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LA SOUS-COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME EXAMINE UN RAPPORT SUR LE VIOL SYSTÉMATIQUE ET L'ESCLAVAGE SEXUEL EN PÉRIODE DE CONFLIT ARMÉ

Arrière

16 août 1999

APRÈS-MIDI

HR/SC/99/16
16 août 1999


Présentation du rapport du Groupe de travail sur les populations autochtones qui préconise la tenue en 2004 d'une conférence mondiale sur ces populations


La Sous-Commission de la promotion et de la protection des droits de l'homme a achevé, cet après-midi, son débat sur les formes contemporaines d'esclavage. Elle a également entamé l'examen de la question des droits de l'homme des peuples autochtones en entendant Mme Erica-Irene Daes, Présidente-Rapporteur spécial du Groupe de travail sur les populations autochtones, qui a notamment indiqué que le Groupe a recommandé l'organisation d'une conférence mondiale sur les questions autochtones qui pourrait se tenir en 2004.

Mme Gay McDougall, Rapporteuse spéciale sur le viol systématique, l'esclavage sexuel et les pratiques analogues à l'esclavage en période de conflit armé, a présenté une mise à jour du rapport final qu'elle avait présenté l'an dernier sur la question. Elle a notamment insisté sur le fait que l'utilisation de la violence sexuelle comme arme de guerre se poursuit dans de nombreux pays. Mme McDougall a par ailleurs déclaré que la Cour pénale internationale n'aura juridiction que pour juger des crimes qui ont été commis après sa création. M.El-Hadji Guissé, expert de la Sous-Commission, s'est inquiété de ce que l'imprescriptibilité des crimes ne s'applique pas à la Cour pénale internationale. Une telle approche peut aboutir à assurer l'impunité de nombreux criminels internationaux, a regretté cet expert.

Les experts et suppléants suivants se sont également exprimés : M. Fan Guoxiang, M.Oleg Shamshur, M.Louis Joinet, M.Yeung Kam Yeung Sik Yuen, M.Joseph Oloka-Onyango, Mme Erica-Irene A. Daes, Mme Iulia Antoanella Motoc, Mme Françoise Jane Hampson.

Les délégués du Pakistan, du Soudan et de la République populaire démocratique de Corée sont également intervenus, ainsi que les représentants des organisations non gouvernementales suivantes : Asian Women's Human Rights Council; Société anti-esclavagiste (au nom également de Mouvement international contre toutes les formes de discrimination); Institut international de la paix; Asia Pacific Forum on Women, Law and Development; International Educational Development; Interfaith International; Bureau international de la paix. Le Parti radical transnational a fait une déclaration au titre des droits de l'homme des peuples autochtones.

Nombre d'intervenants ont insisté sur la nécessité, pour le Japon, de reconnaître sa responsabilité et d'accorder les compensations adéquates dans le contexte de la question des «femmes de réconfort», esclaves sexuelles de l'armée japonaise durant la seconde guerre mondiale. La plupart des interventions se sont attachées à dénoncer les pratiques telles que le trafic d'êtres humains, la prostitution d'autrui, la violence sexuelle utilisée comme arme de guerre et l'esclavage traditionnel, qui subsistent dans de nombreuses parties du monde.

La Sous-Commission poursuivra demain matin, à 10 heures, son débat sur les droits de l'homme des peuples autochtones.


Présentation du rapport sur le viol systématique, l'esclavage sexuel et les pratiques comparables à l'esclavage en temps de guerre

MME GAY McDOUGALL, experte de la Sous-Commission, présentant la mise à jour de son étude sur le viol systématique, l'esclavage sexuel et les pratiques comparables à l'esclavage en temps de guerre, a rappelé que ces pratiques représentent une violation des droits de l'homme, du droit humanitaire et du droit pénal internationaux, et qu'à ce titre ils doivent faire l'objet d'enquêtes en bonne et due forme. Les personnes ayant perpétré de tels crimes doivent être traduits en justice et leurs victimes doivent être dédommagées au titre du droit pénal et du droit civil. L'experte a également rappelé que, même en l'absence de conflit, la violence sexuelle, notamment le viol, peut être poursuivie en tant que forme d'esclavage, de crime contre l'humanité, de génocide ou de torture.

