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LA SOUS-COMMISSION DE LA PROMOTION ET DE LA PROTECTION DES DROITS DE L'HOMME TIENT UN DÉBAT SUR SES MÉTHODES DE TRAVAIL

Arrière

19 août 1999

MATIN

HR/SC/99/21
19 août 1999



Elle termine son débat sur les minorités et entame l'examen des questions relatives aux droits de l'homme et l'administration de la justice


La Sous-Commission de la promotion et de la protection des droits de l'homme a tenu, ce matin, un débat sur ses méthodes de travail, question à laquelle elle a accordé, à la demande de la Commission des droits de l'homme, une attention particulière cette année. Elle a également conclu son débat sur les questions relatives aux minorités et commencé l'examen des questions relatives à l'administration de la justice.

La Sous-Commission était saisie d'une étude de M.Asbjørn Eide sur le rôle futur de la Sous-Commission, ses méthodes de travail, la durée de ses sessions, la composition et l'élection de ses membres. L'expert indique, suite à ses consultations avec les membres de la Sous-Commission, que la Sous-Commission souhaite, dans sa majorité, que l'examen des situations par pays se poursuive pour les pays qui ne font pas l'objet d'un examen par la Commission des droits de l'homme. Il souligne également que la Sous-Commission doit se réunir quatre semaines par an pour pouvoir s'acquitter de son mandat. Elle doit en outre maintenir sa composition actuelle de 26membres élus.

M.Marc Bossuyt, M.Paulo Sérgio Pinheiro, M.Louis Joinet, M.Fan Guoxiang et MmeFrançoise Jane Hampson, experts de la Sous-Commission, ont pris la parole sur la question des méthodes de travail, certains exprimant leur préoccupation face à l'initiative visant à inclure des situations de pays dans le résolutions thématiques de la Sous-Commission. Le Pakistan, au nom de l'Organisation de la Conférence islamique, et la Malaisie, au nom de plusieurs autres pays, ont fait des déclarations.

Terminant l'examen des questions relatives à la prévention de la discrimination à l'égard des minorités et la protection des minorités, la Sous-Commission a entendu les déclarations de MM.Asbjørn Eide, Joseph Oloka-Onyango et Louis Joinet. Les pays suivants ont exercé leur droit de réponse à ce titre : Turquie, Estonie, Grèce, Turquie. MmeErica-Irene Daes est intervenue au sujet de la déclaration de la Turquie.
(à suivre)
La Sous-Commission a également entamé son débat sur l'administration de la justice et les droits de l'homme. M.Héctor Fix Zamudio, expert de la Sous-Commission, a présenté son étude sur l'amélioration et l'efficacité des instruments judiciaires pour la protection des droits de l'homme au niveau national et leur impact au niveau international, en soulignant qu'il faut prêter attention aux instruments juridiques internes car la protection des droits de l'homme dépend au premier chef des États.

MM.El-Hadji Guissé et Louis Joinet, experts de la Sous-Commission, ont aussi fait des déclarations sur l'administration de la justice, ainsi que les organisations non gouvernementales suivantes : Internationale des résistants à la guerre, Organisation mondiale contre la torture, Mouvement international pour l'union fraternelle entre les races et les peuples et Fondation Pen. Elles ont dénoncé des cas de détention arbitraire dans de nombreux pays.

La Sous-Commission de la promotion et de la protection des droits de l'homme poursuivra, cet après-midi à 15 heures, l'examen des questions relatives à l'administration de la justice et les droits de l'homme.



Fin du débat sur la prévention de la discrimination à l'égard des minorités et la protection des minorités

M.ASBJØRN EIDE, expert de la Sous-Commission et Président-Rapporteur du Groupe de travail sur les minorités, a affirmé le droit des minorités, y compris, notamment, de la population kurde en Turquie, de s'auto-identifier comme telles. Insistant sur l'intolérance religieuse qui se manifeste à l'encontre des minorités religieuses, M.Eide a affirmé qu'il faudra, à l'avenir, davantage se pencher sur cet aspect des questions relatives aux minorités. Les États devraient être appelés à respecter le caractère pluriel de leur société. À cet égard, les efforts actuellement consentis par le SriLanka doivent être salués.

