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LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME
ENTEND DES DÉCLARATIONS DE
MEMBRES DES GOUVERNEMENTS DE
L'ITALIE, DE LA FRANCE, DE LA FINLANDE
ET DE LA NORVÈGE

Arrière

26 Mars 1999

MATIN
HR/CN/99/10
26 mars 1999


Elle achève son débat sur le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes

La Commission des droits de l'homme a entendu, ce matin, des déclarations de la Ministre des affaires étrangères de la Finlande; du Ministre du développement international et des droits de l'homme de la Norvège; du Ministre délégué à la coopération de la France; et de la Sous-Secrétaire d'État aux affaires étrangères de l'Italie. La Commission a par ailleurs achevé son débat sur le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes.

Mme Patricia Toia, Sous-Secrétaire d'État aux affaires étrangères de l'Italie, a appelé à un moratoire sur la peine de mort et recommandé que le secteur de la biotechnologie et de l'ingénierie génétique soient soumis à un contrôle minutieux. Le Ministre délégué à la coopération de la France, M.Charles Josselin, a déclaré que le dialogue entamé par l'Union européenne avec la Chine a porté ses fruits. Il a indiqué que son pays proposerait à la Commission cette année quatre projets de résolution portant sur la bioéthique, la détention arbitraire, les disparitions forcées et l'extrême pauvreté. À l'instar de MmeToia, M.Josselin s'est en outre prononcé en faveur de l'adoption rapide des deux protocoles facultatifs sur les enfants dans les conflits armés et sur la vente et la prostitution d'enfants.

La Ministre du développement international et des droits de l'homme de la Norvège, MmeHilde Frafjord Johnson, a indiqué que son pays, en coopération avec le Canada et la Suède, prévoit d'organiser un séminaire sur la manière dont les gouvernements occidentaux peuvent le mieux prévenir l'utilisation des enfants soldats. Mme Tarja Halonen, Ministre des affaires étrangères de la Finlande, a souligné qu'en Europe, le peuple rom continue d'être victime de nombreuses discriminations. À l'instar de la ministre norvégienne, qui a jugé insuffisamment reconnus l'identité et les intérêts des populations autochtones, elle a estimé que la protection des minorités et des populations autochtones n'est pas suffisante à l'heure actuelle et qu'il faudrait donc envisager le renforcement des mécanismes existants dans ce domaine ainsi que la création de nouveaux instruments. Les ministres finlandaise et norvégienne se sont prononcées en faveur de l'abolition de la peine de mort.

Dix-sept organisations non gouvernementales ont pris la parole dans le cadre du débat sur le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes : France-Libertés: Fondation Danielle Mitterrand, Association américaine de juristes, International Institute for Non-Aligned Studies, Interfaith International, Indian Council of Education, International Educational Development, Indian Movement Tupaj Amaro, Libération, Fédération démocratique internationale des femmes, Fédération syndicale mondiale, Congrès musulman mondial, Organisation de la solidarité des peuples afro-asiatiques, Conseil international de traités indiens, European Union of Public Relations, Ligue internationale pour les droits et la liberté des peuples, Société pour les peuples en danger, International Human Rights Association of American Minorities.

L'Indonésie, l'Arménie, la Fédération de Russie, Cuba, le Pakistan, l'Azerbaïdjan et le Portugal ont exercé le droit de réponse.

Ce matin, la Fédération de Russie et Cuba, ainsi que certaines organisations non gouvernementales ont exprimé leur préoccupation face aux frappes de l'OTAN en Yougoslavie. Nombre d'intervenants se sont prononcés en faveur du droit à l'autodétermination des peuples dans diverses parties du monde. D'autres ont insisté sur le respect du principe de l'intégrité territoriale des États et souligné que le droit à l'autodétermination ne devait pas être utilisé pour démembrer un pays souverain.

La Présidente de la Commission, MmeAnne Anderson, a indiqué que l'examen en séance plénière du rapport du bureau concernant les mécanismes de la Commission se déroulera le lundi 26avril. Elle a ajouté que des consultations informelles sur cette question commenceront mercredi prochain, 31 mars, de 18h15 à 20 heures.

La Commission reprendra ses travaux en séance plénière le mardi 30mars, à 10 heures, pour commencer son débat sur le racisme et la discrimination raciale.

