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LE CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME EXAMINE LES RAPPORTS SUR LA VIOLENCE À L'ÉGARD DES FEMMES ET LA TRAITE DES ÊTRES HUMAINS


Arrière

20 Septembre 2006

Conseil des droits de l'homme
MATIN

20 septembre 2006


Elle conclu l'examen des rapports sur les
exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires et les personnes déplacées.


Le Conseil des droits de l'homme a examiné, ce matin, l'examen de rapports sur la violence contre les femmes et sur la traite des êtres humains. Un débat interactif avec les délégations a suivi la présentation de ces rapports. En début de séance, le Conseil a entendu les conclusions des experts chargés respectivement des exécutions extrajudiciaires et des personnes déplacées, qui ont présenté hier leurs rapports.

Le rapport de Mme Yakin Erturk, Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes, ses causes et ses conséquences, porte cette année sur «le critère de la diligence due en tant que moyen de mettre un terme à la violence contre les femmes», y compris le droit de vivre une vie sans violence. L'obligation de diligence signifie que les États ont le devoir de prendre des mesures positives pour prévenir les actes de violence à l'égard des femmes, les protéger de tels actes, en punir les auteurs et offrir réparation aux victimes. À ce jour cependant, l'application du critère de la diligence due consiste simplement à réagir à la violence au moment où elle se produit, sans tenir compte le plus souvent de l'obligation de prendre des mesures de prévention et d'accorder réparation, ni de la responsabilité des acteurs non étatiques. La Rapporteuse spéciale a ensuite rendu compte de ses visites en Russie, en Iran, au Mexique, et en Afghanistan. L'Afghanistan, l'Iran, le Mexique et la Fédération de Russie sont intervenus en tant que pays concernés.

Mme Sigma Huda, Rapporteuse spéciale sur la question de la traite des êtres humains, en particulier des femmes et des enfants, a rappelé que ce phénomène est une violation fondamentale des droits humains et qu'elle suscite encore des problèmes aux ramifications nombreuses. Mme Huda a consacré son rapport à la traite à des fins sexuelles et en particulier au rôle des consommateurs de services sexuels dans la création de la demande. Cette demande, fondée sur des rapports de pouvoir mettant en jeu des considérations de race, de nationalité, de caste ou de couleur, correspond à une «forme très sexualisée de racisme». Or, cette demande est l'un des facteurs les moins bien étudiés dans le cadre des politiques de lutte contre la traite des êtres humains. La Bosnie-Herzégovine et le Liban sont intervenus en tant que pays concernés.

Les représentants des pays suivants sont intervenus dans le cadre du dialogue interactif qui a suivi la présentation de ces deux rapports: Bélarus, Argentine, Uruguay, Costa Rica, Nouvelle Zélande, Chili, Norvège, Brésil, Australie, Japon, Finlande, Soudan, Canada, Islande, Maroc, Suisse, Philippines, Algérie, Bangladesh et Thaïlande.

Dans le cadre de l'examen du rapport sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, le Rapporteur spécial, M. Philip Alston, a répondu aux questions posées hier après-midi par les membres du Conseil, se disant très rassuré par le ton général du débat. Il a notamment salué les interventions de pays où il s'est rendu en mission, qui témoignent de l'importance qu'ils accordent au dialogue. Au terme de cette intervention, les Philippines, l'Algérie et la Géorgie, ont exercé un droit de réponse.

Le Représentant spécial pour les droits de l'homme des personnes déplacées dans leur propre pays, M. Walter Kälin, a pour sa part remercié les pays qui l'ont reçu pour la collaboration dont ils ont fait preuve. Le Zimbabwe et le Sri Lanka ont exercé un droit de réponse.

Le Conseil reprendra cet après-midi, à 15 heures, l'examen des rapports sur la violence contre les femmes et la traite des êtres humains, avant d'examiner les rapports sur la question de la torture et sur les détentions arbitraires.



Conclusions et réponses du Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires et du Représentant spécial sur la situation des personnes déplacées

M. PHILIP ALSTON, Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, a répondu aux questions posées hier après-midi par les membres du Conseil, se disant très rassuré par le ton général du débat. Il a notamment estimé que les observations du Nigéria et du Nicaragua sont rassurantes et témoignent de l'importance accordée par ces pays au dialogue. Elles constituent aussi une réaffirmation de la valeur des procédures spéciales des Nations Unies. Concernant certaines questions concrètes posées par exemple par l'Algérie, relatives à des commentaires faits par le Rapporteur spécial sur un projet de loi d'amnistie soumis au référendum dans ce pays, M. Alston a observé qu'inévitablement, il va demeurer une différence entre la position de la communauté internationale et celle des Gouvernements des pays qui sortent de conflits. La communauté internationale évolue nettement vers une conception restrictive des lois d'amnistie. Il est compréhensible que les États concernés accueillent mal cette position. M. Alston a par ailleurs fait remarquer qu'il n'aurait servi de rien de faire part de ses commentaires après la tenue de ce référendum. Quoi qu'il en soit, le Rapporteur spécial a remercié le Gouvernement de l'Algérie de sa coopération pendant sa visite.

Quant aux explications du Nigéria concernant les condamnations à mort prononcées pour crime de sodomie, elles sont insuffisantes, a estimé M. Alston. Ce dernier a fait valoir que lors de discussions qu'il a eues sur place avec des juristes, il lui a été signifié que cette sanction, bien que présente dans la loi, ne serait jamais appliquée. Or, la visite du Rapporteur lui a montré au moins un prisonnier condamné à mort pour «sodomie» et attendant, depuis plusieurs années, dans le couloir de la mort, dans des conditions éprouvantes. Cette assurance officieuse que la peine de mort ne lui serait pas infligée ne lui est manifestement d'aucun secours moral. Le Gouvernement du Nigéria doit donc réaffirmer ses obligations juridiques et faire en sorte que les différentes parties du pays se conforment à la loi. M. Alston a par ailleurs estimé que trois ans était un délai sans doute un peu long pour recevoir du Gouvernement de l'Iran une date de confirmation de visite.

