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Communiqués de presse Conseil des droits de l’homme

Le Conseil des droits de l'homme examine la situation des droits de l'homme en Erythrée

18 Juin 2014

MATIN

18 juin 2014

Concluant le débat avec le Conseil, la commission d'enquête internationale sur la Syrie indique disposer d'une liste confidentielle d'auteurs présumés de crimes

Le Conseil des droits de l'homme a examiné ce matin la situation des droits de l'homme en Érythrée, après avoir achevé son débat interactif, entamé hier, avec la commission internationale indépendante d'enquête sur la République arabe syrienne.

Présentant son rapport, Mme Sheila B. Keetharuth, Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l'homme en Érythrée, a déploré l'absence de coopération du Gouvernement érythréen avec son mandat. Elle a souligné que son rapport était essentiellement consacré au service national de durée indéfinie et aux arrestations et détentions arbitraires dans des conditions carcérales inhumaines. Ces violations endémiques des droits de l'homme constituent la principale cause de l'exil massif des Érythréens, qui ne cesse de s'amplifier, a-t-elle fait observer. La Rapporteuse spéciale a constaté que le deuxième Examen périodique universel de l'Érythrée, réalisé en février dernier, avait mis en lumière la faible performance du pays concernant la mise en œuvre des recommandations formulées à son intention lors du premier examen. Mme Keetharuth a invité le Gouvernement érythréen à renoncer au service militaire indéfini, à mettre un terme à la militarisation de l'enseignement secondaire, à fermer les centres de détentions secret et à ratifier la Convention contre la torture.

En tant que pays concerné, l'Érythrée a jugé inacceptable que soient qualifiées de «graves» les violations des droits de l'homme dans le pays – des violations existent, certes, mais comme dans tous les pays. L'Érythrée a mis l'accent sur sa collaboration avec les Nations Unies et a dénoncé des «attaques sournoises» visant à réduire à néant ses succès en matière de développement.

Au cours du débat, de nombreuses délégations ont dénoncé l'absence de coopération de l'Érythrée avec la Rapporteuse spéciale et se sont prononcées pour le renouvellement de son mandat. Plusieurs pays ont dénoncé les violations massives des droits de l'homme et en particulier l'enrôlement forcé de mineurs dans les forces armées, malgré les engagements internationaux pris par l'Érythrée en la matière. Des délégations se sont dites alarmées devant le nombre d'Érythréens forcés d'émigrer, parfois au péril de leur vie. À l'instar de la Rapporteuse spéciale, d'autres ont insisté pour que l'Érythrée ratifie la Convention contre la torture et améliore les conditions de détention.

Les délégations suivantes ont pris part à ce débat: Union européenne, Australie, Irlande, Hongrie, Venezuela, France, Allemagne, Italie, Soudan, Royaume-Uni, États-Unis, Suisse, Cuba, Norvège, Luxembourg, Autriche, République tchèque, Djibouti, Chine, Botswana, Human Rights Watch, East and Horn of Africa Human Rights Defenders Project, Amnesty International, Mouvement international de la réconciliation, Jubilee Campaign.

Concluant le débat sur la situation des droits de l'homme en République arabe syrienne, le Président de la commission internationale indépendante d'enquête du Conseil des droits de l'homme, M. Paulo Sergio Pinheiro, a appelé le Conseil de sécurité à saisir la Cour pénale internationale de la situation en Syrie, et a indiqué que la commission disposait d'une liste confidentielle d'auteurs présumés de crimes, qui sera mise à disposition dès qu'une autorité judiciaire se saisira de la situation. Un autre membre de la Commission, M. Vitit Muntarbhorn, a également fait une déclaration.

Les délégations de l'Iraq, de la Turquie, du Soudan et de l'Australie ont participé ce matin au débat interactif avec la Commission d'enquête sur la Syrie, suivies de représentants de Human Rights Watch, Institut du Caire pour les études sur les droits de l'homme, Union des juristes arabes, Presse emblème campagne, Commission internationale des juristes, Fédération internationale des ligues des droits de l'homme, Universal Syriac Alliance et Organization for Defending Victims of Violence.