M.JOSEPH OLOKA-ONYANGO, expert de la Sous-Commission, s'est demandé pourquoi les représentants des États devraient craindre à ce point la quête des minorités pour exercer un «droit» à la sécession. Il s'est interrogé sur l'importance démesurée accordée aux principes d'intégrité territoriale et d'inviolabilité des frontières. L'expert s'est associé à la suggestion faite par MmeIulia Motoc au Groupe de travail sur les minorités de ne pas se pencher exclusivement sur le droit à l'autodétermination des minorités mais d'examiner aussi les questions liées au droit à la sécession. M.Oloka-Onyango a par ailleurs souligné que si les pays africains avaient décidé de ne pas conserver les frontières héritées de l'ère coloniale, on aurait peut-être abouti à la création d'un État qui engloberait le Soudan, l'Ouganda, la Tanzanie et le Kenya.

M.Oloka-Onyango a appelé à un assouplissement des structures de l'État afin de prévenir les confrontations sanglantes. Il a demandé au Groupe de travail sur les minorités d'examiner la question de savoir si la reconnaissance conceptuelle du droit à la sécession n'encouragerait pas les États multiculturels à rectifier préventivement les abus éventuels que subissent les minorités. Il a souligné qu'il s'agit d'une réalité qu'il ne convient d'examiner plutôt que de la contourner en invoquant le droit international.


M.LOUIS JOINET, expert de la Sous-Commission, a affirmé que si on devait retenir le sujet du droit à l'autodétermination à l'orée de l'an 2000 comme thème de réflexion dans le contexte des questions relatives aux minorités, il ne faudrait pas trop définir dès le départ l'angle d'approche de cette réflexion.


Exercice du droit de réponse au titre des questions relatives aux minorités

Le représentant du Vietnam a réfuté les allégations de France-Liberté et World Evangelical Fellowship en soulignant que le Gouvernement vietnamien a pour politique de promouvoir les libertés religieuses de tous ses citoyens, et particulièrement celles des minorités religieuses.

Le représentant de la Turquie, en réponse à une déclaration de la délégation de la Grèce qui affirmait l'absence de minorités en Grèce, a fait valoir que le Ministre grec des affaires étrangères avait fait une déclaration il y a quelques semaines laissant entendre qu'il existe une minorité turque en Grèce. Il s'est étonné que le représentant de ce pays ne soit pas allé dans le sens des propos de son Ministre.

La représentante de l'Estonie a exprimé son étonnement d'entendre parler d'immigrants illégaux en Estonie comme constituant des minorités. S'agissant du cas de la personne à laquelle la délégation russe a fait allusion dans sa déclaration hier, il convient de rappeler que récemment, le Ministère russe des affaires étrangères à lui-même dit que cette personne se devait de respecter la loi du pays dans lequel elle réside. Le chiffre de 70000 personnes avancé par la délégation russe dans sa déclaration hier ne correspond pas à la réalité.

Le représentant de la Grèce a rappelé que, dans sa déclaration d'hier, la délégation grecque a parlé du Traité de Lausanne de 1923. Il semble que la délégation turque ne parle pas de la même chose.

MME ERICA-IRENE DAES, experte de la Sous-Commission, a conseillé au Gouvernement turc de ne pas prendre la parole alors que le membre du Gouvernement grec ne mentionnait même pas la Turquie. L'experte a donc considéré la déclaration de la Turquie comme nulle et non avenue.

Le représentant de la Turquie a fait observer qu'il ne partage pas l'opinion de MmeDaes et que son intervention s'inscrivait parfaitement dans le cadre des débats de la Sous-Commission.


