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Conseil des droits de l'homme : journée annuelle de débat sur les droits fondamentaux des femmes

Arrière

05 Juin 2013

JOURNÉE

5 juin 2013

Le débat porte cette année sur les efforts menés dans de la lutte contre la violence à l'égard des femmes et sur les priorités pour l'avenir

Le Conseil des droits de l'homme a tenu, aujourd'hui, sa journée annuelle de débat sur les droits fondamentaux des femmes, qui a donné lieu à deux séries d'échanges, la première consacrée à un bilan des vingt dernières années, la seconde aux perspectives d'avenir. La journée a été ouverte par Mme Navi Pillay, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme.

Mme Pillay a rappelé qu'avant 1990, les violences contre les femmes étaient considérées par la communauté internationale comme une affaire privée et non pas comme relevant des droits de l'homme. En 1992, le Comité sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes soulignait que l'obligation des États parties de prévenir, d'enquêter et de punir la violence basée sur le genre. L'année suivante, la Conférence mondiale des droits de l'homme en 1993 et la Déclaration et le Programme d'action de Vienne ont marqué un tournant: la violence contre les femmes est devenue un sujet de préoccupation au plan international.

Le premier échange, qui a eu lieu en matinée, avait pour experts invités Mme Patricia Schulz, membre du Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes; Mme Florence Butegwa, de l'Entité des Nations Unies pour l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes (ONU-Femmes); Mme Simone Cusack, chercheuseà laCommission nationale des droits de l'homme de l'Australie; Mme Fatma Khafagy, Médiatrice pour l'égalité entre les sexes de l'Égypte; et M. Juan Carlos Areán, Directeur du programme Family Violence Prevention.

Mme Schulz a notamment souligné que la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes offrait un cadre juridique fondamental, mais ne donnait pas au Comité la compétence de s'assurer que ses recommandations sont appliquées. Mme Butegwa a constaté que face à la priorité accordée au développement, les États consacrent peu de ressources à la question de la violence envers les femmes, une carence que l'on constate notamment au niveau des services d'aide aux victimes. Mme Cusack a relevé que les stéréotypes alimentaient la violence faite aux femmes et qu'ils en étaient la cause première; elle a appelé à un changement culturel. Mme Khafagy a souligné l'importance de dénoncer le mythe selon lequel les mutilations génitales féminines auraient une signification religieuse. Elle a aussi souligné l'importance de faire participer les hommes à la lutte contre cette pratique. Pour sa part, M. Areán a estimé qu'il fallait aider les hommes à se défaire des schémas patriarcaux.

Au cours du débat, de très nombreuses délégations ont mis en avant les mesures prises par leurs États pour lutter contre la violence envers les femmes. Plusieurs se sont dites favorables à l'adoption d'un instrument juridique international non contraignant visant à documenter les cas de violence sexuelle en période de conflit. Les délégations suivantes ont participé aux échanges: Afrique du Sud, Algérie (au nom du groupe arabe), Arabie saoudite, Argentine, Australie, Autriche, Brésil, Canada, Chili, Croatie, Estonie, États-Unis, Fédération de Russie, Grèce, Indonésie, Iran, Islande, Lituanie, Malaisie, Maldives, Norvège, Pologne, Qatar, Royaume-Uni, Sénégal, Sierra Leone, Slovénie, Suisse et Union européenne. La Commission canadienne des droits de l'homme et les organisations non gouvernementales suivantes ont également pris la parole: Canners International Independent Committee, France-Libertés – Fondation Danielle Mitterrand, Minority Rights Group International, Union internationale humaniste et laïque, Verein Südwind Entwicklungspolitik.

Le débat de l'après-midi était consacré aux perspectives d'avenir, avec la participation des conférenciers suivants: Mme Zainab Bangura, Représentante spéciale du Secrétaire général sur la violence sexuelle dans les conflits armés; Mme Patience Stephens, d'ONU-Femmes; M. Sandeep Chawla, Directeur exécutif de l'Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (UNODC); et Mme Marilou McPhedran, de l'Université de Winnipeg (Canada). La réunion a été ouverte par Mme Flavia Pansieri, Haut-Commissaire adjointe aux droits de l'homme, qui a notamment relevé le peu de recommandations issues de l'Examen périodique universel concernent la prévention et la répression des violences faites aux femmes.

Mme Rashida Manjoo, Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes, ses causes et ses conséquences, a pour sa part insisté sur le lien direct entre les mesures prises par les États et une régression du phénomène de la violence contre les femmes. Mme Bangura a déclaré que les gouvernements doivent faire comprendre aux auteurs de violences contre les femmes qu'ils seront retrouvés et traduits en justice. Mme Stephens a constaté avec regret que certaines questions qui allaient de soi il y a vingt ans, sont aujourd'hui considérées comme problématiques, notamment par les participants à la dernière session de la Commission de la condition de la femme. Les cultures, la tradition, la religion ne sauraient être invoquées pour justifier les violences faites aux femmes, a-t-elle rappelé. M. Chawla a attiré l'attention sur la nécessité d'élaborer des normes d'accès à la justice, de concevoir des stratégies locales et de compiler les bonnes pratiques dans ce domaine. Mme McPhedran a notamment souligné l'importance d'une véritable alliance entre les sexes pour combattre efficacement la violence contre les femmes.

