base.
 
Mm Banda a indiqué que la loi sur l'égalité des chances, qui vient d'entrer en vigueur, érige en infraction toute discrimination à l'égard des femmes.  Elle a annoncé qu'en 2011, une loi a été adoptée sur l'immobilier et l'héritage.  Elle a par ailleurs indiqué que le changement de l'âge minimum du mariage nécessite l'organisation d'un référendum. 
 
Au sujet des cas de Fanikizo Phiri, tué par un fonctionnaire de police au cours d'une manifestation d'étudiants, Mme Banda a reconnu qu'il n'y a pas eu de poursuites ni d'arrestations à l'époque et souligné que, compte tenu du temps écoulé depuis les faits, survenus en décembre 2001, il est peu probable que cette affaire soit élucidée.  S'agissant du décès en septembre 2011 de l'étudiant Robert Chasowa, retrouvé mort sur le campus de son université, une enquête inadéquate a été menée et les autorités n'ont pu arriver à une conclusion, a confirmé Mme Banda, qui a précisé que la police a été appelée à entamer une nouvelle enquête.  Enfin, trois policiers ont été inculpés dans l'affaire d'Edison Msiska (décédé en janvier 2012 dans un poste de police). 
 
L'Avocate générale du Malawi a indiqué que les recrues des forces de sécurité bénéficient désormais d'une formation sur le traitement des prisonniers et qu'un manuel ainsi qu'un ouvrage de référence sur les droits de l'homme ont été préparés pour les agents de police.  Plus important, un nouveau projet de loi sur la police permet aux citoyens de procéder à des inspections des conditions de détention à travers des comités. 
 
Mme Banda a ajouté, par ailleurs, que le pays ne disposait toujours pas de textes législatifs ni de projet de loi visant à la pénalisation du viol conjugal.  Elle a signalé qu'en 2010, un amendement constitutionnel avait été approuvé pour permettre à l'État de «décourager activement le mariage de personnes de moins de 15 ans».  Le projet de loi propose de relever cet âge à 18 ans.  Enfin, la Commission du droit a achevé le rapport relatif à l'examen du projet de loi sur l'adoption afin d'introduire des dispositions visant à la protection d'enfants adoptés par des étrangers. 
 
Questions et observations des membres du Comité
 
Un membre du Comité s'est enquis des résultats concrets de la réforme des diverses lois mentionnées sur l'avortement et la violence familiale.  Un autre membre du Comité s'est enquis du statut juridique du Pacte dans le cadre juridique interne, d'autant plus que le Comité examine le rapport initial du Malawi, et sur une potentielle loi de dépénalisation de l'avortement. 
 
Une experte s'est penchée sur les pratiques préjudiciables aux femmes, comme le lévirat, et rappelé la recommandation du Comité d'en poursuivre les coupables et de les condamner.  Or, le Malawi se contente de déclarer que le parlement va adopter une loi sur les questions familiales, le mariage et le divorce.  Les réponses de l'État partie ne portent absolument pas sur les préoccupations du Comité, a-t-elle vivement déploré, rappelant qu'elle a elle-même vécu au Malawi et a été témoin de telles pratiques en zone rurale.  Elle a demandé quelles mesures sont prises pour transmettre le message selon lequel le rite du «nettoyage sexuel» (Kusudzula) et les pratiques nuisibles aux veuves sont inacceptables.
 
L'experte a regretté le manque d'informations sur les personnes victimes de la traite et s'est félicitée, par contre, qu'un projet de loi prévoie la prison à vie pour les auteurs du trafic d'enfants en particulier.  Elle a souhaité savoir si le Gouvernement était prêt à accélérer l'adoption de la loi de lutte contre la traite.
 
Un autre membre a salué le moratoire sur la peine de mort proclamé en 2010 suite à une décision de la Cour suprême, et a voulu savoir combien de peines ont été commués depuis.  Il a aussi demandé quels sont les crimes pour lesquels la peine de mort a été imposée après cette décision.  Le moratoire sera-t-il prorogé et, si oui, dans quel cadre juridique, a-t-il demandé.  Un autre expert a demandé à connaître le nombre actuel de personnes condamnés à mort.  Combien de temps les condamnés à mort restent-ils dans le couloir de la mort, a demandé de son côté le Président du Comité,
 
Un expert s'est dit troublé par la réponse sur les affaires concernant les décès de deux étudiants, Fanikizo Phiri et Robert Chasowa.  S'agissant de cette dernière affaire, la police a délibérément caché la vérité, a-t-il commenté, en pointant du doigt le manque de volonté politique pour mener des enquêtes objectives sur toutes ces affaires et sur toutes les situations impliquant des agents de police qui ont tiré sur des manifestants ou assassiné des personnes.
 