M. Alston s'est félicité que de nombreux pays d'Asie aient exprimé leur soutien à l'action du Gouvernement de Sri Lanka. À l'origine, un mécanisme international de surveillance aurait dû être mis sur pied dans ce pays: à l'heure actuelle, il est plutôt question d'y instaurer une commission ministérielle qui n'a, a dit le Rapporteur spécial, que peu de chances d'être acceptée. La communauté internationale doit donc aider Sri Lanka à créer un modèle de surveillance des droits de l'homme qui donne satisfaction à la population. Quant à la question de la sécurité, il est erroné de juxtaposer cette notion avec celle des droits de l'homme: dans le cas de Sri Lanka notamment, la sécurité passe nécessairement par le respect des droits de l'homme, a conclu M. Alston.

M. WALTER KÄLIN, Représentant spécial du Secrétaire général sur la situation des personnes déplacées dans leur propre pays, a exprimé sa reconnaissance aux pays qui l'ont reçu pour la collaboration dont ils ont fait preuve. Il s'est adressé particulièrement aux pays des Balkans en exprimant le souhait que la mise en œuvre de ses recommandations conduiront rapidement à un règlement de la situation des personnes encore déplacées.

En réponse à la question du Canada sur les moyens de parvenir à un meilleur accès aux populations du Darfour, M. Kälin a évoqué d'une part la nécessité de mettre en œuvre sans réserve l'accord de paix d'Abuja, d'autre part celle d'une présence forte des forces de maintien de la paix. Concernant le Zimbabwe, le Représentant spécial a noté avec regret que la situation des personnes déplacées ne se soit pas améliorée. Il a souscrit à la déclaration du Gouvernement sri-lankais notant que l'action d'urgence suivant un drame était essentielle et a salué à cet égard l'action du Gouvernement. Il a toutefois relevé la nécessité de mettre en place en parallèle une action préventive. Pour ce qui est de la situation des travailleurs humanitaires dans ce pays, il a soulevé la possibilité d'une mission à Sri Lanka qui pourrait engendrer des recommandations utiles à cet égard.

Répondant à la question de savoir s'il fallait opérer une distinction entre les déplacements dus à des conflits internes ou internationaux, il a estimé qu'il n'y avait pas véritablement à faire de distinction, et qu'il convenait dans les deux cas de tenir compte du souhait des personnes déplacées de retourner ou non dans leurs lieux d'origine.


Exercice du droit de réponse et autres déclarations

M. ENOS MAFEMBA (Zimbabwe) a réaffirmé l'engagement de son pays à coopérer avec le Haut Commissariat aux droits de l'homme. Néanmoins, en réponse à la déclaration faite hier par la Finlande, il a déploré la confusion que cette délégation a tenté de semer dans les esprits. Les autorités du Zimbabwe s'efforcent d'aider un grand nombre de personnes. Le Zimbabwe ne supporte pas l'hypocrisie de ceux qui prétendent défendre les valeurs démocratiques et finissent par les violer. Nous ne supporterons pas d'ingérence dans nos affaires intérieures, a insisté le représentant du Zimbabwe, rappelant en outre le passé colonial qu'a subi son pays.

M. HENDIK GARCIA (Philippines), répondant à la déclaration faite hier par le Forum asiatique pour les droits de l'homme et le développement, a souligné que le Gouvernement philippin a pris des initiatives, au plus haut niveau, afin de traiter le problème des assassinats. La Présidente Gloria Macapagal-Arroyo en personne a déclaré récemment au Président de la Commission européenne, M. Manuel Barroso, que l'assassinat de militants politiques et de journalistes n'avait pas sa place dans la démocratie philippine. Le Ministère philippin de l'intérieur a mis sur pied une équipe spéciale chargée d'enquêter sur les allégations d'assassinats politiques et d'attaques contre des journalistes, a précisé le représentant. En outre, la Présidente philippine a mis en place une commission indépendante chargée d'étudier la question et de préparer un rapport contenant des recommandations visant à l'éradication des causes profondes des exécutions extrajudiciaires.

M. IDRISS JAZAÏRY (Algérie) a répondu à M. Alston en relevant que ce dernier s'était référé à la Charte sur la paix et la réconciliation nationale en la qualifiant de loi d'amnistie, en dépit des déclarations publiques que le Chef de l'État algérien lui avait faites, assurant que la loi ne contenait pas d'amnistie. De l'avis de l'Algérie, la priorité devrait être accordée au dialogue bilatéral avant d'avoir recours aux communiqués de presse. En outre, M. Alston n'a pas respecté la pratique normale qui consiste pour les rapporteurs spéciaux à adresser leur correspondance aux gouvernements par le biais de leurs missions diplomatiques dûment accréditées plutôt que directement aux membres des gouvernements. Les rapporteurs spéciaux ne doivent pas considérer leurs fonctions comme se situant au-dessus des lois, a ajouté le représentant algérien.

MME SARALA FERNANDO (Sri Lanka) a estimé que les propos de M. Alston avait induit une certaine confusion en ce qui concerne la constitution de la commission indépendante à laquelle il a fait référence. Elle a aussi souligné que plusieurs pays asiatiques ont exprimé leur soutien pour les efforts de Sri Lanka.

M. TEIMURAZ BAKZADZE (Géorgie) a déploré les accusations de la délégation de Russie concernant le retour des populations géorgiennes, notant que ladite délégation ne s'était même pas donné la peine de lire le rapport du Rapporteur spécial. Il a souligné l'importance d'évaluer la situation en Abkhazie et en Ossétie du sud.