Lors du débat, de nombreuses délégations ont demandé au Conseil des droits de l'homme de jouer un plus grand rôle dans la lutte contre la violence faite aux femmes en intégrant systématiquement la dimension de genre dans ses travaux et ses résolutions. Le Conseil a aussi été prié de concevoir des mécanismes d'action avec le concours d'ONU-Femmes, dans le cadre d'initiatives conjointes. Les délégations suivantes sont intervenues: (Algérie au nom du groupe arabe), Allemagne, Belgique, Chili, Chine, Égypte, Émirats arabes unis, Espagne, Estonie, Éthiopie, Fédération de Russie, Finlande, Gabon (au nom du Groupe africain), Inde, Koweït, Libye, Maldives, Maroc, Mauritanie, Monténégro, Norvège, Paraguay, Pérou, Portugal, Suisse, Thaïlande, Turquie, Venezuela et Organisation de la coopération islamique. Ont également participé aux échanges le Comité international de la Croix-Rouge, le Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida et l'Organisation internationale du travail, de même que le Comité international de coordination des institutions nationales des droits de l'homme et les organisations non gouvernementales suivantes: Action Canada pour le développement et la population, Femmes Afrique Solidarité, Maarij Foundation for Peace and Development, Alliance mondiale des unions chrétiennes de jeunes filles, Worldwide Organization for Women.

La journée de demain sera consacrée, à partir de 9 heures, à l'examen des rapports finaux issus de l'Examen périodique des pays suivants: France, Tonga, Roumanie, le matin; Mali, Botswana, Bahamas, à la mi-journée; et Burundi, Luxembourg et Barbade, l'après-midi.

Déclaration liminaire de la Haut-Commissaire

MME NAVI PILLAY, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, a déclaré que la discussion aborderait les mesures prises depuis ces vingt dernières années pour éliminer les discriminations envers les femmes. Avant les années 1990, les violences contre les femmes étaient considérées par la communauté internationale comme une affaire privée et non pas comme un sujet relevant des droits de l'homme. En 1992, le Comité sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes adoptait son observation générale n°19 qui, pour la première fois, faisait obligation aux États parties de prévenir, d'enquêter et de punir la violence basée sur le genre. Ce texte a constitué le chaînon manquant entre actes privé et droits de l'homme. La Conférence de Vienne de 1993 et ses Déclaration et Programme d'action ont marqué un tournant: la violence contre les femmes est devenue un sujet de préoccupation au plan international. Les Déclaration et Programme d'action de Vienne affirment avec force que tous les droits de l'homme sont universels, indivisibles, interdépendants et liés entre eux. La Conférence de Vienne a donné l'élan de l'adoption, la même année, de la Déclaration sur l'élimination de la violence contre les femmes par l'Assemblée générale de l'ONU et e la création, en 1994, du mandat de Rapporteur spécial sur la violence contre les femmes, ses causes et ses conséquences.

En quelques années, la communauté internationale a affirmé sans équivoque que la violence n'était pas une affaire privée et que les femmes n'y étaient pas exposées en raison d'une vulnérabilité congénitale ou d'une faiblesse intrinsèque, a souligné la Haut-Commissaire. En fait, la violence résulte d'une discrimination profondément ancrée, d'attitudes patriarcales et de préjugés sur la subordination des femmes, que les États ont l'obligation de changer. Toutefois, Mme Pillay a constaté que les violences contre les femmes demeuraient encore très répandues. Elle a rappelé qu'une femme sur trois risquait de subir une forme ou une autre de violence au cours de sa vie et indiqué que plus de 600 millions de femmes vivaient dans des pays où la violence domestique ne constitue pas un délit. Le Fonds des Nations Unies pour la population estime que les «crimes d'honneur» font cinq mille victimes par an.

Réunion-débat sur le bilan des efforts visant à éliminer la violence contre les femmes

MME RASHIDA MANJOO, Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes, ses causes et ses conséquences et animatrice du débat, a souligné que le débat de ce matin vise à faire le point sur les efforts visant à éliminer la violence contre les femmes, sur la base d'une analyse fondée sur les droits de l'homme. Il doit aider chacun à réfléchir aux difficultés que rencontrent les femmes dans la réalisation de leurs droits. La Rapporteur spécial a aussi souligné les difficultés considérables rencontrées pour essayer de résoudre le problème de la violence contre les femmes en tant que question de droits de l'homme.

Exposés

MME PATRICIA SCHULZ, membre du Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, a rappelé que l'Observation générale n°12 du Comité, datant de 1988, soulignait que plusieurs dispositions de la Convention engagent les États à protéger les femmes de la violence au travail, dans la famille et dans n'importe quel autre contexte social. En 1992, le Comité, dans son Observation générale n°19, a estimé que les violences basées sur le genre constituent des discriminations au sens de l'Article premier de la Convention. Ces deux Observations sont la base d'une interprétation innovante de la Convention. Depuis lors, le Comité émet invariablement des observations finales et des recommandations qui prennent en compte les formes spécifiques de violence contre les femmes propres à chaque pays.

Pour l'avenir, il faudra se concentrer sur la mise en œuvre, a souligné Mme Schulz. Cent quatre-vingt-sept pays ont ratifié la Convention et 104 ont adhéré à son Protocole facultatif. Ce cadre juridique global est fondamental, mais il ne donne pas au Comité la compétence de s'assurer que ses recommandations sont appliquées. La création d'un système de mise en œuvre des droits de l'homme au niveau mondial est nécessaire. Des synergies entre tous les acteurs concernés doivent être trouvées et il faut renforcer la coopération entre les différents mécanismes des Nations Unies. Toutes les parties prenantes doivent collaborer pour mettre en œuvre tous les instruments internationaux des droits de l'homme, a souligné enfin Mme Schulz.