Présentation de rapports au titre des méthodes de travail

Présentant le rapport du Groupe de travail sur les méthodes de travail de la Sous-Commission (à paraître), M.Marc Bossuyt, Président-Rapporteur du Groupe, a souligné qu'il appartient à la Sous-Commission de décider de transmettre à la Commission des droits de l'homme les lignes directrices concernant l'organisation de ses méthodes de travail.

Présentant son document de travail sur le rôle futur de la Sous-Commission, ses méthodes de travail, la durée de ses sessions, sa composition et l'élection de ses membres, révisé à l'issue de consultations que les membres de la Sous-Commission ont tenues en séances privées, M.ASBJØRN EIDE a mis l'accent sur la nécessité, pour la Sous-Commission, de réfléchir à ses fonctions futures. Il semble que chacun s'accorde pour insister sur le rôle de la Sous-Commission en tant que réservoir de pensée. Les principaux thèmes sur lesquels la Sous-Commission devrait se pencher sont l'administration de la justice, l'établissement d'un forum social, l'examen de l'impact de la mondialisation, la prévention de la discrimination et la protection des droits des minorités, et la prévention de la discrimination à l'encontre des migrants et des non-ressortissants.

La majorité des experts a penché en faveur de la poursuite d'un examen des situations par pays pour les pays qui ne font pas déjà l'objet d'un examen par la Commission. La Sous-Commission devrait accorder la préférence à la prévention des violations des droits de l'homme et assurer l'objectivité des choix en ce qui concerne les situations traitées.

La Sous-Commission estime que la procédure 1503, relative à l'examen à huis clos de communications relatives à des allégations de violations des droits de l'homme, doit être maintenue sous sa forme actuelle même si quelques aménagements peuvent être réalisés. Elle estime en outre que le Groupe de travail sur les populations autochtones devrait continuer d'exister jusqu'à ce que l'instance permanente soit créée au sein des NationsUnies. Le Groupe de travail sur les formes contemporaines d'esclavage devrait lui aussi être maintenu, estime la Sous-Commission.

Il sera impossible pour la Sous-Commission de s'acquitter de son mandat si elle ne se réunit pas au moins quatre semaines par an. La Sous-Commission estime en outre que ses membres ne doivent pas être désignés mais élus et que leur nombre ne doit pas être réduit.

La Sous-Commission est également saisie d'un document (ne portant pas encore une cote officielle) présentant un résumé des discussions officieuses du Groupe de travail des communications sur la recommandation concernant la procédure 1503 contenue dans le rapport du Bureau de la Commission des droits de l'homme à sa cinquante-quatrième session. Ces discussions officieuses se sont déroulées le 27 juillet dernier. S'agissant de la proposition tendant à demander une réunion supplémentaire du Groupe de travail en vue de filtrer les communications, les membres du Groupe de travail ont estimé qu'une telle réunion retarderait le processus d'encore une année et qu'il ne serait pas possible de décider quelles communications envoyer aux gouvernements sans avoir eu de réponse de leur part. Il a cependant été reconnu qu'on ne devrait pas envoyer aux gouvernements des communications qui ne mériteraient pas leur attention. À cet égard, il a été suggéré qu'étant donné qu'il lui revient principalement d'examiner les communications, le Groupe de travail puisse autoriser son Président-Rapporteur à déterminer si des communications reçues sont si évidemment dénuées de fondement qu'elles n'appellent aucune réponse du gouvernement. Si le Président-Rapporteur le juge opportun, il pourrait indiquer au secrétariat qu'il n'est pas nécessaire de transmettre ces communications au gouvernement.


Échange de vues entre la Sous-Commission et le représentant du Haut Commissariat aux droits de l'homme

M.Guiliano Comba, Chef du Service administratif du Haut Commissariat aux droits de l'homme, a dressé un bilan des frais globaux induits par les sessions de la Sous-Commission en affirmant qu'une session de cet organe coûtait plus cher qu'une session de la Commission des droits de l'homme.