L'expert s'est ensuite enquis des conditions dans les centres de détention et les prisons.  Un de ses homologues a voulu savoir quand les commissions locales sur les agissements de la police et sur les visites des centres pénitentiaires seront mises sur pied.  Un autre expert a demandé des renseignements sur les délais de détention préventive.  Un autre encore a noté qu'il y a eu 49 décès en 2013 dans les prisons et a voulu savoir si les détenus pouvaient s'adresser à un mécanisme de plaintes sur leurs conditions de détentions.  Le Président du Comité s'est aussi intéressé à l'inspection des prisons et aux rapports sur ces visites, en se demandant si leur contenu est rendu public.
 
Un membre du Comité a souligné qu'il est encore fait état de mutilations génitales féminines dans le pays, notamment dans des zones reculées, alors que l'État partie a déclaré que cette pratique avait disparu.  La discrimination envers les albinos a été abordée par un autre membre du Comité, qui a demandé à la délégation de fournir des précisions sur la situation des albinos au Malawi.  Une experte a salué la volonté politique manifeste des autorités malawiennes s'agissant des pratiques discriminatoires à l'égard des veuves mais a souhaité des précisions de la part de la délégation sur les mesures qui ont été prises. 
 
Cette experte a aussi voulu savoir si la police effectue des enquêtes sur la violence domestique.  Certaines informations font état d'une double victimisation des femmes, qui sont violentées par la police lorsqu'elles portent plainte pour violence domestique.  Le Président a demandé à la délégation s'il est vrai, comme l'indiquent les organisations de la société civile, que la problématique du viol conjugal n'est pas prise en compte au Malawi. 
 
Cette experte a aussi demandé si un ensemble de services sont offerts aux victimes de la traite des personnes.  Elle a mis l'accent sur les enfants qui font l'objet de traite vers les pays voisins pour y être forcé à travailler.
 
Un autre expert a voulu connaître la réaction du Malawi s'agissant du report de la décision du Comité international de coordination des institutions nationales s'agissant de l'octroi du statut A à la Commission nationale des droits de l'homme.  Quel rôle le Gouvernement envisage-t-il pour la Commission nationale des droits de l'homme et comment l'opinion publique sera informée des résultats du dialogue avec les membres du Comité, a voulu savoir un autre expert. 
 
Le Malawi pâtit d'une pénurie de juges ce qui fait que des personnes peuvent passer de nombreuses années en détention avant leur jugement.  Le pays connaît en outre un renchérissement important des honoraires des avocats de la défense, a remarqué un membre du Comité, ajoutant que le bureau d'aide juridique est confronté à un manque de ressources, ce qui le rend pratiquement obsolète.  Un membre a voulu avoir des précisions sur le rôle et la place des témoins dans le système judiciaire.
 
Certains auteurs de meurtres n'ont pas été traduits en justice et lorsqu'il y a eu procès, ils ont débuté avec beaucoup de retard, a relevé un membre du Comité.  Il s'est demandé si des sanctions sont prévues à l'encontre des personnes responsables de tels retards et manquements au bon fonctionnement de la justice. 

Selon certaines informations, les fidèles rastafari sont l'objet de discriminations dans le secteur privé et ne peuvent y trouver d'emploi.  En outre, certains établissements scolaires les forcent à se couper les cheveux ou ne les admettent pas. 
 
L'expert a aussi relevé que 26% des enfants de 5 à 14 ans travaillent, dont 86% sont scolarisés.  Il a déploré l'absence de réponse de la délégation sur le nombre d'enfants des rues. 
 
D'après le rapport, une loi a été promulguée en 2012 sur les droits des personnes handicapées et un membre du Comité a demandé si un mécanisme de suivi de cette loi avait été mis en place. 
 
