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Communiqués de presse

LES PIONNIERS DES NOUVELLES TECHNOLOGIES DES PMA ENCOURAGES A SAISIR LES OPPORTUNITES DE LA REVOLUTION NUMERIQUE

18 Mai 2001



Troisième Conférence des Nations Unies
sur les pays les moins avancés
18 mai 2001






Il est paradoxal de parler d’économie numérique dans des pays où des problèmes fondamentaux de la santé, de l’éducation ou encore de l’alimentation n’ont pas encore été réglés mais la révolution numérique offre des opportunités aux pays les moins avancés et pourrait être un tremplin au développement. Tel est le constat auxquels sont parvenus les représentants de sociétés de commerce électronique des PMA et de pays développés ainsi que d’organisations internationales rassemblés, aujourd’hui, au Parlement européen lors d’une réunion sur l’économie numérique dont le thème était « changer les idées reçues » organisée dans le cadre de la Troisième Conférence des Nations Unies sur les PMA.

La révolution numérique offre une possibilité unique aux PMA de tirer parti de leurs faibles coûts comme un avantage comparatif mais certains domaines de l’économie du numérique très prometteurs, en particulier les téléservices, sont très complexes et les PMA ne pourront s’y lancer sans des ressources humaines hautement qualifiées, des infrastructures opérationnelles et des cadres législatifs propices, ont souligné les participants. Plusieurs entrepreneurs des pays les moins avancés ont expliqué qu’ils ont dû s’appuyer sur des structures bancaires ou de télécommunications situées à l’étranger pour pouvoir lancer leur site web. D’autres chefs d’entreprise ont ajouté que l’excellence et des prix inférieurs de moitié ont été leurs atouts sur les marchés des pays développés. Ils ont tous évoqué les difficultés liées au décalage culturel entre leur personnel éthiopien, népalais ou togolais et leurs clients nord-américains ou européens.

« Les technologies de l’information sont un must », a insisté le Ministre des finances du Népal, M. Ram Sharan Mahat, qu’interviewait en début de séance un journaliste de la chaîne CNN, M. James Hattori. Pour beaucoup de PMA, l’économie numérique est une notion qui paraît irréaliste mais il peut être à leur portée, avec des infrastructures de base et des investissements bien moins élevés que dans le secteur de la santé, a-t-il ajouté. Il a rappelé que le gouvernement est moins bien équipé que le secteur privé dans le domaine des nouvelles technologies de l’information et de la télécommunication (TIC) car il dispose de moins de capitaux et sa bureaucratie le ralentit.

Toutefois, le secteur privé a quand même besoin que les pouvoirs publics une réglementation incitative, et des filières de formation et installent des infrastructures, particulièrement dans les télécommunications. Il a souligné l’importance de la formation en précisant qu’au Népal, il y a beaucoup de main-d’œuvre formée mais pas d’entreprises privées pour l’employer. Dans ce contexte, les cerveaux fuient. Ces jeunes diplômés peuvent aussi travailler pour des entreprises étrangères qui viennent s’installer au Népal ou qui sous-traitent une partie de leurs activités, en tant que main-d’œuvre bon marché.

Les PMA ne manquent ni de sagesse ni d’ingéniosité mais ils doivent mettre ce patrimoine à profit, a estimé le Secrétaire général de la CNUCED, M. Rubens Ricupero. Il a rappelé les différentes mesures, favorables ou hostiles, qui ont suivi l’apparition de l’imprimerie pour démontrer que le défi le plus important n’est pas d’inventer quelque chose mais d’en faire un bon usage. Il n’existe pas de produit qui puisse être produit sans informations, a-t-il ajouté. De nous jours, la plus grande partie des informations a trait à la production ou la commercialisation et n’a donc pas un grand « impact physique ». Les technologies de l’information peuvent aussi avoir des effets positifs dans d’autres secteurs comme la santé. Si l’information et la connaissance sont les points essentiels, nous devons donc renforcer l’éducation, a déclaré M. Ricupero en appelant les PMA à se centrer sur leurs ressources humaines. L’information a besoin d’un cadre prévisible. Il faut que les pays développés soient conscients des possibilités de partenariat qui existent dans les PMA, et que les secteurs publics et privés de ces pays coopèrent.