MME FLORENCE BUTEGWA, de l'Entité des Nations Unies pour l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes (ONU-Femmes), a déclaré que l'Afrique a fait des progrès dans la lutte contre les violences faites aux femmes. Sur les 54 pays membres de l'Union africaine, 36 ont légiféré contre cette forme de violence. Ils ont en outre adopté des plans d'action nationaux et prévu des mesures de coordination de leur mise en œuvre. Les États africains ont par ailleurs intégré les normes internationales au niveau régional. Ainsi, douze États de la région des Grands Lacs ont décidé de criminaliser la violence faite aux femmes et d'en traduire les auteurs en justice. Mme Butegwa a également observé que la société civile et les populations sont désormais plus sensibles au problème et se sont emparées du débat. Cependant, et malgré ces évolutions, des difficultés persistent en matière de ressources disponibles. Il est vrai que, face à des priorités comme le chômage ou le développement, les États et les partenaires au développement consacrent peu de ressources à la question de la violence envers les femmes, une carence que l'on constate au niveau des services d'aide aux victimes, entre autres.

MME SIMONE CUSACK, chercheuseà laCommission nationale des droits de l'homme de l'Australie, auteure et experte des stéréotypes de genre, a relevé que les stéréotypes alimentent la violence faite aux femmes et en sont la première cause. Par exemple, le stéréotype selon lequel les hommes sont les chefs de ménage engendre des violences si les femmes ne se soumettent pas aux décisions de leurs conjoints. Autre exemple, certains policiers ou tribunaux pensent que les femmes qui déposent plainte ont mérité les violences subies: ce stéréotype lié à l'accès à la justice empêche les femmes d'être protégées de la violence.

Les «bonnes pratiques» sont heureusement nombreuses, a dit Mme Cusack, citant l'exemple d'une juge canadienne qui a répertorié, pour mieux les combattre, les stéréotypes utilisés par les tribunaux locaux pour acquitter les auteurs de violences, y compris des responsables de viols. Le Protocole à la Charte africaine des droits de l'Homme et des peuples relatif aux droits des femmes en Afrique est un texte remarquable, car il montre le lien concret entre les stéréotypes négatifs et la violence faite aux femmes, a observé l'experte.

MME FATMA KHAFAGY, Médiatrice pour la parité entre les sexes de l'Égypte, a souligné l'importance de dénoncer le mythe selon lequel les mutilations génitales féminines auraient une signification religieuse. Ce travail de longue haleine, mené en collaboration avec des chefs spirituels, doit s'accompagner de lois criminalisant les mutilations génitales féminines. Il faut également faire participer les hommes, notamment les jeunes hommes, à la lutte contre cette pratique. Ces mesures constructives permettent de juguler progressivement ce fléau, surtout auprès des plus jeunes. La nouvelle génération n'accepte plus d'être victime de ces violences, a souligné Mme Khafagy.

Certains hommes s'estiment en droit de tuer leur femme, leur fille ou leur sœur s'ils pensent qu'elle aurait contrevenu aux normes sexuelles ou sociales. Ces «crimes d'honneur» sont parfois couverts par des juges complaisants. Les organisations non gouvernementales sensibilisent les acteurs concernés et leur font prendre conscience du caractère discriminatoire de ces pratiques. Dans plusieurs pays arabes, il a été possible d'amender la loi pénale pour punir les crimes d'honneur, qui sont en recul, selon les statistiques disponibles. Malheureusement, certains pays ne disposent pas de législation appropriée pour lutter contre la violence faite aux femmes dans tous les contextes, y compris au sein des familles ou sur les lieux de travail. Il faut investir davantage dans l'éducation et l'autonomisation économique des femmes, a conclu Mme Khafagy.

M. JUAN CARLOS AREÁN, Directeur du programme Family Violence Prevention, a déclaré que la bataille contre la violence faite aux femmes se gagne par les cœurs et la volonté de chacun à imposer un changement. Cependant, il faut éviter que la participation des hommes soit un phénomène qui finisse par s'émousser dans le temps. Les hommes ont tendance de reproduire des schémas patriarcaux, a-t-il dit, appelant les hommes à mettre un terme à la violence. Cependant, il n'y a pas de solutions uniques pour lutter contre ce phénomène. Il faut une démarche globale, y compris en aidant les hommes à se libérer aux mêmes de ces schémas.

Débat

Le Chili, au nom du Groupe latino-américain et des Caraïbes (GRULAC), a souligné que la violence contre les femmes est exacerbée par des lois patriarcales imposent des statuts différenciés aux deux sexes. Les pays du GRULAC souscrivent aux conclusions de la dernière session de la Commission de la condition de la femme (mars 2013), visant le renforcement des cadres juridiques et normatifs. L'Union européenne s'est dite favorable aux efforts actuels en vue de l'adoption d'un Protocole international non contraignant visant à enquêter et à documenter la violence sexuelle en période de conflit.

Le Canada a observé que la pleine participation des femmes aux processus décisionnels dans toutes les sphères de la société est loin d'être acquise. Il a rappelé le panel organisé par les femmes ambassadeurs, à la dernière session, dont le thème était justement «La force des femmes qui ont le pouvoir d'agir». Ce concept peut susciter des changements positifs et favorables à l'égalité. La Sierra Leone a relevé que de nombreux pays ne sont pas passés de la théorie à la pratique. Il est clair qu'une plus grande volonté politique est nécessaire.