D'autre part, le Comité des droits de l'homme, qui a adopté par le passé une recommandation sollicitant l'abrogation de la loi permettant au Président d'interdire des journaux, l'expert s'est enquis de la situation de la liberté de la presse et fait allusion à des cas d'intimidation et d'arrestation de journalistes.  Qu'est-il advenu des journalistes de la radio indépendante Galaxy, qui aurait diffusé des informations relatives à la corruption qui entache le gouvernement et dont le nom ne figure pas sur la liste des noms fournie par le Malawi dans ses réponses écrites?  L'expert a aussi invité le pays à dépénaliser la diffamation.
 
Entre le légal et l'arbitraire, il n'y a qu'un pas, a renchéri une experte du Comité, qui s'est interrogée sur les conditions de perquisition, souvent effectuées sans mandat. 
 
Un autre expert a exprimé sa profonde compassion face à l'ampleur et à la gravité de la prévalence de la pandémie du VIH/sida et fortement appuyé les efforts considérables du Gouvernement pour s'attaquer à ce problème qui grève son économie et ses forces vives.  À cet égard, il a posé des questions sur les dispositions relatives au dépistage obligatoire, à la prévention et au traitement, ainsi qu'à la divulgation des informations concernant les patients. 
 
S'agissant de l'enquête sur les abus commis lors des manifestations de juillet 2011, l'expert a relevé qu'aucune condamnation n'a été prononcée pour les manquements constatés de la part des forces de sécurité.  Il a demandé des précisions sur l'issue des travaux de la Commission d'enquête et du sort de ses conclusions (paragraphe 74 du rapport du Malawi).
 
En ce qui concerne ce que la délégation qualifie de «leçons tirées» des manifestations de juillet 2011, un expert s'est interrogé sur les situations dans lesquelles, aux termes de la nouvelle loi, les services de l'ordre sont habilités à recourir à la force.  D'autre part, des personnes détenues par erreur ont-elles été indemnisées?
 
Un autre membre a largement cité le rapport d'Amnesty International d'avril 2014 qui exhortait la présidence du Malawi à exprimer publiquement son appui à l'adoption rapide de la loi sur les questions familiales, le mariage et le divorce, qui comporte d'importantes mesures de protection contre le mariage des enfants.  Il a décrit la coutume du «nettoyage» des filles qui «se préparent pour leurs maris»; dans certains cas, des parents vont jusqu'à payer les services d'hommes adultes pour une initiation sexuelle de leurs filles auxquelles il est interdit de se servir de préservatifs, en raison de croyances culturelles profondément ancrées.  Conséquemment, les grossesses précoces qui en résultent forcent les filles au mariage.
 
Plusieurs milliers de demandes d'asile sont en souffrance sous prétexte que leurs pays d'origine n'étaient pas en guerre, a déclaré un autre membre du Comité, en sollicitant des précisions à ce sujet.
 
Un membre du Comité a fait état de préoccupations s'agissant d'un projet de loi sur l'Internet et du risque de censure que son adoption pourrait comporter.  Il a invité le Malawi à veiller à ce que les droits et libertés fondamentales soient respectés en ligne.
 
Réponses de la délégation
 
La délégation du Malawi a expliqué que le pays a rencontré des difficultés et retards dans la mise en œuvre du Pacte du fait du décès de l'ancien président et du changement de direction politique.  S'agissant de l'intégration des dispositions des instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme, il existe une procédure exigeant l'approbation d'un texte de loi pour l'inclusion dans la législation nationale de chaque instrument auquel le Malawi a souscrit.  C'est ainsi que plusieurs lois récentes, comme celle sur l'égalité des sexes, sur les droits des handicapées ou de l'enfance, ont été révisées et adoptées.  Au fil du temps, toutes les dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques seront appliquées et, en cas de lacunes, des procédures particulières seront envisagées par le biais de divers organismes selon les recommandations qui seront émises.
 
Le rapport initial du Malawi au Comité des droits de l'homme est une nouveauté mais le Gouvernement jouit d'une expérience plus ancienne avec d'autres organes conventionnels chargés de l'application d'instruments auxquels il est partie, a poursuivi la délégation.  Le Malawi a besoin de s'assurer qu'il s'engage de manière permanente avec toutes les parties prenantes dans le processus d'élaboration, de soumission et de présentation du rapport.  La délégation a souligné qu'il s'agissait d'un processus continu et a assuré que le travail ne s'arrêtait pas à la présentation du rapport initial.  
 