Déclarations dans le cadre du débat général

MME PATRICIA TOIA, Sous-secrétaire d'État aux affaires étrangères de l'Italie, a souligné que l'universalité des droits de l'homme n'implique pas que ses fondements culturels et ses pratiques doivent être uniformes dans le monde entier. Mais la spécificité des traditions et des cultures ne peut pas constituer un alibi pour se soustraire aux obligations et à la responsabilité politique du respect des droits de l'homme. Rappelant que la matière même des droits de l'homme évolue avec les sociétés, MmeToia a attiré l'attention sur les problèmes délicats et nouveaux que posent les mutations qui apparaissent dans de nombreux secteurs de la société moderne. Attirant l'attention sur le secteur de la biotechnologie ou de l'ingénierie génétique, elle a recommandé que ces activités soient soumises à un contrôle minutieux et à une analyse approfondie, tant pour les aspects éthiques que pour les formes insidieuses des nouveaux trafics d'organes, d'embryons. À cet égard, elle a dénoncé les avortements sélectifs en fonction du sexe ou de la nationalité, les cas inacceptables d'exploitation de la pauvreté qui mènent au prélèvement d'organes chez des êtres vivants et les aspects douteux et illicites de l'adoption.

Mme Toia a en outre appelé à l'adoption rapide des deux protocoles facultatifs à la convention sur les droits de l'enfant, ainsi que d'un moratoire sur la peine de mort.

L'Italie souhaite la ratification au plus vite et par le plus grand nombre d'États possibles du Statut de la Cour pénale internationale. Elle souhaite également que les compétences de la Cour soient étendus à tous les aspects concernés afin de poser la première pierre du système juridictionnel des Nations Unies que l'Italie appelle de ses voeux. En effet, l'Italie considère que la création d'une cour des Nations Unies et d'une procédure de recours individuels compléteraient opportunément l'édifice des droits de l'homme.

Mme Toia a par ailleurs souligné la nécessité toujours plus pressante, face à l'augmentation croissante de l'écart et de l'inégalité entre pays riches et pays pauvres, de protéger et de garantir le plus simple et le plus fondamental des droits de l'homme: le droit à la survie. Dans cette optique, MmeToia a insisté sur l'importance du droit au développement, rappelant que l'extrême pauvreté constitue un obstacle infranchissable pour la jouissance de tout droit humain. En conclusion, MmeToia a lancé un appel pour que des actions soient prises pour former des jeunes cadres afin de créer une catégorie d'observateurs et de consultants en matière de droits de l'homme, compétents et opérationnels sur le terrain. Cette forme d'assistance technique à laquelle l'Italie est prête à fournir son appui, constitue un véritable pari pour que les principes des droits de l'homme puissent s'affirmer universellement comme le plus précieux patrimoine commun, a-t-elle déclaré.

M. CHARLES JOSSELIN, Ministre délégué à la coopération de la France, a rendu hommage à l'action de MmeMaryRobinson en faveur de la défense des droits de l'homme. Il s'est félicité que la révolte contre l'impunité dont bénéficiaient certains crimes contre l'humanité ait États-Unis des répercussions concrètes, notamment en ce qui concerne le génocide commis au Rwanda et la purification ethnique commise en ex-Yougoslavie. Il a aussi salué la décision des Lords britanniques au sujet de M.Augusto Pinochet. Le Ministre a également salué le projet de création d'une Cour pénale internationale.

La situation générale des droits de l'homme reste contrastée. Toutefois, le dialogue entamé par l'Union européenne avec la Chine en octobre 1997 a indéniablement porté des fruits : signature de deux pactes, coopération accrue avec les mécanismes des droits de l'homme et en particulier avec le Haut Commissariat, s'est félicité M. Josselin.

S'agissant du Kosovo, M.Josselin a souligné que ce n'est pas une nation qui est mise au ban mais un régime récusant avec obstination les règles de la communauté internationale.

Au sujet des déflagrations économiques et financières telles que celles qu'ont connu l'Asie, la Russie et le Brésil, M.Josselin a déploré qu'elles menacent d'aggraver l'extrême pauvreté dont souffrent les pays les moins avancés. Les pays développés ont pour responsabilité de montrer que la solidarité nord-sud ne reste pas lettre morte, a déclaré M.Josselin. Les plus hautes autorités de la France comptent d'ailleurs proposer l'annulation du service de la dette au prochain sommet du G8 qui se tiendra à Cologne.