Lors d'une séance supplémentaire de mi-journée, le Conseil examinera des rapports sur la situation des droits de l'homme au Bélarus et en République populaire démocratique de Corée.

Situation des droits de l'homme en Syrie

Fin du débat interactif avec la commission d'enquête internationale sur la République arabe syrienne

L'Iraq a confirmé que la gravité de la situation qui prévaut en Syrie a des répercussions sur la sécurité de la région, comme en témoigne le déchaînement actuel de la violence terroriste. L'Iraq paie aujourd'hui l'incapacité de la communauté internationale de mettre un terme au conflit syrien, a affirmé le représentant iraquien, soulignant l'importance d'apporter une réponse coordonnée à la barbarie des terroristes. La Turquie a rappelé que le pire drame humanitaire du XXIe siècle se poursuivait en Syrie, où le bilan humain et humanitaire ne cesse de s'aggraver. La brutalité du régime vient d'être authentifiée par des milliers de photographies irréfutables, a souligné la Turquie, ajoutant que l'organisation d'élections présidentielles dans ces conditions est un manque de respect envers le peuple.

L'Australie a été choquée par les témoignages photographiques publiés récemment, qui attestent de la brutalité dont fait preuve le Gouvernement syrien à l'encontre de sa population, L'Australie demande à toutes les parties concernées de respecter les dispositions de la résolution 2139 du Conseil de sécurité, sur la situation au Moyen-Orient.

Le Soudan a déploré «l'absurdité» de la confrontation actuelle en Syrie et insisté sur la nécessité, pour la communauté internationale, de venir en aide à la population de ce pays et de l'aider à trouver une solution politique à la crise.

Parmi les organisations non gouvernementales, Human Rights Watch s'est dite vivement préoccupée par la situation des civils syriens victimes de bombardements massifs par les forces armées gouvernementales et d'exécutions sommaires par des acteurs non étatiques. L'organisation a préconisé que la situation soit déférée à la Cour pénale internationale. L'Institut du Caire pour les études sur les droits de l'homme a également recommandé la saisine de la Cour pénale internationale, compte tenu du fait que l'impunité ne peut qu'encourager la perpétration de nouvelles atrocités en Syrie.

L'Union des juristes arabes a déclaré que tous les observateurs de bonne foi devaient prendre en compte les événements survenus depuis la publication du précédent rapport de la Commission internationale d'enquête – notamment l'élection présidentielle démocratique, qui a permis à 15 millions de personnes d'élire librement leur président pour prendre en mains leur destin. L'Union a dénoncé un complot guidé depuis l'extérieur de la Syrie qui encourage le terrorisme et a souligné que tous ceux qui ont fourni des armes aux terroristes devraient rendre des comptes.

Presse emblème campagne s'est dite très inquiète de l'extension du conflit armé en Syrie vers l'Iraq et a rappelé que la Syrie avait été en 2012 le pays le plus dangereux pour les journalistes avec 37 employés des médias tués. Si l'ONG se réjouit de la libération récente de plusieurs journalistes, elle rappelle que toutes les parties sont responsables d'arrestations arbitraires, enlèvements, tortures et assassinats de journalistes, ce qui entraîne une forme d'autocensure dans les médias. Étant donné que l'État syrien, qui a la responsabilité de protéger les journalistes, est aussi la partie responsable de la majorité des crimes commis contre eux, quelle serait la meilleure manière de protéger les journalistes dans ce conflit, a demandé l'organisation?