Présentation des rapports sur la violence à l'égard des femmes et la traite des êtres humains

MME YAKIN ERTURK, Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes, ses causes et ses conséquences, a souligné les aspects-clefs de son rapport qui examine «le critère de la diligence due en tant que moyen de mettre un terme à la violence contre les femmes». Rappelant que l'obligation de diligence signifie que les États ont le devoir de prendre des mesures positives pour prévenir les actes de violence à l'égard des femmes, les protéger de tels actes, en punir les auteurs et offrir réparation aux victimes, elle a indiqué avoir observé deux lacunes graves dans la mise en œuvre de ce principe. Elle a noté tout d'abord que le critère de la diligence due était essentiellement appliqué pour répondre à la violence au moment où elle se produit, mais rarement pour prévenir la violence. Les causes conduisant à la violence, comme la discrimination fondée sur le sexe ou des structures de pouvoir inégalitaires ne sont pas mises en question fondamentalement, comme cela devrait être le cas de la part de tout État qui souhaite honorer ses obligations dans la lutte contre la violence à l'égard des femmes.

La Rapporteuse spéciale a d'autre part fait remarquer que le principal défaut du critère de la diligence due était que cette procédure était par trop centrée sur l'État. À cet égard, elle a insisté sur la nécessité de mettre en place des normes universelles contraignantes et engageant également la responsabilité des acteurs non-étatiques concernés. Dans cette perspective, elle a recommandé le développement et la mise en place de normes et critères transnationaux.

Mme Ertürk a indiqué qu'elle avait réalisé en 2006 des missions en Turquie, en Suède et aux Pays-Bas, dont elle rendra compte en 2007. Elle a ensuite rendu compte des missions qu'elle a effetuées en 2005 en Fédération de Russie, en Iran, au Mexique et en Afghanistan.

Évoquant sa visite en Fédération de Russie, Mme Ertürk a notamment rendu compte de son séjour dans le Nord-Caucase où elle a remarqué que l'impact de la transition politique et économique s'était fait ressentir de manière très négative et disproportionnée sur les femmes. Elle a rappelé par ailleurs que la Fédération de Russie n'avait pas de cadre légal pour traiter de la violence dans les ménages et que ce vide législatif empêche une attention et une protection adéquate des femmes victimes de violence. Elle a aussi exprimé sa préoccupation à l'égard de la violence pratiquée à l'encontre des femmes en Tchétchénie, et qui sont le fait à la fois des autorités tchétchènes et d'agents de sécurité. Elle a notamment mentionné des actes de violence et d'intimidation commis par les autorités tchétchènes à l'égard de femmes dont on considère qu'elles ne suivent pas les us et coutumes. Elle a aussi fait part de témoignages de disparition, de viols et de tortures à l'encontre de femmes tchétchènes commis par des agents de sécurité. Notant que la Russie avait affirmé que ces actes n'étaient pas de la responsabilité de l'État, elle a indiqué que cela ne dégageait pas pour autant l'État de son obligation de protéger ses citoyens avec diligence.

Concernant son voyage en Iran, elle a informé le Conseil que l'inégalité entre les sexes était un aspect marquant de la société iranienne et relevait d'une interprétation restrictive des textes religieux. Si les femmes iraniennes ont accès à l'éducation, et dans une certaine mesure au travail et à la participation politique, l'absence de cadre légal pour assurer leur protection les prive de pouvoir réel et les rend vulnérables à l'égard de la violence commise dans le cadre public et privé. Elle a préconisé une réforme urgente du système judiciaire afin de permettre l'accès des femmes à la justice. Mme Ertürk a aussi demandé à l'Iran qu'il respecte son moratoire sur les lapidations jusqu'à la disparition de cette pratique.

La Rapporteuse spéciale a ensuite rapporté ses observations faisant suite à son voyage au Mexique où elle a constaté un degré de violence généralisée dont les femmes migrantes, pauvres ou autochtones sont tout particulièrement victimes. Si le pays a souscrit à une série de normes internationales et est partie aux principaux instruments sur les droits de l'homme, il n'en demeure pas moins qu'il doit prendre des mesures radicales pour faire face à l'absence de coordination entre le gouvernement central et celui des états. Elle a mentionné la situation particulièrement préoccupante qui prévaut dans l'état de Chihuhua, où plus de 400 assassinats de femmes ont été répertoriés, notant qu'une situation semblable est signalée dans le sud du pays, à la frontière du Guatemala, où plus de 1000 femmes ont été assassinées.

S'agissant de sa mission en Afghanistan, la Rapporteuse spéciale a relevé les changements importants auquel ce pays faisait face, soulignant que la situation des femmes y demeure dramatique. Crimes d'honneur, violence conjugale, mariages forcés et précoces sont courants. Elle a signalé que 185 femmes et jeunes filles ont été tuées cette année par des membres de leur famille. Ces violences sont rendues possibles par le système patriarcal en place et aggravées par le contexte général de pauvreté et d'insécurité. Elle a insisté sur le fait que la prise en compte de la situation des femmes était indispensable pour permettre une transition du conflit à la paix, d'une économie de guerre à la reprise économique, des déchirements de la société vers la réconciliation nationale. Elle a recommandé la création d'abris pour les femmes et les filles victimes de violence.

La Rapporteuse spéciale a souligné que sa mission prévue en Algérie a été reportée au dernier moment à la demande du Gouvernement. Elle a aussi fait mention de la situation des femmes au Darfour, notant que les violences sexuelles contre les femmes se poursuivaient.


Le rapport sur la violence contre les femmes, ses causes et ses conséquences (E/CN.4/2006/61) donne un aperçu des activités menées par la Rapporteuse spéciale en 2005, de même qu'une analyse du critère de la diligence due en tant que moyen de mettre un terme à la violence contre les femmes. L'obligation de diligence signifie que les États ont le devoir de prendre des mesures positives pour prévenir les actes de violence à l'égard des femmes, les protéger de tels actes, en punir les auteurs et offrir réparation aux victimes. À ce jour cependant, l'application du critère de la diligence due est plutôt étatocentrique et consiste simplement à réagir à la violence au moment où elle se produit, sans tenir compte le plus souvent de l'obligation de prendre des mesures de prévention et d'accorder réparation, ni de la responsabilité des acteurs non étatiques.