La question de la peine de mort est sur la table des discussions depuis 2004 et la délégation a indiqué qu'elle fournirait ultérieurement des statistiques sur le nombre des personnes condamnées.  Le Gouvernement compte charger la Commission des grâces de commuer cette peine.
 
La Commission nationale des droits de l'homme est une institution étatique consultative financée par l'État mais ne dispose pas de fonds suffisants.  Son travail est un processus progressif, qui prend en considération les priorités que la Commission s'est fixée.  À ce jour, elle a élaboré six rapports sur les questions qui correspondent aux préoccupations du Comité dans le cadre de l'intégration des droits de l'homme dans la culture nationale.  Une nouvelle proposition visant à rendre la Commission totalement indépendante s'inscrit dans une nouvelle démarche relative à la promotion et la protection des droits civils et politiques au Malawi.  Des propositions de réforme de cette Commission ont été formulées au lendemain des élections de mai dernier, et son statut est en suspens.
 
La loi sur l'égalité des sexes reconnaît le droit à la santé sexuelle et génésique et interdit tous les comportements et toutes les pratiques préjudiciables à la femme, y compris en tenant compte des risques de transmission du VIH/sida.
 
Les pratiques traditionnelles contre les veuves ne sont pas perçues comme normales et sont désormais rejetées, a assuré la délégation.  L'interdiction législative de ces pratiques émane du principe d'égalité hommes-femmes et de protection des veuves.  La délégation a reconnu que la pratique du «nettoyage des veuves» est une pratique préjudiciable; elle n'était pas interdite avant 2014 et c'est pourquoi aucune affaire n'a encore été portée devant les tribunaux.  Il y a eu un travail d'éducation civique sur l'ensemble du territoire pour sensibiliser la population sur les méfaits de cette pratique.  Les «nettoyeurs», appelés hyènes, ont été particulièrement sensibilisés et font partie des acteurs de la campagne de sensibilisation.  La délégation a précisé que cette pratique est sanctionnée pénalement.  La question des mutilations génitales féminines est également à l'étude dans le cadre de la loi sur l'égalité des sexes.
 
En réponse à des questions sur la pratique du dépucelage des filles avant mariage, également associé au rite du «nettoyage», la délégation a expliqué qu'en vertu de plusieurs textes de loi, il s'agit d'un acte illégal et d'un abus sexuel.  Plusieurs dispositifs ont été mis en place en vue de la prise en charge de l'enfant et de sa protection par le système judiciaire.  Des arrangements administratifs ont également été adoptés au sein des commissariats par le biais d'agents de police spécialement formés à la protection des enfants au sein de la communauté. 
 
Les données sur la violence domestique sont rares, a reconnu la délégation, qui a ajouté que la loi est en passe d'être révisée dans le contexte de la réforme du code pénal.  Elle a par la suite précisé que les forces de sécurité et autres services concernés sont chargés de la procédure d'investigation des incidents de violence familiale, dont les victimes sont des femmes mais parfois aussi des hommes.  Les obstacles au signalement des incidents de violence au foyer vont de la crainte de représailles, à l'effondrement de la cellule familiale en passant par des raisons d'ordre financier et économique. 
 
La Commission nationale des droits de l'homme encourageait un débat sur l'homosexualité et la délégation a indiqué qu'elle n'avait pas reçu d'informations sur des discriminations à l'égard des homosexuels.
 
La délégation a aussi souligné que les organisations non gouvernementales jouent un rôle déterminant dans les tribunaux itinérants, qui sont un outil très utiles dans la gestion de la surpopulation carcérale.  Le délai maximal de détention provisoire est de 124 heures en cas d'homicide. 
 
L'inspection des prisons est présidée par un juge de la Cour suprême et n'est pas seulement annuelle.  Elle est complétée par d'autres visites d'organes chargés spécifiquement de l'inspection des lieux de détention.  Les conditions de détention font l'objet de la surveillance de la Commission des visites et veille, notamment, à la séparation des mineurs des adultes et des prisonniers par sexe.  Les détenus doivent passer par leurs proches et leurs avocats pour présenter leurs plaintes et doléances.  Le président de l'inspectorat, qui est un magistrat de la Cour suprême du Malawi, peut accorder sa caution pour que des mesures soient prises.  Les rapports de l'inspectorat sont rendus publics.  Ainsi, suite à des plaintes, une disposition de l'inspectorat a permis d'améliorer la fourniture d'électricité dans les prisons.  Par ailleurs, des rapports annuels et des rapports ad hoc sont préparés pour tous les aspects liés à la détention et aux lieux de détention.  Dans le cadre de la réforme du système carcéral, les pouvoirs publics ont fait bon usage de certaines des recommandations figurant dans ces rapports.
 