Plusieurs experts se sont dit surpris par cette information et ont estimé qu'il serait plus judicieux de comparer les coûts de la Sous-Commission avec ceux d'organes eux aussi composés d'experts tels que la Commission du droit international ou le Comité des droits de l'enfant.

Les experts suivants se sont exprimés dans le cadre de l'échange de vues que la Sous-Commission a eu avec le représentant du Haut Commissariat aux droits de l'homme : M.Fisseha Yimer, M.Paulo Sérgio Pinheiro, MmeHalima-Embarek Warzazi, M.Asbjørn Eide, M.Miguel Alfonso Martínez, M.Soli Jehangir Sorabjee.


Débat sur les méthodes de travail

M.MARC BOSSUYT, expert de la Sous-Commission, a souligné que la Sous-Commission est le seul organe à caractère universel oeuvrant dans le domaine des droits de l'homme et composé d'experts au sein des NationsUnies. C'est aussi le seul organe d'experts en matière des droits de l'homme qui peut examiner la situation des droits de l'homme dans n'importe quel pays, sans qu'aucune réserve ne soit applicable.

En ce qui concerne les sujets abordés par les Rapporteurs spéciaux, M.Bossuyt a souligné qu'ils sont désormais judicieusement choisis et qu'ils ne donnent pas lieu à une rémunération. Quant au reproche adressé à la Sous-Commission sur la duplication des travaux de la Commission, l'expert a précisé que la Sous-Commission a adopté en 1996 une décision par laquelle elle s'interdisait à elle-même d'adopter des résolutions concernant des situations des droits de l'homme faisant l'objet d'une procédure spéciale à la Commission. M.Bossuyt a par conséquent exprimé sa surprise face aux mesures draconiennes que la Commission a tentées d'imposer unilatéralement à la Sous-Commission lors de sa précédente session.

M.Bossuyt a en outre déclaré que l'affirmation selon laquelle la Sous-Commission «serait le mécanisme subsidiaire le plus onéreux de la Commission, le coût de sa session annuelle étant plus élevé que celui de la session de la Commission elle-même» n'est nullement étayée. Il convient de comparer la Sous-Commission à d'autres organes d'experts, a-t-il estimé. La Sous-Commission a rejeté les recommandations du Bureau de la Commission concernant la réduction du nombre de ses membres, la recommandation de remplacer l'élection de ses membres par leur désignation par le Président de la Commission, ainsi que la limitation de la durée de ses sessions de quatre à deux semaines.

M.PAULO SÉRGIO PINHEIRO, expert de la Sous-Commission, a proposé d'intégrer la déclaration que vient de faire M.Bossuyt au rapport du Groupe de travail sur les méthodes de travail de la Sous-Commission présenté par M.Eide. L'accusation faite à la Sous-Commission selon laquelle ses sessions coûteraient plus cher que celles de la Commission n'a aucun fondement, a-t-il estimé.

M.LOUIS JOINET, expert de la Sous-Commission, a exprimé son soutien à la déclaration de M.Pinheiro.

M.FAN GUOXIANG, expert de la Sous-Commission, a émis des réserves sur l'opportunité, dans le cadre de l'examen des situations par pays, d'adopter des résolutions thématiques comme semble le proposer le rapport du Groupe de travail sur les méthodes de travail. Nous verrons bien demain si cette démarche peut être fructueuse, a-t-il ajouté.

MME TEHMINA JANJUA (Pakistan au nom de l'Organisation de la Conférence islamique - OIC) a présenté ses condoléances à la Turquie pour les victimes du séisme qui a frappé ce pays. La représentante a déclaré que la présentation de résolutions sur des pays et plus particulièrement l'initiative récente de mentionner les noms des pays dans des résolutions thématiques ferait double emploi avec autres procédures thématiques ainsi que les travaux de la Commission. Le fait d'adopter des résolutions par pays et de nommer des pays est par principe sélectif et ne reflète pas nécessairement les critères objectifs des droits de l'homme, a-t-elle souligné. La représentante a souligné que l'élaboration de résolutions ne doit pas uniquement résulter d'une interaction intense entre les membres de la Sous-Commission et les organisations non gouvernementales mais aussi entre ses membres et les gouvernements, afin de s'assurer que les résolutions adoptées sont fondées sur des faits objectifs. Afin de lutter contre les stéréotypes dirigés contre l'Islam et les musulmans, l'OIC présentera un projet de résolution intitulé «Diffamation des religions».