La Norvège, au nom des pays nordiques, a appelé le Conseil et le Haut-Commissariat aux droits de l'homme à suivre de près la question des droits relatifs à la santé sexuelle et reproductive. Ils sont convaincus que beaucoup plus peut et doit être fait. Les pays nordiques sont préoccupés par le fait que certains pays prennent des mesures pour limiter les droits et la liberté d'expression des femmes. La Sierra Leone propose notamment que des services médicaux gratuits soient fournis aux victimes.

Pour sa part, le Royaume-Uni, qui préside du Conseil de sécurité ce mois-ci, a l'intention d'organiser une nouvelle réunion sur les femmes et la sécurité internationale.

L'Iran s'est dit convaincu que de nombreuses manifestations de violence envers les femmes s'expliquent par des idéologies basées sur le profit ou, en d'autres termes, sur une approche matérialiste de la femme. La délégation a souligné les mesures prises par son pays pour lutter contre ce phénomène et qui lui ont permis de réaliser des progrès.

La Lituanie a adopté, en 2006, une stratégie nationale pour l'élimination de la violence contre les femmes qui prévoit notamment une assistance et un soutien aux victimes, sans oublier des poursuites contre les auteurs de violence. Les États-Unis ont promulgué, en 1994, la Loi sur la violence contre les femmes qui a constitué le premier texte fédéral visant à lutter contre ce phénomène, y compris lorsqu'il résulte de la violence du conjoint. En 2011, les États-Unis ont lancé leur Plan national d'action pour les femmes, la paix et la sécurité. Le Brésil a adopté des dispositions de lutte contre les violences domestiques dans le cadre de la Loi «Maria da Penha», adoptée en 2006. Ce texte est connu par 94% de la population.

À son indépendance en 1991, soit deux ans avant la Conférence de Vienne, l'Estonie s'est dotée d'un cadre juridique et politique visant à protéger l'égalité des individus quel que soit leur sexe. Elle reconnaît toutefois que les rôles sexuels stéréotypés sont longs à changer. La Grèce a indiqué avoir été l'un des premiers pays à signer la Convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et contre la violence domestique. Une dizaine de centres de conseil sont en train d'être ouverts afin, notamment, de fournir une assistance sur les questions juridiques, de violence, de santé et d'emploi.

En Pologne, où 90% des victimes de violence domestique sont des femmes, le Gouvernement a fait une priorité de la lutte contre cette violence. Le Sénégal pour sa part a adopté une loi pour lutter contre les mutilations génitales féminines et lancé le programme régional du Secrétaire général «Tous unis pour la violences faites aux femmes. » Le Qatar, lui, travaille à la promulgation d'une loi qui mettant hommes et femmes sur un pied d'égalité. Pour l'Argentine, la lutte contre la violence faite aux femmes est une priorité nationale. L'autonomisation des femmes est essentielle au développement de la démocratie, il faut donc les protéger de tout acte de violences. La délégation a détaillé les mesures prises au niveau national pour éradiquer la violence faite aux femmes.

L'Arabie saoudite a fait valoir que la charia interdit toutes les injustices et les violences à l'égard des femmes. C'est pourquoi le pays a adhéré, en 2000, à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes. Des mécanismes ont été mis en place, dont une ligne téléphonique ouverte aux femmes souhaitant se plaindre d'actes de violence. Le Conseil doit continuer de faire le bilan des progrès en la matière et de relever les lacunes, a estimé l'Indonésie. Au niveau national, l'accent est mis sur le renforcement des capacités des femmes, des enfants, des services sociaux et de la police, a indiqué la délégation.

L'Afrique du Sud, convaincue qu'il existe un lien direct entre la pauvreté et la réalisation des droits de l'homme, souligne qu'il faut veiller au respect des droits économiques sociaux et culturels des femmes.

L'Algérie au nom du Groupe arabe, a déclaré qu'il fallait accorder une attention particulière aux femmes marginalisées. Les pays du groupe pour leur part ont adopté des législations de promotion des droits humains de la femme. Il faut absolument que les femmes soient financièrement émancipées afin qu'elles échappent à cette violence, estiment les Maldives. Cela dit, tous les efforts de prévention de la violence faite aux femmes doivent aussi toucher les jeunes hommes. C'est en effet une formation aux droits de l'homme et un accès à la justice qui doivent permettre d'obtenir des résultats probants, a dit Slovénie.

En tant qu'État champion de l'initiative du Secrétaire général sur le droit à l'éducation, la Croatie a estimé que l'un des outils les plus important que l'on puisse disposer dans le cadre de cette lutte, c'est l'égalité, y compris dans le droit à l'éducation; les femmes éduquées subissent moins les violences machistes. Pour la Malaisie aussi, une plus grande éducation et sensibilisation des sociétés est primordiale dans le cadre de cette lutte.

Pour l'Australie, aucune religion ou culture ne peut servir de base pour exercer une discrimination à l'égard des femmes ou exercer des violences contre elles. L'Islande a expliqué que la violence touche aussi les femmes sur la base de leur orientation sexuelle ou identité de genre, et ce dans un climat d'impunité. Les pays doivent adopter des législations encore plus répressives, y compris en matière de de violence sexuelle, a souligné la Suisse.

La Fédération de Russie s'est quant à elle dite préoccupée par les violences dont sont victimes les enfants russes adoptés à l'étranger. Toutes les tentatives de saisine et de recours se heurtent à l'indifférence ou intransigeance des États concernés, a dit la délégation, tout en se disant prête au dialogue.

