J. L’enquête
La seconde procédure instaurée par le Protocole facultatif est celle de l’enquête. Elle permet au Comité d’étudier les renseignements crédibles indiquant qu’un État partie porte gravement ou systématiquement
atteinte aux dispositions de la Convention. Les États parties peuvent, tout en ratifiant le Protocole facultatif, faire savoir
par une déclaration et une réserve qu’ils n’acceptent pas cette procédure (art. 8). Ils peuvent lever leurs réserves ultérieurement.
Par rapport au système des communications, celui des enquêtes présente principalement les caractéristiques suivantes:
- Premièrement, pour lancer une enquête, le Comité n’a pas à attendre de recevoir une plainte officielle: il lui appartient
d’engager la procédure (qui peut comprendre une visite dans l’État partie sous réserve du consentement de celui-ci);
- Deuxièmement, l’enquête n’est permise qu’en cas de violations graves ou systématiques des droits énoncés dans la Convention;
- Troisièmement, il n’est pas nécessaire qu’une victime se fasse connaître.
Une violation est dite grave lorsqu’elle enfreint de manière critique une ou plusieurs dispositions de la Convention: ce pourra être par exemple une discrimination
qui menace la vie, l’intégrité ou la sécurité d’une personne. Elle est systématique en cas d’atteintes répétées d’une ampleur et d’une fréquence importantes, sans considération de l’intention. La violation
peut résulter de lois, de politiques ou de pratiques. Des violations pourraient être «systématiques» sans être qualifiées
de «graves».
La procédure est la suivante:
-
Réception de renseignements crédibles indiquant des violations graves ou systématiques: le Comité reçoit des informations – qui, à en juger par l’expérience des autres organes conventionnels, émanent généralement
d’ONG, même si ces organes peuvent réunir des renseignements de leur propre initiative, notamment auprès des organismes des
Nations Unies (voir l’article 79 du règlement intérieur du Comité). À ce stade, le Comité devrait rechercher un complément
d’information pour s’assurer que les renseignements reçus sont fiables;
-
Invitation à coopérer adressée à l’État partie: si le Comité estime que les renseignements sont fiables, il invite l’État partie à coopérer à leur examen, notamment en communiquant
des informations au Comité;
-
Désignation d’un ou de plusieurs membres du Comité chargés de mener l’enquête: le Comité examine les observations formulées par l’État partie ainsi que tout renseignement supplémentaire fourni par des
organisations gouvernementales, des organismes des Nations Unies, des organisations non gouvernementales ou des particuliers,
et charge un ou plusieurs de ses membres de mener l’enquête. Il doit alors solliciter la coopération de l’État partie à tous
les stades;
-
Visite dans le pays: lorsque cela se justifie, le Comité peut réaliser une visite dans le pays, à condition que l’État partie donne son accord.
À cette occasion, des auditions peuvent être organisées, là encore avec le consentement de l’État partie. Toutefois, la visite
dans le pays n’est pas obligatoire, et le Comité peut enquêter sans que ses membres se rendent sur place;
-
Communication des résultats, observations et recommandations à l’État partie: le Comité doit rédiger un rapport et le communiquer confidentiellement à l’État partie;
-
Présentation des observations de l’État partie dans les six mois: l’État partie dispose de six mois pour présenter ses observations au Comité. Signalons que le Comité pour l’élimination de
la discrimination à l’égard de femmes peut rendre public son rapport final. Le silence tant de la Convention relative aux
droits des personnes handicapées que du règlement intérieur du Comité à ce sujet porte à penser que le Comité peut faire de
même;
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Invitation à l’État partie de rendre compte des mesures prises: le Comité peut inviter l’État partie à incorporer à son rapport périodique des précisions sur toutes mesures prises pour
donner effet à ses conclusions. Le Comité fait figurer un exposé succinct de la procédure dans son rapport annuel.
Comme dans le cas des communications, il pourrait être utile aux participants de prendre connaissance d’une enquête. Malheureusement,
les rapports d’enquête publics sont relativement peu nombreux, en raison du caractère confidentiel de la procédure. Les animateurs
souhaiteront peut-être analyser l’enquête menée par le Comité sur l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes
à propos de l’enlèvement, du viol et du meurtre de femmes à Ciudad Juârez (Mexique) (CEDAW/C/2005/OP.8/ MEXICO).