Concernant les manifestations des 20 et 21 juillet 2011, la police a regretté les décès mais ces incidents ont permis de tirer un certain nombre de leçons.  Une commission d'enquête a établi que la police était mal équipée par manque de financement; soixante officiers de police de plusieurs rangs ont été arrêtés et licenciés.  Le Gouvernement veillera à la poursuite de ces enquêtes avec les moyens nécessaires.  Un partenariat avec des spécialistes irlandais a ouvert une nouvelle étape dans cette démarche. 
 
La délégation a par la suite expliqué que la Commission d'enquête sur la promotion du droit à la liberté d'assemblée pacifique a travaillé à plusieurs niveaux et avec divers organismes impliqués dans les questions liées aux manifestations.  Concernant les manifestations de juillet 2011 pour protester contre les hausses du coût de la vie, la délégation a souligné que la plupart des procédures n'ont pas été respectées ni par les organisateurs ni par les services de police.  À l'évidence, il y a eu abus et un usage excessif de la force par la police, a admis la délégation, qui a indiqué que, depuis ces faits, toutes les manifestations se tiennent dans le calme car toutes les parties ont travaillé de concert pour une bonne gestion des mouvements de foule.  Il ressort de cette expérience qu'au départ, les manifestants ont des réunions pacifiques mais que certains peuvent avoir des objectifs cachés, et que les mouvements de foule peuvent dégénérer très rapidement. 
 
Il existe des circonstances exceptionnelles qui justifient l'usage des armes par la police, mais si certains policiers ne respectent pas le protocole établi, ils sont passibles de sanctions administratives et de poursuites judiciaires, a déclaré la délégation.  La question est également de savoir quand et dans quelle mesure les agents de police peuvent avoir recours à l'usage des armes à feu.  En règle générale, lorsque la vie de l'agent ou d'autres personnes est en danger immédiat, en cas de fuite du contrevenant en dépit des sommations, l'agent peut se servir de son arme pour neutraliser le contrevenant mais en aucun cas pour le tuer.  À cet égard, dans le contexte des manifestations, la police doit veiller à leur bon déroulement. 
 
Hormis la loi de 2010 sur la protection de l'enfance, il n'existe pas de cadre législatif de lutte et pénalisation de la traite des personnes, a reconnu la délégation.  Des structures consacrées à d'autres objectifs, comme les foyers pour les femmes aménagés par le Ministère des femmes, accueillent également des victimes de la traite.  Le Malawi s'efforce d'aborder cette problématique d'une manière exhaustive impliquant plusieurs organismes publics.
 
La peine de mort a été imposée récemment dans l'affaire d'un meurtre atroce et les juges ont estimé que l'auteur devait être condamné à mort.  La Cour suprême s'inspire de la Common Law, surtout en ce qui concerne les circonstances aggravantes.  La trahison, l'homicide volontaire et le vol aggravé sont quelques uns des crimes graves passibles d'une sentence de mort.  La délégation a indiqué que les autorités sont en train de collecter les données dans les différents districts du pays pour établir une liste des condamnés à mort. 
 
Répondant à une nouvelle série de questions, la délégation a attiré l'attention sur l'adoption d'une loi établissant une institution d'aide juridique qui bénéficiera de ressources étatiques et prévoyant des partenariats avec les organisations de la société civile, qui devront avoir été accréditées au préalable.  D'autre part, un partenariat avec Irish Aid a été conclu pour rattraper les arriérés dans les affaires et accélérer les procès. 
 
Les chefs d'accusation contre le journaliste de radio Galaxy ont été annulé et il a été relaxé et indemnisé, a répondu la délégation à la question complémentaire d'un membre du Comité.  Un total de 77 licences a été octroyé aux médias, dont 16 à des chaînes de télévision privées.  La délégation a ensuite renvoyé aux réunions tripartites avec les médias publics dans le cadre du suivi du bon déroulement des processus électoraux.  Le Malawi est dans une période de transition et cherche un équilibre entre les médias privés et publics, a déclaré la délégation, soulignant que la MBC (le réseau d'État de radio et de télédiffusion) fait l'objet d'une concurrence féroce.
 