Mme McDougall a souligné que l'utilisation de la violence sexuelle comme arme de guerre se poursuit, en particulier en Afghanistan, en Algérie, en Birmanie, au Burundi, en Colombie, en République démocratique du Congo, en Indonésie, au Kosovo, au Libéria, en Sierra Leone, à SriLanka, en Ouganda et dans d'autres pays. Elle a précisé que ces pratiques comprennent la détention et le viol de femmes et de fillettes dans leurs foyers, l'internement de femmes et de fillettes dans des «camps de viol», ainsi que l'enlèvement de femmes et de fillettes aux fins du travail ou d'activités sexuelles forcés. MmeMcDougall a souligné que ces pratiques, qui reviennent à traiter les femmes comme du bétail, doivent faire l'objet de poursuites en justice. L'experte a ajouté que les hommes et les garçons sont également victimes de violences sexuelles. Elle a déclaré que la détention ou la mise à l'isolement de femmes ou de fillettes à des fins «d'utilisation sexuelle» représente un esclavage car ces personnes ne sont pas libres de s'en aller, et que la décision d'avoir ou non des relations sexuelles ne dépend pas d'elles.

Mme McDougall a souligné que la violence sexuelle lors de conflits armés peut être efficacement prévenue en s'assurant que leurs auteurs seront tenus pour responsables de leurs crimes. L'impunité encourage de tels crimes, a-t-elle ajouté. Elle a par ailleurs souligné que le statut de la Cour internationale de justice tient compte des questions sexospécifiques dans ses dispositions. Les dispositions concernant le crime contre l'humanité stipule ainsi que la persécution fondée sur le sexe peut constituer un crime contre l'humanité. L'experte a cependant souligné que la juridiction de la Cour ne s'appliquera qu'aux crimes qui ont été commis après son entrée en fonctions. En ce qui concerne la plupart des affaires de violence survenues dans le cadre de conflits armés contemporains, il revient donc aux systèmes judiciaires nationaux d'enquêter sur ces crimes et de poursuivre et de sanctionner les auteurs, a-t-elle déclaré. Les tribunaux internationaux spéciaux ont également permis des progrès dans ce domaine.

En ce qui concerne les dispositions concernant les réparations destinées aux victimes de violations, l'experte a souligné qu'elles sont en cours d'élaboration. Elle a regretté que le Gouvernement japonais n'ait pas fourni de dédommagements aux «femmes de réconfort», victimes sexuelles de l'armée impériale japonaise au cours de la seconde guerre mondiale. Elle a notamment recommandé que les États s'assurent que leurs systèmes législatifs se conforment à tous les niveaux aux règles internationales. L'experte a en effet estimé que seule une partie des violations qui sont commises dans le cadre de conflits armés pourront être réglée par la Cour pénale internationale et les Tribunaux spéciaux de Yougoslavie et du Rwanda. Elle a de ce fait souligné que les poursuites pénales doivent se dérouler efficacement au niveau national.


Débat sur les formes contemporaines d'esclavage

M. NORIHIMO YOSHIDAT (Asian Women's Human Rights Council) a attiré l'attention de la Sous-Commission sur l'importance du rapport final sur le viol systématique, l'esclavage sexuel et les pratiques analogues en temps de guerre présenté l'an dernier par MmeGay McDougall et mis à jour cette année. Il a mis l'accent sur l'importance d'empêcher que ne se reproduise la tragédie des «femmes de réconfort», réduites à l'état d'esclaves sexuelles par les militaires japonais durant la seconde guerre mondiale. Au Japon, le gouvernement contrôle strictement la façon dont cette question est traitée dans les manuels scolaires. Un autre orateur intervenant au nom de la même organisation a attiré l'attention de la Sous-Commission sur le fait que le Japon a abandonné ses propres soldats et citoyens sur des terres étrangères et les a laissés comme travailleurs-esclaves aux mains de l'ennemi. Parce qu'ils n'avaient jamais été éduqués aux droits de l'homme, les prisonniers de guerre japonais se sont considérés comme des esclaves aux mains de ceux qui les détenaient, notamment en Union soviétique. Certains soldats japonais ont même été vendus par leurs chefs militaires aux soviétiques comme compensation de guerre.