M. Bruno Lanvin, Secrétaire exécutif de la « DOT Force » de la Banque mondiale, a estimé que les TIC ne sont plus un secteur mais l’ingrédient fondamental qui fait que tous les efforts déployés dans les autres domaines pourront connaître le succès, à condition qu’elles fonctionnent sur le terrain. Les signes positifs sont notamment que de véritables politiques de réformes et de déréglementation menées dans les PMA ont commencé à attirer les investissements et dans le milieu de la micro-entreprise les technologies de l’information ont été acquises mais aussi adaptées aux besoins de consommations, cultures et langues locales.

M. Dawit Bekele, Directeur d’Ethiolink/Ethiogift, un site qui propose moutons, fleurs et liqueurs à la diaspora éthiopienne (www.ethiogift.com), a expliqué que son projet s’est d’abord heurté à de nombreux obstacles. En effet, la connexion est très lente et peu stable en Éthiopie, les méthodes de paiement par carte de crédit sont rares, les achats en ligne sont une pratique peu répandue et l’accès aux financements est difficile. Finalement, Ethiolink a utilisé des infrastructures juridiques, bancaires et électroniques qui se trouvent respectivement aux États-Unis et au Canada. Ce qui n’empêche pas que la majorité de ses opérations se déroulent en Éthiopie. M. Bekele a également évoqué le problème du fossé entre les revenus de la population et le prix de produits qui correspondent aux revenus de pays développés. Il a souligné l’intérêt de l’Internet qui permet aujourd’hui de commercialiser des produits et de bénéficier des compétences d’un personnel hautement qualifié, aux prix des pays en développement.

La pauvreté peut devenir un atout lorsqu’on propose des produits à bas prix sur les marchés des pays développés a-t-il dit. M. Bekele a souligné que de nombreuses autres entreprises ont échoué sur les écueils que la sienne à pu contourner et il a espéré que les organisations internationales aideront les PMA à passer à l’ère de l’Internet en aidant les gouvernements à régler les questions juridiques et de logistique.

Un entrepreneur ougandais a expliqué que son entreprise a ainsi dû attendre quatre ans que les lois ougandaises autorisent l’existence de plus d’un fournisseur d’accès. Le chef d’une autre « dot com » éthiopienne a déclaré que son entreprise n’a jamais trouvé de partenaire et serait très heureux de pouvoir se lancer dans une « joint venture ».

M. Jacques Rostenne, s’exprimant au nom de Perwitt International (Canada), a noté que l’expansion des téléservices se poursuit et n’a pas été affectée par les problèmes boursiers. Le marché est en Europe et en Amérique du Nord, ce qui exclut les marchés locaux des PMA. Les pays en développement ont pour la première fois un avantage compétitif réel, unique et marqué dans ce domaine. C’est à vous de saisir cette opportunité tant qu’elle existe, a-t-il déclaré. Dans les pays développés, des millions de personnes travaillent déjà dans le domaine des téléservices, et cette production pourrait être délocalisée dans les pays en développement. M. Rostenne a regretté que les services de support, la formation, les fournisseurs d’équipement, soient souvent inexistants dans les PMA, ce qui suppose que les investisseurs étrangers les importent et dépensent donc plus. Pour remédier à ce problème, les PMA doivent se lancer dans la réingénierie et établir des partenariats. M. Rostenne a fortement suggéré aux donateurs d’envisager la création d’un « Institut de la diaspora », notamment panafricaine, afin d’obtenir les connaissances sur la culture du marché africain. Les diasporas d’autres régions ont pu contribuer à l’essor de leurs pays d’origine, mais la diaspora noire d’Afrique est, légitimement, trop préoccupée par sa propre survie pour pouvoir aider la communauté restée au pays, a cependant noté M. Jean-Marie Noagbodgi, Directeur de Café Informatique, une entreprise togolaise de téléservice en ligne.