Le Gouvernement a pris note des préoccupations exprimées sur la discrimination à l'égard de la communauté rastafari et entend mettre en place des stratégies afin de remédier à cette problématique.  Elle a reconnu le droit de cette communauté à la liberté de religion et de conviction ainsi qu'à ne pas être l'objet de discrimination.  Elle a aussi pris bonne note des recommandations sur les droits religieux et sur les tensions religieuses dans certaines régions du pays, notamment à Mungushi.
 
Bien que l'éducation soit aujourd'hui obligatoire, certains enfants travaillent alors qu'ils sont encore trop jeunes, a reconnu la délégation, qui a fait valoir que le Gouvernement œuvre au renforcement des textes législatifs pour mieux les protéger.  Elle a aussi souligné qu'il existe de nombreuses familles dont le chef est un enfant et qu'il faut lui offrir à la fois la possibilité de subvenir aux besoins de sa famille mais aussi de fréquenter l'école.
 
Une politique a été adoptée pour favoriser le maintien des fillettes à l'école.  Le Ministère de l'égalité hommes-femmes et d'autres ministères travaillent ensemble pour lutter contre les pratiques préjudiciables aux filles et en vue de leur scolarisation. 
 
Les efforts menés pour prévenir le viol conjugal sont axés sur la prévention.  Cette problématique ne fait pas partie de loi sur l'égalité des sexes mais a été évoquée au cours des consultations.  Elle sera traitée en tenant compte des opinions émises par différents protagonistes.  Le viol est par contre une infraction prévue par la loi sur les relations familiales, le mariage et le divorce.
 
Pour la délégation, la question qui a été posée s'agissant de la perquisition sans mandat a une connotation politique mais elle a assuré que le Gouvernement s'y est intéressé et a constaté que la réglementation en vigueur est satisfaisante; il s'agit maintenant de veiller à ce qu'elle soit effectivement respectée. 
 
La séparation des inculpés et les personnes en garde à vue est obligatoire, conformément aux instruments internationaux dans le domaine, et le Malawi a fait des efforts pour la respecter mais des personnes appartenant à ces deux catégories sont souvent maintenues dans le même lieu faute de place.
 
La Commission nationale sur le VIH/sida a procédé à un examen d'envergure nationale sur la pandémie et présenté son rapport au Ministère de la justice.  Ces consultations ont aussi associé la société civile et les personnes séropositives, qui ont été satisfaites des recommandations formulées en vue de la rédaction d'un projet de loi.  D'autres amendements et propositions peuvent être encore soumis au cabinet.
 
Le Ministère de l'égalité hommes-femmes s'efforce de recueillir, avec la collaboration de l'organisation non gouvernementale SOS, des données sur les enfants de la rue en vue de les identifier et de faciliter leur placement dans des foyers.
 
Le retard dans le traitement des demandes d'asile est en passe d'être rattrapé et il est essentiel d'envisager une réforme pour faire face aux nouvelles réalités. 
 
La délégation a déclaré que les réponses aux questions sur l'application de la loi sur les droits des personnes handicapées, l'accès à l'information, la responsabilité au civil et au pénal, et la détention des journalistes, exigeaient davantage de consultations et seraient transmises ultérieurement au Comité.
 
Conclusions
 
MME BANDA a reconnu que la délégation du Malawi n'avait pas été en mesure de répondre à certaines questions et s'efforcera de le faire dans les meilleurs délais.  Ce dialogue permettra à la délégation de rentrer riche de nombreux conseils sur les voies et moyens de mise en œuvre des articles du Pacte, a conclu l'Avocate générale du Malawi.
 
M. NIGEL RODLEY, Président du Comité des droits de l'homme, a conclu que le Malawi a parcouru un long chemin depuis la dictature, mais qu'il lui reste encore beaucoup à faire.  Il a souligné qu'il y a encore bien des points noirs en matière des droits de l'homme au Malawi, évoquant en particulier les débordements tragiques des manifestations de juillet 2011.  Il a encouragé la délégation à fournir au Comité des exemplaires des rapports sur l'inspectorat des centres de détention et de la législation sur la police, de manière à des montrer que ces documents sont effectivement disponibles pour le public.  Il s'est de nouveau dit sceptique quant au bien-fondé de l'usage des armes à feu par les services de sécurité lors de ces manifestations. 
 
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