M. EL-HADJI GUISSÉ, expert de la Sous-Commission, s'est félicité que MmeGayMcDougall ait rappelé que les juridictions nationales ont toute latitude pour poursuivre les crimes graves commis par des militaires. Il a également rappelé que le principe d'imprescriptibilité est l'un des piliers du droit contemporain. Or aujourd'hui, Mme McDougall semble affirmer que l'imprescriptibilité ne s'applique pas au Cour pénale internationale, ce qui ne semble pas cadrer avec la volonté de la communauté internationale de voir aboutir toutes les sanctions concernant des crimes internationaux. Une telle approche peut aboutir à assurer l'impunité de nombreux criminels internationaux, a regretté M. Guissé.

M.MIKE DOTTRIDGE (Société anti-esclavagiste, au nom également du Mouvement international contre toutes les formes de discrimination) a noté que le trafic de personnes peut être considéré au sens large, ou bien dans ses liens avec la prostitution. La Société anti-esclavagiste estime par ailleurs que les États ne doivent pas considérer comme des criminels les personnes qui font l'objet de trafics, tels que les travailleurs clandestins. Elle estime par ailleurs que, pour mener à bien la lutte contre le trafic de personnes, la communauté internationale doit définir clairement les abus auxquels elle souhaite mettre fin et définir avec clarté les mesures à mettre en place. La définition du trafic est également en suspens. Le représentant a suggéré que le terme de trafic ne soit pas limité au recrutement à des fins de prostitution, mais qu'il s'applique également au recrutement à des fins de travail forcé, de servitude ou d'esclavage. Il a regretté que les mécanismes des droits de l'homme ne disposent pas de centre d'expertise en ce qui concerne le trafic des personnes.

MME TATIANA SHAUMIAN (Institut international de la paix) a estimé que l'exploitation des enfants constitue la forme la plus grave de l'esclavage. Jamais, au cours de l'histoire, les enfants n'ont été l'objet d'autant de violence, a-t-elle souligné. Elle a rappelé que selon l'Organisation internationale du travail, 250millions d'enfants travaillent à travers le monde dont environ 40millions en Asie seulement. Les enfants qui travaillent sont particulièrement exposés aux accidents sur leurs lieux de travail. La pauvreté est étroitement liée au travail des enfants, a souligné la représentante. En Haïti, par exemple, près de 200000 enfants sont envoyés en ville pour travailler comme domestiques. La représentante s'est félicitée qu'un Fonds de contributions volontaires pour la lutte contre les formes contemporaines d'esclavage ait été créé notamment pour assurer la participation des organisations non gouvernementales aux travaux du Groupe de travail sur la question.

MME CHIN SUNG CHUNG (Asia Pacific Forum on Women, Law and Development) a déclaré que des mesures doivent être prises en ce qui concerne les atrocités commises par le Japon pendant la deuxième guerre mondiale, faute de quoi elles sont susceptibles de se reproduire. D'autres victimes de guerre, notamment coréennes, ont été forcés de travailler dans des conditions inhumaines. Ces crimes resteront impunis, a-t-elle regretté. Elle a attiré l'attention de la Sous-Commission sur la nécessité d'étendre le mandat du Rapporteur spécial sur le viol systématique afin que la Sous-Commission puisse renforcer les règles et mécanismes internationaux pour l'élimination de ces pratiques en protégeant les victimes et en poursuivant les responsables. Elle a suggéré l'élaboration d'une législation modèle fondée sur les principes internationaux dans ce domaine. Elle a en outre appelé la Sous-Commission à poursuivre son évaluation de la question de l'esclavage sexuel commis par l'armée japonaise pendant la deuxième guerre mondiale, jusqu'à ce que le Japon se conforme aux exigences de la communauté internationale. Le Japon devrait notamment fournir un rapport annuel sur ce problème, a-t-elle suggéré.