Le rapport s'étend sur les potentialités du critère de la diligence due; celles-ci résident dans une interprétation nouvelle de l'obligation de prévenir les actes de violence, de protéger les victimes, de poursuivre les auteurs et d'offrir réparation, et dans l'élaboration des paramètres permettant de définir la responsabilité tant de l'État que des acteurs non étatiques face à la violence. Ce que recouvre le critère de la diligence due variera nécessairement selon le contexte national, la dynamique interne, la nature des acteurs et la conjoncture internationale.
Le rapport rappelle que l'éradication de la violence à l'égard des femmes et la réalisation des droits de l'homme à l'échelle universelle, sont un objectif commun et une obligation pour tous. Malgré cela, dans la pratique, les mesures prises pour faire face à la violence contre les femmes ont été fragmentaires, sans lien aucun avec la question des droits et de l'égalité des femmes. Toutefois les progrès réalisés jusqu'ici, quoique inégaux, laissent penser qu'il est possible de faire évoluer les modèles, les institutions et les relations fondés sur l'oppression. Le rapport relève qu'opérer des changements en profondeur n'est pas chose aisée, surtout quand on sait à quel point le patriarcat est ancré dans les mœurs. De tels changements ébranlent en outre le sentiment de sécurité qu'apporte le statu quo, quel que soit le degré d'oppression qui l'accompagne. Ils ne vont pas non plus sans risques, mais ils recèlent la possibilité de progresser vers une plus grande émancipation pour tous.

Le rapport conclut que si nous continuons de repousser les limites de la diligence due en exigeant des États qu'ils respectent pleinement le droit international, et notamment qu'ils s'attaquent aux causes de la violence à l'égard des femmes, et qu'ils demandent aux acteurs non étatiques de prendre leurs responsabilités face aux actes de violence qu'ils commettent, nous nous acheminerons vers une conception des droits de l'homme en accord avec nos aspirations qui tendent vers l'édification d'un monde juste et sans violence.

L'additif 1 au rapport contient un aperçu des allégations générales et individuelles, ainsi que des appels urgents transmis aux gouvernements et des réponses reçues.

Les rapports de la Rapporteuse spéciale concernant les visites qu'elle a effectuées en Fédération de Russie, en Iran, au Mexique et en Afghanistan figurent dans les additifs 2, 3, 4 et 5.

MME SIGMA HUDA, Rapporteuse spéciale sur la question de la traite des êtres humains, en particulier des femmes et des enfants, a rappelé que cette activité est une violation fondamentale des droits humains et qu'elle suscite des problèmes aux nombreuses ramifications. Mme Huda a précisé avoir consacré son rapport à la traite à des fins sexuelles et en particulier au rôle des consommateurs de services sexuels dans la création de la demande. Cette demande, qui est souvent fondée sur des rapports de pouvoir mettant en jeu des considérations de race, de nationalité, de caste ou de couleur, correspond à une «forme très sexualisée de racisme», a expliqué Mme Huda. Or, cette demande est l'un des facteurs les moins bien étudiés dans le cadre des politiques de lutte contre la traite des êtres humains. Ces politiques sont généralement axées sur la détection et l'arrestation des trafiquants, ou sur la limitation des flux de victimes par l'intermédiaire de campagnes d'éducation. Ces mesures sont utiles mais insuffisantes, et il convient aussi d'agir sur la demande, a fait valoir Mme Huda. Cette dernière a estimé que la criminalisation des victimes de la prostitution et de la traite doit être condamnée. Au contraire, des mesures doivent être prises pour ne pas vulnérabiliser davantage ces victimes et la Rapporteuse spéciale a exposé un certain nombre de «bonnes pratiques» appliquées à cet égard en Suède, au Venezuela, en République de Corée.

Mme Huda a aussi estimé que la pratique montre qu'il est contre-productif de distinguer entre la demande s'agissant des victimes de la traite et de personnes prostituées, une distinction très difficile à étayer. Certains États comme la Norvège interdisent à leurs fonctionnaires d'avoir recours à des services sexuels payants; les Nations Unies disposent d'un code de conduite qui interdit à son personnel d'utiliser les services de personnes prostituées ou se prostituant.

Le rapport de la Rapporteuse spéciale sur les droits fondamentaux des victimes de la traite des êtres humains, en particulier les femmes et les enfants (E/CN.4/2006/62) vise notamment à clarifier la définition de la traite adoptée dans le Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des êtres humains, en particulier des femmes et des enfants. La Rapporteuse spéciale souhaite aussi dissiper un malentendu fréquent sur la nature d'une «approche de la traite sous l'angle des droits de l'homme». Certains milieux ont cru comprendre, à tort, qu'une approche de la traite sous l'angle des droits de l'homme était quelque peu incompatible avec le recours à la loi pénale pour punir les consommateurs de services sexuels. Pour parvenir à cette conclusion, il faut nécessairement prendre pour hypothèse que les hommes ont le droit fondamental d'avoir recours aux services de personnes prostituées. Cette hypothèse est écartée par le rapport: le recours à des personnes prostituées n'est pas un droit fondamental des hommes.

Après avoir étudié les mesures d'action adoptées par plusieurs États, la Rapporteuse constate que si la criminalisation ne garantit pas qu'une activité cessera d'exister, elle constitue sans nul doute un moyen clair et efficace de décourager cette activité. Il est aussi vrai que la légalisation de la prostitution a pour effet de faire passer des atteintes aux droits de l'homme pour un simple travail légitime, «occultant» ainsi certaines atteintes commises au vu de tous. L'obligation de décourager la demande a directement trait à l'obligation pour l'État de s'engager dans un projet normatif condamnant la demande. La Rapporteuse spéciale souligne à cet égard que toute sanction pénale relative à l'industrie du sexe à des fins commerciales ne devrait pas servir à réprimer les femmes et les enfants victimes de la traite. Les lois et politiques internes qui sanctionnent les femmes et les enfants prostitués contribuent à les rendre vulnérables et plus susceptibles de devenir victimes du proxénétisme.

