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LE COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS EXAMINE LE RAPPORT DU CAMBODGE

12 May 2009

Comité des droits économiques,
sociaux et culturels
12 mai 2009

Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné, hier et ce matin, le rapport du Cambodge sur les mesures prises par ce pays en application des dispositions du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Il rendra publiques ses observations finales sur ce rapport, à la fin de la session, vendredi 22 mai prochain.

M. Sun Suon, Représentant permanent du Cambodge auprès des Nations Unies à Genève, a souligné que les défis sont nombreux pour son pays, alors que 30% des habitants vivent sous le seuil de pauvreté. Il a précisé que la stabilité politique actuelle du pays permet au Cambodge de mettre en œuvre des programmes de réforme dans tous les secteurs, de reconstruire ses capacités, de renforcer ses infrastructures socioéconomiques et de créer un climat propice aux investissements. Les principaux indicateurs sociaux se sont, par conséquent, améliorés, notamment en matière d'éducation, de santé et d'égalité entre les sexes, a-t-il fait observer. Il a en outre attiré l'attention sur les réformes foncières, par lesquelles le Gouvernement a souhaité renforcer la gestion et la distribution des terres et empêcher que des terres deviennent inutilisables et improductives.

La délégation cambodgienne, qui était composée de quatre autres représentants de la Mission permanente du Cambodge auprès des Nations Unies à Genève, a répondu aux questions des membres du Comité s'agissant, notamment, du système judiciaire; de la place du Pacte dans l'ordre juridique interne; des politiques adoptées pour attirer les investissements et de l'octroi de concessions; des droits fonciers; des questions d'emploi et de salaire; des libertés syndicales; des questions de santé et d'éducation; des droits des femmes et de la violence conjugale; des questions de logement; ou encore de la protection de l'environnement, notamment face aux projets de construction. À cet égard, la délégation a assuré que les préoccupations environnementales du Gouvernement sont réelles. Le Cambodge a besoin de croissance économique, d'investissements et de prospérité et applique à cette fin une politique de la porte ouverte qu'il faut respecter, a ajouté la délégation.

Manque de progrès dans l'indépendance de la justice; pressions voire menaces de mort à l'encontre de syndicalistes; déforestation; éventuelles conséquences néfastes, sur les droits économiques, sociaux et culturels, de certaines concessions accordées à des investisseurs et manque de clarté globale de la politique foncière figurent au nombre des préoccupations exprimées par les membres du Comité s'agissant du Cambodge.


Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l'examen du dernier rapport inscrit au programme de la présente session, à savoir celui du Royaume-Uni (E/C.12/GBR/5).


Présentation du rapport

M. SUN SUON, Représentant permanent du Cambodge auprès des Nations Unies à Genève, a rappelé que son pays sortait d'une période tragique de souffrances et de douleurs, à l'issue de laquelle les conflits et la guerre civile ont ébranlé le tissu social, les services d'éducation et de santé. Dans ce contexte, il a fallu du temps au pays pour se reconstruire et s'engager sur la voie de la paix, de la réconciliation nationale et du développement, a-t-il souligné. Il a précisé que la stabilité politique actuelle permet au Cambodge de mettre en œuvre des programmes de réforme dans tous les secteurs, de reconstruire ses capacités, de renforcer ses infrastructures socioéconomiques et de créer un climat propice aux investissements. M. Suon a attiré l'attention sur les progrès réalisés par le Cambodge dans le domaine politique, entre autres, faisant valoir que la tenue d'élections nationales en 2008 montre que le pays est bien engagé sur la voie de la démocratie et des droits de l'homme.

M. Suon a souligné que fondamentalement, la protection et la promotion des droits de l'homme au Cambodge sont incorporées dans la Constitution. Depuis la fin du processus de paix en 1993, le pays a renforcé sa coopération avec les mécanismes des Nations Unies et notamment avec le Haut Commissariat aux droits de l'homme, a-t-il poursuivi. Le Cambodge a établi un Comité national des droits de l'homme rattaché au Gouvernement ; une Commission des droits de l'homme a été créée ; et la société civile s'est développée, a-t-il ajouté. Il a en outre rappelé que son pays avait ratifié les principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme. Le Gouvernement n'a ménagé aucun effort pour promouvoir la réalisation des droits de l'homme, a-t-il insisté.