MME KAREN PARKER (International Educational Development) a attiré l'attention de la Sous-Commission sur le fait qu'aux États-Unis, les salaires versés aux prisonniers sont inférieurs au salaire minimum, ce qui n'est pas sans conséquence sur la situation des familles des prisonniers. Des pratiques analogues existent au Japon. Il faudrait que le Groupe de travail sur les formes contemporaines d'esclavage se penche sur cette question du travail effectué dans les prisons. La représentante a par ailleurs dénoncé l'attitude des entreprises des États-Unis qui délocalisent leurs activités dans des pays en développement où elles n'offrent pas de salaires permettant de vivre et proposent des conditions de travail inhumaines. Il convient de relever que les États-Unis ne sont toujours pas partie au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et n'ont toujours pas ratifié les Conventions de l'Organisation internationale du travail (OIT) sur relatives à la négociation collective, à l'égalité des salaires pour travail égal et à nombre d'autres instruments de l'OIT.

MME DEANNA MORROW PATTY (Interfaith International) a partagé les préoccupations exprimées par M.El Hadji Guissé concernant l'existence de formes classiques et de pratiques comparables à l'esclavage en Mauritanie et au Soudan. Elle a en outre estimé que l'utilisation de femmes et de fillettes dans le cadre de conflits armés doit être condamnée, notamment au Soudan, au Cachemire, au Sri Lanka et au Mexique.

M.FAROOQ HASSAN (Pakistan) a souligné que son pays a régulièrement pris part aux travaux du Groupe de travail sur les formes contemporaines d'esclavage, qui permet aux organisations non gouvernementales d'attirer l'attention sur les situations qu'elles jugent graves. En ce qui concerne l'avenir du Groupe de travail au vu de certaines propositions visant à remplacer cet organe par un rapporteur spécial, la question sera débattue au sein du Groupe de travail de la Commission sur la réforme des mécanismes de la Commission. Bien qu'il aborde toutes ces questions avec un esprit d'ouverture, le Pakistan ne cache pas qu'au premier abord, sa réaction est défavorable à cette proposition. Le Groupe de travail fournit une occasion de dialogue unique entre tous les acteurs impliqués dans cette question extrêmement importante. Le Pakistan estime en outre que le Groupe de travail doit conserver son caractère thématique et ne pas être surchargé par de nouvelles tâches de contrôle. Le Groupe de travail devrait continuer de se concentrer sur les questions relatives à la prévention de l'esclavage.

M.HASSAN EL TALIB (Soudan) a déclaré que son pays est opposé à l'esclavage et à la torture et que sa constitution reconnaît les droits de tous ses citoyens. Il a déclaré que les enlèvements de femmes et d'enfants se produisent dans le cadre de conflits entre populations nomades. Le représentant a souligné qu'une Commission spéciale sur cette question n'a trouvé aucun fondement aux accusations d'esclavage au Soudan. Il a ajouté que le Comité pour l'éradication de l'enlèvement des femmes et des enfants du Soudan travaille conjointement avec des organisations des NationsUnies. Plus de vingt femmes et enfants qui avaient été enlevés ont été rendus à leurs familles, a souligné le représentant. Il a affirmé la volonté du Gouvernement soudanais de parvenir à un règlement négocié du conflit qui se déroule dans le sud du pays.