Institutions nationales des droits de l'homme et organisations non gouvernementales

La Commission canadienne des droits de l'homme a souligné que les femmes et les fillettes autochtones étaient davantage exposées, au Canada, à des actes de violence parfois mortels. Des cas relativement nombreux de disparitions et d'homicides sont en effet signalés, la plupart restant sans suite sur le plan judiciaire. Le Gouvernement a annoncé, récemment, la création d'une commission parlementaire sur cette question

Le Canners International Independent Committee a salué la résilience des femmes confrontées à des crimes épouvantables tels que l'excision ou le meurtre pour dot insuffisante. L'honneur prétendu des hommes ne justifie pas le mariage forcé, ni même l'interdiction faite aux femmes de conduire une voiture.

Pour la Verein Südwind Entwicklungspolitik, la participation politique des femmes en Iran est une pure fiction. L'Iran connaît aussi la pratique du mariage précoce, tandis que sa politique nataliste a conduit à la fermeture de centres de conseil pour les femmes, a déploré l'ONG. Le Minority Rights Group International dont l'oratrice était une représentante des femmes «haratines» (esclaves et esclaves affranchies en Mauritanie) a souligné que la méconnaissance des lois en général, notamment celles incriminant l'esclavage, expliquaient la persistance du phénomène dans son pays. Un tiers d'entre elles n'ont aucune instruction. Le manque de données relatives aux violences touchant cette composante sociale rend difficile de mesurer l'ampleur de toutes les formes de violence envers les femmes haratines.

France-Libertés – Fondation Danielle Mitterrand a souligné que les femmes sahraouies étaient victimes de violences massives en raison de la politique du Maroc. Elles réclament leur droit à l'autodétermination. L'oratrice a indiqué avoir été rouée de coups lors d'une intervention de la police à l'université, violences qui ont entraîné la perte d'un œil. La violence sexuelle est taboue dans la société, ce qui n'empêche qu'un grand nombre de femmes en soient victimes, y compris en pleine rue. Union internationale humaniste et laïque a cité des exemples de violence faite aux femmes dans la sphère publique, citant le cas d'une jeune femme aux Maldives qui, bien qu'elle ait été victime d'abus, a été punie d'un châtiment d'une centaine de coups de fouet en public. Elle a rappelé qu'il en allait de la responsabilité de l'État des protéger les femmes. Elle a aussi affirmé qu'en Chine et en Inde, les violences contre les femmes sont la norme.

Conclusions

MME KHAFAGY a souligné que dans sa région d'origine, la culture et la religion jouent un rôle déterminant en matière de violence familiale, en particulier dans la manière d'interpréter la culture ou la religion. Dans le monde arabe, ces cas de violence sont de plus en plus dénoncés par les femmes. Cependant, lorsque celle-ci est commise en groupe, il reste très difficile pour les femmes d'identifier ou de désigner leurs agresseurs, a-t-elle dit.

Pour MME BUTEGWA, tant que les corps sociaux et les institutions nationales et internationales ne prendront pas conscience du coût économique de la violence à l'égard des femmes, il sera impossible d'investir dans la lutte contre ce phénomène.

MME CUSAK a appelé à un changement culturel et à la prise en compte qu'il n'y pas une seule façon d'être un homme ou une femme. Beaucoup d'efforts ont été fait en matière d'identité sexuelle et de genre, mais cela n'est pas encore suffisant, a-t-elle ajouté . Même en période de crise économique, la sécurité de tous doit être une priorité.

M. AREÁN a estimé que beaucoup de ressources sont gaspillées si elles ne sont pas utilisées à bon escient. De même, des fonds privés existent et peuvent être utilisés, y compris en matière de formation des hommes.

MME SCHULZ a dit souscrire à presque tout ce qui a été dit par les autres intervenants. Cela dit, les femmes ont le droit de disposer librement de leur corps, a-t-elle insisté. Pour leur part, les initiatives des organes conventionnels seront vaines si les États ne changent pas la façon dont ils leur présentent des rapports. Dans la plupart des cas, ils n'en présentent aucun ou ne mettent pas en œuvre leurs engagements. Une réforme de ces organes est également à envisager afin qu'ils traitent plus rapidement les rapports qui leurs sont présentés.

Définir les priorités pour l'avenir: renforcer les efforts du Conseil et autres organismes intergouvernementaux dans le domaine de la violence contre les femmes

Exposés

MME FLAVIA PANSIERI, Haut-Commissaire adjointe aux droits de l'homme, a relevé que les premiers échanges avaient mis en évidence certains progrès en matière d'élimination de la violence contre les femmes. Elle a noté qu'au cours de ses vingt ans d'existence, le mandat de la Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes, ses causes et ses conséquences a conféré davantage de visibilité au lien entre la violence et les discriminations fondées sur le genre, ainsi qu'à la prévalence de la violence faite aux femmes dans la sphère tant publique que privée. Le mandat de la Rapporteuse spéciale a aussi fait la lumière sur les structures sociales et les idéologies qui sous-tendent cette violence. Autre point positif, les autres procédures spéciales et le Comité consultatif du Conseil des droits de l'homme traitent, désormais, de la question de la violence faite aux femmes.