S'agissant de la réduction de la pauvreté, M. Suon a attiré l'attention sur la stratégie mise en place par le Cambodge à cette fin et sur le Plan national de développement pour la période 1996-2010. Les principaux indicateurs sociaux se sont, par conséquent, améliorés, notamment en matière d'éducation, de santé et d'égalité entre les sexes, a-t-il fait observer. Il a ensuite attiré l'attention sur les réformes foncières, par lesquelles le Gouvernement a souhaité renforcer la gestion et la distribution des terres et empêcher que des terres deviennent inutilisables et improductives. En outre, les efforts de déminage se poursuivent, a ajouté M. Suon.

En ce qui concerne les droits des femmes, le Représentant permanent a déclaré qu'au Cambodge, les femmes sont considérées comme la colonne vertébrale de l'économie nationale et de la société. Une loi relative à la violence domestique et à la protection des victimes, ainsi qu'une loi contre la traite des femmes et des enfants ont été adoptées, a-t-il précisé. Pour ce qui est de l'éducation, le Cambodge a établi un Plan stratégique pour les années 2006-2010, dont l'objectif est d'assurer l'accès à l'éducation pour tous les Cambodgiens. Le Gouvernement s'est fixé pour objectif d'assurer pour tous les enfants une éducation de base de neuf ans, a précisé M. Suon.

Pour conclure, M. Suon a rappelé que son pays sort d'un conflit de très longue durée et fait partie du groupe des pays les moins avancés, 30% de la population cambodgienne vivant sous le seuil de pauvreté. Il a reconnu que le Gouvernement doit consentir des efforts considérables pour assurer le plein respect des droits de l'homme. L'objectif principal du Gouvernement est de favoriser le processus de développement et de lutter contre la pauvreté; l'accent est mis sur le renforcement de la bonne gouvernance et la réforme du secteur judiciaire, a indiqué M. Suon.

Le rapport initial du Cambodge (E/C.12/KHM/1) souligne qu'au Cambodge, le Gouvernement royal considère la protection des droits de l'homme comme une mission vitale et prend des mesures effectives afin d'appliquer les principes de la démocratie libérale. Dans cet esprit, il a créé des juridictions et d'autres organisations chargées de préserver les droits de l'homme, comme les Commissions de l'Assemblée nationale et du Sénat chargées de la protection des droits de l'homme et de l'examen des recours et le Comité cambodgien des droits de l'homme. Chacun a droit à la protection assurée par le pouvoir judiciaire et tout citoyen peut s'adresser aux tribunaux en cas d'atteinte à sa personne, à ses biens, à son honneur ou à d'autres droits, précise le rapport. Aucune disposition de la Constitution ou de la loi ne contredit les principes relatifs aux droits de l'homme consacrés par les instruments internationaux. Les dispositions énoncées dans des instruments internationaux qui ne sont pas encore appliqués pleinement par les tribunaux et les autorités administratives sont considérées comme devant être incorporées à la législation et à la réglementation nationales, car elles jouent un rôle essentiel dans la protection des droits de l'homme.

Le rapport souligne que le taux d'accroissement de la population est d'environ 2,5 %. Pour répondre adéquatement aux besoins qui découlent de cet accroissement, il faut augmenter l'offre alimentaire de 2,8 % par an en augmentant les surfaces cultivables, en stimulant la productivité et en développant l'agriculture et autres secteurs. Alors que la population s'accroît, le développement agricole se heurte à un obstacle de taille, qui est la présence des mines. Aussi le Gouvernement et les organisations non gouvernementales se sont-ils attachés à travailler ensemble au déminage et à réduire progressivement la dimension du problème.