M.PAK DOK HUN (République populaire démocratique de Corée) a souligné que la Convention sur l'esclavage a été adoptée en 1926, ce qui n'empêche pas pour autant que les pratiques d'esclavage se poursuivent à travers le monde. Le représentant a dénoncé les crimes contre l'humanité commis par le Japon qui, plus d'un demi-siècle plus tard, n'ont toujours pas été réglés. Au cours de ses quatre décennies d'occupation de la Corée, le Japon a enrôlé de force plus de six millions de personnes dans l'armée ou les a contraintes au travail forcé. Un million d'entre elles ont été tuées et près de 200000femmes coréennes ont été réduites à l'esclavage sexuel par les militaires japonais. Les manuels scolaires japonais transmettent aux nouvelles générations des informations fausses quant à cette partie de l'histoire. Le Japon devrait assumer ses responsabilités pour ces crimes en reconnaissant sa responsabilité juridique en tant qu'État pour les crimes commis contre le peuple coréen, en assurant une indemnisation pour ces crimes et en s'efforçant de poursuivre en justice les responsables.

M.PRIMO BURSIK (Bureau international de la paix) a condamné la violence sexuelle comme arme de guerre, qui ne peut qu'aggraver les situations de guerre. À Sri Lanka, la guerre civile a fait de nombreuses victimes parmi les femmes. Les forces gouvernementales ont commis des atrocités contre les femmes tamoul, a-t-il précisé. Il a suggéré qu'une enquête soit effectuée sur ces abus. Il a également souhaité que les observateurs étrangers participent aux exhumations de victimes présumées de ces violations. Il a lancé un appel à la Sous-Commission pour qu'elle exige qu'une enquête indépendante soit menée sur les fosses communes découvertes à Sri Lanka.

M.FAN GUOXIANG, expert de la Sous-Commission, a déclaré que cela fait longtemps que la question des «femmes de réconfort» réduites à l'état d'esclaves sexuelles par l'armée japonaise durant la seconde guerre mondiale reste sans solution. Il semble que les propositions qui ont été faites ne soit pas satisfaisante, a-t-il relevé. Dans la culture traditionnelle japonaise, les ancêtres sont toujours respectés et vénérés, sans distinction aucune, ce qui n'empêche pas certaines de ces personnes d'avoir été des criminels de guerre. Il ne s'agit pas de tenir la jeune génération japonaise pour responsable des agissements du passé. Mais la question de l'indemnisation des victimes reste à l'ordre du jour. Il faut espérer que des solutions pourront être trouvées, sans quoi le problème demeurera sur la scène internationale, ce qui n'est dans l'intérêt ni des victimes ni des gouvernements concernés.

M.OLEG SHAMSHUR, expert de la Sous-Commission, s'est félicité que les activités du Groupe de travail sur les formes contemporaines d'esclavage se renforcent et il a exprimé son soutien aux campagnes d'information qui peuvent prévenir les populations des pratiques de recrutement utilisées. Il a mis l'accent sur l'importance de la participation des gouvernements et de la coopération entre les organisations internationales dans la lutte contre le trafic des personnes.

M.LOUIS JOINET, expert de la Sous-Commission, a estimé que c'est à juste titre, malheureusement, que le rapport du Groupe de travail sur les formes contemporaines d'esclavage a insisté sur «l'expansion» de la traite des être humains et de la prostitution d'autrui. Il s'agit là d'une séquelle de la guerre froide, a estimé M.Joinet. Il a rappelé que les organisations non gouvernementales anti-esclavagistes sont parmi les plus anciennes organisations de droits de l'homme et a estimé que c'est précisément pour cela qu'il faut maintenir en place le Groupe de travail qui constitue l'unique forum permettant à ces organisations de s'exprimer sur ces questions.

Commentant le rapport de MmeHalima Warzazi sur les pratiques traditionnelles affectant la santé des femmes et des enfants, M.Joinet a rappelé le courage dont a fait preuve, en tant qu'Africaine, MmeWarzazi lorsqu'elle a décidé voilà plusieurs années d'accepter de se saisir de la question. Relevant que le mandat de MmeWarzazi a été prolongé, M.Joinet a souligné qu'il s'agit là d'un mandat où la Sous-Commission apporte une plus-value incontestable. Lorsqu'il y a une dimension culturelle dans un problème, seule la durée peut permettre de le résoudre, a estimé M.Joinet.