M.RAJA NUSHIMAN (Malaisie, au nom également de l'Algérie, du Bhoutan, de la Chine, de Cuba, de l'Égypte, de l'Inde, de l'Indonésie, de la République islamique d'Iran, du Mexique, du Myanmar, du Pakistan, des Philippines, de SriLanka et du Soudan) a souligné le rôle important joué par la Sous-Commission dans maints domaines. Il a mis l'accent sur les lacunes qui subsistent dans certains domaines tels que la promotion des droits économiques, sociaux et culturels et la promotion d'un dialogue civilisé sur les questions relatives aux droits de l'homme, domaines dans lesquels la Sous-Commission peut apporter une contribution utile. Le représentant a par ailleurs indiqué ne pas être favorable à des mesures draconiennes telles que l'élimination pure et simple de la Sous-Commission ou la réduction du nombre de ses membres. Toute tentative visant à réduire la durée des sessions annuelles de la Sous-Commission devrait se fonder sur le programme de travail et non pas sur une directive arbitraire. Les résolutions par pays au sein de la Sous-Commission constituent sans conteste un chevauchement par rapport aux travaux de la Commission. Le représentant a exprimé sa préoccupation face à la question de l'apparition de résolutions thématiques par pays dans lesquelles apparaissent des listes de pays.

MME FRANÇOISE JANE HAMPSON, experte de la Sous-Commission, a souligné que l'argument pour maintenir la Sous-Commission est que cet organe subsidiaire effectue un travail important avec efficacité. Elle a souhaité savoir si le Bureau de la Commission souhaite que la Sous-Commission cesse d'adopter des résolutions par pays ou qu'elle cesse d'adopter tout document pouvant être appelé une résolution.

M.LOUIS JOINET, expert de la Sous-Commission, a rappelé que la stratégie globale à l'Organisation des NationsUnies est de réformer parce que cela coûte trop cher et cela coûte trop cher «parce que certaine grande puissance ne paie pas».

MME FRANÇOISE JANE HAMPSON, experte de la Sous-Commission, a convenu que l'affirmation sur le coût onéreux de la Sous-Commission est effectivement sujette à caution. Cependant elle a souligné qu'il ne convient pas de maintenir la Sous-Commission parce qu'elle coûterait moins cher que les autres organes subsidiaires mais parce que ses travaux sont utiles.

M.PAULO SÉRGIO PINHEIRO, expert de la Sous-Commission, a ajouté que dans aucun document, la Sous-Commission ne défend le point de vue selon lequel sa valeur découle du fait qu'elle est bon marché.

Présentation de rapports au titre de l'administration de la justice et les droits de l'homme

Présentant son étude sur l'amélioration et l'efficacité des instruments judiciaires pour la protection des droits de l'homme au niveau national et leur impact au niveau international, M.Hector Fix Zamudio, expert de la Sous-Commission, a souligné qu'il faut prêter attention aux instruments juridiques internes car il est évident que la protection des droits de l'homme dépend au premier chef des États. Les organes et procédures juridiques internationaux ont un caractère subsidiaire et complémentaire, a-t-il déclaré.

En ce qui concerne l'efficacité des mécanismes judiciaires, M.FixZamudio a notamment souligné qu'ils doivent être simples, brefs et efficaces. Il a également souligné que les instruments judiciaires internes ont des répercussions au niveau international puisque les mesures internes doivent être épuisées avant de recourir à des mécanismes internationaux, et que les dispositions du droit international humanitaire doivent être incorporées dans le droit interne.