La Commission internationale des juristes a félicité les 13 membres du Conseil de sécurité qui ont voté récemment pour la saisine de la Cour pénale internationale et a condamné les deux vetos qui ont empêché l'adoption d'une résolution en ce sens. La paralysie du Conseil de sécurité fait qu'il est encore plus important que le Conseil des droits de l'homme envoie un message fort, a souligné l'ONG. Il n'existe pas de perspective à terme de voir des comptes être rendus au niveau national pour les crimes graves commis dans le pays, a-t-elle fait observer. La Commission internationale des juristes souhaite donc savoir si le Conseil des droits de l'homme est prêt à renforcer ce qu'il a déjà dit à propos de l'obligation redditionnelle face à une situation dont la nature devrait requérir l'attention de la Cour pénale internationale.

United Nations Watch a déclaré qu'à quelques rares exceptions près, au nombre desquelles figure le travail de la Commission internationale d'enquête, la politique des Nations Unies face à cet enfer sur terre qu'est la Syrie est de ne rien faire. L'ONG a dénoncé l'élection en 2011 de la Syrie au Comité des droits de l'homme de l'UNESCO et son élection récente au poste de rapporteur de la Commission de la décolonisation, qui traite de Gibraltar ou de la Polynésie française. Pire, a ajouté United Nations Watch, en mars de cette année, le Conseil des droits de l'homme a sapé sa propre crédibilité en adoptant une résolution sur le Golan syrien occupé, préparée par la Syrie elle-même.

La Fédération internationale des ligues des droits de l'homme (FIDH) a estimé que le projet de résolution récemment soumis au Conseil de sécurité pour déférer la situation en Syrie à la Cour pénale internationale – projet qui s'est malheureusement heurté au droit de veto – fournissait de bonnes bases pour poursuivre les auteurs de crimes graves. Si une solution différente devrait prévaloir, la FIDH appelle toutes les parties concernées à refuser tout compromis sur les normes pénales et garanties internationales. La FIDH condamne les atrocités commises par le régime syrien et ses milices, tout comme celles commises par les groupes d'opposition armés. La FIDH appelle à une libération immédiate et inconditionnelle de tous les journalistes détenus.

Universal Syriac Alliance - The Federation Syriaque International a dénoncé les atrocités commise en Syrie, citant en exemple la coupure de l'approvisionnement en eau d'Alep par un groupe extrémiste islamique, au risque de provoquer des épidémies. L'Alliance appelle les États à faire usage de leur influence pour veiller à ce que les parties respectent leurs obligations et notamment que l'alimentation d'Alep en eau soit rétablie. L'Alliance a rappelé la tenue le mois dernier d'une conférence des principales églises chrétiennes présentes en Syrie, pour appeler tous les acteurs internationaux à cesser leur soutien à l'une ou l'autre des parties et à soutenir les parties de bonne volonté pour leur permettre de reconstruire le pays dans le respect de tous les citoyens syriens.

L'Organization for Defending Victims of Violence a dénoncé les atrocités commises par les mêmes terroristes opérant en Syrie et maintenant en Iraq – terroristes qui, avec l'appui des mêmes États, ont pris en otage les revendications pacifiques et légitimes du peuple syrien. L'Organisation a demandé du Conseil des droits de l'homme de faire pression sur les États qui soutiennent les terroristes afin qu'une solution pacifique soit trouvée au conflit.

Réponses des membres de la Commission d'enquête internationale

M. PAULO PINHEIRO, Président de la Commission d'enquête internationale indépendante sur la République arabe syrienne, a rappelé que la Commission avait reçu pour mandat de documenter la situation humanitaire en République arabe syrienne. La Commission accomplit très scrupuleusement ce mandat, a-t-il assuré: elle constate les faits tels qu'ils lui sont rapportés, sans émettre de jugement. En l'absence d'autorisation de travailler sur le terrain, la Commission a réalisé, hors de la Syrie, trois mille entretiens, ce qui lui permet de constituer un échantillonnage des actes commis lors de ce conflit. La Commission a par ailleurs connaissance de menaces exercées contre et pesant sur la population durant les récentes élections. M. Pinheiro a ajouté que la Commission dispose d'une liste confidentielle d'auteurs présumés de crimes, qui sera mise à disposition dès qu'une autorité judiciaire se saisira de la situation. La communauté internationale doit faire en sorte que tous les auteurs de crimes contre l'humanité en Syrie rendent compte de leurs actes, tôt ou tard, a-t-il insisté. M. Pinheiro a demandé au Conseil de sécurité de saisir la Cour pénale internationale de la situation en Syrie.