Rappelant que les droits de l'enfant continuent d'être bafoués dans le monde, M.Josselin a déclaré que la France soutient activement l'adoption de deux protocole facultatifs à la Convention relative aux droits de l'enfant concernant les enfants impliqués dans les conflits armés et la vente des enfants, la prostitution et la pornographie enfantines. Il a appelé à la définition de moyens juridiques appropriés, relayée par l'intensification de la coopération administrative et judiciaire entre les États. La France soumettra quatre projets de résolution à la Commission concernant la détention arbitraire, les disparitions forcées l'extrême pauvreté et la bioéthique. À cet égard, M.Josselin a souligné la nécessité de la défense d'une éthique de l'usage des biotechnologies et d'une réflexion sur le cadre du développement de la science. Il faut réfléchir aux moyens de la mettre au service exclusif de l'humanité, a t-il souligné.

L'éducation des générations futures doit être le pilier de notre action, a dit M.Josselin, et c'est le sens d'une proposition de loi française proclamant que la traite négrière pratiquée au cours des siècles passés a été un crime contre l'humanité. M.Josselin a également signalé l'adoption, en 1998, d'une loi contre l'exclusion ainsi que l'organisation d'une réforme constitutionnelle en faveur de la parité hommes-femmes.

MME TARJA HALONEN, Ministre des affaires étrangères de la Finlande, a lancé un appel en faveur de la ratification universelle des principaux instruments internationaux dans le domaine des droits de l'homme. En cette année du dixième anniversaire de la Convention relative aux droits de l'enfant, même cet instrument n'a pas atteint l'universalité puisque deux pays ne l'ont pas ratifiée. Tous les gouvernements devraient adhérer aux traités internationaux relatifs aux droits de l'homme sans émettre de réserves qui seraient incompatibles avec leurs objectifs et leurs buts. Tous les États parties à ces instruments devraient réexaminer leurs réserves en vue de les retirer. MmeHalonen a souligné que les droits de l'homme sont universels et qu'ils ne doivent pas être affaiblis par des réserves vagues. Il est important de renforcer la capacité des NationsUnies à protéger les droits de l'homme et à prévenir leurs violations. Aussi, tous les gouvernements devraient-ils coopérer avec tous les mécanismes de droits de l'homme et les autoriser à visiter leur pays sans imposer des limites à leurs travaux. La Finlande estime qu'il est inacceptable que les rapporteurs spéciaux ne reçoivent pas toute la coopération voulue de la part des gouvernements dans l'exercice de leurs mandats.

La question de l'égalité entre hommes et femmes est essentielle, a affirmé MmeHalonen. Un seul rapporteur spécial sur les droits de la femme, à savoir la Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes, ne saurait suffire, a-t-elle estimé. Il faut également intégrer une dimension sexospécifique dans tous les mandats des mécanismes pertinents créés dans le domaine des droits de l'homme. À cette fin, la Finlande a maintes fois demandé que des ressources supplémentaires soient fournies, à partir du budget ordinaire des NationsUnies, au Haut Commissariat aux droits de l'homme.

Soulignant l'importance de la lutte en faveur de l'élimination de la discrimination raciale, MmeHalonen a estimé que la Conférence mondiale contre le racisme offre la meilleure manière d'examiner les moyens d'agir dans ce sens. En même temps, il est essentiel d'assurer la transparence vis-à-vis de la société civile tout au long du processus. Il faut que les préparatifs régionaux ne soient pas interprétés comme des processus séparés de la Conférence, a affirmé MmeHalonen. En Europe, le peuple rom continue d'être victime de nombreuses discriminations à travers le continent. De plus, les communautés d'immigrants sont victimes de xénophobie à maints égards et se sentent souvent exclus des sociétés dans lesquelles ils vivent. La Finlande estime que la protection des minorités et des peuples autochtones n'est pas suffisante à l'heure actuelle et qu'il faudrait envisager le renforcement des mécanismes existants dans ce domaine, ainsi que la création de nouveaux instruments.

La Finlande milite en faveur de l'abolition de la peine de mort dans le monde entier. Depuis 1826, la Finlande n'a procédé à aucune exécution en temps de paix et la peine capitale en vertu de la loi martiale a été abolie en 1972. Les travaux de recherche ont montré que la peine capitale n'est pas dissuasive, a rappelé MmeHalonen.