Pour ce qui est de la classification des instruments judiciaires, l'expert a distingué trois catégories au niveau interne, à savoir les instruments indirects qui passent par le processus ordinaire ou par la justice administrative, les instruments complémentaires, tels que la procédure de destitution et enfin les instruments spécifiques de tutelle des droits de l'homme, qui sont destinés de préférence à éviter ou à prévenir leur violation.

M.Fix Zamudio a salué l'adoption de nouveaux instruments juridiques destinés à renforcer la protection des droits de l'homme par les pays de la région d'Amérique latine, qui a subi des régimes autoritaires caractérisés par des violations massives des droits de l'homme.

M.EL-HADJI GUISSÉ, expert de la Sous-Commission, a présenté un rapport de suivi de l'évolution de la peine de mort qui contient les faits nouveaux intervenus dans le domaine de l'application de cette peine, conformément à ce qui lui avait été demandé par le Groupe de travail sur l'administration de la justice. L'expert a notamment relevé que, dans de nombreux cas, des brutalités inutiles et des exactions gratuites sont exercées contre les condamnés. Il a souligné que l'essentiel de ses sources d'information provient d'Amnesty International.

M.Guissé a rappelé que 54 pays ont aboli la peine de mort. En mai 1999, le Royaume-Uni a signé la Convention européenne relative à l'abolition de la peine de mort, emboîtant le pas à l'Espagne. La politique européenne en matière de peine capitale tend vers une abolition progressive, ce qui ne s'accompagne pas d'une progression particulière de la criminalité. M.Guissé a précisé que quinze pays ont en outre aboli la peine capitale sauf pour les crimes de guerre alors que 27 autres peuvent être considérés comme des abolitionnistes de fait puisqu'ils n'ont pas appliqué cette peine depuis dix ans bien qu'ils la conservent dans leur arsenal répressif.

M.Guissé a indiqué que 97 pays maintiennent la peine de mort et l'appliquent effectivement. Depuis 1997, on constate d'ailleurs une recrudescence de la mise en application de la peine capitale. Depuis 1990, la peine de mort a été rétablie en pratique ou dans la législation dans dix États des États-Unis : NewYork, Arizona, Californie, Delaware, Idaho, Kansas, Maryland, Nebraska, État de Washington, Wyoming. Ainsi, la peine de mort est-elle désormais prévue dans 38 États des États-Unis au total. M.Guissé a ajouté que le plus grand nombre de condamnés à mort aux États-Unis sont des Noirs. Il a aussi indiqué que, depuis l'avènement du régime actuel dans l'ex-Zaïre, plus de 60 personnes ont été condamnées et exécutées publiquement. M.Guissé a insisté sur l'importance de soutenir la réflexion sur les peines de substitution à la peine de mort.


Débat sur l'administration de la justice

M.LOUIS JOINET, expert de la Sous-Commission, a estimé que l'approche de M.Fix Zamudio est tout à fait dans la ligne de la déclaration faite par la Haut-Commissaire aux droits de l'homme à l'ouverture de la session de la Sous-Commission, qui préconisait d'accorder la priorité aux questions de mise en oeuvre. Certes, il faut que les États respectent les normes en matière de droits de l'homme et d'administration de la justice ; mais l'important c'est aussi que les juges les appliquent. M.Joinet a estimé qu'il faudrait réfléchir à l'opportunité de modifier le nom du Groupe de travail sur l'administration de la justice, qui pourrait devenir «Groupe de travail sur la mise en oeuvre des normes, y compris dans le domaine de la justice».

M.MICHEL MONOD (Internationale des résistants à la guerre) a attiré l'attention de la Sous-Commission sur le fait que de nombreux pays considèrent comme traîtres ou déserteurs les objecteurs de conscience et les condamnent à des peines de prison, voire à la peine capitale en temps de guerre. Il a estimé qu'il n'y a pas de bonne guerre ni de bonne armée. Les personnes qui refusent l'usage des armes doivent être traitées comme des êtres humains. Il a dénoncé les châtiments corporels tels que l'amputation de la main ou de l'oreille que subissent les objecteurs de conscience et les déserteurs dans certains pays. Il a également condamné le recrutement forcé des jeunes hommes et femmes.