Le rapport explique par ailleurs qu'il a été mis un terme graduellement à la collectivisation des biens opérée de 1975 à 1979. Depuis 1992, la propriété foncière a été reconnue et chacun a pleinement le droit d'occuper une terre et d'en être propriétaire, tout comme d'hériter de la terre donnée par l'État. L'expropriation est possible lorsque l'État a besoin d'une terre à des fins d'utilité publique, mais elle doit se faire dans le respect de la loi. Dans ce cas, une indemnisation juste et suffisante doit intervenir.

En ce qui concerne le droit de contracter mariage et de fonder une famille, le rapport indique que la pratique des mariages forcés conclus sans le consentement des conjoints, telle qu'elle était en vigueur sous le régime des Khmers rouges, a été supprimée. Les mariages avant l'âge nubile et les mariages forcés sont interdits de façon absolue. Toutefois, le mariage est généralement arrangé par les parents. Cela peut paraître une forme de contrainte exercée par les parents sur les enfants, mais en réalité les parents ne font que faciliter le mariage et ce sont les enfants qui choisissent en dernier ressort, explique le rapport.


Examen du rapport

Questions et commentaires des membres du Comité

Les membres du Comité se sont réjouis de pouvoir enfin dialoguer avec le Cambodge qui présente ici son rapport initial, dix-sept ans après avoir ratifié le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Certains experts ont toutefois déploré qu'aucun représentant du Gouvernement ne soit venu de la capitale et ont souligné que la composition d'une délégation témoigne généralement de l'importance que le pays accorde au Comité et à la mise en œuvre du Pacte; en outre, la composition d'une délégation permet d'avoir un dialogue plus ou moins informé, en fonction du nombre d'experts qu'elle comprend.

Plusieurs membres du Comité ont soulevé la question de l'efficacité du pouvoir judiciaire cambodgien. Le pouvoir judiciaire est-il indépendant, a-t-il été demandé? Tout en saluant l'intention du Gouvernement de réformer ce secteur, certains experts ont insisté sur l'importance qu'il y a aussi à lutter contre la corruption. Un membre du Comité s'est dit frappé par la différence qui existe entre ce qui est écrit dans le rapport et les informations fournies par le Représentant spécial du Secrétaire général sur la situation des droits de l'homme au Cambodge s'agissant précisément de l'indépendance du système judiciaire. Il s'agit d'un sujet de préoccupation extrêmement grave, a insisté cet expert, faisant remarquer qu'aucun droit économique, social et culturel ne peut être respecté ni appliqué si aucun système ne le permet. Ce même expert a déploré qu'en dépit des engagements réitérés pris par l'État et en dépit des importants fonds de coopération internationale alloués à la réforme du système judiciaire au Cambodge, il n'y ait eu pratiquement aucun progrès dans l'indépendance des tribunaux.

Quel type de recours existe-t-il pour les violations des droits économiques, sociaux et culturels, a-t-il été demandé? Qu'en est-il de la possibilité pour les plus pauvres d'obtenir une assistance juridique?

Un expert a demandé un complément d'information sur le fonctionnement du Comité national des droits de l'homme. Est-il en conformité avec les Principes de Paris? Est-il indépendant? Quels types de violations a-t-il répertoriés?

S'agissant de la réforme agraire, plusieurs experts ont souhaité en savoir davantage au sujet de la gestion des terres des populations autochtones. Notant qu'il n'existe pas de démarcation claire des terres, un expert s'est inquiété de ce que des concessions puissent être accordées au détriment des personnes qui habitent sur les terres visées par ces concessions. Comment les populations autochtones peuvent-elles enregistrer leurs terres? Comment peuvent-elles voir leurs droits respectés?

Relevant la volonté du Cambodge d'attirer les investissements, un membre du Comité a souhaité connaître la part des investisseurs étrangers et celle des investisseurs locaux dans le total des investissements réalisés dans le pays. Quels sont les secteurs qui ont le plus bénéficié de ces investissements? Relevant que le Cambodge est parfois considéré comme un pays à vendre, cet expert a souhaité en savoir davantage sur la concession accordée au Koweït pour que ce pays puisse produire du riz au Cambodge. L'expert s'est inquiété des conséquences négatives de cet accord sur les droits économiques, sociaux et culturels et sur la sécurité alimentaire du pays. Un autre membre du Comité a fait part de sa préoccupation face à la politique d'abattage d'arbres actuellement menée dans certaines régions du Cambodge. Les études de faisabilité menées par le Gouvernement avant le lancement de chaque projet incluent-elles un processus de consultation des personnes concernées, a-t-il en outre été demandé?