M. Sharif Ambia, Directeur de Technosoft Transcription Ltd., a estimé que les conditions principales pour lancer une entreprise en ligne est de posséder une bonne source d’électricité pour le transfert des données, un bon niveau d’anglais, un système de développement des programmes indépendants afin de séparer les coûts du développement de celui de la réalisation; de posséder un correspondant aux Etats-Unis pour obtenir des contrats et recueillir les paiements. Quant à M. Sanjib Raj Bhandari, Directeur de « Mercantile office systems » (www.mos.com.np), une entreprise népalaise dont les activités comprennent le développement en ligne de base de données et un centre multimédia (www.servingminds.com), a souligné que la qualité du personnel est vitale pour les centres de sous-traitance, ce qui pose un problème car les tâches qui leur sont demandées sont extrêmement techniques. Son entreprise fixe des tarifs 40 et 60% moins chers que les entreprises US pour la même qualité et les mêmes services. 100% des employés sont diplômés de l’enseignement supérieur et ont reçu une formation de 6 mois. Pour s’introduire sur le marché à un moindre coût, l’entreprise s’est créé un site web de grande qualité et a employé des experts en qualité. Le fait que l’image du Népal n’est pas associée aux technologies de l’information a pu être surmonté en utilisant les partenariats et les actions menées pour de grands noms de l’informatique. Actuellement, son entreprise négocie la vente de ses capacités avec plusieurs entreprises nord-américaines.


Dans la seconde partie de la réunion, qui était axée sur les initiatives en cours et notamment celles qui sont développées par des organisations internationales, des institutions nationales et des entreprises du secteur privé actives, Mme Sultana Nazneen, Directrice de Grameen Communications, l’une des antennes de la Banque Grameen de microcrédit, a rappelé que cette institution du Bangladesh fournit aujourd’hui des crédits à environ deux millions de petits entrepreneurs qui ne remplissent pas les conditions requises par les banques de crédit traditionnelles. Elle a expliqué que Grameen Communications fournit des informations sur les villages et les différents endroits où des services sont accessibles. Ces informations doivent être précises afin de motiver les différents acteurs économiques à investir dans les zones rurales. Mme Nazneen a ajouté que, pour que les enfants puissent être initiés aux technologies de l’information dès l’école, il faut également former des professeurs capables d’enseigner aux écoles comment tirer parti d’un ordinateur.

L’Afrique est la grande absente de la révolution du numérique, a regretté la Ministre des communications de l’Afrique du Sud. L’Afrique est marginalisée dans le monde des technologies de l’information, pourtant les TIC pourraient lui apporter énormément, a-t-elle ajouté. La prochaine réunion de l’Organisation de l’Unité africaine sera l’occasion de mesurer tout ce que font les pays africains pour faire exister leur secteur des télécommunications et le rendre compétitif. Présentant pour sa part les résultats d’un partenariat entre son gouvernement et l’Institut international pour la communication et le développement des Pays-Bas, M. Eward Addo-Dankwa, Gestionnaire du projet AGRINET au Ministère de l’alimentation et de l’agriculture du Ghana, a expliqué comment son Gouvernement s’est tourné vers les technologies de l’information pour développer ses exportations non traditionnelles.

M. Roger Dehaybe, Administrateur général de l’Agence intergouvernementale de la francophonie a reconnu que la révolution du numérique contient aussi un risque d’exclusion. Il est donc vital que les PMA participent à la société de l’information en tant qu’acteurs à part entière, avec les orientations qu’ils jugeront prioritaires. Il a présenté les actions menées dans ce domaine par l’Institut francophone des nouvelles technologies de l’information et de la formation (INTIF), direction et organe subsidiaire de l’Agence intergouvernementale de la Francophonie. M. Roger Dehaybe a estimé que, pour accroître l’indépendance technologique des PMA, il faudra absolument mener des actions locales, en particulier dans le domaine de la formation. A ce propos, il a souligné les vastes possibilités offertes par la formation à des logiciels libres.

Des représentants du Centre du commerce international, de la Banque mondiale et de l’Organisation du Commonwealth ont également présenté les programmes qu’ils ont mis en place pour intégrer les PMA dans l’économie numérique et accélérer leur développement grâce aux nouvelles technologies.



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