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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ CONTRE LA TORTURE ENTAME L'EXAMEN DU RAPPORT INITIAL DU COSTA RICA

10 Mai 2001



CAT
26ème session
10 mai 2001
Matin





Le Comité contre la torture a entamé, ce matin, l'examen du rapport initial du Costa Rica sur les mesures prises par ce pays pour se conformer aux dispositions de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Présentant le rapport de son pays, Mme Nora Ruiz de Angulo, Représentante permanente du Costa Rica auprès des Nations Unies à Genève, a rappelé que l'abolition de l'armée en 1949 a permis au Costa Rica d'investir une grande partie de son budget dans le secteur social, en particulier dans le développement humain, de sorte que le pays dispose aujourd'hui d'un vaste cadre juridique et constitutionnel pour la protection de la vie humaine et le respect des libertés civiles et politiques. Pour faire face aux besoins créés par l'augmentation de 156% de la population carcérale ces dernières années, le Ministère de la justice consacre cette année environ 7 millions de dollars à la construction et à la rénovation d'établissements pénitentiaires, a-t-elle indiqué.

Le rapport de 2001 du bureau du Défenseur du peuple constate une évolution positive, ces derniers temps, de l'attitude des autorités pénitentiaires, a par ailleurs fait valoir Mme Ruiz de Angulo. Elle a souligné que les quelques cas isolés d'abus de pouvoir et de mauvais traitements qui ont été dénoncés ont fait l'objet de sanctions administratives et judiciaires appliquées avec toute la rigueur de la loi.

M. Alejandro González Poblete, rapporteur du Comité chargé de l'examen du rapport du Costa Rica, s'est étonné que le Costa Rica n'ait pas fait les déclarations prévues dans la Convention pour reconnaître la compétence du Comité pour recevoir et examiner des plaintes. Il s'est en outre inquiété de l'autorisation qui aurait été donnée par le Président de la République d'ouvrir le feu sur toute personne détenue qui chercherait à s'évader.

Le corapporteur du Comité pour l'examen du rapport costaricien, M. Ole Vedel Rasmussen, a noté que le Costa Rica semblait soumettre les candidats au recrutement dans les forces de police à un questionnaire calqué sur celui utilisé par les forces armées des États-Unis pour le recrutement des soldats.


La délégation costaricienne répondra demain après-midi, à 15h30, aux questions qui lui ont été adressées ce matin. Cet après-midi, à 15 heures, le Comité présentera ses conclusions et recommandations concernant la Bolivie avant de poursuivre l'examen du rapport du Kazakhstan.


Présentation du rapport du Costa Rica

Présentant le rapport de son pays, MME NORA RUIZ DE ANGULO, Représentante permanente du Costa Rica auprès des Nations Unies à Genève, a rappelé que l'abolition des forces militaires en 1949 a permis au Costa Rica d'investir une grande partie de son budget dans le secteur social, en particulier dans le développement humain. Le Costa Rica dispose donc aujourd'hui d'un vaste cadre juridique et constitutionnel pour la protection de la vie humaine et le respect des libertés civiles et politiques. La Constitution politique, dans son article 40, interdit toute forme de torture et cette disposition a été efficacement respectée tant au niveau juridique et institutionnel qu'au niveau des forces de police.

Mme Ruiz de Angulo a souligné que l'article 48 de la Constitution costaricienne prévoit les recours en amparo et en habeas corpus qui sont examinés par une chambre spéciale, la Chambre constitutionnelle, créée en 1989. La population pénale du pays a augmenté de 156% ces dernières années, passant de 3698 détenus en 1994 à 9491 en 2000, a-t-elle précisé. Pour faire face aux besoins créés par cette situation, le Ministère de la justice a consacré, dans le budget national de 2001, environ 7 millions de dollars à la construction et à la rénovation d'établissements pénitentiaires.

Selon le rapport de 2001 du bureau du Défenseur du peuple, deux plaintes pour abus physique et quatre plaintes pour abus psychologiques dans des établissements pénaux avaient été reçues jusqu'au mois d'août de l'an dernier. Ce rapport constatait une évolution positive, ces derniers temps, de l'attitude des autorités pénitentiaires.