Un membre du Comité a relevé que le taux de chômage est très élevé au Cambodge, en particulier chez les jeunes, et s'est enquis des mesures prises pour y faire face, notamment au niveau des formations proposées. Qu'en est-il du salaire minimum, a-t-il aussi été demandé?

Un expert s'est fait l'écho des plaintes de la Conférence syndicale internationale selon laquelle des syndicalistes subissent des pressions et des menaces de mort au Cambodge, où ils figurent sur des listes noires, sont traduits en justice pour des motifs infondés et voient des retenues opérées sur leurs salaires.

Certains membres du Comité se sont enquis des mesures prises par le Gouvernement pour assurer que la législation contre le travail des enfants soit dûment appliquée.

S'agissant du droit à la santé, un membre du Comité a regretté le caractère lacunaire des informations fournies dans le rapport à ce sujet, ce qui ne permet malheureusement pas de saisir les incidences réelles des mesures prises par le Gouvernement dans ce domaine. Il est vain d'adopter des politiques si elles ne sont pas suivies d'effet, a-t-il été souligné. Certains experts ont souhaité des compléments d'informations s'agissant, notamment, du manque d'installations sanitaires et de la situation en matière de VIH/sida. Comment le Gouvernement s'y prend-il pour empêcher la sous-alimentation, en particulier dans le présent contexte de crise financière, a-t-il par ailleurs été demandé?

Plusieurs membres du Comité se sont inquiétés de la proportion considérable de personnes victimes de violence domestique. Qu'en est-il de la situation à cet égard? Que fait le Gouvernement pour y remédier? Il s'agit là d'une question à traiter avec la plus grande urgence au regard de certaines statistiques recueillies par le Ministère des affaires féminines concernant les violences commises sur les femmes.


Réponses de la délégation

À un membre du Comité qui s'étonnait de la lenteur des procès des personnes responsables du génocide, la délégation a rappelé que ces procès répondent à un engagement pris par les autorités cambodgiennes. Ces procès sont effectivement très longs, mais ce processus aboutira, a ajouté la délégation. Il faut assurer la justice et rendre justice au peuple cambodgien, a souligné la délégation, après avoir rappelé combien le Cambodge a été traumatisé par cette tragédie.

La situation au niveau du système judiciaire n'est pas parfaite, a reconnu la délégation, ajoutant que les questions des experts sont pertinentes à cet égard. Néanmoins, le Gouvernement s'efforce de promouvoir le principe de l'indépendance de la justice, a indiqué la délégation. L'important est d'agir dans la pratique pour progresser, a-t-elle poursuivi; or, telle est bien la volonté du Gouvernement, qui a établi un plan d'action pour la mise en œuvre de la réforme judiciaire et juridique. Plus de 140 lois ont alors été adoptées, a précisé la délégation. Des séminaires, des ateliers et des conférences sont organisés à l'appui de ces efforts, pour renforcer l'efficacité du système judiciaire, a-t-elle ajouté. Un projet de loi relatif à la lutte contre la corruption est en cours d'approbation, a-t-elle indiqué.

La délégation a indiqué que si le Comité national des droits de l'homme ne s'inspire pas des Principes de Paris, il n'en demeure pas moins qu'il s'agit d'un organe très important, créé pour aider la population; pour l'heure, a-t-elle précisé, ce Comité dépend du Gouvernement, mais il s'agit là d'un processus évolutif.