Un résumé des cas signalés aux Gouvernements et des réponses reçues figure dans l'additif 1 au rapport de la Rapporteuse spéciale (E/CN.4/2006/62/Add.1).

Dans son raport sur la mission qu'elle a effectuée en Bosnie-Herzégovine en février 2005 (Add.2), la Rapporteuse spéciale note que, dans le domaine de la prévention et de la répression de la traite, la situation dans le pays a considérablement évolué depuis l'adoption du Plan d'action national. Bon nombre d'étrangères en situation irrégulière ont quitté le pays, de nombreux bars ont fermé leurs portes et plusieurs individus impliqués dans la traite sont maintenant en prison. La législation et le cadre institutionnel ont été modifiés afin d'améliorer la lutte contre la traite, l'application des lois, les contrôles à la frontière, l'identification, l'aide aux victimes et la poursuite des coupables. La Rapporteuse spéciale relève que l'ampleur comme la nature de la traite ont évolué. Les trafiquants ont adapté leur mode opératoire à la stratégie globale de lutte contre la traite adoptée par le Gouvernement. Par conséquent, la Rapporteuse spéciale juge que cette stratégie doit être revue en permanence pour éviter qu'elle ne soit dépassée par les nouvelles méthodes adoptées par les trafiquants. En particulier, elle estime qu'il faut prêter davantage attention au phénomène naissant de la traite à l'intérieur du pays et revoir et adapter les mécanismes mis en place pour lutter contre la traite et protéger les victimes, afin qu'ils s'appliquent également aux nationaux et comprennent des mesures destinées expressément à protéger ces derniers. Il faudrait aussi adopter des mesures pour combattre un autre phénomène naissant, à savoir la traite de ressortissants bosniaques à destination de pays tiers. Par ailleurs, il est impératif de mettre en place des méthodes et des structures particulières pour lutter contre la traite des enfants et pour leur accorder la protection à laquelle ils ont droit au titre de la Convention relative aux droits de l'enfant.

Le Liban (Add.3), où elle s'est rendue en février 2005, est un pays de transit et de destination pour les travailleurs domestiques migrants, dont un nombre considérable font l'objet d'un trafic à des fins d'exploitation. C'est aussi un pays de destination et de transit pour les femmes étrangères exploitées par l'industrie du sexe. À cela s'ajoute le problème de la traite des enfants à destination du Liban et sur le sol libanais. La Rapporteuse spéciale appelle le Liban à prendre quatre grands types de mesures: a) renforcer la coopération nationale et internationale; b) réformer la législation pour ériger en crime toutes les formes de traite humaine et consolider le droit du travail; c) identifier, protéger et rapatrier en toute sécurité les victimes de la traite; et d) faire en sorte que soient effectivement poursuivis les auteurs de ces actes et d'actes criminels apparentés. Les pays d'origine doivent assurer une protection consulaire effective, de préférence en vertu d'accords bilatéraux conclus avec le Liban sur les migrations. La société civile, notamment les organisations de défense des droits de l'homme, les médias et les syndicats, ainsi que la communauté internationale, doivent s'intéresser de plus près à la situation des travailleurs migrants, des femmes étrangères dans l'industrie du sexe et des enfants des rues.

Interventions de pays concernés

M. ASSAD OMER (Afghanistan) a rappelé que son pays est en pleine reconstruction après plus de vingt années de guerre et surtout cinq années d'obscurantisme. Le rapport de Mme Erturk témoigne que l'Afghanistan est encore loin de la réalisation des objectifs en faveur desquels le pays est engagé. Il n'en demeure pas moins que la Constitution fait une référence explicite à la Déclaration universelle des droits de l'homme, a fait valoir le représentant. Sur les 249 députés que compte le parlement national, figurent 70 femmes, soit 27% du nombre total de députés, a-t-il également souligné. La question des femmes fait partie des priorités de la politique de développement mise en place en Afghanistan, a insisté le représentant afghan.

On ne saurait ignorer que les femmes sont les premières victimes de l'insécurité, de la pauvreté, de la malnutrition et du taux élevé de la mortalité maternelle, a poursuivi le représentant. Faisant face à une insécurité grandissante due aux attaques de terroristes venus de l'extérieur, l'Afghanistan parvient tout de même, avec l'aide internationale, à encourager les femmes à reprendre la place qui leur est due dans la société afghane. Depuis la libération du pays, le pourcentage de fréquentation scolaire des jeunes filles ne cesse de croître, a fait valoir le représentant; cet accroissement est autant visible dans les zones urbaines que dans les zones rurales.

M. ALI REZA MOAYERI (Iran) a exprimé la gratitude de son Gouvernement pour la visite de Mme Yakin Ertürk dans son pays, estimant que le rapport produit par l'experte conduira à une meilleure compréhension de la situation et de la promotion de la femme en Iran. Cependant personne n'est parfait et des progrès dans ces domaines sont toujours possibles, a reconnu le représentant, estimant qu'il ne fallait pas réduire les rapports à de simples déclarations politiques et que les organisations non gouvernementales ont un rôle important à jouer dans la prise en compte de ces problèmes. Quant aux crimes dits d'honneur, ils sont un phénomène qui ne touche pas que l'Iran, a rappelé son représentant, évoquant les mesures prises pour réduire le nombre de cas recensés. Le mariage précoce est devenu une pratique inacceptable dans le système juridique iranien. Pour le prévenir complètement, des mesures doivent encore être prises dans certaines zones rurales du pays, a admis le représentant. Il a enfin observé que les problèmes de genre doivent être abordés sous l'angle du multiculturalisme et de la diversité.

