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CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME: DISCUSSION AUTOUR
D'UN PROJET DE CONVENTION SUR LES DISPARITIONS FORCÉES

Arrière

27 Juin 2006

Conseil des droits de l'homme
MIDI (12 heures à 15 heures) 27 juin 2006

Au cours de sa séance supplémentaire de midi, le Conseil des droits de l'homme a poursuivi son débat sur les questions de fond en discutant du rapport du Groupe de travail intersessions à composition non limitée chargé d'élaborer un projet d'instrument normatif juridiquement contraignant pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.

Plusieurs membres du Conseil ont salué le fait que le projet érige les pratiques de disparitions forcées en véritables crimes, voire en crimes contre l'humanité selon leur degré de gravité, et qu'il consacre le principe des réparations dues aux victimes et à leurs familles. Certains intervenants ont appelé à l'adoption par acclamation du projet de convention pendant la présente session du Conseil des droits de l'homme et son renvoi à la prochaine session de l'Assemblée générale pour adoption définitive. La Russie, entre autres États, a fait valoir sa satisfaction de constater que le projet responsabilisait les acteurs non étatiques auteurs de disparitions forcées. Le rôle important des associations de familles de personnes disparues, comme inspiratrices de l'action des instances des droits de l'homme, a été plusieurs fois mentionné.

Les délégations des États membres suivants se sont exprimées dans le cadre de l'examen du rapport sur la convention relative aux disparitions forcées: Inde, Indonésie, France, Argentine, Maroc, Brésil (en son nom propre et au nom du Groupe des pays d'Amérique latine et des Caraïbes), Fédération de Russie, Japon, Guatemala, Équateur, Pakistan, Chine, Azerbaïdjan, Algérie, Sénégal, Bangladesh et Cameroun.

Les représentants du Costa Rica, de l'Espagne, du Chili, de la Belgique, des États-Unis, de la Grèce et de la Bolivie ont également pris la parole, ainsi que le Comité international de la Croix-rouge, le Centre d'information pour les droits de l'homme aux Philippines, Federación Latinoamericana de Asociaciones de Familiares de Detenidos-Desaparecidos (au nom également de Amnesty International, Commission internationale des juristes, Service international pour les droits de l'homme, Fédération internationale des ligues des droits de l'homme, Human Rights Watch), Fédération mondiale des associations des Nations Unies, Familles des victimes des disparitions forcées, Assemblée permanente des droits de l'homme, Union d'action féminine, Conseil consultatif des droits de l'homme du Maroc.

L'Algérie a fait usage de son droit de réponse.

Le Conseil des droits de l'homme poursuit ses travaux cet après-midi pour examiner le rapport du Groupe de travail sur le projet de déclaration des Nations Unies concernant les droits des peuples autochtones.


Examen d'un projet d'instrument normatif pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées

M. AJAI MALHOTRA (Inde) a estimé que la communauté internationale doit mettre l'accent sur le renforcement de la capacité des États à mettre en œuvre le texte présenté. L'Inde n'est pas convaincue de la nécessité d'une convention séparée et aurait préféré que l'on élabore un protocole facultatif au Pacte international relatif aux droits civils et politiques. L'Inde souligne que la définition de la disparition forcée énoncée par le projet de convention est ambiguë. L'absence des entités non étatiques n'est pas non plus la bienvenue.

MME WIWIEK SETYAWATI (Indonésie) a déclaré qu'il fallait absolument éradiquer les disparitions forcées et a assuré que son pays souscrivait pleinement au principe de tolérance zéro à cet égard. Néanmoins, un instrument aussi important que le projet de convention aurait dû recueillir un consensus plus large au cours des discussions. Lors des délibérations, certains pays ont en effet avancé des préoccupations concernant certains points précis du dispositif, préoccupations partagées en partie par l'Indonésie. Toutefois, compte tenu de l'importance de ce texte, l'Indonésie espère que le Conseil examinera ce texte de manière positive.

M. JEAN-MAURICE RIPERT (France) s'est dit convaincu que le projet de convention internationale comble un vide juridique. La convention fait avancer le droit en définissant un nouveau crime: le crime de disparition forcée, et en consacrant le droit de ne pas disparaître et le droit de savoir. Ces droits correspondent à des exigences fondamentales. La convention constitue un véritable test pour le nouveau Conseil. «Prenons nos responsabilités et adoptons le projet de convention avant la fin de notre session», a conclu le représentant.