En ce qui concerne la place du Pacte dans l'ordre juridique interne, la délégation a souligné que le Pacte a été consacré par la Constitution puisque cette dernière stipule que le Cambodge est lié aux instruments internationaux auxquels il est partie. Les instruments internationaux dûment ratifiés sont intégrés dans la législation cambodgienne, a ajouté la délégation. Dès lors, l'interprétation des lois par les tribunaux tient compte des dispositions des instruments internationaux, a-t-elle insisté.

S'agissant des zones économiques spéciales et des politiques adoptées par l'État pour attirer les investissements, la délégation a expliqué que le Gouvernement a adopté, en la matière, une politique libérale, dans l'optique de susciter des créations d'emplois bénéfiques pour la population cambodgienne. Ainsi, en ce qui concerne les concessions accordées, il faut qu'elles bénéficient à l'emploi et au Cambodge, a insisté la délégation. Avant le lancement de tout projet ou l'octroi de toute concession, des études de faisabilité et d'impact sur la communauté et sur l'environnement sont menées, a-t-elle ajouté, précisant que le projet ou la concession sont avalisés ou non en fonction des résultats de l'étude préalable. Ainsi, a souligné la délégation, en cas d'incidence sur la propriété ou sur l'environnement, une solution appropriée sera trouvée - comme une indemnisation ou l'abandon du projet, par exemple. Le Cambodge a besoin d'investissements, a rappelé la délégation, tout en se disant consciente des incidences que peuvent avoir les investissements. Aussi, les préoccupations environnementales du Gouvernement sont-elles réelles, a assuré la délégation.

Pour ce qui est plus particulièrement de l'accord actuellement discuté avec le Koweït, la délégation a souligné qu'il ne s'agit pour l'heure que d'un projet qui fait l'objet d'une étude de faisabilité aujourd'hui en cours. Le Cambodge a besoin de croissance économique, d'investissements et de prospérité et applique à cette fin une politique de la porte ouverte qu'il faut respecter, a déclaré la délégation. D'une manière générale, le Cambodge accueille tous les pays qui veulent investir dans l'agriculture, comme c'est le cas ici pour le Koweït, a-t-elle ajouté.

S'agissant de la répartition entre investissements locaux et investissements étrangers, la délégation a affirmé que l'investissement local joue un rôle important et que de nombreux secteurs d'investissement se sont ouverts aux investisseurs locaux. Néanmoins, les capitaux étrangers revêtent une importance cruciale en raison de leur volume plus important, a souligné la délégation. Elle a rappelé qu'en tant que membre de l'Organisation mondiale du commerce, le Cambodge s'est ouvert aux investisseurs dans tous les secteurs - l'habillement et le tourisme figurant parmi les plus importants.

Invitée à fournir davantage d'informations sur les droits fonciers - qu'il s'agisse du
droit à la propriété, de la gestion des terres ou encore du processus de démarcation des terres -, la délégation a fait remarquer que s'il existe des phénomènes de spéculation et autres manœuvres économiques, ces agissements ne relèvent pas de la politique menée par le Gouvernement dans ce domaine. Dans la mesure où la situation lui échappe quelque peu, le Gouvernement s'efforce de la réguler, bien que cette tâche soit ardue, a indiqué la délégation. Elle a précisé qu'une politique d'enregistrement des terres autochtones a été lancée par le Gouvernement, dans un cadre juridique approprié; il s'agit là d'un point de départ important qui permettra de renforcer le système de gestion des terres et des ressources naturelles, en tenant compte des intérêts des populations autochtones. Le Gouvernement œuvre aussi à la lutte contre le déboisement et défend le droit des communautés à se prévaloir des ressources naturelles. Sur ce dernier plan, certaines mesures ont déjà été prises tant sur le plan institutionnel que juridique et opérationnel, a affirmé la délégation, précisant que ces questions sont actuellement examinées au sein du Conseil des Ministres. S'agissant précisément de l'enregistrement des populations autochtones et de leurs terres, la délégation a fait part de l'existence d'un organe, rattaché au Conseil des Ministres, qui vise à régler tous les conflits et litiges fonciers. Dans le cadre de cette réforme foncière, a précisé la délégation, le Gouvernement entend accélérer l'enregistrement des titres fonciers, notamment dans les zones les plus intéressantes au niveau économique.