M. VITIT MUNTARBHORN, Membre de la commission d'enquête internationale indépendante sur la République arabe syrienne, a rappelé que la commission avait reçu des milliers de photographies dans le cadre de son travail de recueil d'informations. De prime abord, on peut affirmer que la plupart de ces photos ont été prises dans des installations militaires gouvernementales, mais des vérifications se poursuivent, a-t-il précisé. M. Muntarbhorn a également souligné que l'entrave à l'aide humanitaire a des incidences sur les droits de l'homme et qu'il convient donc de lever ces entraves afin d'assurer le respect de la résolution 2139 du Conseil de sécurité sur l'accès humanitaire. M. Muntarbhorn a par ailleurs souhaité que les mesures d'amnistie prises par le Gouvernement syrien soient appliquées avec parcimonie et ne portent en aucun cas sur les crimes les plus graves. La fourniture d'armes par les parties extérieures doit elle aussi se faire avec le plus grand discernement pour éviter que les armes ne se retrouvent entre de mauvaises mains, a-t-il d'autre part souligné.

Situation des droits de l'homme en Érythrée

Présentation du rapport

MME SHEILA B. KEETHARUTH, Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l'homme en Érythrée, a déploré que le Gouvernement de l'Érythrée continue de faire fi de son mandat en lui refusant l'accès au pays et en refusant de coopérer. Expliquant qu'il n'était pas facile d'accéder aux migrants et réfugiés pour recueillir des informations de première main, elle a appelé les 14 États concernés, qui n'ont pas répondu à son appel, à le faire. Mme Keetharuth a expliqué que son rapport se concentre sur deux questions principales: le service militaire de durée indéfini et la poursuite des arrestations et détentions arbitraires, qui forment la principale cause de l'exil massif des Érythréens. Ainsi, chaque mois, 2000 Érythréens quittent leur pays pour l'Éthiopie et 2000 sont arrivés au Soudan en mai 2014. En outre, 13 000 Érythréens sont arrivés par bateau en Italie depuis le début de l'année - soit 32% du nombre des arrivées dans ce pays - contre 9300 pour l'ensemble de l'année 2013. Au total, 11 000 Érythréens sont arrivés en 2013 en Europe. Si la tendance actuelle se confirme, il y aura bientôt plus d'Érythréens à l'étranger que dans leur propre pays.

La Rapporteuse spéciale a rappelé que la situation des droits de l'homme en Érythrée avait déjà reçu l'attention de la communauté internationale en de nombreuses occasions. Ainsi, le pays a participé en février dernier pour la deuxième fois à l'Examen périodique universel, qui a mis en lumière la faible performance du pays concernant la mise en œuvre des recommandations du premier examen, réalisé en 2009. Mme Keetharuth y a vu le signe du manque de bonne volonté du Gouvernement à traiter sérieusement de la situation des droits de l'homme dans le pays. La Rapporteuse spéciale a en outre exprimé de sérieuses réserves face aux progrès annoncés par le Gouvernement dans la réalisation de six des objectifs du Millénaire pour le développement, en mettant l'accent sur l'absence de données actualisées et de suivi indépendant.