M. SERGIO CERDA (Argentine) a déclaré que le projet de convention pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées devrait être adopté. Il a estimé que l'opinion publique mondiale attend beaucoup de la présente session du Conseil. Le Groupe de travail a conclut ses travaux avec succès en 2005, aboutissant au projet actuellement soumis, et il devrait être adopté par consensus. Le texte tient compte de tous les besoins et préoccupations; le résultat est un projet de convention équilibré. Le représentant argentin a en outre souligné les excellentes contributions conceptuelles et pratiques faites par les organisations non gouvernementales, en particulier les associations de victimes. Le texte comprend en outre des sanctions pénales concernant l'enlèvement d'enfants dans le conteste des disparitions forcées, question à laquelle l'Argentine accorde une importance particulière.

M. OMAR KADIRI (Maroc) a déclaré que la convention viendra combler un vide et renforcer ainsi l'arsenal juridique international pour la protection des droits de l'homme. Le Maroc a participé activement aux travaux de préparation de ce texte important qui garantit en particulier aux victimes le droit aux réparations. Le Maroc a aussi manifesté sa ferme volonté de clore le dossier des disparitions forcées s'étant produites au Maroc par le passé, et présenté l'action de l'instance nationale de vérité et réconciliation dans ce domaine. Le Maroc réaffirme ainsi son appui au texte et exprime le souhait que la prochaine Assemblée générale des Nations Unies fera de même lors de sa prochaine session.

M. CLODOALDO HUGUENEY (Brésil, au nom du Groupe des États d'Amérique latine et des Caraïbes) a lancé un appel au Conseil afin qu'il adopte par acclamation le projet de convention pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, un texte dont la fonction est humanitaire au sens strict du terme. Le Conseil devrait ensuite transmettre le projet de convention à l'Assemblée générale en vue de son entrée en vigueur à brève échéance.

MME MARINA KORUNOVA (Fédération de Russie) a déclaré que l'on ne saurait exagérer l'importance du problème abordé par le projet de convention, surtout quand on apprend les nouveaux crimes qui se produisent pratiquement chaque jour, ainsi de l'enlèvement et de l'assassinat récents de quatre diplomates russes en Iraq. Le Conseil doit donc accorder à ce thème une attention égale à celle que lui portait l'ancienne Commission. L'adoption du texte permettra de renforcer l'arsenal juridique de protection des libertés et la Russie est particulièrement satisfaite de la présence de dispositions responsabilisant les acteurs non-étatiques auteurs de tels crimes. Il s'agit là d'une manière très opportune de refléter les changements contemporains, a estimé la représentante.

M. TETSUYA KIMURA (Japon) a déclaré que la communauté internationale se doit de combattre les disparitions forcées. Le Japon se félicite des travaux accomplis à cet égard par le Groupe de travail sur les disparitions forcées, dont le rapport reflète bien toutes les préoccupations qui se sont exprimées lors des travaux. Le Japon souhaite se porter co-auteur du projet de résolution présenté par la France sur l'adoption du projet de convention sur la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.

MME CARLA RODRÍGUEZ MANCIA (Guatemala) a dit sa satisfaction de constater que le projet de convention tient compte du fait que les disparitions forcées peuvent être le fait d'acteurs non étatiques. Il est aussi bon que les États soient désormais formellement tenus de poursuivre les auteurs des violations. À cet égard, le Guatemala a déjà pris, au niveau interne, des dispositions permettant d'intensifier les recherches de personnes disparues. Le Guatemala approuve fermement le projet de convention et espère qu'il sera adopté lors de cette session du Conseil.

M. GALO LARENAS SERRANO (Équateur) s'est félicité de la qualité du rapport du Groupe de travail sur les disparitions forcées. Il faut accorder la protection voulue au droit à la vie. La disparition forcée est une violation flagrante du droit à la vie dont les conséquences sont particulièrement néfastes pour les familles des victimes. L'Équateur est favorable à l'adoption du texte sous la forme d'un instrument international juridiquement contraignant.

MME TEHMINA JANJUA (Pakistan) a déclaré que le renforcement du cadre juridique en matière de lutte contre les disparitions forcées, une violation très grave du droit à la vie, était une démarche très importante. Le Pakistan a toujours appuyé les travaux du Groupe, qui a fait un effort sincère pour parvenir à un résultat équilibré. L'adoption de la convention par le Conseil permettra à ce dernier de se montrer sous un jour plus humain, a estimé la représentante.

M. DONG ZHIHUA (Chine) s'est félicité que le Groupe de travail ait fondé son approche sur le consensus. C'est seulement de cette manière que les instruments internationaux peuvent jouer un rôle important. La Chine espère que la convention pourra dissiper les hésitations que pourraient avoir certains pays quant à son application.