M. PABLO MACEDO (Mexique) a rappelé que le Gouvernement mexicain avait répondu par écrit aux recommandations de la Rapporteuse spéciale. Il a reconnu que malgré les mesures prises par le Gouvernement fédéral et les gouvernements de États, de nombreux progrès restaient à faire. Énumérant une série d'initiatives qui ont été mises en place depuis la visite de la Rapporteuse spéciale, il a notamment mentionné l'établissement d'un Bureau chargé d'enquêter sur les délits et les violences commis à l'égard des femmes. Cette instance était en outre chargée de la coordination des activités et de la collaboration avec les gouvernements régionaux. Il a aussi indiqué que le Procureur de la République avait récemment rendu un rapport sur les violences commises contre les femmes dans l'État de Chihuahua. Une base de données génétiques a été mise en place pour établir un registre des données biologiques des femmes disparues ou assassinées. Le représentant mexicain a aussi mentionné un projet d'information géographique et statistique contribuant à répertorier les informations sur les violences commises contre les femmes dans tout le pays. En août 2006, a-t-il ajouté, la Commission pour le développement des peuples autochtones a mis en place un programme pour prévenir la violence familiale et conjugale chez les populations autochtones. Il a reconnu que ces mesures prendraient effet à long terme.

MME VALERY LOSHCHININ (Fédération de Russie), a déclaré que le rapport de la Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes sur sa mission en Fédération de Russie est émaillé de préjugés et donne l'impression qu'il y aurait presque une violence d'État contre les femmes en Fédération de Russie. Ceux qui connaissent le rôle joué par les femmes russes dans la vie et la société russes savent à quoi s'en tenir. Les femmes représentent 56% de la population de la Fédération de Russie. Quarante pour cent des petites et moyennes entreprises dans le pays sont dirigées par des femmes. Elles constituent 70% des fonctionnaires de l'État et 60% des juges. Le nombre de femmes dans les forces armées et les forces de police est de plus en plus important, a insisté la représentante russe. Bien entendu, des problèmes subsistent, notamment pour ce qui a trait à la criminalité violente et à la persistance dans certaines familles de violence à l'égard des femmes. Mais, pour faire face à ce problème, la Fédération de Russie a adopté les dispositions nécessaires dans la législation générale et c'est ce qui explique qu'il n'y ait pas de disposition séparée, dans la loi pénale, traitant de la question de la violence contre les femmes, ce qui ne signifie pas qu'il n'y ait pas de mesures prises pour protéger les femmes, a indiqué la représentante russe.

M. SAMIR RIZVO (Bosnie-Herzégovine) s'est félicité du rapport de Mme Huda, dans lequel la Rapporteuse spéciale fait notamment état de la coopération des autorités de son pays. Le rapport mentionne également que la situation de la lutte contre la traite des femmes a évolué dans le bon sens, de nombreux coupables ayant été sanctionnés et des mesures de soutien mises en place à l'intention des victimes, comme des programmes de protection des témoins. Mais ce phénomène n'est pas encore maîtrisé, a reconnu le représentant, soulignant notamment que le cadre juridique et le domaine de l'application des lois devant encore être renforcés. La lutte contre la traite des êtres humains est une priorité du Gouvernement, qui œuvre au renforcement de ses capacités d'action institutionnelle. La communauté internationale doit maintenir ses efforts pour aider la Bosnie-Herzégovine à enrayer ce fléau. La Bosnie-Herzégovine ne ménagera pas ses faibles moyens pour contribuer à cette action. Le représentant a par ailleurs observé que certaines recommandations du rapport ne prennent pas en compte les difficiles conditions économiques et politiques que connaît la Bosnie-Herzégovine (chômage, pauvreté et situation politique complexe). Ces recommandations seront par conséquent difficilement applicables dans les court et moyen termes, a dit le représentant, espérant qu'elles seront appliquées ultérieurement, à mesure que la situation générale du pays ira s'améliorant.

M. GEBRAN SOUFAN (Liban) a indiqué que le Liban ne se formalisait aucunement des critiques et remarques le concernant dans le rapport de la Rapporteuse spéciale sur la traite des êtres humains, mais accueillait au contraire avec gratitude ses recommandations. Celles-ci, a-t-il affirmé permettent de poser le cadre de travail pour l'élaboration de mesures visant à remédier, notamment, aux problèmes relatifs aux migrants employés comme travailleurs domestiques. Il a souligné que la possibilité d'obtenir de meilleurs résultats dépendra aussi des ressources dont disposera le Liban, et de l'appui de la communauté internationale. Il a conclu en affirmant que la culture des droits de l'homme était profondément enracinée dans le pays.

Débat interactif

M. SERGEI ALEINIK (Bélarus) a remercié la Rapporteuse spéciale sur la traite des êtres humains pour son rapport. Il s'est réjoui que Mme Huda ait défini des orientations nettes pour son travail à venir, s'agissant notamment de la question de la demande. La question de la traite des êtres humains n'a pas encore reçu, de la part de la communauté internationale, toute l'attention qu'elle mérite. Le Bélarus coopère avec les procédures thématiques, a souligné le représentant, faisant observer que son pays avait adressé une invitation à la Rapporteuse spéciale. Les 26 et 27 octobre prochain, se déroulera à Minsk une Conférence internationale sur le développement de la coopération en matière de lutte contre la traite des êtres humains, a-t-il en outre indiqué.

M. SERGIO CERDA (Argentine) a notamment recommandé que la Rapporteuse spéciale sur la traite des êtres humains se penche, dans le cadre de son mandat, sur la problématique du tourisme sexuel. Il a aussi suggéré qu'elle établisse des contacts avec interactions avec le Comité des droits de l'enfant.