Interrogée sur les incidences pour l'environnement de projets de construction de centrales électriques, la délégation a assuré que le pays veille à la protection de l'environnement et à la prévention de toute catastrophe. En réponse aux interrogations d'un membre du Comité au sujet d'un projet de barrage dans le pays, la délégation a souligné que les projets du Cambodge sont de petite envergure - si on les compare à l'ampleur qu'ils peuvent prendre dans d'autres pays comme la Chine, la Thaïlande ou la République démocratique populaire lao - car le pays n'a pas l'ambition de fournir de l'électricité à ses voisins et n'est d'ailleurs pas compétitif dans ce domaine. Quoi qu'il en soit, des études très poussées sont menées lorsque la construction d'un barrage est envisagée, a assuré la délégation. Le projet de barrage mentionné par un membre du Comité est, pour l'instant, encore en discussion; néanmoins, eu égard à son potentiel économique, ce projet mérite qu'on s'y intéresse avec le plus grand soin.

En ce qui concerne le niveau des salaires dans l'éducation, la délégation a reconnu qu'il existe un écart salarial entre les employés du secteur public et ceux du secteur privé. Elle a dit espérer que des améliorations seront apportées à cet égard, tant - d'ailleurs - dans le secteur public que dans le secteur privé. La délégation a en outre précisé que le Cambodge privilégie la compétitivité dans le secteur de l'éducation, le développement des ressources humaines étant en effet une priorité pour le pays. Les ajustements que le Gouvernement peut opérer dans ce domaine dépendent toutefois du produit intérieur brut et de la croissance économique, a-t-elle souligné.

La délégation a par ailleurs indiqué qu'un projet de loi sur les organisations non gouvernementales (ONG) serait bientôt examiné, car il n'existe aujourd'hui aucune législation sur les ONG. La délégation a néanmoins souligné que les ONG sont admises à travailler dans l'ensemble du pays. Depuis la fin de la guerre, des milliers d'ONG locales et internationales sont à l'œuvre au Cambodge et des progrès remarquables ont été obtenus, en dépit de l'absence de toute législation, a-t-elle fait valoir.

En matière de droits des femmes, la délégation a rappelé que le Cambodge s'est doté d'un Ministère des affaires féminines qui joue un rôle clef en matière de coordination et de contrôle des politiques menées en faveur des femmes. Il existe également un Conseil national de la femme et un Groupe de travail - conduit par le Ministère des affaires féminines, avec le soutien du Programme des Nations Unies pour le développement - qui fonctionne comme mécanisme national pour l'équité et la promotion de la femme. La question de la condition féminine est prioritaire pour le Gouvernement, a assuré la délégation cambodgienne.

En ce qui concerne l'emploi, la délégation a expliqué que le Ministère du travail et de la formation professionnelle met l'accent sur l'acquisition de compétences qui permettront aux Cambodgiens d'obtenir un meilleur emploi et de contribuer au développement de l'économie. Pour ce qui est de la différence de traitement entre les travailleurs du secteur formel et ceux du secteur informel, la délégation a souligné qu'il est bien entendu plus difficile, de ce point de vue, de protéger les droits des travailleurs de la seconde catégorie. En dépit des contraintes budgétaires, le Gouvernement s'efforce d'assurer une formation pour les personnes au chômage, a poursuivi la délégation. S'agissant du salaire minimum, la délégation a expliqué que son seuil varie selon la catégorie socioprofessionnelle considérée et selon les régions. À titre d'exemple, la délégation a indiqué que le salaire minimum des travailleurs des secteurs de l'habillement et de la chaussure est de 45 dollars par mois.

S'agissant des syndicats et de leur indépendance, la délégation a indiqué que la législation cambodgienne prévoit la liberté syndicale associée au droit de former des syndicats et de s'y affilier. Il existe aujourd'hui plusieurs centaines de syndicats au Cambodge, pour environ 300 usines, a précisé la délégation. Ces chiffres montrent qu'il n'y a pas eu d'obstruction de la part du Gouvernement pour la formation de syndicats, a-t-elle affirmé.