Malgré tous ces efforts, beaucoup reste à faire. Par exemple, peu de recommandations issues de l'Examen périodique universel concernent la prévention et la répression des violences faites aux femmes, a relevé Mme Pansieri. Des mesures simples pourraient être prises pour intégrer le problème de la violence contre les femmes dans le travail du Conseil. Ainsi, le Conseil pourrait intégrer systématiquement cet aspect dans ses résolutions concernant des pays ou portant création de commissions d'enquête, a suggéré la Haut-Commissaire adjointe. Il faut aussi que le Conseil prenne mieux en compte les formes multiples de discrimination, à l'intersection du genre, de l'âge, du handicap, de l'origine ethnique et des opinions, entre autres critères. Enfin, le Conseil doit approfondir sa collaboration avec d'autres mécanismes intergouvernementaux, afin de tirer parti de leurs travaux et qu'ils se renforcent mutuellement.

MME ZAINAB BANGURA, Représentante spéciale du Secrétaire général sur la violence sexuelle dans les conflits armés, a souligné que les violences sexuelles sont peut-être la pire forme de violence infligée aux femmes. Les séquelles du viol s'enracinent profondément dans la chair de la femme. C'est une arme de guerre terrible, a dit la Représentante spéciale. Or, la honte ne devrait pas frapper les victimes du viol, mais au contraire ses auteurs: les gouvernements doivent faire comprendre à ces criminels qu'ils seront retrouvés où qu'ils se cachent et traduits en justice. Mettre fin à l'impunité signifie aussi donner les moyens aux femmes d'accéder à la justice, a encore plaidé Mme Bangura. Pourtant, dans certains pays, les victimes doivent débourser environ 150 dollars pour obtenir un certificat médical prouvant qu'elles ont été violées. Cela traduit la faiblesse de moyens dont disposent les États pour combattre ce problème. Mais pour espérer éradiquer cette forme de violence, il faut s'attaquer à ses causes profondes. Pour cela, les femmes doivent participer à l'élaboration des programmes et moyens d'action.

MME RASHIDA MANJOO, Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes, ses causes et ses conséquences, animatrice du débat, a résumé les conclusions de son dernier rapport, en soulignant l'importance d'amender les lois tout en traitant des causes profondes de la violence. Il est prouvé qu'il y a un lien direct entre les mesures prises par les États et la régression de la violence envers les femmes. Mme Manjoo a déploré n'avoir guère reçu de réponses des États aux questions qu'elle leur avait posées lors de la rédaction de son rapport. Par contre, elle a déjà reçu de nombreux éléments de réponse lors de la première partie de ce débat, s'est-elle félicitée.

MME PATIENCE STEPHENS, de l'Entité des Nations Unies pour l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes (ONU-Femmes), a expliqué qu'ONU-Femmes fédère les quatre institutions onusiennes qui l'avaient précédée. ONU-Femmes œuvre en étroite concertation avec le Conseil des droits de l'homme. Il y a lieu d'être découragé, a-t-elle reconnu, lorsque l'on constate que certaines questions, considérées comme problématiques par les participants à la cinquante-septième session de la Commission de la condition de la femme (mars 2013), allaient de soi il y a vingt ans, un véritable «bond en arrière». Les cultures, la tradition, la religion ne sauraient être invoquées pour justifier les violences faites aux femmes, a-t-elle rappelé. La coercition dans le cadre des rapports de couple est considérée, par certains, comme conforme aux traditions, d'où l'impossibilité d'aborder formellement cette question dans le cadre de la Commission de la condition de la femme, a regretté Mme Stephens. La violence faite aux femmes n'est pas un problème isolé: elle s'inscrit dans un éventail complexe de phénomènes sociaux, a-t-elle observé.

M. SANDEEP CHAWLA, de l'Office des Nations unies contre le crime et la drogue, a présenté la Commission de prévention de la criminalité et de la justice pénale, qui joue un rôle très important au sein du système des Nations Unies. La Commission intervient à de nombreux titres, notamment l'élaboration des normes d'accès à la justice, la conception de stratégies locales et le recueil de bonnes pratiques au niveau international. La violence faite aux femmes touchant tous les pays du monde, il est primordial que les stratégies soient appliquées au niveau global, a expliqué M. Chawla. L'expert a cité plusieurs difficultés de la lutte contre la violence à l'égard des femmes à l'échelle des pays, notamment les cadres législatifs défaillants et la faiblesse du système judiciaire et de la police. D'autre part, l'adoption de stratégies mieux ciblées exige des statistiques ventilées par sexe qui font souvent défaut.

Pour MME MARYLOU MCPHEDRAN, de l'Institute for International Women's Rights de l'Université de Winnipeg (Canada), l'exercice de leurs droits par les femmes dépend d'abord de la coordination entre les différents organes des Nations Unies, en particulier entre le Conseil des droits de l'homme et le Conseil de sécurité. Les résolutions condamnant la violence contre les femmes sont certes importantes: mais elles risquent de compromettre la contribution des femmes en tant que chefs de file et dirigeantes, selon Mme McPhedran. Il faudrait aussi accorder une plus grande importance à l'origine des violences, comme par exemple la répartition inéquitable des revenus. L'autonomisation économique des femmes est la clé de l'élimination de la violence contre les femmes. La recherche montre que les mouvements féministes autonomes jouent également un rôle prépondérant dans le changement. Mme McPhedran a enfin souligné l'importance d'une véritable alliance entre les sexes pour combattre efficacement la violence contre les femmes.

Débat

Pour le Gabon, au nom du Groupe africain, les menaces qui pèsent sur la sécurité des femmes devraient être identifiées en vue de leur éradication, particulièrement en période de crise ou de conflit. Les femmes doivent jouer un rôle majeur dans les négociations de paix et la reconstruction post-conflit, a-t-il ajouté. Pour l'Espagne, la violence faite aux femmes appelle d'urgence une action vigoureuse et coordonnée de la communauté internationale. Il est urgent de traiter la question des meurtres de femmes – les féminicides – et de l'impunité des responsables, a-t-elle ajouté.