M. MAMMAD TALIBOV (Azerbaïdjan) a déclaré que le Groupe de travail avait parcouru un chemin important, le Conseil devant maintenant se prononcer sur ses travaux. Le phénomène des disparitions forcées est extrêmement grave, il faut le combattre et le prévenir. L'Azerbaïdjan est coauteur du projet de résolution, dont l'adoption symboliserait l'engagement de la communauté internationale dans ce domaine.

M. IDRISS JAZAÏRY (Algérie) a déclaré que son pays se félicitait du consensus qui semble se dégager au sein du Conseil sur l'adoption du projet de convention internationale sur la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées. L'Algérie se joint à ce consensus et souhaite que l'adoption de cette convention consacre une véritable amélioration de la protection de la personne de par le monde.

M. ABDUL WAHAB HAIDARA (Sénégal) a déclaré qu'il était difficile d'être toujours à l'abri d'une disparition forcée, le texte considéré renforçant à cet égard non seulement cette liberté fondamentale, mais toutes les libertés individuelles au plan international.

M. HEMAYETUDDIN (Bangladesh) a souligné que les disparitions forcées sont probablement l'une des pires violations des droits de l'homme. Le Bangladesh s'est d'ailleurs doté de lois très sévères pour lutter contre ce phénomène. Il souhaite se joindre au consensus sur l'adoption du projet de convention pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.

M. SAMUEL MVONDO AYOLO (Cameroun) a déclaré que la question des disparitions forcées continue de s'aggraver et prend actuellement une dimension universelle. Le représentant a salué le côté équilibré du projet et son rôle novateur. Les auteurs - étatiques ou non - sont désormais prévenus de la gravité de leurs actes. Le Cameroun s'est porté coauteur du projet de résolution par lequel le Conseil proposera à l'Assemblée générale d'adopter la convention.

MME CORDULA DROEGE (Comité international de la Croix-rouge) s'est dite gravement préoccupée par le sort des personnes disparues. La disparition forcée est une violation grave du droit humanitaire et du droit international des droits de l'homme. L'interdiction de la disparition forcée ne doit être susceptible d'aucune exception. Pour lutter contre les disparitions forcées, il faut agir de manière préventive et c'est précisément la raison pour laquelle le projet de convention est aussi important. Ce projet énonce par exemple que toute personne privée de liberté doit être enregistrée et doit bénéficier d'un contact avec sa famille. Le CICR se félicite que de tels éléments soient énoncés par une convention mais appelle les États à redoubler d'efforts pour mettre un terme aux disparitions forcées.

M. LUIS VARELA QUIROS (Costa Rica) a déclaré que son pays avait participé activement aux travaux autour de ce texte. Un instrument de nature universelle est nécessaire qui puisse répondre aux besoins des États et fixer leurs obligations en matière de lutte et de réparation. Les victimes ne doivent pas être oubliées et il faut espérer que la convention permettra le respect universel de ce droit des personnes par les acteurs étatiques et non étatiques.

M. JOAQUÍN MARÍA DE ARISTEGUI LABORDE (Espagne) a toujours estimé que la lutte contre les disparitions forcées était une priorité absolue. Le Conseil devrait adopter ce projet de convention car ce texte viendra utilement compléter les règles internationales relatives à la lutte contre l'impunité, notamment, et parce qu'il répond aux attentes légitimes des victimes, des membres de leurs familles et de leurs proches. L'Espagne souhaite être un des premiers signataires du texte.

M. PATRICIO UTRERAS (Chili) a rappelé que le caractère préventif de cette convention est primordial, notamment les obligations suivantes: l'interdiction de la détention secrète qui oblige les États à enregistrer toutes les détentions; l'obligation de fournir des informations détaillées sur les conditions de détention et la garantie d'une procédure judiciaire rapide et avec un recours. Cette convention est une réponse appropriée à l'attente de la communauté internationale. Elle devrait être adoptée par consensus, a conclu le représentant.

M. BART OUVRY (Belgique) a salué l'action du Président du Groupe de travail, qui a permis d'aboutir à un consensus sur le texte. Le représentant a dit la détermination des familles des personnes disparues, l'un des moteurs du travail des organes des droits de l'homme en vue de l'adoption d'un texte susceptible d'améliorer le sort des victimes et de leurs familles. Le représentant belge a aussi souligné le rôle crucial de la société civile et des organisations non gouvernementales dans les travaux du Groupe de travail. La convention adoptée par l'Assemblée générale devra ensuite être appliquée, a prévenu le représentant.