Mme Keetharuth a déclaré que le Gouvernement érythréen n'avait pris aucune mesure pour mettre fin au service militaire de durée indéfinie. Elle a rappelé que la majorité des Érythréens étaient initialement favorables à un service national de 18 mois permettant de contribuer à la reconstruction du pays après la lutte pour l'indépendance, et que nombre d'entre eux étaient alors rentrés au pays. Mais entre-temps, les autorités ont transformé ce service en un système qui contraint chacun à travailler durant de longues périodes pour l'État, parfois jusqu'à l'âge de la retraite, sans compensation financière adéquate. Aujourd'hui, la population est opposée à ce service de caractère indéfini et aux multiples violences qui sont commises pendant celui-ci. La Rapporteuse spéciale a notamment signalé que de très nombreuses informations font état d'exactions liées au service national. Elle a aussi a dénoncé les arrestations arbitraires pour des durées indéfinies dans des conditions terribles marquées par la surpopulation carcérale, la mise au secret et les mauvais traitements.

En conclusion, la Rapporteuse spéciale a invité le Gouvernement à renoncer au service militaire indéfini en le ramenant à 18 mois, à mettre un terme à la militarisation de l'enseignement secondaire, à fermer les centres de détentions secret, à ratifier la Convention contre la torture et son protocole facultatif et à mettre un terme à la notion de culpabilité par association. Elle a demandé à la communauté internationale de veiller à ce que toute coopération au développement avec l'Érythrée veille strictement au respect des normes internationales des droits de l'homme et de renforcer leur assistance pour protéger les Érythréens qui fuient leur pays, notamment les enfants non accompagnés, en s'abstenant de tout refoulement, et en leur accordant à titre temporaire le statut protecteur de réfugié.

Le Conseil est saisi du rapport de la Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l'homme en Érythrée (A/HRC/26/45).

Pays concerné

L'Érythrée a déclaré être confrontée, comme tous les pays, à des violations des droits de l'homme auxquelles elle s'efforce de remédier mais qu'il est inacceptable de qualifier de «graves». L'Érythrée a consolidé, ces trois dernières années, sa collaboration avec les Nations Unies. Son engagement envers l'Examen périodique universel reflète, à cet égard, des dynamiques internes qui régissent son développement, en matière de droits de l'homme en particulier. Le processus politique en œuvre est une autre dimension importante du développement du pays, étayé par la Constitution, la Charte nationale et la loi. La revitalisation de l'économie et les transformations du secteur social annoncent une croissance prometteuse, fait valoir l'Érythrée, ajoutant que la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement est en bonne voie. Malheureusement, des attaques sournoises contre l'Érythrée visent à saper sa croissance économique, à étouffer son secteur minier naissant et à réduire à néant ses succès en matière de développement. Le pays a assuré le Conseil que l'accusation d'enrôlement d'enfants érythréens dans les forces armées est sans fondement.

Débat

L'Union européenne, à l'instar de nombreuses autres délégations, a regretté le refus persistant de coopération du Gouvernement érythréen en dépit des appels répétés de la communauté internationale. Définir, comme le fait le Gouvernement, la situation comme étant «ni un état de guerre, ni un état de paix» ne peut servir de justification pour violer les droits de l'homme, et l'Union européenne appelle de nouveau le Gouvernement à pleinement coopérer et permettre l'accès de son territoire à la Rapporteuse spéciale.

Pour l'Australie, le Gouvernement doit prendre des mesures avec détermination pour améliorer la situation, notamment en appliquant la Constitution de 1997, en permettant l'existence d'une opposition et en luttant contre toutes les formes de discrimination qui y ont cours. La Suisse, dont les autorités ont récemment rencontré des membres de la diaspora érythréenne vivant en Suisse, a partagé cet avis, ajoutant que le Gouvernement devrait également autoriser l'expression d'une société civile libre et se pencher sur la question des émigrants érythréens, souvent victimes de traite des êtres humains. Pour les États-Unis, les recommandations concernant les détentions arbitraires ou la conscription indéfinie exigent aussi des réponses positives de la part du Gouvernement. Les violences touchant les femmes et les enfants ou celle persistant dans les centres de détention sont inquiétantes, a ajouté l'Irlande.