M.YEUNG KAM YEUNG SIK YUEN, expert de la Sous-Commission, a souligné que les espoirs de nouvelles règles de conduite dans le cadre des conflits armés ne se sont pas matérialisés sur le terrain. L'expert a déploré que la violence sexuelle soit encore largement pratiquée comme arme de guerre. Il a exprimé sa préoccupation au sujet des femmes en Afghanistan. Le membre de la Sous-Commission s'est par ailleurs félicité de l'adoption du statut de la Cour pénale internationale en 1998, tout en soulignant qu'elle ne sera opérationnelle que lorsque 60 États auront ratifié son statut. En ce qui concerne les «femmes de réconfort», l'expert a regretté que cette question n'ait pas encore trouvé de solution.

M.JOSEPH OLOKA-ONYANGO, expert de la Sous-Commission, a souligné que, pendant des décennies, nous savions tous que l'une des causes principales des violations des droits de l'homme au Rwanda était liée à la répression exercée par la majorité hutue contre les Tutsis. Cela n'a pas empêché le monde d'être pris par surprise, a-t-il fait observer. Il faut se demander comment les maris hutus ont pu s'acharner sur leurs femmes et leurs enfants tutsis. À cet égard, M.Oloka-Onyango a estimé que les causes fondamentales des violations de droits de l'homme doivent être ramenées à l'unité de l'organisation humaine la plus petite, à savoir la famille. Tant que les questions d'inégalité au sein de la famille n'auront pas été examinées, il sera difficile de régler les questions de violations des droits de l'homme à l'échelle de l'État. En fait, l'État n'est qu'une famille élargie, une collectivité de familles.

Faisant référence à la question des «femmes de réconfort», M.Oloka-Onyango a jugé regrettable que ce qui a été analysé comme ayant été une manifestation incontestable d'esclavage sexuel soit resté sans solution à ce jour. Il est regrettable que les NationsUnies se soient avérées incapables de contribuer au règlement de cette question.

MME ERICA-IRENE DAES, experte de la Sous-Commission, a souligné que les travailleurs migrants sont l'objet d'une nouvelle forme d'esclavage de la part des intermédiaires puis de leurs employeurs. Nombre d'entre eux perdent la vie, a-t-elle déploré. MmeDaes a appelé le Groupe de travail sur les formes contemporaines d'esclavage à se pencher sur ce problème.

MME IULIA ANTOANELLA MOTOC, experte de la Sous-Commission, a dénoncé les violations massives des droits de l'homme perpétrées contre les femmes en Bosnie et plus récemment au Kosovo et toutes les situations similaires dans lesquelles les femmes sont utilisées comme arme de guerre. MmeMotoc a regretté que peu d'organisations non gouvernementales semblent s'intéresser à la situation des femmes victimes de trafic et de prostitution en Europe centrale et orientale, où la tradition en ce qui concerne les droits des femmes est généralement différente de ce qu'elle est dans le reste de l'Europe.

MME FRANÇOISE JANE HAMPSON, experte de la Sous-Commission, a souligné que les dommages physiques causés aux femmes excisées sont irréversibles et entraînent parfois la mort de l'enfant du fait d'accouchements difficiles. S'agissant du problème du viol en temps de guerre, l'experte a noté qu'il existe un taux de viol beaucoup plus élevé au sein des forces armées que dans le reste de la population, en particulier pendant les conflits armés. Elle a estimé que l'engagement de poursuites n'est pas une mesure de prévention suffisante, mais que les États doivent prendre des mesures internes contre le viol et la torture. Il faut prendre des mesures spéciales, à l'échelle nationale, en matière pénale mais aussi pour protéger les victimes et les témoins, a-t-elle déclaré. L'experte a estimé qu'il faut prendre des mesures de formation et d'éducation tant au sein des forces armées que de la population en général. Si les chiffres de la violence ne diminuent pas, c'est que les mesures entreprises ne sont pas efficaces. MmeHampson a déclaré que, désormais, les gouvernements qui n'empêchent pas leurs forces armées de se livrer à des abus, exposent leurs soldats à des poursuites internationales.


