Au moment de la signature, de la ratification ou de l’adhésion, les États et les organisations d’intégration régionale souhaitent parfois adapter l’application de l’instrument en émettant une réserve. La Convention de Vienne sur le droit des traités définit la réserve comme suit (art. 2, par. 1.d)):
L’expression «réserve» s’entend d’une déclaration unilatérale, quel que soit son libellé ou sa désignation, faite par un État quand il signe, ratifie, accepte ou approuve un traité ou y adhère, par laquelle il vise à exclure ou à modifier l’effet juridique de certaines dispositions du traité dans leur application à cet État.
Les États peuvent aussi faire des déclarations au moment de la signature, de la ratification ou de l’adhésion. Par une déclaration, un État fait connaître son interprétation d’une question contenue dans la Convention ou d’une disposition de celle-ci.
Les réserves et déclarations peuvent parfois indiquer qu’un État n’est pas résolu à donner pleinement effet à la Convention: il peut par exemple invoquer une divergence de principes culturels pour dissimuler son manque de volonté politique. Dans d’autres cas, elles peuvent traduire sa crainte légitime et sérieuse que les ressources nationales ne lui permettent pas de répondre aux obligations découlant de la Convention. Les États peuvent être tentés de formuler des réserves pour gagner du temps. Ils peuvent décider de modifier certaines des dispositions les plus rigoureuses ou d’en limiter la portée afin d’éviter d’être blâmés par la communauté internationale pour ne pas appliquer la Convention convenablement. Si les réserves sont inévitables, il importe de tout faire pour que leurs incidences soient aussi réduites que possible. Vagues ou précises, elles méritent une attention particulière lors du suivi de l’application d’un instrument. Ainsi par exemple, le Comité des droits des personnes handicapées peut, par ses interprétations qui font autorité, circonscrire la portée apparemment générale et indéterminée de certaines réserves.
En tout état de cause, les réserves ne doivent jamais être encouragées, et l’animateur devrait trouver le moyen, eu égard à la composition de son auditoire, de le faire clairement comprendre lors de la présentation du module 3.
L’article 46 de la Convention autorise les parties à formuler des réserves à condition qu’elles ne soient pas incompatibles avec l’objet et le but de l’instrument. Si un État a des objections, il les notifie au Secrétaire général des Nations Unies, qui en distribue le texte. Les objections à une déclaration portent généralement sur le point de savoir si celle-ci est purement interprétative ou si elle est en réalité une réserve qui modifierait les effets juridiques de l’instrument. L’État qui élève une objection demande parfois que l’État auteur de la déclaration précise ses intentions. Si ce dernier convient qu’il a formulé une réserve et non une déclaration, il peut éventuellement retirer sa réserve; dans le cas contraire, il confirme qu’il ne s’agit que d’une déclaration.
Une fois que le texte d’une réserve leur a été communiqué, les États parties disposent de 12 mois pour faire connaître leurs objections, ce délai commençant à courir à la date du dépôt de la notification de la réserve ou à la date à laquelle l’État ou l’organisation d’intégration régionale a exprimé son consentement à être lié par le traité, si cette deuxième date est ultérieure. Lorsqu’un État formule une objection à une réserve et la communique au Secrétaire général après l’expiration du délai de 12 mois, le Secrétaire général en distribue le texte comme étant une «communication». La formulation d’une objection ne contraint pas un État à retirer sa réserve. Elle exerce cependant une certaine pression politique sur lui et peut le conduire à la retirer de son plein gré, immédiatement ou après un certain temps. De plus, l’objection à une réserve pourrait conduire un État à considérer que l’instrument est sans effet entre lui-même et l’État auteur de la réserve – du moins en ce qui concerne la disposition qui fait l’objet de la réserve.
Les organes conventionnels cherchent systématiquement à réduire la portée des réserves et à en encourager le retrait. C’est ainsi que le Comité des droits de l’homme a exposé sa position dans son observation générale n° 24 (1994) sur les questions touchant les réserves formulées au moment de la ratification du Pacte ou des Protocoles facultatifs y relatifs ou de l’adhésion à ces instruments, ou en rapport avec des déclarations formulées au titre de l’article 41 du Pacte. Se fondant sur le fait que les réserves incompatibles avec l’objet et le but de l’instrument ne sont pas autorisées, le Comité indique les domaines dans lesquels les réserves lui paraissent inadmissibles. En font partie les articles considérés comme définissant des normes impératives. Le Comité se demande si les réserves à des droits non susceptibles de dérogation sont autorisées. De même, il juge irrecevables les réserves aux dispositions qui créent les mécanismes d’appui à la jouissance des droits, comme le droit à des voies de recours. C’est à lui, estime-t-il, qu’il appartient de déterminer si une réserve est compatible avec l’objet et le but de l’instrument, en partie parce que cette décision n’est pas du ressort des États parties s’agissant d’instruments relatifs aux droits de l’homme, et en partie parce que le Comité ne peut manquer de faire cette évaluation dans l’exercice de ses fonctions.
Les parties prenantes qui cherchent à soutenir les organes conventionnels, à enrichir l’examen périodique universel et/ou à coopérer avec les autorités nationales qui engagent ou terminent la procédure de ratification devraient plaider en faveur d’une ratification sans réserve.
Point important, les réserves existantes peuvent être modifiées. Le changement peut consister en un retrait partiel, en la création de nouvelles exclusions ou en la modification des effets juridiques de certaines dispositions (ce qui équivaut à la formulation d’une nouvelle réserve). Un État ou une organisation d’intégration régionale peuvent à tout moment retirer une réserve qu’ils ont formulée à la Convention ou au Protocole facultatif. Le retrait doit être fait par écrit et être signé par le chef de l’État, le chef du gouvernement ou le ministre des affaires étrangères, ou par une personne pleinement habilitée à cet effet par l’une de ces autorités. Comme les réserves, les déclarations peuvent être modifiées ou retirées.
Des États parties ont formulé un certain nombre de réserves et de déclarations dont quelques-unes ont suscité des objections d’autres États parties.