La Représentante permanente du Costa Rica a par ailleurs insisté sur le fait que l'article 12 de la Constitution politique de son pays interdit l'existence d'une armée dans le pays et délègue la sécurité à une force publique à caractère civil. La constante des corps de police du pays reste le respect absolu des droits et de la dignité humaine de chaque individu. Les quelques cas isolés d'abus de pouvoir et de mauvais traitements qui ont été dénoncés ont fait l'objet de sanctions administratives et judiciaires appliquées avec toute la rigueur de la loi, a assuré Mme Ruiz de Angulo.


Le rapport initial du Costa Rica (CAT/C/24/Add.7) souligne que le Code pénal actuel du pays ne décrit pas les actes de torture. Cependant, le journal officiel du 2 décembre 1999 a publié un projet de loi visant à ajouter un article au Code pénal définissant la torture en tant qu'infraction. En outre, poursuit le rapport, l'article 7 de la Constitution stipule que «les traités publics, les conventions internationales et les concordats dûment approuvés par l'Assemblée législative ont, à compter de leur promulgation ou du jour qu'ils précisent, une autorité supérieure aux lois». La législation du Costa Rica a mis en place toute une série d'instances qui assurent la protection des droits des personnes privées de liberté, ajoute le rapport. Les instances externes sont la Chambre constitutionnelle qui examine les recours en amparo et en habeas corpus; l'Organisme de défense des habitants; les juges d'exécution des peines; la Commission interaméricaine des droits de l'homme, le Comité des droits de l'homme et d'autres instances des Nations Unies. Le rôle de la Chambre constitutionnelle, qui a été créée il y a dix ans, consiste essentiellement à assurer le contrôle constitutionnel de l'exécution de la peine. De son côté, l'Organisme de défense des habitants possède un service dit «de protection spéciale» qui traite les plaintes formulées par les détenus, les membres de leurs familles, des proches, des particuliers ou des organisations non gouvernementales s'occupant des droits de l'homme pour ce groupe de la population.

Indépendamment des fonctions qu'exercent les corps de police nationaux, des entreprises, des communautés urbaines et des particuliers ont de plus en plus recours à des gardes ou policiers privés. Les agents de sécurité sont seulement chargés de protéger par tous les moyens légaux l'intégrité physique des personnes qui les ont recrutés ainsi que leurs biens, et de protéger toutes les personnes se trouvant dans la zone placée sous leur responsabilité. Il est interdit à ce corps de sécurité de détenir, de réquisitionner ou de priver de liberté de quelque manière que ce soit un tiers, sauf en cas de flagrant délit. La surveillance de ce corps de sécurité incombe à la Direction des services privés de sécurité dépendant du Ministère de la sécurité publique. Les corps de sécurité privés peuvent seulement utiliser les armes autorisées, à savoir les pistolets, les revolvers, les carabines, les fusils et les armes de chasse d'un calibre compris entre 5,6mm (calibre 22) et 18,5mm (calibre 12) qui ne peuvent tirer en rafale ou à répétition plus d'un projectile, qui ne sont pas pourvus d'un dispositif de tir automatique ni d'un dispositif leur permettant de lancer des projectiles explosifs. En mai 1999, quelque 235 entreprises occupant 50 étrangers et 4 800 Costariciens étaient enregistrées à la Direction des services privés du Ministère de la sécurité publique.

Selon les données statistiques pour l'année 1999, l'effectif total de la population pénitentiaire était de 7 676 personnes contre 5 821 en 1998 et 5 454 en 1997. La population pénitentiaire du Costa Rica est passée de 3 375 à 8 526 personnes entre 1992 et 1999, soit une augmentation de 155% en sept ans, ce qui représente l'augmentation la plus importante d'Amérique latine. En ce qui concerne les décès survenus dans le système pénitentiaire national au cours des cinq dernières années, leur nombre s'élève à 72 (24 homicides, 13 suicides, 29 morts naturelles et 7 morts accidentelles).