Présentation du rapport du Groupe de travail sur les populations autochtones

Présentant le rapport du Groupe de travail sur les populations autochtones (E/CN.4/Sub.2/1999/19, à paraître en français), MMEERICA-IRENEA.DAES, Présidente-Rapporteuse, a déclaré que la visite qu'elle a effectuée au Japon cette année est un événement historique qui marque le début d'une coopération étroite entre le Japon et le Groupe de travail, ainsi que la réconciliation entre le Gouvernement japonais et le peuple ainu.

Mme Daes a regretté que les sessions du Groupe de travail ne durent que cinq jours, ce qui s'avère insuffisant pour examiner avec précision tous les points inscrits à son ordre du jour. MmeDaes a affirmé que les délibérations durant la dernière session du Groupe se sont déroulées dans une atmosphère amicale et harmonieuse, ce qui a permis l'instauration d'un dialogue constructif, même pour les questions prêtant à controverse. Dans certains cas, les populations autochtones ont reconnu que certains gouvernements ont déjà pris des mesures en vue d'améliorer la vie des populations autochtones alors que d'autres gouvernements maintiennent des politiques d'oppression.

Le thème central de la dernière session du Groupe de travail a été «les populations autochtones et de leurs relations à la terre», a rappelé MmeDaes. Elle a indiqué que le Groupe de travail a décidé qu'à sa prochaine session, il mettrait l'accent sur le thème des enfants et des jeunes autochtones.

Le Groupe de travail a estimé que l'établissement de normes fait également partie de son mandat et a donc décidé d'inviter le Haut Commissariat aux droits de l'homme à organiser, en collaboration avec l'Organisation internationale du travail, la Conférence des NationsUnies sur le commerce et le développement et l'Organisation mondiale du commerce, un atelier sur les populations autochtones, le secteur privé, les ressources naturelles, l'énergie et les compagnies minières dans le contexte des droits de l'homme.

L'une des recommandations faites par le Groupe de travail concerne l'organisation d'une conférence mondiale sur les questions autochtones qui pourrait se tenir à la fin de la Décennie internationale pour les populations autochtones, en 2004, afin d'évaluer les réalisations de la Décennie et d'envisager les futures politiques internationales susceptibles de réconcilier les gouvernements et les populations autochtones du monde. Le Groupe de travail s'est également félicité de l'évolution de la situation en ce qui concerne l'organisation de Jeux des nations autochtones du monde et a prié la Haut-Commissaire aux droits de l'homme d'examiner la manière dont le Haut-Commissariat pourrait appuyer cette importante initiative. Le Groupe de travail a également pris en considération les appels répétés lancés par les populations autochtones en faveur de la nomination d'un rapporteur spécial sur les questions autochtones.


Déclaration au titre des droits de l'homme des peuples autochtones

MME OLGA CELHUROVA (Parti radical transnational) a salué les travaux effectués par MmeErica-Irene Daes, en tant que rapporteuse spéciale sur la reconnaissance et le respect des droits fonciers autochtones. Elle a souligné que les peuples autochtones ont vu leurs terres subir des dommages environnementaux liés à l'exploitation qu'en ont fait des acteurs publics ou privés. Elle a notamment condamné les conséquences de l'exploitation minière menée par le Gouvernement indonésien en Papouasie-Nouvelle-Guinée. Elle a souligné que ces opérations aboutissent à la destruction de grandes parties de la forêt vierge et que leurs bénéfices ne sont pas réinvestis sur place. Le phénomène de migration d'autres populations attirées par les emplois fournis par les exploitations minières entraîne en outre des tensions sociales, a-t-elle souligné. MmeCelhurova a appelé à un renforcement de la participation des communautés autochtones au développement de la région.
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