MME ALEJANDRA DE BELLIS (Uruguay) a dit l'intérêt de son pays pour le rapport de Mme Ertürk, relevant en particulier la mention qui y est faite des lacunes dans l'action des États en matière de protection des femmes. La Rapporteuse spéciale regrette par exemple le manque de structures d'accueil à l'intention des femmes victimes de violences. La représentante a demandé à Mme Ertürk dans quelle mesure cette insuffisance de moyens matériels se ressent sur la protection effective des victimes, et ce que pourrait faire la communauté internationale dans ce domaine.

M. LUIS VARELA QUIRÓS (Costa Rica) a félicité la Rapporteuse spéciale sur la traite des êtres humains de la manière franche et directe avec laquelle elle aborde une question aussi délicate et sensible. Le Costa Rica partage son avis que les campagnes d'éducation à tous les niveaux sont particulièrement importantes pour lutter contre ce phénomène. Le Costa Rica, pour sa part, a engagé de telles campagnes, tant à l'intention du public que des touristes. La Rapporteuse spéciale considère-t-elle que la communauté internationale devrait agir pour faire en sorte que l'Internet ne soit pas utilisé par des pédophiles, a demandé le représentant costaricien?

MME MILINDA HILL (Nouvelle Zélande) a déclaré que les États ont besoin d'indications sur la manière d'appliquer le principe de diligence due en matière de protection des droits des femmes, tant cette notion est compliquée à interpréter et à mettre en œuvre. La représentante a demandé à Mme Ertürk comment les États pourraient s'inspirer des débats organisés dans le cadre des institutions des Nations Unies pour faire avancer leur propre action en faveur du respect des droits des femmes. La représentante a aussi évoqué le cas des femmes handicapées, encore plus fragiles et susceptibles de voir leurs droits humains bafoués. Cet aspect devrait sans doute être étudié de plus près dans les futurs rapports de Mme Ertürk, a estimé la représentante.

M. PATRICIO UTRERAS (Chili) a apprécié la mise en évidence, par la Rapporteuse spéciale sur la violence à l'égard des femmes, du caractère multidimensionnel de cette violence. Il a apprécié l'analyse sur la diligence due et a exprimé son soutien à l'idée d'élargir ce concept afin de tenir compte des aspects prévention et réparation. Il a suggéré toutefois que le contexte culturel soit mieux pris en compte dans le cadre de la lutte contre certains types de violence commises contre les femmes. M. EDUARDO EGUIGUREN, intervenant au sujet du rapport sur la traite des êtres humains, a souligné la gravité de la problématique. Il a énuméré un certain nombre d'initiatives mises en place par le Chili pour pallier ce phénomène. Il a notamment fait mention de l'introduction d'une loi criminalisant les clients qui utilisent les services sexuels de mineurs. À cet égard, il s'est dit intéressé de connaître le bilan dressé par les pays qui ont mis en place une législation visant à criminaliser les personnes recourant aux services de la prostitution; l'impact de ces mesures est-il plutôt positif ou négatif, a-t-il demandé ?

MME ASTRID HELLE AJAMAY (Norvège) s'est félicité que la Rapporteuse spéciale sur la traite des êtres humains ait porté son étude sur la traite à caractère sexuel et le rôle à cet égard des clients qui créent la demande. Elle a en outre souligné qu'à l'instar de certains pays voisins, la Norvège envisage de criminaliser la clientèle de la prostitution. Il faut veiller à ne pas pénaliser les victimes de la traite, a par ailleurs souligné la représentante.

MME MAGALI NAVES (Brésil) a salué la qualité du rapport de Mme Huda. Elle a attiré l'attention sur la récente ratification par son pays de la Convention internationale contre la criminalité transnationale organisée et de ses Protocoles facultatifs, un tournant dans l'histoire judiciaire du pays. Le Gouvernement a lancé une campagne de sensibilisation au phénomène de la traite des êtres humains. Les contrôles aux frontières ont été renforcés et des mesures prises pour un meilleur soutien psychosocial aux jeunes filles, afin de prévenir la prostitution. Elle a ajouté que les agressions contre les femmes font désormais l'objet de sanctions aggravées. Un Secrétariat spécial pour les femmes a permis de faire figurer les questions féminines au plus haut niveau des préoccupations de l'État. Au plan pratique, des centres d'accueil ont été ouverts à l'intention des femmes menacées par la violence, a fait valoir la représentante.

MME GUY O’BRIEN (Australie) a prié la Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes de donner quelques exemples concrets pour montrer comment les États peuvent agir pour donner effet au principe de diligence due pour lutter contre la violence commise contre les femmes. L'Australie, a-t-elle indiqué, adhère au principe qu'aucune coutume ou pratique culturelle ne justifie et n'excuse la violence contre les femmes. Elle a toutefois précisé, en se référant au paragraphe 91 du rapport, qu'un commentaire avait été attribué à tort à l'Australie, et demandé qu'il soit explicitement indiqué que ce commentaire n'émanait pas d'un représentant officiel.

M. SHIGERU ENDO (Japon) a remercié la Rapporteuse spéciale sur la traite des êtres humains pour son rapport. Du fait de la mondialisation, la traite des êtres humains est devenue un sujet de préoccupation pour tous. Reconnaissant la nécessité d'aborder la question de la demande, le représentant japonais a indiqué que son pays avait pris des mesures, notamment à travers le Code pénal, visant à sanctionner les clients. Le Japon tient également à insister sur l'importance qu'il y a à promouvoir la coopération entre pays d'origine et de destination; aussi, le Japon a-t-il entrepris de renforcer sa coopération avec les pays concernés.