MME HILDE FRAFJORD JOHNSON, Ministre du développement international et des droits de l'homme de la Norvège, s'est félicité qu'aujourd'hui, un esprit de partenariat et de dialogue a remplacé des décennies de bipolarité, de murs et de gardiens. Cette plate-forme universelle suppose cependant une mondialisation des comptes à rendre indispensable pour le progrès de l'humanité, a déclaré MmeJohnson. Elle a également souligné l'interdépendance de plus en plus importante entre les États, les nations, les cultures et les individus, un phénomène lié à la mondialisation. On ne peut plus invoquer l'ignorance, a t-elle dit.

Les droits de l'homme commencent chez soi, a rappelé MmeJohnson. Pour sa part, le gouvernement norvégien élabore actuellement un plan national d'action dans le domaine des droits de l'homme qui sera présenté au parlement cette année. En outre, la Norvège a donné l'année dernière un million de dollars au Haut Commissariat aux droits de l'homme afin que d'autres pays puissent élaborer un plan similaire, a t-elle signalé. La Norvège prévoit également, en collaboration avec les gouvernements du Canada et de la Suède, l'organisation d'un séminaire sur la manière dont les gouvernements occidentaux peuvent prévenir l'enrôlement d'enfants dans des conflits armés. Une conférence a États-Unis lieu à Oslo en 1998 pour traiter de la question de l'élimination de toutes les formes d'intolérance et de discrimination fondée sur la religion ou les croyances. Elle s'est aussi félicité de la prochaine création d'une Cour pénale internationale.

Mme Johnson a rappelé que la Norvège mène un dialogue sur les droits de l'homme avec plusieurs pays. Ce dialogue ne se limite pas à la théorie mais comprend aussi un engagement pratique sur le terrain. La Norvège accorde beaucoup d'importance à ce dialogue bilatéral, notamment avec la Chine, Cuba et la Turquie. Cette démarche n'implique d'ailleurs aucune indulgence de la part de la Norvège. Cependant, le dialogue bilatéral ne doit pas se substituer aux autres formes de discussion, a déclaré MmeJohnson.

Mme Johnson a ajouté que les défenseurs des droits de l'homme ont eux aussi droit à de bonnes conditions de sécurité. Elle a aussi souligné l'importance de l'assistance technique et de la coopération intergouvernementale.

Parmi les autres questions qui préoccupent la Norvège, MmeJohnson a mentionné le déni des libertés fondamentales et celui du droit à la vie, qui est bafoué par le maintien de la peine de mort dans certains pays. À ce sujet, la Norvège se félicite de la proposition conjointe de l'Union européenne d'élaboration d'une résolution sur la peine de mort.

Fin du débat sur le droit à l'autodétermination

M. JAKA YMER (France-Libertés) a demandé qu'au nom du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, les organes compétents des Nations Unies oeuvrent afin que le peuple kurde puisse bénéficier de son droit à l'autodétermination et qu'il soit mis fin à l'oppression nationale, à la discrimination économique et au «double sous-développement» dont il souffre en Iraq, en Iran, en Syrie et en Turquie. Seul l'Iraq reconnaît constitutionnellement l'existence du peuple kurde mais, en pratique, les Kurdes sont gazés, massacrés et dépouillés de tous leurs droits. M.Jaka Ymer a également abordé le problème du peuple sahraoui qui lutte pour son indépendance depuis plus de 25 ans et attend l'organisation dans les meilleurs délais d'un référendum d'autodétermination libre, régulier et transparent. M.Jaka Ymer a déclaré que le Maroc met toujours des entraves au bon déroulement du processus de paix élaboré par l'Organisation de l'unité africaine et l'Organisation des NationsUnies, entré en vigueur en 1991. Enfin, France-Libertés est sensible au sort des Albanais du Kosovo, des Timorais et des Tibétains.

MME MERCEDES MOYA (Association américaine de juristes) a rappelé que le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes est l'une des pierres angulaires du système international et le fondement de l'ONU, dont les principes reposent sur le l'égalité souveraine de tous les États. Un groupe d'États appartenant à l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN), sous la direction des États-Unis, a passé outre au système des NationsUnies et paralysé le Conseil de sécurité, décidant seuls du destin et de la vie de populations entières. Les méthodes qu'ils utilisent pour imposer leurs décisions vont des embargos ayant des effets dévastateurs sur la population civile, comme c'est le cas à Cuba et en Iraq, jusqu'aux bombardements aériens tels que ceux entrepris contre le Panama, la Somalie, l'Iraq et le Soudan. Aujourd'hui, l'OTAN s'arroge par la force le droit de résoudre le conflit du Kosovo alors qu'elle n'a pas été mandatée pour cela par le Conseil de sécurité. D'ailleurs, l'OTAN n'est pas un organisme régional
tel que défini dans l'article 52 de la Charte des NationsUnies mais une alliance militaire. C'est pourquoi toute attaque militaire contre l'ancienne Yougoslavie de la part des forces de l'OTAN est une agression pure et simple totalement prohibée par le droit international. Un exemple flagrant de la manière dont il est porté atteinte au droit à l'autodétermination des peuples est fourni par le traitement infligé au peuple kurde, dont les 25 millions de membres sont traités par les grandes puissances comme une bande de bandits, a conlu la représentante.