Le Comité international de la Croix-Rouge a constaté que la violence sexuelle avait des conséquences physiques, émotionnelles et psychologiques très graves. Le CICR demande aux États d'adopter des mesures répondant aux besoins des victimes. En particulier, les femmes victimes de violence sexuelle devraient bénéficier d'un accès aux soins dans les 72 heures après l'agression, ainsi que d'une aide juridique. La force publique, militaire et civile, doit être formée pour prévenir les agressions sexuelles et protéger les victimes. À cet égard, l'engagement des États est crucial, a conclu la délégation. L'ONUSIDA a souligné que les femmes vivant avec le VIH/sida sont particulièrement ciblées par les violences. Dans de nombreux pays, ces femmes sont d'ailleurs considérées comme des criminelles. Il faut prendre des mesures de protection en leur faveur. L'Organisation internationale du travail (OIT) a appelé le Conseil à porter son attention sur les violences faites aux femmes sur leur lieu de travail, qui est propice au déploiement de mesures de prévention. À cet égard, les inspecteurs du travail ont un rôle crucial à jouer, a-t-elle noté. L'OIT envisage d'adopter un nouvel ensemble de normes pour lutter contre les violences sexuelles sur le lieu de travail.

L'Éthiopie a présenté les mesures prises au niveau national pour réduire les violences faites aux femmes, notamment les mesures relatives à leur autonomisation économique. De même, l'Algérie a décrit ses efforts pour améliorer la participation des femmes et renforcer l'égalité entre les sexes. Les femmes libyennes jouent un rôle important dans le développement de la société et dans la prise de décision politique, a assuré la délégation de la Libye. L'Égypte, pour sa part, a présenté ses lois incriminant les différents types de violence faite aux femmes. Il faut créer des synergies avec la société civile, renforcer les capacités des forces de l'ordre en matière de réaction aux violences contre les femmes et s'attaquer aux causes profondes des violences, a conclu la délégation.

Le Pérou a détaillé ses programmes et mesures de lutte contre les violences à l'égard des femmes et pour la réhabilitation des victimes. Le Venezuela a indiqué avoir promulgué plusieurs lois garantissant les droits des femmes, lois conformes aux instruments internationaux en la matière. Il plaide pour l'échange d'expériences et de «bonnes pratiques» sur les plans national, régional et international, en vue d'éradiquer tous les types de violence faite aux femmes.

Depuis plusieurs décennies, le Maroc a amorcé une série de réformes structurelles, législatives, politiques et sociales importantes, plaçant la question de l'égalité entre l'homme et la femme au centre de la politique nationale. Le Koweït est convaincu de la nécessité de lutter contre toutes les formes de discrimination. La famille étant la pierre angulaire de la société, le viol conjugal est dûment sanctionné, a précisé la délégation. Les autorités de l'Inde recensent toutes les pratiques traditionnelles néfastes aux droits des femmes en vue de les éradiquer. La loi pénale a été amendée pour prendre en compte tous les types de comportements agressifs envers les femmes.

Les Maldives ont déclaré que la peine de flagellation infligée à une adolescente de 15 ans par la justice a montré la nécessité de revoir les mécanismes actuels, particulièrement le cadre juridique du pays. Cette jeune fille est maintenant sous la protection de l'État, qui a fait appel de la sentence. Le Paraguay a lancé un programme d'action pour protéger en particulier les femmes autochtones et les handicapées. La Mauritanie a indiqué que sa loi fait désormais de l'esclavage un crime contre l'humanité. Le Portugal a adopté un plan contre la violence domestique et, simultanément, ouvert de nouveaux foyers d'accueil.

Abordant le thème des mesures à prendre par la communauté internationale pour lutter contre la violence à l'égard des femmes, l'Allemagne a souligné que l'un des principaux problèmes en suspens avait trait au droit à la santé sexuelle et reproductive des femmes victimes de violence. Les Émirats arabes unis ont constaté qu'aucune solution miracle n'avait permis de remédier au problème de la violence contre les lemmes, dont la généralisation est très préoccupante. La Finlande a souligné la nécessité d'impliquer les hommes et les garçons de manière plus volontariste dans la lutte contre les violences faites aux femmes.

Pour la Suisse, il ne faut pas dissocier le renforcement du système d'organes conventionnels de la question de la violence contre les femmes, car ils jouent un rôle important dans la mise en œuvre des droits des femmes. Il faut renforcer les synergies entre les différents mécanismes, afin d'en améliorer l'efficacité et d'en réduire les coûts. Le Monténégro a appelé à une meilleure coopération entre les différents organes chargés de la protection et de la promotion des femmes, afin d'aider les États à remplir leurs obligations en la matière. Entre autres, le Fonds monétaire international et la Banque mondiale devraient tenir compte de la perspective de genre dans leurs programmes. Pour sa part, l'Estonie a admis l'existence pour les États d'un devoir de diligence qui doit être rempli dans le cadre d'une approche globale. La résolution 1820 du Conseil de Sécurité a permis la reconnaissance du viol comme arme de guerre dans les conflits armés, constitutif d'un crime de guerre, contre l'humanité, voire de génocide. Elle a appelé à lutter contre l'impunité des responsables de tels crimes.