MME KIRSTI POHJANKUKKA (Finlande) a demandé à Mme Ertürk comment les États pouvaient améliorer la protection des femmes en matière justice et de services de police. Elle lui a aussi demandé comment l'on pouvait lutter contre les violences ciblées commises contre les femmes sur la base de leur identité sexuelle. S'agissant de la mission de la Rapporteuse spéciale en Afghanistan, la représentante a souhaité savoir si le Groupe de travail interministériel chargé lutter contre la discrimination des femmes dans la société et les institutions avait eu des effets tangibles. La représentante a aussi demandé à Mme Huda quels sont les meilleurs moyens d'action au plan national et international de mesures de découragement de la demande. Le rapport mentionne des normes de lutte contre la traite des êtres humains. Est-il envisageable d'instaurer un cadre normatif international?

MME ATTIAT MUSTAFA (Soudan) a commenté le rapport de la Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes, s'agissant notamment de la situation au Darfour, en faisant observer que beaucoup de situations de violence au Darfour ne sont pas mentionnées dans ce rapport. Différents cas de violence et de viols ont fait l'objet de poursuites en justice et de sanctions, a fait valoir la représentante soudanaise, assurant la Rapporteuse spéciale de la volonté de son pays de collaborer avec elle.

M. TERRY CORMIER (Canada) a demandé à Mme Ertürk si elle estimait que son travail pourrait tirer parti de l'étude du Secrétaire général sur la violence contre les femmes à paraître en octobre.

MME EDDA MAGNUS (Islande) a souligné que la lutte contre la violence à l'égard des femmes constitue l'un des aspects fondamentaux des droits de l'homme et doit être abordée tant au niveau national qu'au niveau international. Il faut que les acteurs non étatiques soient impliqués dans le dialogue sur ces questions. Faisant référence aux crimes d'honneur, la représentante islandaise a indiqué qu'elle souhaiterait en savoir davantage sur la violence perpétrée au nom de l'honneur.


M. MOHAMMED LOULICHKI (Maroc), reconnaissant le caractère hideux de la violence contre les femmes et insistant sur le fait que la lutte contre la violence participait à l'assurance de l'émancipation des femmes et à la reconnaissances de leurs pleins droits, a cité les mesures mises en place par le Maroc pour protéger les femmes et promouvoir leurs droits. Il a mentionné l'introduction d'un nouveau code de la famille, qui consacre l'égalité de l'homme et de la femme, la loi permettant aux enfants d'obtenir la nationalité de leur mère, la création d'un ministère en charge de la famille, la criminalisation du harcèlement sexuel, l'établissement de cellules d'accueil pour les femmes victimes de violence, la mise en place d'un numéro vert et l'encouragement à la multiplication des organisations non gouvernementales travaillant sur les problématiques de violence à l'encontre des femmes

M. JEAN-DANIEL VIGNY (Suisse) a observé que Mme Ertürk estime que la notion de diligence due pourrait servir à obtenir des États qu'ils s'attaquent aux causes profondes de la violence contre les femmes. Y a-t-il déjà une tendance dans ce sens, et comment engager les États à utiliser cette notion, a demandé le représentant? Il a d'autre part demandé à Mme Huda comment elle comptait protéger les victimes de la prostitution et comment les mesures de criminalisation de la demande pouvaient servir les droits de la femme: tous les experts ne sont pas d'accord sur l'efficacité de cette méthode.

MME JUNEVER MAHILUM WEST (Philippines) a souligné que les droits de l'homme des victimes doivent être protégés et qu'il serait injuste de rendre ces dernières responsables de la traite des êtres humains. Aujourd'hui, les Philippines tiennent leur première conférence sur la lutte contre la traite des êtres humains, suite à une nouvelle législation adoptée dans ce domaine, a indiqué la représentante philippine.

M. IDRISS JAZAÏRY (Algérie) a informé la Rapporteuse spéciale sur les violences contre les femmes que son pays avait récemment modifié le code de la famille pour favoriser l'accès de la femme à son logement en cas de divorce. L'Algérie a également criminalisé le harcèlement sexuel, a-t-il fait valoir. Il a souligné une prise de conscience croissante dans son pays de la nécessité de lutter contre les violences commises contre les femmes. Les femmes, a-t-il dit, ont été durement touchées par les violences terroristes qui ont marqué les années 80 et 90; un bilan sur cette situation est d'ailleurs en cours. Finalement, il a regretté que l'Algérie ait dû reporter la visite de la Rapporteuse et s'est réjoui de pouvoir l'accueillir en 2007.

MME MARINA KORUNOVA (Fédération de Russie) a relevé, dans le rapport de Mme Huda, l'importance accordée à la lutte contre la demande de «marchandises humaines». Dans ce domaine, c'est la demande qui engendre l'offre, et non le contraire, a tenu à souligner la représentante russe. Dans le même temps, il faut sévir contre les groupes criminels qui sont à l'origine des trafics. La représentante a demandé son avis à Mme Huda concernant l'idée de regrouper les capacités d'action des Nations Unies sous l'égide d'une «task force» unique, axe central d'un projet de résolution sur la lutte contre la traite des êtres humains qui sera prochainement présenté par le Bélarus devant l'Assemblée générale.

M. MUSTAFISUR RAHMAN (Bangladesh) s'est félicité que la Rapporteuse spéciale sur la traite de personnes ait insisté sur le volet «demande» de la traite de personnes. Il a attiré l'attention sur la nécessité de prendre des mesures dans les pays d'origine et de destination, mais aussi dans les pays de transit, afin de lutter contre ce phénomène. Le représentant a exprimé l'espoir que la Rapporteuse spéciale présenterait un plan d'action dans son prochain rapport.

M. AMNART NETAYASUPHA (Thaïlande), félicitant la Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes, a indiqué qu'une législation nationale pour prévenir les violences contre les femmes et visant leur émancipation était actuellement en cours d'examen. Il a aussi informé le Conseil que la Thaïlande préparait une législation pour lutter contre le trafic des êtres humains dans le pays et sur ses frontières. Il a invité la Rapporteuse spéciale sur la traite des êtres humains à prévoir une visite en Thaïlande dans les meilleurs délais.

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