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Déclarations Haut-Commissariat aux droits de l’homme

Mission de la Haut-commissaire en République Centrafricaine

18 Février 2010

18 février 2010

Merci à tous d'être venus. Aujourd'hui, j’effectue ma première visite en République centrafricaine. En fait, je suis honorée d'être la première Haut-commissaire aux droits de l'homme à faire une visite officielle dans ce pays. Je tiens à remercier le Gouvernement de la RCA de m'avoir invité et pour avoir été très souple à propos du calendrier de la visite, qui était initialement prévue pour novembre l'année dernière.

Plus tôt aujourd'hui, j'ai eu une série d'entretiens fructueux avec le Premier ministre, le Ministre des Affaires Etrangères, le Ministre de la Justice et le Ministre d’Etat, Conseiller personnel du Chef de l’Etat et un certain nombre de responsables clés du gouvernement. J'ai également eu des entretiens avec le Représentant spécial du Secrétaire général et d'autres hauts fonctionnaires des Nations Unies.

Plus tard aujourd'hui, je rencontrerai également divers membres de la société civile travaillant sur les questions des droits de l'homme. Leurs points de vue et les informations qu'ils recueillent sont bien sûr d'une grande importance à l'amélioration et le maintien des droits de l'homme dans tous les pays, et j’ai hâte d'entendre ce qu'ils ont à dire.

Les prochaines élections, qui doivent avoir lieu dans exactement deux mois, présentent une formidable opportunité pour la République centrafricaine, à la fois de montrer au monde et à la population centrafricaine qu'elle peut tenir avec succès des élections libres et transparentes, et de faire un grand pas en avant vers un avenir pacifique et démocratique. La paix, la sécurité et le développement dépendent ultimement du respect des droits de l'homme. Ainsi, l'importance du travail à faire au cours des deux prochains mois, afin de tenter d'assurer une élection réussie, ne peut pas être surestimée. J'exhorte toutes les parties, y compris le gouvernement actuel, les divers partis d'opposition et la Commission électorale indépendante à mettre de côté leurs divergences et à travailler pour s'assurer que le peuple de ce pays puisse avoir confiance et respecter le résultat de l'élection, quel qu'il soit.

Evidemment, afin de parvenir à un tel résultat, la liberté d'expression et le droit de réunion devront être respecté avant, pendant et après les élections. Votre travail de journaliste est, bien entendu, d'une grande importance au cours de cette période de transition vers la paix et la démocratie. Dans un processus électoral, le rôle des médias dans le maintien d'une approche neutre, mais critique si nécessaire, est absolument crucial.

La République centrafricaine fait face à de nombreux défis à plusieurs niveaux, tant nationaux qu’internationaux. Le pays est situé dans une région qui a été particulièrement volatile au cours des dernières décennies, et a été touché non seulement par ses propres difficultés et conflits internes, mais aussi par ceux que connaissent plusieurs de ses voisins.

Ces derniers mois, le banditisme croissant dans la préfecture de Vakaga au nord, et la présence du groupe armé particulièrement vicieux, l’Armée de Résistance du Seigneur, dans l'est du pays ont causé beaucoup de peur et de souffrance parmi les habitants de ces régions. Ces deux sources d'instabilité présenteront des défis particuliers en ce qui concerne la tenue d’élections dans ces régions.

C'est le travail d'un Haut-commissaire aux droits de l'homme de souligner les difficultés et les lacunes, mais je ne veux pas être trop négative car il y a eu, sans aucun doute, du progrès réalisé dans certains domaines.

Le gouvernement a manifesté sa volonté de collaborer avec le système des Nations Unies en matière des droits de l’homme, y compris lors du passage de la République centrafricaine devant le Conseil des droits de l’homme, dans le cadre de l’examen périodique universel à Genève en mai 2009. Le gouvernement a également coopéré avec les titulaires de mandats du Conseil des droits de l’homme sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires et sur les droits de l’homme des personnes déplacées dans leur propre pays ainsi qu’avec le Représentant spécial du Secrétaire général pour les enfants et les conflits armés. J’encourage le gouvernement à inviter d’autres experts indépendants, titulaires de mandats spécifiques.

J’ai félicité le Premier Ministre et le Ministre de la Justice sur la récente révision par l’Assemblée Nationale du code pénal et du code de procédure pénale, et ai exprimé mon espoir que ces révisions amélioreront l’administration de la justice en République centrafricaine, en particulier l’indépendance de la magistrature et la lutte contre l’impunité.

L’impunité continue des violations des droits de l’homme, en particulier parmi les agents d’application de la loi et les membres des forces armées, est une préoccupation importante et j’ai vivement encouragé le gouvernement de continuer à prendre des mesures concrètes pour accorder réparation aux victimes et poursuivre les auteurs. Les exécutions sommaires, les disparitions forcées, les arrestations et détentions arbitraires sont autant de préoccupations qui ont apparu en rapport avec les institutions étatiques de sécurité et de défense et des efforts considérables devront être faits pour mettre fin à ces abus de pouvoir extrêmement graves.

J’ai également exprimé ma profonde préoccupation au sujet des violences sexuelles répandues dont font face les femmes en République centrafricaine – prétendument commises par les acteurs étatiques et non-étatiques, y compris les LRA – ainsi que par les violences faites aux femmes accusées de sorcellerie, une diffamation basée sur le genre qui n’a pas sa place dans cette société du 21ème siècle. Tous les gouvernements devront agir fermement pour mettre fin aux pareils crimes dont les responsables devront être poursuivis, et s’ils sont reconnus coupables, devront être sanctionnés en conséquence, sans considération de leurs statuts.

Les mutilations génitales féminines sont interdites par la loi en République centrafricaine, mais continuent d’être pratiquées. J’invite le gouvernement à fournir des efforts particuliers pour mettre fin à cette pratique extrêmement nuisible pour les femmes.

Il serait également important de sensibiliser les populations, les fonctionnaires et les agents de maintien de l’ordre sur les conséquences négatives de ces pratiques.

Je suis aussi préoccupée par le problème persistant de recrutement des enfants par les groupes armés. Bien qu’il semble que certains progrès aient été faits dans ce domaine, les enfants restent particulièrement vulnérables et ont besoin d’une protection supplémentaire contre pareille exploitation illégale.

Un des aspects importants pour améliorer la situation des droits de l’homme dans tout pays est l’existence d’une institution nationale des droits de l’homme forte et indépendante. Le gouvernement a pris des engagements, y compris lors de son examen par le Conseil des droits de l’homme, de mettre sur pied une Commission Nationale des Droits de l’Homme et d’adopter un Plan d’Action National des Droits de l’Homme d’ici fin 2010. La création d’une institution nationale des droits de l’homme indépendante en conformité avec les normes internationales en la matière  unanimement acceptées par les Etats membres– dénommées les Principes de Paris – est cependant loin d’être finalisée. J’espère que le gouvernement en fera une priorité importante aussi bien avant qu’après les élections.

Plusieurs obstacles significatifs doivent être surmontés pour que le peuple centrafricain puisse jouir d’un avenir meilleur. L’élection constitue l’un et le plus important de ces obstacles. Cependant, à long terme, renforcer l’état de droit et le système judiciaire, mettre fin à l’impunité parmi les autorités étatiques, y compris les forces armées, et mettre fin à la violence et à l’exploitation sont tous importants pour le bien-être de ce grand pays.

J’aimerai remercier le gouvernement et le peuple de la République centrafricaine pour leur accueil chaleureux. Cela a été un privilège pour moi de visiter ce pays et j’espère revenir bientôt.

Je vous remercie.

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