L'Organisation de la coopération islamique entend donner une orientation concrète, grâce à sa Commission permanente indépendante des droits de l'homme, à la prévention, dans ses États membres, de toutes les formes de violence, d'exploitation et d'atteintes aux droits des femmes. L'OCI prévoit en outre d'adopter un plan d'action pour l'autonomisation des femmes. La création, au Caire, d'un organisme dédié à la promotion de la femme ira dans le même sens. La Turquie a relevé que les femmes et les filles continuent de subir des formes traditionnelles de violence, dont les mariages précoces. Une approche tenant compte des besoins de tous les membres de la société est nécessaire, afin de s'attaquer aux causes profondes de la violence faite aux femmes, a-t-elle estimé. La Fédération de Russie a déclaré soutenir un dialogue constructif sur cette question, dans l'intérêt de tous les groupes régionaux. Une convergence est nécessaire entre les stratégies et leur mise en œuvre.

Le Chili a demandé au Conseil de concevoir des mécanismes d'action avec le concours d'ONU-Femmes, dans le cadre d'initiatives conjointes. La Thaïlande a souligné que les efforts du Conseil doivent compléter ceux d'autres instances de l'ONU, sans oublier les organes régionaux. Elle souhaite une coopération plus étroite entre les États membres, les organes de traité et les titulaires de mandats de procédures spéciales.

La Chine a constaté que si la communauté internationale n'a pas ménagé sa peine pour lutter contre la violence à l'égard des femmes, elle doit encore faire preuve d'un plus grand volontarisme, notamment dans le cadre du programme de développement pour l'après-2015. Conseil de sécurité, Conseil des droits de l'homme et ONU-Femmes doivent jouer leur rôle dans cet effort. La Norvège s'est dite heureuse de constater l'existence d'un consensus sur la nécessité de définir un objectif sur l'égalité entre les sexes en tant que telle, outre la prise en compte du genre de manière transversale dans tous les autres objectifs.

La Belgique a appelé les États qui ne l'ont pas encore fait à ratifier la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes et à la mettre pleinement en œuvre.

Institutions nationales de droits de l'homme et organisations non gouvernementales

Le Comité international de coordination des institutions nationales des droits de l'homme a relevé que les États ont la responsabilité de mettre un terme aux violences faites aux femmes. Les institutions nationales des droits de l'homme sont compétentes pour conseiller les États sur les mesures à prendre et pour renforcer les synergies internationales, a-t-il souligné.

Action Canada pour le développement et la population a rappelé que les États ont l'obligation de prévenir et punir la violence faite aux femmes. Des politiques judiciaires efficaces sont nécessaires, mais il faut surtout prévenir la violence en vue de l'éradiquer. L'organisation Femmes Afrique Solidarité s'est dite préoccupée par les violences, notamment sexuelles, faites aux femmes et aux filles dans les conflits armés en Afrique, en particulier en République démocratique du Congo. Elle a aussi condamné toutes les formes de violence subies par les femmes en République centrafricaine, appelant à traduire en justice leurs auteurs.

L’Alliance mondiale des unions chrétiennes de jeunes filles a indiqué que plus de 40% des premiers rapports sexuels se faisaient sous la contrainte d'hommes bien plus âgés que leurs partenaires. Les jeunes filles mariées précocement sont privées d'instruction. Il semble néanmoins possible d'éradiquer le phénomène du mariage précoce en l'espace d'une génération. Maarij Foundation for Peace and Development estime nécessaire la mise en œuvre de politiques de discrimination positive.

La Worldwide Organization for Women a indiqué que les agressions sexuelles se multiplient depuis le début du conflit en Syrie, particulièrement dans les camps de réfugiés. La prostitution explose, tandis que les mariages précoces compromettront la création d'un État syrien stable.

Conclusions

MME BANGURA a expliqué que le viol utilisé comme tactique militaire a pour but de déstructurer les sociétés. Les crimes d'honneur, où des pères tuent leurs filles violées plutôt que de subir une stigmatisation, ne sont pas un problème culturel: les seigneurs de guerre eux-mêmes ne veulent pas que leurs propres filles ou femmes soient violées. Mme Bangura a invité chacun à réfléchir à la manière dont il pourrait protéger sa fille ou sa femme en temps de guerre. Pour Mme Bangura, la lutte contre les violences sexuelles est un combat que l'on ne peut se permettre de perdre.

M. CHAWLA a indiqué qu'il est possible de combler certaines lacunes en dotant les tribunaux de magistrats et de personnels spécialisés.

MME STEPHENS a observé que la question de la violence faite aux femmes est si complexe qu'elle mérite que tout le système des Nations Unies s'y attelle, en particulier le Conseil des droits de l'homme et la Commission de la condition de la femme. Il faut travailler sur plusieurs plans et établir des stratégies et des synergies.

MME MCPHEDRAN a déclaré que l'Examen périodique universel pose un problème de crédibilité, en ce sens qu'il faut encore trouver le moyen d'obliger les États à tenir leurs promesses. Dans ce contexte, il est important d'investir dans la participation de la société civile, pour qu'elle veille à la mise en œuvre des recommandations.

MME MANJOO a relevé que les mesures systématiques ont les résultats les plus probants. La Commission de la condition de la femme, organe intergouvernemental crée en 1946 reste, à ses yeux, le forum approprié pour débattre de toutes les questions ayant trait aux femmes. Enfin, les États doivent prendre conscience de la nécessité d'adopter un instrument juridique contraignant pour lutter contre les violences faites aux femmes.

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