MME REENA MARWAH (International Institute for Non-Aligned Studies) a rappelé que la Conférence de Vienne a clairement réaffirmé l'engagement des Nations Unies à garantir le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes. Toutefois, la Charte des Nations Unies et les autres instruments internationaux n'indiquent nulle part qu'un groupe ethnique ou culturel qui vit dans une société pluraliste puisse être considéré comme un peuple vivant sous une règle coloniale. À cet égard, elle a déploré que certains dirigeants autoproclamés de tels groupes interprètent le droit à l'autodétermination comme un droit de faire sécession, le plus souvent aidés par des intérêts étrangers. Personne ne peut nier la nécessité de respecter les droits culturels, linguistiques et religieux des populations, mais la formation d'un État n'est pas nécessaire pour protéger ces droits, a précisé Mme Marwah. Ces «libérateurs autoproclamés» non seulement ne permettent pas aux peuples de faire usage de leur droit à disposer d'eux-mêmes, mais viol
ent les autres droits de leurs peuples. Elle a souligné la nécessité de garantir à ces groupes, dans toute société, leurs droits à la liberté d'expression, d'association, et de culte tant individuellement que collectivement. Les portes-parole autoproclamés ne peuvent pas être autorisés à décider du destin des peuples au profit de leurs seuls intérêts, sans un mandat démocratique.

M.ATTIQ-UR-REHMAN (Interfaith International) a attiré l'attention de la Commission sur le sort du peuple cachemiri se trouvant au Pakistan. La communauté cachemirie reste colonisée par le Pakistan qui la soumet à un régime d'oppression depuis plus de 25 ans. Le peuple cachemiri est contraint à l'obéissance passive par des moyens administratifs mais aussi militaires. En outre, les Cachemiris ne sont pas représentés au Parlement et ne peuvent exercer leurs droits politiques. Les membres de la communauté cachemirie qui vivent au nord du Pakistan sont particulièrement défavorisés, a déploré le représentant.

M.H.A. GUPTA(Indian Council of Education) a déclaré que la répression des mouvements ethniques, même au nom de l'intégration ou de l'édification d'une nation, constitue sans aucun doute une violation des droits de l'homme. Mais cela ne légitime pas pour autant l'interprétation du droit à l'autodétermination comme étant un droit à la sécession. L'expérience a démontré que la partition d'un pays selon des lignes de partage ethniques est non seulement inadéquate mais crée des problèmes pour les États successeurs et pour la communauté internationale dans son ensemble. Il convient donc de distinguer l'autodétermination externe, qui est le droit à la liberté face à une puissance coloniale, de l'autodétermination interne. Il est regrettable que certains États qui connaissent eux-mêmes des conflits ethniques encouragent ceux qui entreprennent des conflits dans d'autres États et soutiennent leurs revendications insensées en faveur de la sécession ou de la séparation. Tous les États devraient respecter la pluralité et réaliser l'importance du multiculturalisme pour leur propre développement et leur propre stabilité.

M.S.V. KIRUBAHARAN (International Educational Development) a déclaré qu'une décision de justice ainsi que les pratiques des États ont récemment confirmé le fait qu'une entité qui est liée par des facteurs objectifs tels qu'une langue ou une culture distincte ainsi qu'une identité propre liée à l'appartenance à un territoire, a le droit légitime à l'autodétermination. Ce principe a été appliqué par la reconnaissance du droit des Kosovars et des Timorais d'affirmer leur volonté par référendum. Or, a rappelé le représentant, au Sri Lanka, les libertés fondamentales et les droits de l'homme du peuple tamoul sont violés en toute impunité par le Gouvernement sri-lankais depuis un demi-siècle sur la base d'une idéologie de supériorité raciale et de contrôle exclusif de l'île. En dépit des offres de médiation, l'intransigeance persistante de l'État ne permet pas d'espérer une solution rapide au conflit qui est cause de violations massives des droits de l'homme, d'une tragédie humanitaire et de crimes contre l'humanité. Alors que l'État tente de réaliser ses intentions génocidaires, la communauté internationale et les Nations Unies ont laissé tombé le peuple tamoul, a déploré le représentant. Il a rappelé la déclaration commune publiée à l'issue de la 54ème session des organisations non gouvernementales exhortant à l'adoption d'une résolution qui appelle notamment le Gouvernement de Sri Lanka à retirer toutes ses forces armées du territoire tamoul et à entamer des négociations en vue de trouver une solution politique permettant au peuple tamoul d'exercer son droit à l'autodétermination.