M.ERIC SOTTAS (Organisation mondiale contre la torture) a dénoncé le rejet, par le Pérou, de la compétence de la Cour interaméricaine des droits de l'homme concernant le Pérou. M.Sottas a en outre rappelé que des milliers de personnes ont été arrêtées au Bahreïn suite à l'adoption d'une loi sur la sécurité. Ces personnes n'ont pas toutes été jugées et les procès qui ont eu lieu n'ont pas respecté les principes des droits de l'homme. L'OMCT dénonce par ailleurs les disparitions forcées survenues au Maroc et, en particulier, au Sahara occidental. L'organisation non gouvernementale a attiré l'attention de la Sous-Commission sur la détention illégale, accompagnée d'actes de torture, de plusieurs personnes à Mysore, en Inde. Les États se contentent trop souvent de modifier leurs lois sans leur donner d'application pratique, a-t-il regretté.

MME MELANIE LE VERGER (France-Libertés: Fondation Danielle Mitterrand) a rappelé que l'Iran vient de connaître la vague de protestation antigouvernementale la plus importante depuis l'avènement du régime des mollahs. Téhéran, ainsi que de nombreuses grandes villes, ont été pendant une semaine le théâtre d'un vaste mouvement de protestation populaire qui a secoué le régime dans son ensemble. Ces manifestations ont été une fois de plus réprimées dans le sang, entraînant de nombreux morts et blessés, ainsi que des arrestations arbitraires. Les estimations font état de plus de dix mille personnes arrêtées à travers le pays. Depuis ces événements, des centaines de membres des familles de prisonniers se rassemblent chaque jour devant les prisons et les centres de détention. Sans nouvelle de leurs enfants, frères, soeurs ou parents, ces familles sont systématiquement renvoyées vers le quartier général des forces de sécurité, qui refusent tout dialogue. France-Libertés demande à la Sous-Commission de clarifier la situation de ces détenus en obligeant les autorités iraniennes à admettre une mission d'enquête internationale chargée d'établir la vérité sur ces événements. La représentante de France-Libertés a par ailleurs rappelé qu'en Turquie, la plupart des Kurdes soupçonnés à tort de terrorisme sont détenus en garde à vue et ne jouissent pas d'un procès équitable.

M.MESFIN WOLDE-MARIAM (Mouvement international pour l'union fraternelle entre les races et les peuples) a déclaré que la population éthiopienne souffre d'une pauvreté abjecte et d'une famine constante. Il a souligné que l'Éthiopie dispose d'un excellent système judiciaire et législatif. Mais l'exercice de ces fonctions est entre les mains de personnes incompétentes ou liées au pouvoir est source de violations des droits de l'homme. M.Wolde-Mariam a particulièrement mis en cause les exécutions extrajudiciaires, la torture et les détentions illégales. Il a également dénoncé que des individus qui ne sont pas en accord avec le régime politique fassent l'objet de fausses accusations.

MME FAWZIA ASSAD (Fédération Pen) a dénoncé les sanctions appliquées en Turquie pour faire taire les critiques contre le gouvernement. En effet, 103écrivains et journalistes sont emprisonnés ou victimes de poursuites judiciaires. La législation turque, notamment la loi antiterroriste dont le champ d'application est très large, autorise à détenir des personnes pendant de longues périodes ou à les poursuivre en justice pour le simple fait d'avoir exprimé leur opinion. Les sentences encourues sont parfois très lourdes. Il est même arrivé que des journalistes aient été battus à mort alors qu'ils se trouvaient en garde en vue. La protection des droits de l'homme et du droit fondamental à la liberté d'expression dont découlent tous les autres est actuellement sérieusement battue en brèche en Turquie.
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