Le nombre extrêmement élevé de personnes, notamment des jeunes fuyant le pays pour tenter la traversée de la Méditerranée et se rendre à Lampedusa est tout aussi inquiétant, a de son côté déploré la Hongrie. Le drame d'octobre 2013 où des dizaines d'Érythréens sont morts à Lampedusa devrait en effet réveiller la conscience des autorités sur cette question, a également ajouté la France. L'Italie, directement concernée par cet afflux de réfugiés, a déclaré que la conscription, telle qu'elle est organisée en Érythrée de manière indéfinie, est une violation des normes internationales, et dans ce contexte exige qu'il y soit mis fin. L'Allemagne qui a relevé une présence croissante de multinationales en Érythrée, a demandé comment faire en sorte que ces entreprises appliquent les principes directeurs des Nations Unies relatives aux entreprises et aux droits de l'homme.

Devant ce grand nombre de problèmes, que peut faire la communauté internationale pour que ce pays respecte les droits de l'homme, a demandé le Royaume Uni. La Norvège a également demandé à la Rapporteuse spéciale de dire ce que la communauté internationale pouvait faire pour remédier à la situation des droits de l'homme en Érythrée, au-delà du renouvellement des appels à la coopération avec le mandat. La Norvège a formulé de nombreuses recommandations à l'Érythrée, concernant notamment la libération de défenseurs des droits de l'homme, de militants de la société civile et de journalistes détenus. Le Luxembourg a salué les efforts de la Rapporteuse spéciale pour rencontrer toutes les parties prenantes en Érythrée, malgré l'interdiction de visite dans le pays par les autorités. Le Luxembourg est particulièrement préoccupé par l'enrôlement forcé de mineurs dans les forces armées, malgré les engagements internationaux de l'Érythrée dans ce domaine. L'Autriche a également appelé l'Érythrée à collaborer avec la Rapporteuse spéciale. Le pays est préoccupé par l'émigration forcée, chaque mois, de deux mille jeunes érythréens dans des conditions difficiles. L'Autriche doit se conformer à ses engagements internationaux en matière de droits de l'homme en mettant en œuvre des réformes profondes. La République tchèque a invité le Gouvernement de l'Érythrée à ratifier la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et à améliorer les conditions de détention. Elle a dit sa préoccupation face au sort des Érythréens victimes d'abus au cours de leur migration.

Le Venezuela, qui s'oppose à toute immixtion dans les affaires intérieures des pays, a mis en garde contre la politisation des questions relatives aux droits de l'homme. Les Nations Unies disposent de l'Examen périodique universel pour aborder les questions relatives aux droits de l'homme et l'Érythrée y participe avec un esprit d'ouverture, a souligné le Venezuela. Partageant le même avis, le Soudan a déclaré que l'imposition depuis l'extérieur est contraire à la Charte des Nations Unies et à ses principes. Pour le Soudan, considérer la violation des droits de l'homme comme la source d'une émigration massive de jeunes Érythréens est «une aberration». Ce sont les sanctions économiques imposées à ce pays qui conduisent les jeunes à le fuir. Cuba a déclaré être par principe opposée aux démarches sélectives dirigées contre certains pays en voie de développement. Cuba estime en l'espèce que l'examen périodique, auquel l'Érythrée s'est soumise récemment, doit faciliter la coopération entre États pour traiter des situations de droits de l'homme et encourager les échanges de bonnes pratiques dans ce domaine. La Chine s'est félicitée de la participation constructive de l'Érythrée au dernier cycle de l'Examen périodique universel et de sa coopération avec le Haut-Commissariat aux droits de l'homme. La Chine espère que la communauté internationale examinera la situation des droits de l'homme en Érythrée de manière équilibrée et qu'elle fournira à ce pays l'assistance qu'il demandera.

Le Botswana s'est félicité des mesures prises par l'Érythrée pour lutter contre les mutilations génitales féminines mais s'est dit préoccupé par le flux d'émigration très important en provenance de ce pays. Le Botswana est préoccupé que les personnes qui s'opposent à la conscription forcée risquent d'être abattues sur place, y compris lorsqu'il s'agit de mineurs. Djibouti a déploré l'absence de coopération du Gouvernement érythréen. Djibouti observe que le rapport dresse un constat accablant s'agissant des nombreuses violations des droits de l'homme en Érythrée. Djibouti a demandé au Gouvernement érythréen de fournir des renseignements sur le sort des prisonniers de guerre djiboutiens qu'il détient, ne serait-ce que pour indiquer s'ils sont encore en vie.