Pour l'année 2009, 24% du budget national sont consacrés à la santé et 19% à l'éducation, ce qui constitue une augmentation par rapport à 2008, a indiqué la délégation. Elle a insisté sur l'importance que le pays accorde à l'éducation, en raison du rôle crucial qu'elle joue pour l'élimination de la pauvreté. Des progrès réels ont été enregistrés dans la lutte contre l'analphabétisme ; une loi sur l'éducation a été promulguée ; un plan stratégique pour l'éducation (2006-2010) a été mis sur pied ; et davantage de professeurs ont été formés, a fait valoir la délégation.

Pour ce qui est de la santé, a-t-elle poursuivi, le Gouvernement œuvre à réduire les taux de mortalité infantile et maternelle, à lutter contre le paludisme et à sensibiliser la population au VIH/sida. La mortalité infantile a diminué de 30% en moyenne depuis l'an 2000, a fait observer la délégation. Le nombre d'hôpitaux et de centres de soins s'est accru; il a presque doublé, a-t-elle ajouté.

En ce qui concerne l'alimentation, la délégation a expliqué que le Gouvernement a mis au point un programme de nutrition et de sécurité alimentaire qui s'intègre dans une stratégie plus large de lutte contre la pauvreté.


La lutte contre la violence conjugale est l'une des priorités du Cambodge, a poursuivi la délégation, précisant qu'une loi a été adoptée dans ce domaine il y a déjà plusieurs années. Il ne fait aucun doute que le Gouvernement s'efforce de lutter contre la violence conjugale, a insisté la délégation; la situation en la matière n'est certes pas parfaite, mais la volonté politique est bien présente.

La délégation a par ailleurs indiqué que le pays n'a pas encore adopté de mesures pour éliminer les châtiments corporels.

En matière de logement, le Gouvernement est sur le point d'adopter une législation et s'intéresse à tout conseil que les membres du Comité pourraient lui fournir à cet égard. Plusieurs experts ayant souhaité savoir si le Cambodge avait l'intention d'adopter un moratoire sur les expulsions, comme l'a recommandé le Rapporteur spécial sur le logement convenable, la délégation s'est dite dans l'incapacité de répondre à cette question. Elle a toutefois souligné que la politique d'expulsion n'est pas une politique choisie par le Gouvernement. Les nombreux problèmes fonciers du pays ont poussé le Gouvernement à s'atteler à ces questions et à engager une politique foncière, a rappelé la délégation. Elle a toutefois reconnu qu'il s'agit d'un véritable problème pour le Cambodge et a assuré que des mesures seront prises pour sanctionner et traduire en justice les personnes, fonctionnaires ou autres, qui commettent des actes répréhensibles.

En ce qui concerne les mesures prises pour protéger l'environnement, la délégation a indiqué que le Cambodge a adopté une loi sur la protection de l'écosystème. Trois centres d'écotourisme ont été créés, des zones ont été protégées et une loi a été promulguée en 2008 pour assurer la bonne gestion des régions, a notamment expliqué la délégation. Ces mesures de protection de l'environnement et de bonne gestion des ressources sont toutefois assez lourdes à assumer, a-t-elle fait observer. Pour ce qui est des zones forestières, elle a reconnu l'importance d'être vigilant afin d'empêcher la disparition des forêts, qui couvrent quelque 49% du territoire cambodgien. Une loi a été adoptée pour lutter contre le déboisement et une véritable politique sylvicole a été lancée, a ajouté la délégation.

À un expert qui se demandait si le génocide des Khmers rouges était mis en lumière dans l'enseignement des droits de l'homme, la délégation a répondu par l'affirmative. Les nouvelles générations doivent être informées sur le passé, a-t-elle souligné.

En conclusion, la délégation a remercié le Comité pour ce dialogue constructif, soulignant qu'il s'est agi d'un véritable apprentissage pour sa délégation. La délégation a réitéré que le Cambodge reste attaché à la mise en œuvre du Pacte.

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Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel