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LE CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME EXAMINE LES RAPPORTS SUR LE RACISME, LES PERSONNES D'ASCENDANCE AFRICAINE ET LES MIGRANTS


Arrière

18 Septembre 2006

Conseil des droits de l'homme
APRÉS-MIDI

18 septembre 2006


Le Conseil des droits de l'homme a examiné, cet après-midi, les rapports présentés par le Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale et de xénophobie et l'intolérance qui y est associée; par le Rapporteur spécial sur les droits de l'homme des migrants; et par le Président-Rapporteur du Groupe de travail d'experts sur les personnes d'ascendance africaine. Un débat interactif a suivi la présentation des rapports de ces procédures spéciales, auquel ont participé les représentants d'une trentaine de pays et organisations non gouvernementales.

M. Doudou Diène, Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l'intolérance, a présenté, outre son rapport annuel, des rapports concernant la situation des populations musulmanes et arabes dans diverses régions du monde ainsi que les programmes politiques qui incitent à la discrimination raciale ou l'encouragent. Il a indiqué que ces rapports confirment le constat qu'il avait déjà fait l'an dernier devant la Commission des droits de l'homme à savoir que la recrudescence des phénomènes et des manifestations de racisme, de discrimination raciale et de xénophobie constitue aujourd'hui la plus grave menace contre la démocratie et le «vivre-ensemble»des sociétés. M. Diène a attiré l'attention sur un certain nombre de tendances lourdes illustrant la gravité de cette situation.

M. Diène a par ailleurs rendu compte des visites qu'il a effectuées au Japon, au Brésil, en Suisse et en Fédération de Russie. Les représentants de ces pays ont fait des déclarations.

M. Jorge Bustamante, Rapporteur spécial sur les droits de l'homme des migrants, a lui aussi déploré un regain de sentiments xénophobes dans le monde, avec ses conséquences pour les travailleurs sans papiers. La reconnaissance de l'existence, dans tous les États, d'une demande interne de main-d'œuvre en situation irrégulière sera facilitée par l'introduction par les Nations Unies d'une nouvelle norme statistique qui rendra compte de l'importance numérique mais aussi de l'apport bénéfique des travailleurs migrants non déclarés aux économies des pays où ils sont installés. Le Rapporteur spécial a précisé aussi avoir reçu de nombreuses dénonciations de violations des droits de l'homme de personnes migrantes telles que conditions de détention inhumaines, mauvais traitement lors de contrôle aux frontières, décès suite à l'usage excessif de la force par des membres de la police, déportations collectives, expulsions sommaires et violations des droits humains des personnes déplacées. Le Burkina Faso est intervenu en tant que pays concerné par le rapport du Rapporteur spécial sur les droits de l'homme des migrants.
Le Président-Rapporteur du Groupe de travail d'experts sur les personnes d'ascendance africaine, M. Peter Lesa Kasanda, a relevé que malgré les efforts entrepris, les personnes d'ascendance d'africaine continuent à vivre dans la pauvreté, dans les pays en voie de développement comme dans les pays développés. M. Kasanda a aussi rendu compte de la visite que le Groupe de travail a effectuée en Belgique. La Belgique a fait une déclaration en tant que pays concerné.

Les représentants des pays suivants sont intervenus dans le cadre du dialogue interactif qui a suivi la présentation de ces rapports: Pakistan, Finlande (au nom de l'Union européenne), Allemagne, Espagne, Mali, Azerbaïdjan, Chili, Arménie, Pologne, Nicaragua, Norvège, Pérou, Jordanie, Uruguay, Chine, Mexique, Philippines, Argentine, Guatemala, Indonésie.

Les représentants des organisations non gouvernementales ci-après ont également pris la parole: Franciscain international; Comité de coordination d'organisations juives; Amnesty International; Association pour l'éducation d'un point de vue mondial; Mouvement international contre toutes les formes de discrimination; Mouvement indien «Tupaj Amaru»; et Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples.

L'Iran a exercé son droit de réponse.

Le Conseil poursuivra ses travaux demain matin, à 10 heures, en examinant les rapports sur les disparitions forcées, sur les minorités et sur les populations autochtones.


Présentation de rapports

M. DOUDOU DIÈNE, Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l'intolérance qui y est associée, a souligné que les rapports qu'il présente cette année confirment le constat qu'il avait déjà fait l'an dernier devant la Commission des droits de l'homme à savoir que la recrudescence des phénomènes et des manifestations de racisme, de discrimination raciale et de xénophobie constitue aujourd'hui la plus grave menace contre la démocratie et le «vivre-ensemble» des sociétés.

M. Diène a notamment attiré l'attention sur les tendances lourdes suivantes, qui illustrent la gravité de cette situation: montée des violences racistes et xénophobes découlant du passage à l'acte de groupes d'extrême droite et néo-nazis, confirmée récemment par des assassinats ouvertement racistes en Belgique et en Fédération de Russie; amalgame des facteurs de race, de culture et de religion, qui se traduit, entre autres, par la recrudescence de la diffamation des religions; légitimation intellectuelle de plus en plus ouverte du racisme et de la xénophobie tant par les intellectuels reconnus que par les médias influents; banalisation du racisme et de la xénophobie, illustrée tant par la prégnance dans les programmes des partis démocratiques de plates-formes politiques racistes et xénophobes des partis d'extrême droite que par la capacité des leaders de ces partis à mettre en application ces plates-formes par des alliances de gouvernement qui leur donnent légitimité et légalité; criminalisation et traitement principalement sécuritaire des questions d'immigration, d'asile et de statut des étrangers; pratiques croissantes de différentes formes de racisme, de discrimination et de xénophobie dans les zones d'entrée, d'accueil et d'attente des pays, notamment dans les aéroports, les ports et les frontières. Une autre tendance lourde est l'aggravation des manifestations de racisme dans les sports, en particulier le football, a ajouté M. Diène.

La problématique du multiculturalisme et notamment sa reconnaissance politique, son respect, sa protection légale et sa promotion sociale, culturelle et éducative, est une des sources profondes de la recrudescence du racisme et de la xénophobie, a poursuivi M. Diène. En outre, a-t-il ajouté, les manifestations de racisme et de discrimination les plus profondes et les plus durables sont le résultat de constructions intellectuelles dans la longue durée.

S'agissant de la mission qu'il a effectuée au Japon en juillet 2005, M. Diène a notamment indiqué avoir constaté que ce pays est marqué par la réalité du racisme et de la xénophobie découlant tant de l'héritage historique de sa société que de ses relations avec les pays voisins ainsi que de l'insularité de sa population. Cette réalité touche trois catégories de victimes: les minorités nationales, les descendants de personnes originaires d'anciennes colonies japonaises, les étrangers et les travailleurs migrants. M. Diène a notamment précisé avoir suggéré la rédaction d'une histoire générale de la région.

En ce qui concerne la visite qu'il a effectuée au Brésil en octobre 2005, M. Diène a fait valoir que l'engagement ferme du Gouvernement dans le combat contre le racisme lui a été confirmé au plus haut niveau de l'État par le Président Lula. Au Brésil, a poursuivi M. Diène, les communautés les plus pauvres, invisibles dans les structures du pouvoir politique, économique, social et médiatique, sont les communautés historiquement discriminées, à savoir les communautés autochtones et les descendants d'Africains. Le Rapporteur spécial a souligné que dans ses recommandations, il encourage le Gouvernement brésilien, compte tenu des résistances fortes à l'éradication du racisme dans les profondeurs de la société, à mettre en œuvre de manière déterminée son programme de lutte contre le racisme en tenant compte de sa profondeur historique et culturelle et de sa prégnance dans les mentalités et les structures de la société. M. Diène a par ailleurs encouragé les autorités brésiliennes à généraliser le programme de discrimination positive.

S'agissant de la Suisse, où il a effectué une visite en janvier dernier, M. Diène a indiqué qu'il présenterait un rapport exhaustif sur cette visite à la quatrième session du Conseil. Le Rapporteur spécial a indiqué avoir constaté en Suisse la place croissante prise, dans les discours politiques et dans les médias, par la rhétorique de la «défense de l'identité nationale» et de la «menace de la présence allogène». Cette rhétorique est révélatrice de l'existence, dans la société suisse, d'un courant politique favorable à un enfermement identitaire face à l'immigration et donc animé par des tendances xénophobes. «La Suisse illustre, à cet égard, une des causes profondes de la montée du racisme et de la xénophobie en Europe: le rôle important de l'instrumentalisation politique du racisme dans le débat politique», a déclaré M. Diène.

Faisant part des observations préliminaires sur la visite qu'il a effectuée en Fédération de Russie au mois de juin dernier, le Rapporteur spécial a par ailleurs déclaré que, bien que sa mission lui ait permis de constater l'absence de racisme d'État dans ce pays, il a pu y noter l'existence d'une dynamique profonde de racisme et de xénophobie dans la société russe. Cette visite fera également l'objet d'un rapport exhaustif qui sera présenté lors de la quatrième session du Conseil, a indiqué M. Diène.

Le rapport sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l'intolérance qui y est associée (E/CN.4/2006/16 et Add.1 à 4) indique que pour le rapporteur, l'actualité du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l'intolérance qui y est associée est révélatrice des tendances lourdes suivantes: la recrudescence du racisme, de la discrimination raciale et de la xénophobie, nourrie par l'intolérance et l'hostilité à l'immigration, la montée générale de la diffamation des religions, notamment l'antisémitisme et la christianophobie et plus particulièrement l'islamophobie, l'importance croissante dans les constructions identitaires du refus du multiculturalisme, la tendance à une hiérarchisation des discriminations raciales, la légitimation intellectuelle de plus en plus ouverte du racisme, de la discrimination raciale et de la xénophobie, la banalisation du racisme par la prégnance dans les programmes des partis démocratiques de plates-formes politiques racistes et xénophobes des partis d'extrême droite, ainsi que l'aggravation des manifestation de racisme dans le sport, notamment le football.

Le Rapporteur spécial recommande, outre l'adoption de législations contre le racisme, la promotion du lien entre le combat contre le racisme et la construction d'un multiculturalisme démocratique, interactif et égalitaire. Il invite le Conseil à attirer l'attention des États Membres sur la profondeur historique et culturelle du racisme. Il l'invite aussi à souligner la gravité des manifestations et pratiques racistes et xénophobes dans les zones d'entrée, d'accueil et d'attente des pays (aéroports, gares, ports, etc..). Il est capital que ces zones ne deviennent pas des zones de non-droit pour les non-nationaux en général et surtout pour les immigrés et demandeurs d'asile.

L'additif 2 au rapport concerne la mission que le Rapporteur spécial a effectuée au Japon du 3 au 11 juillet dernier. Durant cette mission, le Rapporteur spécial a examiné les facteurs de discrimination qui touchent différents groupes minoritaires, notamment les minorités issues d'un système de classes apparenté au régime des castes, les autochtones, les descendants de personnes originaires d'anciennes colonies japonaises, les étrangers et les travailleurs migrants. Le Rapporteur spécial est arrivé à la conclusion que la discrimination raciale et la xénophobie étaient présentes au Japon et qu'elles touchaient trois catégories de victimes: les minorités nationales (Burakus, Aïnous et habitants d'Okinawa); les personnes et descendants de personnes originaires d'anciennes colonies japonaises (Coréens et Chinois); les étrangers et les migrants originaires d'autres pays asiatiques et du reste du monde. Les manifestations de cette discrimination sont tout d'abord d'ordre social et économique. Il y a une profonde discrimination d'ordre culturel et historique qui touche principalement les minorités nationales et les descendants de personnes originaires d'anciennes colonies japonaises; cela transparaît essentiellement dans la reconnaissance et la transmission insuffisantes de l'histoire de ces communautés et dans la perpétuation de l'image discriminatoire de ces groupes. Pour ce qui est des politiques et des mesures adoptées par les pouvoirs publics, le Rapporteur spécial se félicite de la promulgation d'une série de lois qui renforcent certains droits dans le cas de certaines minorités mais note avec préoccupation qu'il n'y a pas de législation nationale interdisant la discrimination raciale et garantissant un recours judiciaire aux victimes. Le Rapporteur spécial recommande notamment la reconnaissance de l'existence de la discrimination raciale au Japon et l'expression d'une volonté politique pour la combattre; l'adoption d'une loi nationale contre la discrimination; la mise en place d'une commission nationale de l'égalité des droits de l'homme; la réécriture et l'enseignement de l'histoire des groupes marginalisés.

L'additif 3 au rapport concerne la mission que le Rapporteur spécial a effectuée au Brésil du 17 au 26 octobre 2005. Le Rapporteur spécial a constaté que la discrimination raciale était profondément enracinée au Brésil et qu'au cours de ces cinq derniers siècles, elle avait marqué de son empreinte la structure de la société tout entière. Cette discrimination touche principalement la communauté amérindienne autochtone et la population d'ascendance africaine, mais elle s'exerce aussi à l'égard de certains travailleurs migrants, réfugiés et demandeurs d'asile en provenance de pays d'Amérique du Sud et des Caraïbes. Le fait que la carte de la marginalisation politique, sociale et culturelle se confonde avec celle des spécificités humaines et culturelles de ces communautés démontre le caractère foncièrement structurel du racisme et de la discrimination raciale. Le Rapporteur spécial se félicite de ce que les autorités fédérales reconnaissent l'existence et l'intensité du phénomène du racisme et salue l'adoption de plusieurs textes législatifs et la mise en place d'un certain nombre d'institutions visant à le combattre. Il relève toutefois une résistance aux politiques allant dans ce sens à différents niveaux de la société en général et de la part de certaines autorités fédérales et locales, et la persistance de l'idéologie de la démocratie raciale au sein de la population et de certaines institutions. Il prend note avec une vive préoccupation du recours important de certains éléments de la police fédérale et locale à la violence et à des actes criminels contre de jeunes Afro-Brésiliens et contre la communauté autochtone. Le Rapporteur spécial formule donc un certain nombre de recommandations visant à traduire la volonté politique des autorités brésiliennes en une double stratégie juridique et culturelle qui permette de supprimer les causes profondes du racisme et de la discrimination raciale dans la société et d'en éliminer les conséquences.

L'additif 4 au rapport porte sur la mission que le Rapporteur spécial a effectuée en Suisse du 9 au 13 janvier 2006. Dans ce rapport, le Rapporteur spécial s'interroge sur la signification profonde de la déclaration d'un porte-parole de l'UDC qui, à la suite de sa visite, a dit: «J'accepte qu'un représentant de l'ONU nous fasse des critiques puisque nous sommes maintenant Membres de l'ONU, mais c'est quand même le comble que ces remarques viennent d'un Sénégalais». Le Rapporteur spécial a noté avec satisfaction les réactions du Département fédéral des affaires étrangères, qui a déploré vivement que le porte-parole d'un parti gouvernemental mette en cause la compétence d'un Rapporteur spécial des Nations Unies, ainsi que du Département fédéral de l'intérieur, qui a indiqué que cette remarque, qu'il a qualifiée d'incongrue, démontre l'inculture de son auteur quant à la qualité des intellectuels africains. La société suisse est davantage que par le passé progressivement marquée par une grande diversité culturelle, ethnique et religieuse; or, là comme partout ailleurs, la remise en question de l'identité nationale par cette diversité est source d'une tension identitaire, poursuit le rapport. Le Rapporteur spécial a noté, tant dans le discours politique que dans les plates-formes politiques, ainsi que dans une partie des médias, la place croissante de la rhétorique de la «défense de l'identité nationale» et de «la menace de la présence allogène». Il a en outre fait le constat de l'absence de clarté et de détermination politique à combattre le racisme et la xénophobie. L'absence d'une législation nationale globale contre le racisme, la discrimination raciale et la xénophobie constitue un obstacle majeur à l'efficacité du combat de la Suisse contre le racisme, souligne le rapport. En outre, la législation sur les étrangers et sur l'asile, par sa dimension restrictive et répressive, est révélatrice d'une tendance au traitement uniquement sécuritaire des questions de l'immigration et de l'asile ainsi qu'à la criminalisation de l'étranger, de l'immigré et du demandeur d'asile. Le nombre élevé d'actes de violence policière à connotation raciste et xénophobe contre ces groupes ainsi que l'impunité judiciaire et administrative dont jouissent, selon les victimes, leurs auteurs constituent des indicateurs alarmants non seulement de la prégnance d'une culture de racisme et de xénophobie dans ces institutions centrales de la loi et de l'ordre mais surtout de l'absence de directives politiques déterminées à l'intention de l'institution policière.

Le rapport du Rapporteur spécial sur la situation des populations musulmanes et arabes dans diverses régions du monde (E/CN.4/2006/17) s'articule autour des conclusions suivantes: la gravité de la recrudescence, dans la plupart des régions, des manifestations et expressions de discrimination contre les populations musulmanes et arabes et d'actes de violence contre leurs lieux de culte et de culture; la centralité, dans ces manifestations, de l'hostilité à l'islam avec la légitimation intellectuelle ouverte de l'islamophobie; l'assimilation de l'islam au terrorisme et la surdétermination de son traitement principalement sécuritaire par le contrôle de son enseignement et la surveillance de ses lieux de culte et de ses pratiquants.

Enfin, la mise à jour de l'étude réalisée par le Rapporteur spécial au sujet des programmes politiques qui incitent à la discrimination raciale ou l'encouragent (E/CN.4/2006/54) souligne que la recrudescence du racisme, de la discrimination raciale et de la xénophobie est l'expression d'une régression majeure du progrès démocratique par son instrumentalisation politique et idéologique traditionnelle par les partis d'extrême droite, sa légitimation intellectuelle ouverte par des intellectuels et des médias influents, l'infiltration progressive de la rhétorique et des plates-formes racistes et xénophobes dans les programmes politiques de partis démocratiques sous couvert de lutte contre le terrorisme, l'immigration illégale et la défense de l'identité nationale, et la banalisation populaire de la culture et de la mentalité racistes et xénophobes. Toutes les formes, anciennes et nouvelles, de racisme et de discrimination raciale sont désormais revigorées, souligne le document. Le combat contre le racisme, la discrimination raciale et la xénophobie doit s'articulier autour d'une double stratégie, à la fois politique et juridique, d'une part, et éthique, intellectuelle et culturelle, de l'autre.

M. PETER LESA KASANDA, Président-Rapporteur du Groupe de travail d'experts sur les personnes d'ascendance africaine, a présenté le rapport du Groupe en rappelant que celui-ci s'était penché sur trois thèmes, à savoir l'intégration de la situation des personnes d'ascendance africaine dans les plans pour la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement, l'autonomisation des femmes d'ascendance africaine et le rôle des partis politiques dans l'intégration des personnes d'ascendance africaine dans la vie politique et les processus décisionnels. Il a fait observer qu'en dépit des efforts en cours afin d'appliquer les recommandations adoptées à l'issue de la Conférence mondiale contre le racisme de Durban, les personnes d'ascendance africaine continuent de vivre dans une situation de pauvreté et de marginalisation dans la plupart des régions du monde, tant dans les pays développés que dans les pays en développement. Les femmes et les fillettes noires sont parmi les groupes les plus défavorisés et les plus vulnérables, a poursuivi M. Kasanda. Il a souligné que le Groupe de travail avait encouragé les partis politiques à prendre des mesures concrètes pour promouvoir la solidarité, la tolérance et le respect de tous les droits de l'homme pour tous, sans distinction aucune.

S'agissant de la mission qu'il a effectuée en Belgique, M. Kasanda a noté avec satisfaction les efforts déployés par le Gouvernement belge pour protéger les droits de l'homme des personnes d'ascendance africaine et traiter les questions relatives à leur bien-être. Souvent, a fait observer M. Kasanda, les enfants d'ascendance africaine ou d'origine étrangère ne commencent pas leur cursus scolaire avec le même capital social et culturel que les autres enfants. Il a en outre jugé préoccupant que dans certaines zones fortement peuplées par des personnes d'origine étrangère, des classes sont composées essentiellement d'élèves d'origine étrangère, ce qui nuit aux efforts d'intégration déployés par les autorités nationales. La question de la reconnaissance des diplômes obtenus dans un pays étranger constitue un autre sujet de préoccupation, a ajouté le Président-Rapporteur. M. Kasanda a par ailleurs souligné que le Groupe de travail avait relevé des pratiques et des comportements discriminatoires en matière d'emploi, en particulier dans les processus de recrutement.

Le rapport du Groupe de travail d'experts sur les personnes d'ascendance africaine sur les travaux de sa cinquième session (E/CN.4/2006/19) prie instamment les États de prendre en considération le contenu des paragraphes 1 et 5 du Programme d'action de Durban, où il est recommandé, entre autres, de prendre des mesures en vue de l'éradication de la pauvreté, particulièrement dans les zones où prédominent des victimes du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l'intolérance qui y est associée, et d'envisager favorablement d'investir davantage dans le secteur médico-sanitaire, l'enseignement, la santé publique, la distribution d'électricité, l'approvisionnement en eau potable et la protection de l'environnement, entre autres secteurs. De plus, considérant les conditions d'extrême pauvreté dans lesquelles vivent dans leur majorité les personnes d'ascendance africaine, tant dans les pays en développement que dans les pays développés, le Groupe de travail prie instamment les États à élaborer, en coopération avec la société civile, des stratégies visant à mettre en œuvre les objectifs de développement du Millénaire vis-à-vis des personnes d'ascendance africaine, quel que soit le pays dans lequel elles vivent.

D'autre part, le Groupe de travail prie instamment les États de collecter des données ventilées par race et par sexe dans le but de réaliser des évaluations économiques, sociales et culturelles fiables des problèmes qui touchent plus particulièrement les femmes d'ascendance africaine, afin d'élaborer et mettre en œuvre des programmes de lutte contre les discriminations fondées sur la race et le sexe et d'évaluer les progrès en la matière. Les États doivent adopter des mesures spécifiques telles que la discrimination positive, le traitement préférentiel ou les quotas pour s'attaquer aux formes multiples et exacerbées de discrimination, aux handicaps, aux obstacles et aux difficultés auxquels se heurtent les femmes d'ascendance africaine et promouvoir leur intégration dans des domaines tels que l'éducation, l'économie ou la politique. Par ailleurs, le Groupe de travail pense que les États doivent impérativement collecter des données ventilées sur la participation des personnes d'ascendance africaine à la vie politique, telles que le taux de participation aux scrutins lors des élections présidentielles et parlementaires, tant au niveau national que local, les adhésions aux partis politiques, la présence au sein des organes législatifs et les fonctions politiques que ces personnes exercent, dans le but de déterminer leur niveau de participation à la vie politique. Le Groupe de travail encourage enfin les États à élaborer des initiatives visant à combattre la discrimination et à faciliter la participation des personnes d'ascendance africaine à la vie politique et aux processus décisionnels.

M. JORGE BUSTAMANTE, Rapporteur spécial sur les droits de l'homme des travailleurs migrants, a lui aussi déploré un regain de sentiments xénophobes dans le monde, avec ses conséquences pour les travailleurs sans papiers, comme s'ils n'étaient plus des sujets de droit. Dans les pays de destination, on enregistre des violations flagrantes des droits des personnes migrantes, surtout en région et au mépris des lois nationales. Cette attitude est adoptée à des fins électoralistes, afin de gagner des voix lors d'élections régionales, par exemple. La reconnaissance de l'existence, dans tous les États, d'une demande interne en main-d'œuvre en situation irrégulière demande sera facilitée par l'introduction par les Nations Unies d'une nouvelle norme statistique qui rendra compte de l'importance numérique mais aussi de l'apport bénéfique des travailleurs migrants non déclarés aux économies des pays où ils sont installés. La production de telles statistiques aurait par ailleurs pour effet de couper l'herbe sous le pied des mouvements xénophobes qui mettent en avant le caractère prétendument indésirable des travailleurs migrants dans leurs pays. Ces statistiques permettraient aussi sans doute de combattre la xénophobie en général et de convaincre certains États encore récalcitrants de ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leurs familles adoptée en 1990.

M. Bustamante a souligné que les violations des droits de l'homme des migrants en situation irrégulière sont à mettre en rapport direct avec la vulnérabilité de ces personnes. Ce constat est particulièrement évident en ce qui concerne les femmes et les enfants, surtout lorsqu'ils et elles font partie de populations autochtones. Les violations dont le Rapporteur spécial a eu connaissance dans le contexte des migrations temporaires sont la confiscation des documents d'identité par les employeurs, le système des parrainages, qui rend les migrants totalement dépendants de leurs employeurs, le placement de certaines catégories en marge de la protection du droit du travail, entre autres. Par ailleurs, on doit déplorer la pratique croissante de l'engagement de travailleurs migrants par le biais d'intermédiaires, le but étant pour les employeurs d'échapper à leurs obligations au regard du droit du travail.

Le Rapporteur spécial a précisé aussi avoir reçu de nombreuses dénonciations de violations des droits de l'homme de personnes migrantes, qui portaient notamment sur des conditions de détention inhumaines, de mauvais traitement lors de contrôle aux frontières, des décès suite à l'usage excessif de la force par des membres de la police, les déportations collectives, les expulsions sommaires et les violations des droits de l'homme des personnes déplacées. Le Rapporteur spécial constate aussi l'impunité dont bénéficient les auteurs de ces violations ainsi que la fréquence de la violence à l'encontre des femmes. M. Bustamante a aussi fait état d'un très grand nombre de rapports qu'il a reçus en 2006 concernant les migrants ayant trouvé la mort en Méditerranée. À cet égard, le Rapporteur spécial a dit encourageante l'adoption de nouveaux amendements aux conventions maritimes, en juillet dernier, qui permettront sans aucun doute de mieux protéger les droits des migrants en mer. Les équipages, qui ont en effet le devoir de sauver les naufragés, voient leurs efforts souvent contrecarrés par les lois des pays où ils font relâche, leur interdisant de laisser descendre les personnes qu'ils auraient sauvées. Les amendements des conventions maritimes permettent de remédier à cette situation grave qui menace de vider de leur substance les principes du droit maritime.

Le rapport du Rapporteur spécial sur les droits de l'homme des travailleurs migrants (E/CN.4/2006/73) signale notamment le fait que la réticence à reconnaître la demande de main-d'œuvre migrante, commune parmi les pays d'accueil, prend une importance considérable quand il apparaît clairement qu'il existe un lien entre cette réticence et l'apparition d'idéologies hostiles aux immigrants, souvent teintées de xénophobie et de racisme. Le déni de la demande en question est une question importante car c'est l'un des principaux facteurs qui favorisent l'immigration clandestine, situation qui est au centre des abus et des nombreuses violations des droits de l'homme subies par les migrants. Le rapport relève aussi que la discrimination et l'idéologie antimigrants sont des facteurs qui touchent tous les migrants, qu'ils soient des migrants en situation régulière ou irrégulière, temporaires ou permanents. Le Rapporteur spécial indique son intention de continuer d'examiner les aspects multidimensionnels des pratiques discriminatoires touchant les migrants, en mettant particulièrement l'accent sur la dimension sexospécifique de la migration. Il mettra également l'accent sur la situation des enfants participant à la migration comme enfants non accompagnés ou enfants de migrants, en soulignant les besoins de protection de ce groupe et en les traitant comme autant de droits. Dans un premier temps, le Rapporteur spécial se concentrera sur l'analyse de la demande par une analyse de la demande réelle de main-d'œuvre migrante des États membres par secteur économique, portant sur les cinq dernières années.

Le rapport du rapporteur spécial est complété par le rapport de la précédente Rapporteuse spéciale sur les droits de l'homme des migrants Mme Gabriela Rodríguez Pizarro, dont le mandat a expiré en juillet 2005. Le rapport informe de la visite que Mme Rodríguez Pizarro a effectuée au Burkina Faso (E/CN.4/2006/73/add.2). Le rapport traite plusieurs des problèmes migratoires auxquels le pays est confronté et recommande en particulier, concernant les effets de la crise en Côte d'Ivoire sur le Burkina Faso, que la priorité soit accordée aux programmes de réinsertion économique des personnes rapatriées, et que la situation des femmes et des enfants soit dans ce contexte abordée expressément. Le rapport préconise que soit envisagée la possibilité de créer un fonds d'assistance à l'intention des rapatriés et que soit mis en place un registre d'état civil où pourraient être déposées les plaintes des violations des droits de l'homme subies pendant la crise en Côte d'Ivoire. La Rapporteuse spéciale estime également que l'établissement d'une politique migratoire nationale appropriée est nécessaire, comme en témoignent les problèmes croissants posés par les flux qui procèdent du Burkina Faso, ou transitent par ce pays à destination des pays occidentaux. Le rapport préconise, entre autres mesures, la conclusion d'accords bilatéraux avec les pays expulsant des ressortissant vers le Burkina Faso, afin que les rapatriements puissent avoir lieu dans le respect des droits des migrants irréguliers. Un accord de ce type est surtout nécessaire avec la Jamahiriya arabe libyenne, précise le rapport. Un dernier chapitre est consacré à la traite des enfants, des mesures plus vigoureuses étant à cet égard nécessaire pour appuyer l'action des comités de surveillance, fait valoir la Rapporteuse spéciale.


Déclarations de pays concernés

M. ICHIRO FUJISAKI (Japon) a salué les efforts déployés par M. Diène afin de présenter un rapport détaillé à l'issue de sa visite au Japon. Il a toutefois souligné que certains éléments du rapport doivent être rectifiés. En outre, de l'avis du Japon, certaines parties du rapport ne relèvent pas du mandat du Rapporteur spécial. Le Japon a pris toutes les mesures possibles pour combattre la discrimination raciale, a-t-il assuré. La Constitution japonaise garantit l'égalité en droit de tous, sans aucune discrimination, a-t-il rappelé. Or, il y a eu des affaires dans lesquelles des tribunaux ont jugé que des actes de citoyens constituaient une discrimination au sens de la Constitution, a fait valoir le représentant japonais. En ce qui concerne les Dowa (ou Buraku), le Gouvernement a appliqué des politiques spéciales à l'égard des districts Dowa dans le but d'améliorer rapidement les conditions économiques de ces districts; suite à ces efforts, d'importantes améliorations ont été apportées, notamment en matière de logement et d'infrastructures, a déclaré le représentant japonais. Il a en outre attiré l'attention sur la loi pour la promotion de la culture du peuple ainu, entrée en vigueur en juillet 1997 et dont l'objectif est d'instaurer une société respectant la fierté raciale du peuple ainu, tout reconnaissant la contribution de la culture et des traditions de ce peuple au développement d'une culture variée au Japon. En ce qui concerne la question des ressortissants étrangers résidant au Japon, le représentant a rappelé que la Constitution japonaise garantit les droits de l'homme fondamentaux aux résidents étrangers au Japon, à l'exception des droits qui, du fait de leur nature, sont interprétés comme n'étant applicables qu'aux seuls citoyens japonais.

MME MAGALI NAVES (Brésil) a salué le rapport de M. Diène , mais a tenu à souligner certains aspects qui n'ont pas été assez pris en considération, en particulier les initiatives du gouvernement et la participation de la société civile. L'État brésilien a ainsi, entre autres initiatives de lutte contre le racisme et la discrimination, créé un Secrétariat d'État aux politiques de promotion de l'égalité raciale en 2003, qui a rendu possible la création du poste de Rapporteur spécial pour les droits des personnes d'ascendance africaine et contre la discrimination raciale dans l'Organisation des États américains. Il a de même participé aux efforts de rédaction et de négociation du projet de convention interaméricaine contre le racisme et toutes les formes de discrimination, qui met à jour et élargit la protection accordée par le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale. Le Brésil s'est aussi battu pour la création d'un Groupe de travail sur le racisme auprès de la réunion des hautes autorités aux droits de l'homme du Mercosur et des pays associés. De même, le Gouvernement a participé à une réunion d'experts sur les Plates-formes politiques qui incitent au racisme et à la xénophobie, réunion organisée par M. Diène. D'autre part, l'intensification du travail en partenariat entre l'administration fédérale, les gouvernements locaux et les municipalités ont permis la création, en 2004, d'un Forum intergouvernemental de promotion de l'égalité raciale.

Malgré tous ces progrès, la promotion de l'égalité raciale au Brésil est confrontée à plusieurs facteurs qui identifient discrimination raciale et discrimination économique. Les processus d'éducation antidiscriminatoire réalisés à partir de campagnes médiatiques visent à promouvoir la conscience de l'existence du racisme et à démontrer que les politiques universalistes sont insuffisantes pour traiter les méfaits historiques du racisme. Cependant, les efforts engagés sont constants et progressifs, a fait valoir la représentante, rappelant que les résultats seront engrangés sur le long terme.

M. BLAISE GODET (Suisse) a félicité le Rapporteur spécial sur le racisme pour son travail et son analyse de la situation en Suisse. Le représentant a pris note des commentaires oraux de M. Diène et y répondra ultérieurement, dès que le rapport final sera connu. Cependant, concernant un commentaire à connotation xénophobe proféré par un responsable politique suisse à l'encontre de M. Diène, le représentant a fait savoir que les autorités fédérales s'étaient publiquement désolidarisées de ces propos après les avoir fermement condamnés. Quant au système politique suisse, où les solutions centralisatrices ne sont pas envisageables, il présente pour avantage que pour chaque décision de fond, des majorités doivent être dégagées dans les urnes de tous les cantons. L'avantage de ce processus assez long est qu'une fois les solutions largement acceptées au plan politique, elles sont appliquées de manière conséquente.

La Suisse se félicite de la reconnaissance par le Rapporteur spécial de l'utilité des programmes gérés par le Service de lutte contre le racisme du Département fédéral de l'intérieur. Avec la création de ce service, a fait valoir le représentant, la Confédération a intégré la lutte contre le racisme comme tâche permanente de l'État. La mise sur pied de ce service a aussi permis de renforcer la sensibilisation des citoyennes et citoyens. Le Service de lutte contre le racisme a pu assurer que tous les offices fédéraux soient engagés dans la lutte contre le racisme. De concert avec l'Office fédéral des migrations, il a intensifié sa collaboration avec les cantons dans le domaine de l'intégration et de la lutte contre la discrimination. Avec la nouvelle loi sur les étrangers, soumise à votation ces prochains jours, la base légale de cette politique d'intégration sera encore renforcée, a dit le représentant.

MME MARINA KORUNOVA (Fédération de Russie) a indiqué que son pays appréciait hautement les activités du Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme. Elle a précisé que la Fédération de Russie avait l'intention d'étudier soigneusement les recommandations du Rapporteur spécial et de prendre les mesures nécessaires pour résoudre les problèmes qui demeurent. La Constitution russe garantit l'égalité des droits de chacun indépendamment de toute considération, a poursuivi la représentante. La législation pénale accorde une attention particulière à la prévention du racisme et de la discrimination, a-t-elle ajouté.

M. ALEX VAN MEEUWEN (Belgique) a exprimé la satisfaction de son pays sur la façon dont s'est déroulée la visite du Groupe de travail d'experts sur les personnes d'ascendance africaine. Il a souligné que cette disponibilité de la Belgique à recevoir ce Groupe de travail s'inscrit dans la ligne de son engagement à recevoir toute procédure spéciale qui en ferait la demande. Toutes les autorités belges compétentes, que ce soit au niveau fédéral, régional ou local, se sont investies dans la réussite de cette visite et ont souligné la volonté et les efforts des autorités belges pour lutter contre le racisme et promouvoir la diversité, a-t-il poursuivi, avant de se réjouir que ceci ait été reconnu par les experts dans leur rapport «qui présente une vision équilibrée de la visite». Le représentant belge a par ailleurs souligné le caractère constructif des recommandations du Groupe de travail, qui identifient bien les défis et les enjeux d'une réelle intégration des personnes étrangères en Belgique. Ce rapport et ses recommandations ont été répercutés auprès de toutes les instances concernées; ils sont d'ailleurs à la base de plusieurs réflexions en cours, a-t-il indiqué. Sur le plan législatif, la Belgique s'est dotée d'un arsenal complet pour lutter contre le racisme et toutes les formes de discriminations, a insisté le représentant. En 1993, le Centre pour l'égalité des chances et la lutte contre le racisme a été créé, qui dispose entre autres de la possibilité d'ester en justice, a-t-il ajouté. En 2003, les compétences de ce Centre ont été élargies à toutes les formes de discriminations ainsi qu'aux questions de migration et de traite des êtres humains, a-t-il précisé. Il a indiqué que le Centre pour l'égalité des chances a été chargé de procéder à l'évaluation du plan d'action national de lutte contre le racisme; cette évaluation devrait aboutir début 2007.

Les autorités belges sont conscientes de la nécessité de trouver un moyen de quantifier les discriminations et d'évaluer l'efficacité des mesures prises pour les combattre, a poursuivi le représentant. Toutefois, de telles récoltes de données sur base ethnique posent des difficultés, notamment d'ordre éthique et juridique, a-t-il souligné. Les autorités belges sont également conscientes des discriminations existantes dans le domaine de l'emploi, du logement et de l'éducation. Toutefois, il convient de rappeler que les politiques d'aides à l'emploi et au logement ne sont aucunement discriminatoires. Ainsi, la Région wallonne a adopté un ensemble de mesures visant à faciliter l'accès à l'emploi et au logement par les personnes étrangères. Pour ce qui est de l'enseignement, les Communautés flamande et française ont également pris des mesures pour y assurer l'égalité des chances. Les autorités judiciaires se sont dotées récemment d'instruments visant à mieux appréhender et enregistrer les crimes racistes, a ajouté le représentant. Les motifs racistes et xénophobes de certaines infractions seront systématiquement encodés, ce qui devrait permettre de disposer d'une image plus fidèle de ce phénomène, a-t-il indiqué. Lors des élections communales du 8 octobre prochain, pour la première fois, les résidents étrangers non-européens auront la possibilité de voter, a enfin souligné le représentant.

M. MOUSSA B. NEBIE (Burkina Faso), intervenant au sujet du rapport de la précédente Rapporteuse spéciale sur les droits de l'homme des migrants sur sa mission au Burkina Faso, a rappelé que son pays est un véritable carrefour migratoire et une terre d'accueil et de transit pour les travailleurs migrants de la région subsaharienne. Le Burkina a toujours fait de l'intégration et de la politique de bon voisinage un des points cardinaux de sa politique étrangère. Le représentant, après avoir rectifié une erreur sémantique concernant l'utilisation déplacée dans le rapport du terme «stigmatisation» à propos des «vétérans de la brousse», a rappelé aussi que son pays a privilégié la solution de l'intégration et de l'intégration des rapatriés à celle qui aurait pu consister à les parquer dans des ghettos à la périphérie des villes. Quant aux difficultés socio-économiques dont il est fait état dans le rapport, le représentant a rappelé qu'elles ne sont pas spécifiques aux rapatriés et qu'elles s'expliquent par la situation générale de pauvreté dans le pays, les difficultés économiques découlant de la fermeture des frontières avec la Côte d'Ivoire suite à la crise ainsi que l'imprévisibilité du retour massif des rapatriés au Burkina Faso. Le pays en appelle donc à la solidarité internationale et souhaite par ailleurs réaffirmer son engagement à mettre en œuvre les accords régionaux et internationaux auxquels il est partie pour une meilleure protection des migrants vivant ou en transit sur son territoire, a dit le représentant.
Aperçu des déclarations dans le cadre du débat interactif

M. MASOOD KHAN (Pakistan) a remercié le Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme pour son étude dont il a jugé les conclusions alarmantes. Les hostilités à l'égard des musulmans se développent de manière rampante, a relevé le représentant. Il a dénoncé les tendances à l'islamophobie et à l'incitation à l'islamophobie, dont les caricatures du Prophète constituent une manifestation. La liberté d'expression n'est pas en accord avec l'impératif du respect des religions, a poursuivi le représentant pakistanais. Comme le souligne le Rapporteur spécial, il est nécessaire de promouvoir le multiculturalisme, a-t-il ajouté. Il a souhaité connaître le point de vue du Rapporteur spécial sur la manière dont le Conseil pourrait aborder la question du déficit juridique dans le domaine du respect des religions. Le représentant pakistanais s'est en outre enquis des mesures qui pourraient être prises pour renforcer la participation des personnes d'ascendance africaine. Enfin, il a souhaité savoir pourquoi la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leurs familles a fait l'objet de si peu de ratifications.

MME KATRI SILFVERBERG (Finlande, au nom de l'Union européenne) a exprimé l'appréciation des pays de l'Union européenne et des pays en voie d'accession pour le rapport de M. Diène. Elle a demandé comment les gouvernements pouvaient contribuer à identifier les causes profondes et la nature des discriminations ? Se référant au déni de l'Holocauste par un chef d'État rencontré par M. Diène, et aux mesures de suivi que celui-ci avait l'intention de mettre en œuvre auprès des autorités du pays concerné, elle a demandé où en étaient ces démarches. Se félicitant de ce que le rapport avait reconnu qu'une expérience de racisme pouvait être exacerbée par une discrimination portant sur d'autres causes, l'orientation sexuelle, par exemple, ou le genre, elle a demandé quelles mesures le Groupe de travail préconisait aux États pour promouvoir une société pluraliste, intégrant les individus, indépendamment de leur race, leur origine ethnique, leur sexe ou leur orientation sexuelle.

Remerciant M. Kasanda pour son rapport, et évoquant en particulier la situation des femmes d'ascendance africaine, elle a souhaité recevoir des précisions sur les programmes d'action affirmative et demandé au rapporteur de communiquer des exemples positifs qui pourraient servir de modèles.

Se référant le chapitre du rapport de M. Bustamante portant sur violations dont sont victimes les travailleurs migrants, elle a demandé des précisions par rapports aux violations commises par les acteurs non-étatiques. Notant que le diagnostic du Groupe de travail se concentrait sur les travailleurs migrants, elle a souhaité aussi en savoir plus sur l'impact positif de l'immigration, à la fois pour le pays d'origine et le pays de destination.

M. MICHAEL STEINER (Allemagne) a déclaré que la lutte contre le racisme et la discrimination était une priorité pour l'Allemagne, et a remercié le Rapporteur spécial pour avoir contribué à l'inclusion de messages contre le racisme lors des manifestations sportives, notamment lors des derniers championnats du monde de football qui se sont tenus en Allemagne. Cette campagne a abouti à une déclaration commune des capitaines des équipes contre la discrimination et le racisme. Ces initiatives peuvent contribuer de manière efficace à la lutte contre le racisme dans le monde, a estimé le représentant allemand.

M. JOAQUÍN MARIA DE ARISTEGUI LABORDE (Espagne) a commenté le rapport du Rapporteur spécial sur les droits des migrants en soulignant que la question du contrôle aux frontières et la problématique des migrants dans ce contexte demeurent source de préoccupation. Aussi, a-t-il demandé à M. Bustamante comment, selon lui, il serait possible de faire face à cette situation de manière équilibrée. Avez vous eu connaissance de bonnes pratiques de certains pays dans ce domaine, a-t-il lancé à l'intention du Rapporteur spécial ? L'Espagne connaît bien la problématique migratoire, tant du point de vue de ses aspects positifs que de ses aspects négatifs, a rappelé le représentant. Il a fait part de la volonté du Gouvernement espagnol de collaborer avec M. Bustamante dans ce domaine.

MME FATOUMATA DIALLO (Mali) a souligné que le Mali était un pays multiethnique et multiculturel qui ne connaît pas de phénomène de racisme ni de discrimination raciale. Les différentes races et ethnies dont les activités sont d'ailleurs complémentaires vivent en parfaite harmonie. Le peuple malien, dont l'hospitalité et le respect de l'étranger caractérisent la culture, ne connaît pas non plus de phénomène de xénophobie. Il est de tradition au Mali que l'étranger compte plus que l'hôte. Le Mali a une forte tradition d'immigration, c'est pourquoi la dimension raciste et xénophobe qui caractérise le traitement des immigrés et qui se situe au-delà de l'acceptable dans certains pays constitue une préoccupation pour le Gouvernement du Mali. Pour endiguer ce phénomène, le Mali recommande aux États concernés une politique beaucoup plus volontariste dans l'application des instruments juridiques internationaux qu'ils ont eux-mêmes ratifiés. Il serait utile pour ces États de mener à l'interne une politique d'information et d'éducation pour une reconversion des mentalités, a suggéré la représentante, ceci à travers les échanges de jeunesse et des échanges culturels, par exemple.

M. ELCHIN AMIRBAYOV (Azerbaïdjan) a relevé que le racisme est le terrain fertile de tendances dangereuses. Il s'est notamment dit alarmé par la diffamation des religions ainsi que par l'islamophobie, faisant observer que l'islam est souvent assimilé au terrorisme. Il s'est enquis des stratégies préconisées par le Rapporteur spécial pour combattre les slogans racistes. Le représentant a souhaité savoir si le Rapporteur spécial était partisan d'aller jusqu'à restreindre la liberté d'expression aux fins de la lutte contre la discrimination raciale.

M. PATRICIO UTRERAS (Chili) a exprimé le constat que l'islamophobie, la christianophobie et l'antisémitisme sont de nature plus politique que religieuse. Face à ce constat, peut-on efficacement combattre ces phénomènes par le dialogue ou convient-il de mettre en place des mesures politiques? Il s'est d'autre part interrogé sur la place du programme d'action de Durban et plus particulièrement sur le rôle des médias dans la lutte contre le racisme et la discrimination.

M. ARTAK APITONIAN (Arménie) a observé que si certains groupes d'États sont exposés à la surveillance des médias, d'autres échappent totalement à cette forme de contrôle. Il a demandé au Rapporteur spécial sur le racisme, M. Diène, s'il comptait adapter sa liste des pays à visiter pour tenir compte de la liste croissante des cas communiqués. Il convient de lutter d'une manière générale contre les partis politiques qui font la promotion du négationnisme et de la discrimination, avec des conséquences pour les relations internationales, a aussi déclaré que le représentant. Ce dernier a aussi suggéré que le mandat de M. Diène, créé il y a douze ans maintenant, soit modifié pour qu'il soit mieux adapté aux nouvelles formes de discrimination.

M. ZDZISLAW RAPACKI (Pologne) a rappelé que l'éducation constitue un élément essentiel de la promotion de la tolérance. Aussi, a-t-il demandé au Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme quelles mesures il considèrerait comme les plus importantes pour renforcer encore davantage l'éducation contre le racisme. Il s'est en outre enquis des résultats d'un atelier qui s'est tenu au Brésil en avril 2006 intéressant les questions de racisme.

MME ALICIA MARTIN GALLEGOS (Nicaragua) a indiqué que son pays avait pris note des recommandations formulées par M. Diène à la suite de la visite qu'il avait faite au Nicaragua en 2004 et se réjouissait de l'accueillir à nouveau pour vérifier les progrès accomplis en matière de lutte contre le racisme et la discrimination. Soulignant qu'il n'y avait pas, au Nicaragua, de discrimination raciale institutionnelle, elle a reconnu que la problématique concernait tous les pays. Elle a cité, à cet égard, la question des violations des droits des migrants et invité les États qui ne l'avait pas encore fait à adhérer à la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leurs familles. Finalement, elle a souhaité connaître le processus de planification des visites du Groupe de travail sur les personnes d'ascendance africaine: les visites seront-elles, comme cela avait été le cas par le passé, effectuées en fonction des invitations des États parties ?

MME ASTRID HELLE AJAMAY (Norvège) a déclaré que son pays approuvait l'approche adoptée par M. Diène dans son rapport, qui met l'accent sur la nécessité d'envisager les formes de discrimination et de racisme sur un pied d'égalité, en évitant toute hiérarchisation. La Norvège, qui a adopté une loi interdisant la discrimination fondée notamment sur la race et la religion, estime que la soumission de rapports périodiques devant le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale est le fondement du système de contrôle international du respect par les États de leurs obligations. Le représentant a demandé à M. Diène des précisions sur les relations que ce dernier entretient avec le Comité et sur les meilleures pratiques qu'il serait possible de tirer des relations avec cet organe et qui seraient applicables aux travaux du Conseil.

MME ELIANA BERAUN ESCUDERO (Pérou) a approuvé les recommandations figurant dans le rapport du Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme. Elle a souhaité savoir si M. Diène avait identifié des décisions ou des normes internes en matière de migration qui contiendraient des éléments racistes ou xénophobes et influeraient sur les droits des travailleurs migrants. Elle a par ailleurs demandé au Président Rapporteur du Groupe de travail d'experts sur les personnes d'ascendance africaine de formuler un diagnostic de situations concrètes de ces personnes par régions et par pays. La représentante péruvienne a par ailleurs mis l'accent sur l'intérêt que son pays accorde aux conditions dans les centres de contrôle aux frontières et aux problèmes d'irrégularités dans les procédures d'expulsion. Elle a jugé intéressante l'initiative visant à mettre sur pied une base de données sur la proportion et l'influence des migrants dans les différents pays. Quelles activités le Rapporteur spécial sur les droits de l'homme des migrants envisage-t-il pour encourager les pays à ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leurs familles, a par ailleurs demandé la représentante péruvienne ?

M. MOUSA BURAYZAT (Jordanie) a déclaré que le temps accordé à la question du racisme est très limité, compte tenu en particulier des conclusions alarmantes du rapport de M. Diène. La lutte contre l'islamophobie en particulier doit «passer à la vitesse supérieure», a estimé le représentant, qui s'est inquiété de ce que, comme le montre M. Diène, les causes du racisme sont bien souvent structurelles, et non pas seulement épidermiques ou marginales comme on l'avait cru jusqu'ici. Comment les recommandations du Rapporteur spécial peuvent-elles être abordées de manière réaliste par des gouvernements eux-mêmes basés sur ces structures défaillantes, a demandé le représentant.

M. RICARDO GONZALEZ ARENAS (Uruguay) s'est déclaré intéressé par la description de la situation des droits de l'homme dans le monde par la Haut-Commissaire, mais a déploré que rien n'ait été dit concernant les événements au Liban et dans les territoires palestiniens occupés. Le représentant a par ailleurs rappelé que le consensus général est favorable à un Conseil des droits de l'homme renforcé, capable de promouvoir les droits de l'homme pour tous d'une manière impartiale et non-sélective. Par ailleurs, le Haut Commissariat doit être soutenu dans ses efforts en faveur de l'humanité, a fait valoir le représentant. Il a aussi déclaré que le respect universel des droits de l'homme dépend de l'adoption d'un certain nombre de mesures précises, mesures qui doivent être abordées sous l'angle du dialogue constructif et de la coopération avec les États concernés. Quant au dialogue interactif avec la Haut-Commissaire, il s'agit d'une nouveauté très appréciable, a souligné le représentant, estimant que cette modalité de travail doit être poursuivie à l'avenir.

M. ZHAO XING (Chine) a rappelé que, suite à l'augmentation des flux migratoires à travers le monde, il a y eu croissance des manifestations de racisme, de discrimination raciale et de xénophobie. La lutte contre le racisme et la discrimination raciale implique de faire face à des facteurs complexes, a-t-il ajouté. Aussi, s'est-il enquis des mesures que le Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme entend prendre à l'avenir pour lutter contre ces phénomènes. Rappelant qu'à l'occasion de sa visite au Japon, M. Diène avait abordé la question des manuels d'histoire, qui, au Japon, ne correspondent pas à la réalité historique, le représentant chinois a souhaité savoir si le Rapporteur spécial avait abordé avec les autorités japonaises la question de la rédaction d'un nouveau manuel d'histoire avec le concours de l'Unesco et, le cas échéant, quelle a été la réaction des autorités.

M. JOSÉ GUEVARA (Mexique) s'est félicité de ce que le Conseil ait entamé sans tarder l'examen des rapports issus de la Commission des droits de l'homme. Il a demandé à M. Bustamante quelles seraient les mesures que les États devraient adopter - outre les mesures statistiques qu'il préconise dans son rapport - pour assurer le plein respect des droits des migrants.

M. ENRIQUE MANALO (Philippines) a assuré que son gouvernement accordait la plus grande attention aux droits des migrants et appelait à la ratification, par les pays de destination notamment, de la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leurs familles. Ces droits doivent être protégés de manière prioritaire dans le contexte de leur lien avec les droits de l'homme en général, a fait valoir le représentant, demandant à M. Bustamante comment cette question pourrait être mieux intégrée aux activités du Conseil.

M. SERGIO CERDA (Argentine) s'est référé au rapport de M. Diène et a souligné l'importance de l'éducation, proposant que ce thème fasse l'objet d'un travail commun entre procédures spéciales. Il a aussi évoqué le projet de M. Kasanda d'établir, avec l'UNESCO, des indicateurs communs, en soulignant les enjeux liés à la récolte des données statistiques. Il a ensuite fait référence au rapport de M. Bustamante, et particulièrement au paragraphe portant sur les législations limitant les droits des travailleurs migrants, en insistant sur la nécessité d'évaluer les plates-formes politiques qui œuvrent dans ce sens.

M. CARLOS RAMIRO MARTÍNEZ ALVARADO (Guatemala) a rappelé que le Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme s'était rendu dans son pays en 2004 et que les autorités guatémaltèques avaient, depuis, entrepris de mettre en œuvre une bonne partie des recommandations qu'il avait alors formulées à l'issue de cette visite. Le Guatemala a ratifié la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leurs familles et appelle tous les pays qui ne l'ont pas encore ratifiée à le faire.

M. DEDE A. RIFAI (Indonésie) a souligné que son pays attache une importance particulière à la question des travailleurs migrants, son pays comptant de nombreux ressortissants qui travaillent à l'étranger. Il a souligné l'importance de la ratification par davantage de pays de la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leurs familles. Il a demandé aux pays d'accueil des migrants de se conformer aux normes internationales de protection des migrants et a préconisé la signature d'accordds bilatéraux dans ce domaine.

MME ALESSANDRA AULA (Franciscains international) a relevé que le rapport de M. Bustamante faisait état de l'élaboration de nouvelles normes sur les droits des migrants et a demandé s'il était prévu d'établir un lien entre ces normes et les droits de l'homme. Elle a mentionné, à titre d'exemple, la vulnérabilité des femmes migrantes à l'égard de la traite. Dans ce même esprit, elle a suggéré de donner plus d'importance à l'aspect protection des droits des migrants.

M. K. NETTER (Coordinating Board of Jewish Organizations) a appelé le Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme porter davantage son attention sur l'antisémitisme et ses conséquences. La négation de l'holocauste doit être rejetée à chaque fois qu'elle a lieu, a-t-il par ailleurs souligné. Il a dénoncé les propos tenus par le Président iranien qui a qualifié l'holocauste de «conte de fées» inventé pour protéger Israël.

MME PATRICIA SCANNELLA (Amnesty International) a dit à M. Diène sa reconnaissance pour sa contribution à la lutte contre le racisme. Son rapport souligne l'importance d'assurer un suivi des missions, mais comment le Conseil peut-il agir dans ce domaine, a demandé la représentante.

M. DAVID LITTMAN (Association for World Education) a demandé à des précisions sur les moyens d'action de M. Diène concernant la situation au Darfour, en particulier compte tenu de la politique d'arabisation forcée de la région. Quel rôle le Conseil peut-il jouer dans la résolution de cette crise, qui s'apparente à un génocide, a aussi demandé le représentant.

MME SUMIE OGASAWARA (Mouvement international contre toutes les formes de racisme et de discrimination) a remercié M. Diène pour sa mission au Japon, la première de ce type. Elle a exprimé son appréciation de ce que le rapport abordait la question du racisme et de la discrimination non seulement à partir des aspects juridiques, mais dans sa dimension historique, économique, sociale et politique. Le rapporteur, a-t-elle dit, n'avait à ce titre aucunement transgressé son mandat et ses conclusions n'expliquaient pas l'attitude défensive marquée par les autorités japonaises. Exprimant ses regrets pour l'attitude officielle de son pays, elle a indiqué que les organisations œuvrant en faveur des minorités se réjouissait d'étendre leur réseau et de continuer à collaborer avec le rapporteur spécial.

M. LAZZARO PARIS (Mouvement indien Tupaj Amaru, au nom également du Conseil mondial pour la paix) a jugé réaliste le rapport du Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme qui fait en outre preuve d'un courage notoire. Le Rapporteur spécial estime-t-il que le racisme peut être combattu par la seule éducation, a demandé le représentant ? Il a en outre souligné que les peuples autochtones pensent que le colonialisme et l'appropriation de continents entiers constituent les prémisses fondamentales de la discrimination raciale. Les multinationales ont pillé les richesses des pays aujourd'hui pauvres, a-t-il insisté.

M. JEAN-JACQUES KIRKYACHARIAN (Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples) a fait remarquer qu'il faudrait dénoncer l'entreprise idéologique qui est à l'œuvre derrière la question de la «guerre des civilisations». Le travail de changement nécessaire dans les pays où le racisme sévit devrait toucher plus directement les populations, a estimé le représentant, qui a aussi dénoncé les contradictions à l'œuvre dans les pays d'accueil des migrants. Il y a aurait un parallèle à tirer avec la situation en Europe dans les années 1930, où la détresse sociale et économique a servi de terreau à la haine raciale.

Conclusions des trois experts

M. BUSTAMANTE, répondant à certaines questions des membres du Conseil, a précisé que son mandat est récent et qu'il n'a pas encore reçu de réponse à toutes ses demandes de visites. Le principal problème qu'il a observé jusqu'ici est la distinction très claire entre les pays de destination et d'origine des migrations, pratiquement aucun des premiers n'ayant ratifié la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, qui serait un instrument très efficace pour la protection des droits des migrants dans un contexte de mondialisation inégalitaire. Les droits de l'homme ont un fondement objectif, contrairement aux préjugés idéologiques qui entachent la vision des migrants en situation irrégulière dans les pays de destination et sur lesquels il faut agir énergiquement sans plus tarder, a conclu M. Bustamante.

M. KASANDA s'est vivement réjoui de savoir qu'en Belgique, les autorités avaient discuté de la mise en place de mesures pour faire suite à la visite et aux recommandations du Groupe de travail. S'agissant de la question de l'intégration des personnes d'ascendance africaine dans la vie politique, il a insisté sur la participation particulièrement faible des communautés d'origine africaine dans la vie citoyenne, reflétée dans les chiffres et les statistiques. Les partis politiques ont, a-t-il dit, la possibilité de réserver dans leurs listes des postes pour les personnes d'origine africaine.

À la question sur le type d'actions positives qui pouvaient être mise en place en faveur des femmes, il s'est référé au Brésil où l'accès à l'université a été réglé avec l'introduction de quotas. On peut aussi faciliter l'indépendance des femmes en favorisant l'accès aux crédits ou aux ressources productives comme la terre. Il y a aussi l'exemple de décrets permettant de décider de la nomination de femmes dans les gouvernements de certains pays, a-t-il conclu.

M. DIÈNE a souhaité répondre à l'intervention de la délégation japonaise selon laquelle la problématique historique se situerait en dehors du mandat du rapporteur spécial, ce mandat ayant trait aux formes contemporaines de racisme. On ne saurait ignorer que le racisme est un iceberg et que ses formes visibles ne sont que les manifestations et les expressions actuelles du phénomène. Le racisme est un mutant et l'Histoire est la scène principale où il s'exprime. On ne peut toucher aux formes contemporaines du racisme sans en aborder les formes profondes. Le Japon sait bien que les minorités chinoise et coréenne au Japon sont actuellement les plus discriminées, a ajouté M. Diène.

En ce qui concerne le Brésil, a poursuivi M. Diène, le problème est que ce pays est certes en train de rompre avec l'héritage raciste de la société brésilienne mais qu'il ne tient pas compte suffisamment de la profondeur culturelle du racisme.

S'agissant de la Suisse, M. Diène a reconnu que si la déclaration du porte-parole de l'UDC était malheureuse, les autorités suisses au plus haut niveau ont condamné cette déclaration.

Enfin, a ajouté M. Diène, le problème rencontré en Fédération de Russie est que le vide idéologique de l'après-période soviétique a été remplacé par un nationalisme dont des groupes ont donné une lecture ethnique.

Droit de réponse

Le représentant de l'Iran, faisant usage de son droit de réponse, a réagi à des remarques concernant le Président de la République islamique d'Iran par une organisation non gouvernementale dans un document portant la cote E/CN.4/2006/ONG/10. Ce dernier a toujours fait la différence entre la religion juive, dont une minorité de représentants vivent en Iran depuis longtemps, et le sionisme, qui est une idéologie politique.
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