S'agissant des organisations non gouvernementales, Human Rights Watch a dénoncé une situation des droits de l'homme «déplorable», avec des atteintes à de multiples libertés, des nombreuses arrestations arbitraires et des cas de torture. Près de 6% de la population ont déjà fui le pays, parfois au péril de leur vie. L'ONG a dénoncé l'absence de coopération de l'Érythrée avec la Rapporteuse spéciale, a appelé les États à collaborer avec elle et à reconduire le mandat.

Le East and Horn of Africa Human Rights Defenders Project a estimé que l'ampleur et la nature systématique des violations des droits de l'homme en Érythrée défie toute compréhension. Le Conseil doit condamner le manque de coopération de l'Érythrée avec la Rapporteuse spéciale et le Conseil. Il doit en outre condamner clairement les violations des droits de l'homme, donner à la Rapporteuse spéciale les moyen d'exercer son mandat, et créer une commission internationale d'enquête sur la situation en Érythrée.

Amnesty international a assimilé à une mobilisation d'enfants dans l'armée les méthodes utilisées dans l'enseignement secondaire, et le service national indéfini à du travail forcé. Amnesty International dénonce les tortures et autres mauvais traitements et est préoccupée par le fait que la communauté internationale ne fait rien pour assurer la mise en œuvre des conclusions de la commission frontalière Éthiopie-Érythrée, ce que l'Érythrée utilise pour qualifier la situation de «ni guerre, ni paix» et justifier notamment le maintien d'un service national indéfini.

United Nations Watch a appuyé les recommandations de la Rapporteuse spéciale, en particulier pour mette fin à la détention arbitraire. Elle a souhaité le renouvellement du mandat de la Rapporteuse spéciale et lui a demandé si elle souhaitait que les Nations Unies fassent davantage de plaidoyer, notamment par le biais d'autres titulaires de mandats des procédures spéciales.

Le Mouvement international de la réconciliation a dénoncé le fait que l'Érythrée a toujours rejeté le statut d'objecteur de conscience, par exemple pour les Témoins de Jehova. L'Érythrée n'a pourtant rien à perdre à autoriser l'objection de conscience et à affecter aux objecteurs des tâches civiles actuellement effectuées par les conscrits.

La Jubilee Campaign a déclaré que des dizaines de milliers d'Érythréens croupissent dans des prisons dans des conditions inhumaines et a parlé de tentatives systématiques pour éliminer certaines composantes de l'Église protestante. L'organisation demande le renouvellement du mandat de la Rapporteuse spéciale et la création d'une commission internationale d'enquête

Conclusion de la Rapporteuse spéciale

MME KEETHARUTH a expliqué qu'elle continuera tout au long de son mandat de se pencher sur des questions spécifiques pour avoir une idée plus large de ce qui se passe dans ce pays au regard des droits de l'homme. Pour elle, il faut être audacieux et traiter tous les aspects des droits de l'homme de la population érythréenne.

Quant aux prochaines étapes, la Rapporteuse spéciale a estimé que des choses simples sont possibles: libérer les prisonniers, interdire le recrutement d'enfants de moins de 18 ans et réduire le service militaire à 18 mois. Ces mesures modestes peuvent changer la vie des Érythréens, a-t-elle souligné. Parallèlement, l'état de droit doit être respecté, et les auteurs d'abus et des violations des droits de l'homme doivent répondre de leurs actes.

Mme Keetharuth a enfin salué les progrès réalisés par l'Érythrée dans la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement, tout en estimant qu'il manque encore des critères d'évaluation pour mesurer ces progrès.

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