MME PAULA BARTON (États-Unis) a demandé au Conseil de faire référence au document écrit soumis au Secrétariat qui contient l'interprétation légale et les réserves des États-Unis s'agissant du texte du projet de convention.

M. FRANCISCOS VERROS (Grèce) a remercié le président du Groupe de travail et appelé le Conseil à adopter le texte par consensus. Ce projet est un pas important en direction des familles des personnes disparues et comblera un vide juridique important, permettant notamment la poursuite de ces crimes devant les juridictions pénales internationales.

La représentante de la Bolivie a rappelé que l'incertitude constante que vivent les familles en cas de disparition constitue également un cas de torture. Il est urgent de mettre en place des mécanismes juridiques internationaux pour sanctionner toutes ces pratiques. La représentante a prié tous les États membres du Conseil à adopter le projet de convention a sa présente session.

MME MARY AILEEN BACALSO (Centre d'information pour les droits de l'homme aux Philippines) a souhaité faire entendre la voix du continent asiatique, où sont disparues de très nombreuses personnes, que ce soit en Chine, au Cachemire, en Indonésie, aux Philippines, à Sri Lanka ou en Thaïlande. La société et les familles ont été très choquées par ces disparitions et attendent avec impatience l'adoption de la convention, qui leur donnera des droits non seulement face aux criminels, mais aussi vis-à-vis des États, qui seront obligés d'agir.

MME MARTA OCAMPO VÁSQUEZ (Federación Latinoamericana de Asociaciones de Familiares de Detenidos-Desaparecidos) a rappelé que les disparitions forcées constituent la négation même de l'être humain. Ce projet de convention vient combler une lacune intolérable pour lutter contre cette violation si grave des droits de l'homme. La convention fournira à la communauté internationale un instrument juridique lui permettant de lutter efficacement contre les disparitions forcées et constituera aussi un message fort.

MME BRUMA MOLINA FAIDUTTI (Fédération mondiale des associations des Nations Unies) a dit que son organisation saluait les conclusions du Groupe de travail, faisant remarquer que c'est grâce à l'action des associations des familles de victimes que ce problème est parvenu sur le devant de la scène des droits de l'homme. La convention une fois adoptée sera un instrument juridique important car elle fondera le droit de chacun d'exiger de connaître les circonstances d'une disparition forcée. La convention prévoit aussi le principe important des réparations dues aux victimes et à leurs familles. La convention mérite donc pleinement d'être adoptée par le Conseil des droits de l'homme, a dit la représentante.

MME MILDA SUMILLA (Familles des victimes des disparitions involontaires) a rappelé que les yeux de milliers de disparus étaient portés sur le Conseil des droits de l'homme et qu'il devait absolument adopter cette convention.

M. HORACIO RAVENNA (Assemblée permanente des droits de l'homme) a dit que l'instrument proposé, avec ses «clairs-obscurs», comportait plusieurs aspects très positifs: définition des disparitions comme un crime contre l'humanité, réaffirmation du principe d'extradition, suppression de la prescription. L'article 24 donne une définition suffisamment ouverte de la notion de victimes. La convention est une contribution capitale pour l'avenir des droits de l'homme. Le Conseil doit continuer d'améliorer les instruments de protection des droits de l'homme et, donc, approuver le projet qui lui est soumis.

M. OUARDI ZAHNA (Union de l'action féminine) a estimé qu'une une fois ratifiée, cette convention constituera un instrument fondamental. Le représentant a dit espérer que le Maroc ratifiera cette convention sans réserve afin de renforcer les droits de l'homme dans ce pays et lutter contre l'impunité.

M. MAHJOUB EL HAIBA (Conseil consultatif des droits de l'homme du Maroc) a dit que son organisation, qui a participé au processus de justice transitoire engagé au Maroc, estime que la convention participera de manière décisive à la défense du droit à la vérité et qu'elle renforcera la paix et la sécurité dans le monde. Le Conseil estime aussi que la convention permettra la mise en place de bonnes conditions de réconciliation dans les États touchés par les disparitions forcées. Il est à espérer qu'elle entrera en vigueur au plus tôt, a conclu le représentant.

M. BERNARD KESSEDJIAN, Président-Rapporteur du Groupe de travail, a tenu à dire en conclusion qu'il était très touché par les appréciations positives portées sur le travail du Groupe de travail.

Droit de réponse

Le représentant de l'Algérie s'est inscrit en faux contre les propos tenus par une organisation nationale ce matin et a rappelé qu'une mission du Haut-commissariat aux droits de l'homme s'est rendue dans la région de Tindouf.


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