M.LAZARO PARY (Indian Movement Tupaj Amaro) a rappelé que la notion d'autodétermination est le principe essentiel sur lequel repose le droit international. Le processus de décolonisation n'est pas achevé puisqu'Israël continue d'occuper les territoires arabes alors que la France conserve des colonies, que le Royaume-Uni exerce sa domination coloniale sur les Malouines et que les États-Unis tiennent sous leur joug le peuple de Porto-Rico. Le peuple kurde et les Basques sont persécutés pour la simple raison qu'ils revendiquent leur identité culturelle et politique. Le représentant a dénoncé le blocus économique, commercial et financier imposé à Cuba depuis 40ans ainsi que les sanctions et les actions militaires frappant le peuple iraquien. L'intervention militaire de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN) contre la Yougoslavie est une grave violation des principes internationaux. Pourquoi l'OTAN ne bombarde-t-elle pas la Turquie et l'Espagne qui oppriment les Kurdes et les Basques, s'est interrogé le représentant.

M. HALEPOTA MUNAWAR (Libération) a souhaité que la Commission examine les nombreux conflits liés à la question de l'autodétermination dans le monde. A cet égard, il a notamment demandé que des efforts de médiation soient déployés pour mettre un terme au conflit qui oppose le Gouvernement sri-lankais au peuple tamoul et trouver une solution pacifique. Il a également demandé à la Commission de condamner la capture du leader kurde Abdullah Ocalan et de faire pression sur la Turquie pour qu'elle respecte le droit à l'autodétermination des Kurdes dans le nord de l'Iraq et sur son propre territoire. Libération a également attiré l'attention de la Commission sur la situation du peuple sindhi au Pakistan, estimant qu'une mission d'enquête impartiale des Nations Unies est essentielle et que des mesures urgentes doivent être prises afin d'assurer la participation des Sindhis à la paix, au progrès et à la stabilité de la région.

MME AGDAS LEYLA (Fédération démocratique internationale des femmes) a fait remarquer que la Turquie a appliqué à plusieurs reprises une politique de génocide en toute impunité. Depuis 1990, l'Etat turc continue une politique de nettoyage ethnique au Kurdistan, a t-elle déploré. Les premières victimes de cette politique sont les femmes et les enfants, a t-elle déclaré.

MME SADHANA HARISH (Fédération syndicale mondiale) a souligné que la notion d'autodétermination est désormais souvent utilisée pour détruire des États-nations, en particulier ceux qui ont des traditions pluralistes. Dans la plupart des cas, les groupes armés mènent un combat au nom de la religion, de l'ethnicité ou de la langue. Les personnes qui les soutiennent dans les instances internationales réclament l'autodétermination pour ces groupes. Au Cachemire, l'autodétermination est utilisée à des fins malveillantes pour démembrer un pays, a regretté la représentante. Elle a dénoncé le recours à deux poids deux mesures utilisée par le Pakistan en matière d'autodétermination et a attiré l'attention sur l'attitude de ce pays contre sa propre population, en particulier dans le Gilgit-Baltistan.

M.AHMAD (Congrès mondial musulman) a estimé que la situation des peuples du Cachemire, de Palestine et du Kosovo sont quelques exemples du déni du droit à l'autodétermination qui continue de prévaloir à travers le monde. S'agissant du Kosovo et à la lumière des atrocités que les Serbes ont pu commettre à Srebrenica, M.Ahmad a indiqué que seule l'indépendance pouvait résoudre le problème de ce peuple. Il a en outre dénoncé l'occupation militaire par l'Inde du Jammu-et-Cachemire, estimant que ce pays qui se prétend la plus grande démocratie du monde ne croit pas en la démocratie et est prêt à bafouer les droits de l'homme à la poursuite de ses objectifs impérialistes. À cet égard, M.Ahmad a déclaré que des considérations géopolitiques ne sauraient empêcher d'exprimer sa préoccupation chaque fois que la force est employée pour nier le droit à l'autodétermination. Comme le montrent les cas du Kosovo et du Cachemire, la domination étrangère peut parfois être pire que les formes traditionnelles de colonisation. Il a appelé la communauté internationale à aider le peuple du Cachemire à exercer son droit fondamental à l'autodétermination.

