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Experts de l'ONU : Les professionnels de la santé sont essentiels pour la prévention de la torture, l'obligation de rendre des comptes et les réparations.

Arrière

24 Juin 2022

GENÈVE (24 juin 2022) - Les experts des droits de l'homme des trois mécanismes anti-torture de l'ONU* ont exhorté les États membres à mettre en place les conditions matérielles et juridiques nécessaires pour permettre au personnel de santé d'évaluer, de signaler et de documenter la torture ou les traitements cruels ou inhumains. À l'occasion de la Journée internationale pour le soutien aux victimes de la torture, ils ont publié la déclaration conjointe suivante, soulignant les fonctions vitales des professionnels de la santé dans la prévention et la répression des actes de torture et le soutien aux victimes :

"Les professionnels de la médecine et de la santé ont un rôle essentiel à jouer dans la prévention et la sanction des actes de torture, ainsi que dans la réadaptation des survivants de la torture.

Les médecins généralistes, les médecins légistes, les infirmiers, les psychiatres, les psychologues, les kinésithérapeutes et les autres professionnels de la santé sont souvent les premiers à détecter les signes de torture par leur contact quotidien avec les patients ou lorsqu'ils constatent les décès. Comme ils peuvent inspecter et observer de près les conditions physiques et mentales des personnes privées de liberté, ils sont dans une position importante pour prévenir et signaler toute forme de torture et pour fournir des soins de santé aux victimes.

Pour prévenir efficacement la torture, une approche holistique est nécessaire, car elle permet aux praticiens de comprendre les effets de la torture sur les individus, leurs familles et les communautés, de savoir comment faire face à ces effets et d'avoir le devoir de s'attaquer à cette violation flagrante des droits de l'homme.

Les victimes d'actes de torture ont droit à une réadaptation complète, comme le stipule l'article 14 de la Convention contre la torture et les professionnels de santé sont essentiels pour rétablir et réparer le préjudice subi par les victimes.

En cette Journée internationale pour le soutien aux victimes de torture, nous rappelons que les États m"embres doivent fournir toutes les conditions matérielles et juridiques nécessaires pour que le personnel de santé puisse assumer ses responsabilités professionnelles. Un soutien sans équivoque et une formation spécialisée sont d'une importance capitale. En particulier, les Etats devraient garantir que toutes les personnes privées de liberté ont accès à un examen médical indépendant et confidentiel. Les États parties devraient également associer les professionnels de la santé à l'élaboration et à la mise en œuvre de stratégies et de politiques de lutte contre la torture. En période de conflit armé, le personnel médical doit être protégé en toutes circonstances en vertu des règles coutumières du droit international humanitaire.

« Les États doivent veiller à ce que tous les détenus subissent des examens médicaux immédiatement après leur arrestation. Les autorités doivent également documenter et enquêter sur la torture et ses séquelles afin d'empêcher qu'elle ne se reproduise et de lutter contre l'impunité, » a déclaré Suzanne Jabbour, présidente du Sous-comité pour la Prévention de la Torture. « Il est fondamental de rendre les auteurs de ces actes responsables de leurs actes et d'offrir justice et réhabilitation aux victimes, » a-t-elle ajouté.

Documenter la torture est souvent une condition préalable à l'obtention de la justice, de l'asile, de la réhabilitation et des soins et peut être thérapeutique en reconnaissant les expériences des victimes. Le Manuel pour enquêter efficacement sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (Protocole d'Istanbul), publié initialement en 2001, fournit des lignes directrices et des normes internationales en matière de documentation. Le Haut-Commissariat aux droits de l'homme lancera une version révisée du manuel à la fin du mois de juin. Elle comprendra un nouveau chapitre sur le rôle des professionnels de santé dans la documentation des cas de torture et sur l'importance de conclusions médicales de qualité en tant que preuves dans les procédures pénales et administratives.  Il guide également les États pour qu'ils remplissent leurs obligations conventionnelles au titre de la Convention contre la torture et en tant que norme de jus cogens du droit international. Les États parties sont encouragés à diffuser largement la version révisée auprès des professionnels de la santé, des responsables de l'application des lois et du personnel judiciaire.

« Les professionnels de santé ont également la responsabilité de signaler les violations dont ils sont témoins et d'aider les victimes sans pression indue ni représailles. Le Comité contre la torture recommande souvent aux États parties d'éliminer les risques de représailles et d'assurer la protection des praticiens de la santé. Le Comité se réfère aussi régulièrement au Protocole d'Istanbul pour guider les États parties dans la conduite d'enquêtes efficaces sur la torture et la collecte de preuves pour établir la réparation pour les victimes, » a déclaré Claude Heller, président du Comité contre la torture.

Dans le rapport sur le rôle des sciences médico-légales dans les enquêtes de la torture et autres mauvais traitements et leur prévention, l'ancien Rapporteur spécial sur la torture a souligné la nécessité de maintenir une collaboration étroite entre les professions de santé et celles juridiques pour une enquête efficace sur les cas présumés de torture. Il est également important d'établir des procédures claires de documentation de l'incidence de la torture qui pourraient servir de preuves valables devant les tribunaux pour assurer la redevabilité.

« Au Fonds de contributions volontaires des Nations unies pour les victimes de la torture, nous avons été témoins des conséquences bouleversantes et souvent chroniques de la torture sur la santé mentale et physique des survivants, qui peuvent se transmettre de génération en génération. Le besoin de soins de santé spécialisés immédiats et à long terme est essentiel pour surmonter le traumatisme et reconstruire les liens. Nous exprimons notre profonde admiration pour les professionnels de la santé qui fournissent des services aux survivants et risquent parfois leur propre sécurité dans des situations de rétrécissement de l'espace civique ou de conflit armé, » a déclaré Lawrence Mute, président du Fonds.

Pour que les professionnels de la santé puissent assumer pleinement leur rôle essentiel dans la prévention de la torture et contribuer à l'établissement des responsabilités et à la réparation, les États doivent assurer l'éducation et la formation nécessaires aux professionnels de la santé et aux étudiants en médecine.

Les professionnels de la santé ont une responsabilité particulière dans le partage d'expériences et d'informations sur les conséquences de la torture sur la santé, notamment le caractère destructeur de cette pratique sur la santé des victimes, les dommages qu'elle cause à l'ensemble de la communauté et les besoins d'aide pour surmonter les traumatismes et reconstruire leur vie."

FIN

* La déclaration conjointe a été publiée par le Comité des Nations Unies contre la torture, le Sous-comité des Nations Unies pour la prévention de la torture et le Conseil d'administration du Fonds de contributions volontaires des Nations Unies pour les victimes de la torture.

Journée internationale des Nations Unies pour le soutien aux victimes de la torture, 26 juin
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