Examen du rapport du Costa Rica

M. ALEJANDRO GONZÁLEZ POBLETE, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport du Costa Rica, a relevé que le Costa Rica n'a pas fait les déclarations prévues aux articles 21 et 22 de la Convention par lesquelles il reconnaîtrait la compétence du Comité pour recevoir et examiner des plaintes émanant de particuliers ou de pays tiers. Le Costa Rica reconnaît en revanche la compétence, en matière de contentieux, de la Cour interaméricaine des droits de l'homme dont il abrite le siège. Or, en ratifiant la Convention interaméricaine de prévention de la torture, le Costa Rica a adhéré à un instrument international qui offre une protection plus vaste contre la torture que celle qu'offre la Convention contre la torture. Il est donc étonnant que le Costa Rica n'ait pas fait les déclarations prévues aux articles 21 et 22 de ce dernier instrument.

M. González Poblete a regretté l'absence de définition pénale de la torture dans le pays et a regretté que le Code pénal costaricien ne criminalise pas la torture. Il a cependant relevé qu'un projet de loi est actuellement à l'étude au Costa Rica qui entend assurer la protection pénale contre la torture en visant tous les auteurs de torture, qu'ils soient fonctionnaires publics ou simples particuliers. Il semble toutefois que ce projet de loi n'envisage pas d'aggravation de la peine si la torture a entraîné la mort, a relevé l'expert.

M. González Poblete s'est enquis du délai maximum avant qu'un prévenu soit présenté devant un juge, y compris un prévenu détenu au secret.

L'expert s'est inquiété de l'ordre qu'aurait donné le Président de la République d'ouvrir le feu sur toute personne détenue qui chercherait à s'évader.

M. OLE VEDEL RASMUSSEN, corapporteur pour l'examen du rapport costaricien, a noté que le Comité n'a reçu aucun document émanant d'organisations non gouvernementales en ce qui concerne le Costa Rica, ce qui est probablement un bon signe pour ce pays. Étant donné qu'en général, un grand nombre d'actes de torture commis à travers le monde sont imputables aux forces armées, M. Rasmussen a demandé au Costa Rica de convaincre ses voisins de l'imiter en se passant d'une armée.

M. Rasmussen s'est toutefois enquis des procédures de recrutement des officiers de police au Costa Rica. Il semble en effet que le Costa Rica soumette les candidats au recrutement dans les forces de police à un questionnaire calqué sur celui utilisé par les forces armées des États-Unis pour le recrutement des soldats. M. Rasmussen a insisté sur la différence qu'il y a entre un policier et un soldat.

L'expert a en outre voulu savoir de quel ministère dépendent la police, d'une part, et la police pénitentiaire, de l'autre, et a insisté sur la nécessité de séparer ces deux polices en faisant en sorte qu'elles ne soient pas placées sous une même tutelle.

Le plus grand établissement pénitentiaire du pays, celui de La Reforma, devrait faire l'objet d'une visite hebdomadaire - et non pas semestrielle - du juge d'application des peines, a estimé M. Rasmussen.

Le corapporteur a d'autre part demandé de quelle façon était assurée au Costa Rica l'indépendance du bureau du Médiateur (Défenseur du peuple).

Un autre membre du Comité s'est enquis de la formation reçue par les quelque 5000 gardes de sécurité privés que compte le pays.

Le fait que le Costa Rica ne se soit pas doté d'une définition pénale de la torture l'empêche de présenter avec précision au Comité la situation en ce qui concerne la torture dans le pays puisqu'il n'existe pas de chef d'accusation particulier concernant ce délit, a souligné le Président du Comité, M. Peter Thomas Burns.

Plusieurs membres du Comité se sont inquiétés des informations contenues dans le rapport selon lesquelles pour recourir à la thérapie par électrochoc dans les hôpitaux psychiatriques, il suffit d'avoir obtenu une autorisation générale signée lors de l'admission dans l'établissement. Selon le rapport, «même dans les cas où la famille et le patient lui-même s'y opposent, cette thérapie est appliquée si le ou la psychiatre estime qu'il existe un risque immédiat de suicide».


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