MME RUBY MALON (Organisation solidarité des peuples afro-asiatiques) a déclaré que certains groupes d'Asie du sud et du sud-est, dont des pays qui ont longtemps été soumis à la domination coloniale, font un usage abusif du terme d'autodétermination. En effet, l'idéologie extrémiste de groupes terroristes qui invoquent les droits des Cachemiris à l'autodétermination, ne laisse aucune place à la démocratie, l'humanisme et la tolérance. La représentante s'est félicitée de la proposition émise par un membre du parlement pakistanais encourageant le peuple cachemiri à accepter l'autonomie au sein de l'union indienne. Elle a néanmoins dénoncé la répression exercée par les gouvernements successifs du Pakistan contre les Mohajirs. Elle a encouragé ce pays à engager un dialogue sur l'autonomie avec ses provinces.

M. ANTONIO GONZALES (Conseil international de traités indiens) a affirmé qu'en dépit des efforts déployés par certains secteurs gouvernementaux pour soutenir le processus de démocratisation et de paix au Guatemala, certains éléments au sein du Gouvernement et du secteur des affaires, qui dominent le pays, font obstruction à tout progrès. Ces éléments s'opposent aux consultations populaires en vue d'effectuer les changements législatifs nécessaires pour rendre justice aux populations autochtones du pays. Aussi, la Commission devrait-elle adopter comme document officiel des NationsUnies le rapport publié par la Commission sur la vérité historique et exhorter le Gouvernement guatémaltèque à respecter en priorité les recommandations qu'il contient. Un certain nombre d'organisations mayas ayant présenté des propositions concernant des politiques gouvernementales de réparation historique à l'égard de la population maya, le Gouvernement devrait adopter ces propositions et en faire une politique d'État en matière de reconstruction et de revitalisation culturelle, politique, économique et sociale de la population maya et des autres populations autochtones du pays.

M. ZULFIQAR KHAN AZIZ (European union of Public relations) a lancé un appel à la Commission pour qu'elle envoie une mission d'enquête dans les territoires de Gilgit et du Baltistan pour témoigner de la subjugation politique, économique et culturelle des populations kashmiri du Pakistan. Il a dénoncé les appels continuels du Gouvernement pakistanais pour les droits du peuple Kashmiri qui ne concernent que les Kashmiri d'Inde. En effet, en ce qui concerne les territoires du Jammu-et-Kashmir occupés par le Pakistan en 1947, le Pakistan refuse d'entendre les appels à l'autodétermination, a-t-il indiqué décrivant l'état de subordination et d'arriération dans lequel est maintenue cette population ainsi que les violations des droits de l'homme dont elle fait l'objet.

MME VERENA GRAF (Ligue internationale pour les droits et la libération des peuples) s'est félicité de l'action internationale récemment entreprise pour défendre le peuple Albanais du Kosovo. Elle a déclaré que le processus d'auto-détermination peut s'effectuer selon diverses modalités, notamment au Timor oriental et au Sahara occidental, par des démarches allant de l'autonomie locale ou régionale à l'indépendance totale.

M.PRIMO BURSIK (Société pour les peuples en danger) a attiré l'attention de la Commission sur la situation des droits de l'homme au Nagaland et a exprimé sa vive préoccupation que le Gouvernement de l'Inde ait déjà violé les termes du processus de paix et du cessez-le-feu qui durait depuis un armes nucléaires et dont l'objectif était de faciliter le dialogue politique entre les parties. Au cours de ces derniers mois, a poursuivi le représentant, de nombreuses violations des droits de l'homme et de nombreuses violations du cessez-le-feu ont été commises par les autorités indiennes. Le Gouvernement indien devrait donc donner pour instructions à ses officiers militaires et autres fonctionnaires de mettre un terme à tout violence contre le peuple naga et de respecter le cessez-le-feu.

M. MAJID TRAMBOO (International Human Rights Association of American Minorities) a rappelé que le droit à l'autodétermination du peuple cachemiri était ancré dans les résolutions des Nations Unies et que celui-communauté internationale continue d'être l'objet de violations des droits de l'homme inacceptables. Il a également indiqué que ce territoire, depuis les essais nucléaires de l'Inde et du Pakistan, était devenu le point nucléaire le plus dangereux du monde. La communauté internationale doit intensifier ses efforts de médiation auprès de l'Inde afin que se tienne un referendum d'autodétermination et que s'ouvrent des négociations entre les parties pour trouver une issue pacifique à ce conflit.

Le représentant de l'Indonésie a déclaré que son gouvernement a accepté d'élaborer un plan d'autonomie étendue très large pour le Timor oriental et ce plan sera suivi de l'organisation d'un référendum pour les Timorais. Il a rappelé que le Portugal a accès à cette province et a déclaré que ses allégations ne sont pas fondées.

Le représentant de l'Arménie a déploré que l'Azerbaïdjan nie le droit à l'autodétermination du peuple du Haut-Karabakh. L'Azerbaïdjan souhaite ainsi détourner l'attention de la Commission.

Le représentant de la Fédération de Russie s'est dit surpris que le projet de démocratie pour l'Europe auquel a fait référence ce matin le Ministre délégué à la coopération de la France semble justifier l'usage de la force contre un état souverain. La Fédération de Russie est profondément perturbée par l'agression de l'OTAN contre la nation serbe alors que le Conseil de sécurité était le seul habilité à prendre des décisions concernant l'utilisation de la force. Cette situation a créé un précédent dangereux en imposant un diktat de la force qui met en question tout l'édifice international. Le règlement de la situation au Kosovo n'est possible que par le biais de pourparlers, a affirmé le représentant russe.

Le représentant de Cuba a dénoncé la guerre d'agression barbare qui vient d'être lancée contre la République fédérale de Yougoslavie et le génocide que l'OTAN et les États-Unis ont engagé contre les enfants, les femmes, les vieillards, les jeunes et l'ensemble du peuple serbe. Les bombes qui tombent aujourd'hui sur Pristina, Pancevo et sur d'autres lieux de la République fédérale de Yougoslavie sont les mêmes qui sont tombées et pourraient retomber sur Kaboul, Khartoum, Tripoli, Bagdad et Benghazi ou ailleurs. Elles ne font pas la distinction entre les fils du Christ et ceux d'Allah, entre les militaires et les civils, entre les Serbes et les Kosovars, ni entre les adultes et les enfants. La tactique des puissants, qui consiste à diviser pour mieux régner, est vieille comme le monde, a rappelé le représentant cubain.

Le représentant du Pakistan a dénoncé les allégations injustifiées d'un certain nombre d'organisations non gouvernementales appuyées par l'Inde contre le Pakistan qui défend les droits du peuple du Jammu-et-Cachemir. Il a indiqué que les dirigeants de l'Inde et du Pakistan ont entamé un processus de négociation dont l'objet est de permettre au peuple du Jammu-et-Cachemir d'exercer son droit à l'autodétermination. Il a estimé préférable que l'on s'abstienne de faire des références injustifiées à la situation interne d'un pays.

Le représentant de l'Azerbaïdjan a rappelé, la nécessité de respecter l'intégrité territoriale des États, ajoutant que l'Arménie ne respectait pas l'intégrité territoriale de l'Azerbaïdjan. Il a souligné que l'Arménie a une position contraire à toutes les résolutions des Nations Unies. Le recours à la force et l'occupation du territoire azerbaïdjanais par l'Arménie ne sauraient être reconnus comme légitimes, non plus que les violations des droits de l'homme perpétrées dans ces territoires.

Le représentant du Portugal se félicite que l'Indonésie ait décidé d'accepter le droit à l'autodétermination du Timor oriental mais souligne que la liberté d'expression laisse encore à désirer dans cette région.

Le représentant de l'Indonésie a engagé les parties en présence à oeuvrer en faveur d'un climat favorable au processus de paix.

Le représentant de l'Arménie estime que la position de l'Azerbaïdjan ne peut être qu'une tentative désespérée pour détourner la Commission de sa tâche fondamentale et du véritable problème du Nagorny-Karabakh.

Le représentant de l'Azerbaïdjan a regretté que l'Arménie ne montre pas une volonté de régler le conflit du Karabakh de manière pacifique. Il a affirmé que le Nagorny-Karabakh ne ferait jamais partie de l'Arménie.
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